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Critiques de Valérie Zenatti (452)
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Les âmes soeurs

J’ai beaucoup, beaucoup aimé ce roman. Une lecture fraîche, enivrante, parfumée sur des airs de liberté et de renaissance.



Emmanuelle, mariée et mère de famille décide de s’octroyer une journée sabbatique pour elle. Fatiguée des contraintes, des responsabilités, de la routine quotidienne, elle veut désormais « vivre sa vie avec la sensation de la terre mouillée après la pluie, fraîcheur et promesse s’élevant dans la brume. » Un livre à la main, elle se promène de rue en rue, de train en train, et vivra une de ses plus belles aventures intérieures, comme un long voyage d’une journée sous la charmille des souvenirs languissants. Plongée dans sa lecture, les coïncidences s'entremêlent à l’instantanée vision de sa vie. Très surprenant ce roman dans le roman, on titube dans deux histoires, on vibre et on s’attache à Emmanuelle ainsi qu’aux personnages dudit roman, on plonge dans les eaux qui miroitent une double réalité. Touchant, sensible, cinglant de vérités. Car Emmanuelle dans sa journée pour elle, exorcisera les souvenirs ainsi que sa vision de la société. Les enfants, le couple, les beaux-parents, le monde du travail, le temps qui passe trop vite, l’amour, l’amitié, on s’arrête avec elle sur le banc de la vie. On sent la photographe qui vit en elle, figeant avec une sensibilité percutante les images de la Vie.



J’ai passé une excellente journée avec Emmanuelle. Une journée où seul l’instant présent relève de l’importance, où la liberté d’être qui on est et de faire exclusivement ce que l’on veut juste une fois, juste un jour n’a pas de prix.

Un roman qui fait du bien et que je recommande sans hésiter ! Ne fut-ce que pour vous inciter à vous promener librement une journée sans vous préoccuper des qu’en-dira-t-on.
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Qui-vive

Mathide professeur d'histoire géo, a tout pour être heureuse, un mari aimant et une fille.attachante. Elle devient insomniaque, perd le sens de toucher, elle trouve des feuillets énigmatiques à la suite du décès de son grand- père, rien ne va plus, elle découvre une vidéo de Léonard Cohen,. Elle décide de quitter la France, pour Israël, un besoin d'être seule, elle part sur les traces de Léonard Cohen , celui qui vient de décéder, Elle va se retrouver face à la réalité , ce monde en guerre, un conflit qui perdure, Elle va faire des rencontres de parfaits inconnus , des liens qui vont se créer, Un mode de vie nouveau, pour elle, un mode de vie loin de sa vie en France, trouvera t'elle en Israël à son questionnement, ce besoin de quiétude, qui l'avait abandonné, reprendre confiance , laissant derrière elle ce désespoir ce dessaroi , qui la poursuivent.

Un roman intense sur la quête de soi, une résilience entre ses pensées internes face à la réalité externe. Il y a toujours une pointe du vécu de l'auteure, elle qui navigue entre la France et Israël

Un récit bouleversant, poignant, sensible, vu les conjonctures actuelles, cette quête de sens qui la poursuit tout le long de la lecture, La plume de l'auteure est toujours aussi fluide, saupoudré d'un brin de sensibilité, une plume poétique , voir philosophique .Alire et à écouter avec un fond musical de Léonard Cohen pour mieux s'impregner de l'histoure de l'histoire et du personnage de Mathilde

Belle découverte qui me laisse dans mon propre questionnement.







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Une bouteille dans la mer de Gaza

Que je me rentre bien ça dans la tête : littérature jeunesse ne doit plus vouloir dire littérature à délaisser une fois adulte. Si besoin était, ce livre est venu me le rappeler.

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C'est une pépite toute douce malgré la violence sous-jacente du propos, que ce roman au trois quart épistolaire.

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Tal est une jeune Israélienne de 18 ans qui vit à Jérusalem où les attentats se succèdent, rendant sa vie incertaine et fragile. Les terroristes ? Les Palestiniens de Gaza, qui revendiquent eux aussi leur Etat sur ces terres, que les Israéliens se sont appropriées par la force, Israélien qui les parquent pour l'heure dans la fameuse bande de Gaza. Les représailles se succèdent dans les deux camps depuis si longtemps que les jeunes générations n'en voient pas le bout et sont épuisées de devoir survivre dans la peur, le bruit, les restrictions. Et la mort, omniprésente.

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Mais même si les perspectives de paix semblent s'être envolées depuis longtemps, ici l'espoir fait littéralement vivre. Alors après un attentat effrayant à deux pas de chez elle, Tal décide que les deux peuples doivent se parler pour avoir un espoir de se comprendre. Comme les communications entre Israéliens et Palestiniens sont très mal vues par les extrémistes des deux bords, Tal décide d'envoyer littéralement aussi une bouteille à la mer : elle déchire les pages du journal qu'elle nous écrit pour les glisser dans une bouteille, et demande à son frère militaire de deux ans son ainé de la jeter dans la mer de Gaza.

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Commence alors un échange de mail entre elle et un certain Gazaman. Au départ distant, moqueur, sur la défensive et légèrement agressif, il sera finalement touchée par cette idéaliste rêveuse mais très humaine, qu'il ne s'attendait certainement pas à rencontrer. de boudeurs, les échangent s'accélèrent et s'intensifient jusqu'au bouquet final, nous racontant dans l'intervalle la vie intime et public de chacun d'eux et de leurs villes, leurs points de vue opposés qui se rejoignent.

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Ce qui m'a accroché c'est d'abord la plume : d'une extrême douceur, elle n'en décrit pas moins les horreurs vécues quotidiennement par les habitants de ces contrées comme si on y était. le contenu est donc intéressant et la forme le rend supportable. L'émotion à fleur de mot dessine les personnages et les rend touchants malgré le côté déjà vu de leurs contours et de l'histoire.

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Ensuite, le rythme est prenant avec une alternance régulière des deux points de vue, via leurs échanges mais aussi leurs écrits intimes lisibles seulement par le lecteur. Parfois même, l'auteur en joue en faisant ne pas répondre l'un des protagonistes, un mail manqué comme un battement de coeur, celui qui manque quand un proche ne répond plus à l'appel. Ou au contraire une accélération du rythme de l'histoire avec le passage au dialogue par messagerie instantanée. La forme suit le fond comme les vagues la marée. Et le lecteur, petite bouteille jeté dans ces remous, est ballotté plus ou moins puissamment au gré des flots de rires ou de larmes.

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Egalement, le suspense s'installe en filigrane : où va l'auteur ? L'un des deux va-t-il mourir ? Vont ils décider de montrer au grand jour l'exemple pour unir leurs deux peuples ? Vont-ils se faire prendre par des milices ? Vont-ils tomber amoureux ?

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C'est si facile de tomber amoureux par écran interposé. Il n'y a qu'à lire « Quand souffle le vent du nord » pour s'en rendre compte et le vivre par procuration… Ou avoir vu le film adapté de ce roman, peut-être (je ne l'ai pas vu).

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Eh bien vous savez quoi ? Vous verrez bien ce qui va se passer, vous qui succomberez au chant des sirènes d'alerte de ce roman tout simple, tout court (220 pages) et pourtant si fort. Inch'Allah !
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Jacob, Jacob

Dans l'appartement, modeste mais bien tenu, de la famille Melki, à Constantine, la joie n'est pas souvent à l'ordre du jour. Les hommes, Haïm et son aîné Abraham, ordonnent, les femmes, Rachel et sa bru Madeleine, obéissent et se taisent. Le seul rayon de soleil, c'est Jacob, le dernier né de Rachel, son fils chéri, sa réussite. Lui seul sait mettre de la gaîté entre ces murs où trop souvent résonne la fureur du père. Lui seul joue avec ses nièces, Fanny et Camille, les fait voler comme un avion. Lui seul sait trouver les excuses qui évitent à Gabriel, son neveu, les corrections que trop souvent il mérite. Lui seul voit la peine de Madeleine, séparée de sa famille restée à Tunis, esclave de sa nouvelle famille malgré ses huit mois de grossesse, mal-aimée par un mari autoritaire. Brillant, beau, généreux, Jacob a 19 ans en cette année 1944. Il sort à peine de l'adolescence mais sait qu'il doit répondre à l'appel de la France qui a besoin de troupes pour chasser l'envahisseur Allemand, là-bas, loin, en Europe. Jacob va faire ses classes, devenir un homme, un soldat. Du désert algérien au Débarquement de Provence, de l'éblouissement à fouler le sol français, à la peur, aux tirs, à la perte de ses camarades, le voyage de Jacob dans la France en guerre est fait de découvertes et de pertes. Juifs comme lui, français et musulmans se battent pour sauver un pays qui n'a pas toujours voulu d'eux, apprennent la solidarité, savourent la gloire du libérateur et, dans le rude hiver alsacien, se souviennent de la chaleur de Constantine, de leur famille, de leur foyer. Pendant ce temps, en Algérie, les Melki suivent les actualités, imaginent les combats de Jacob et surtout attendent son retour.





En même pas 200 pages, Valérie ZENATTI réussit à nous transporter au cœur de l'Algérie française, au cœur de la famille Melki, au cœur de la guerre. Porté par le personnage lumineux de Jacob, ce roman est pourtant un livre de femmes, celles qui attendent, celles qui se soumettent, mais qui savent aussi se révolter, lutter, s'imposer. Concentré d'amour, de tendresse et de chaleur, Jacob, Jacob évoque pourtant des épisodes douloureux pour les juifs d'Algérie : leur statut qui change avec les lois vichystes, leur incorporation dans l'armée française et, plus tard, leur fuite devant le FLN. De la France, ils connaissent l'histoire et la géographie mais leur pays, c'est l'Algérie où pourtant on leur dira qu'ils ne sont pas chez eux. Déracinés, ils ont le droit ici, grâce à Valérie ZENATTI, de retrouver un peu de leur passé, des traditions, des odeurs, des saveurs perdues mais profondément inscrites dans leurs gènes. En refermant les pages de cette histoire, pleine de force et de sensibilité, on quitte à regret les Melki mais, comme eux, on garde au fond du cœur le souvenir de Jacob qui murmurait son prénom pour ne pas oublier qu'il n'était pas qu'un matricule. Puissant et bouleversant, à lire.
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Jacob, Jacob

Jacob, Jacob, un prénom à réciter comme un poème pour que jamais il ne s’efface, pour que toujours, Jacob soit présent.



Jacob a dix-neuf ans quand il s’engage sur le front durant la seconde guerre mondiale. Et laisse un vide immense pour sa famille qui voit en lui le soleil de leurs nuits. Jacob c’est qu’il est lumineux le brave garçon, il est drôle, intelligent, beau, aimant, Jacob il a tout un monde qui bat en lui. Difficile pour les siens de le voir partir. Alors Rachel sa mère va suivre toutes les actualités sur son poste télévisé. Elle veut savoir où il est son fils, elle veut être là avec lui.



Entre la peur des siens, Jacob apprendra la peur de la guerre, des ennemis, des bombes, des jours qui ressemblent à la nuit. Il trouvera du réconfort dans les bras de Louise, il écoutera la petite voix qui viendra lui rappeler sa vie près des siens.



Une jolie plume où le sujet est traité avec sobriété, j’aurai aimé le connaître davantage Jacob, j’aurai aimé rire avec lui, qu’il m’apprenne à faire des ricochets au bord de l’eau...

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Une bouteille dans la mer de Gaza

Ne vous fiez pas à la couverture de ce livre (très moche selon moi), elle ne reflète en aucun cas la petite merveille qu'est ce roman.



Une histoire d'amitié entre Tal une jeune israélienne, fille de juifs militants pour la paix et Gazaman, un jeune palestinien coincé dans la bande de Gaza qui va se forger au fil d'une correspondance parfois houleuse, parfois emprunte de ressentiments.



Une histoire comme on aimerait que les médias nous en relayent plus souvent ; une histoire qui tend à prouver que malgré l'histoire douloureuse de cette région, une solution de paix et de fraternité est possible et que derrière "les israéliens" et "les palestiniens", il y a des individus avec leur personnalité propre pétris de rêves, d'envies, de projets qui ne sont peut-être pas si différents, qu'on se trouve dans un camp ou dans l'autre.



Un livre qui m'a serré parfois le cœur mais un livre optimiste qui fait énormément de bien !

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Qui-vive

Auteur d’ouvrages remarqués, traductrice d’Aharon Appelfeld et scénariste occasionnelle, Valérie Zenatti tente, dans un nouveau roman interrogateur, de conjurer le vertige qui la saisit face au tumulte du monde contemporain.





Pandémie, guerre en Ukraine, élection de Donald Trump et… mort de Leonard Cohen : la narratrice Mathilde, professeur d’histoire-géographie habituée à « tâcher d’y voir clair dans ce capharnaüm qu’on nomme l’histoire de l’humanité », ne sait plus interpréter le sens de l'actualité. Désorientée, perturbée même puisqu’elle en a perdu le sommeil et le sens du toucher, elle décide sur une impulsion de se soustraire à son quotidien parisien, laissant un temps un mari compréhensif et une fille adolescente nettement moins compatissante, pour un voyage éclair en Israël. Sans se le formuler, sans doute a-t-elle ainsi le réflexe, sentant les vents du temps secouer en tous sens les branches de sa vie, de chercher une réassurance du côté de racines jusqu’ici reléguées très loin à l’arrière-plan de son existence. C’est aussi pour elle une plongée dans un véritable inconnu, là où elle pourra enfin se sentir « légitimement étrangère ».





Entre Tel-Aviv, Capharnaüm et Jérusalem, commence une errance sans véritable but, au hasard de rencontres et de lieux qu’elle découvre imprégnés des traces du conflit israélo-palestinien. Rédigé avant les attaques du Hamas d’octobre 2023, le récit entre en résonance troublante avec l’actualité récente, alors que, cherchant les traces du passé dans le présent, elle s’interroge sur ce que le présent peut contenir de germe de l’avenir. Mais, elle qui s’offre le temps d’une pause soustraite au rythme de son quotidien, en marge du monde tel qu’elle le perçoit de sa minuscule vie parisienne, se retrouve sans le savoir au bord d’une vraie accélération. Car on ne s’écarte jamais bien longtemps du temps qui vous rattrape sans qu’on le voie venir. Cueillant le lecteur lui aussi par surprise, le dénouement permettra à Mathilde de conclure qu’elle n’était « pas la seule à ne pas avoir vu la fin de l’Histoire ».





Invitation à réfléchir à notre place dans une époque que l’on dirait emportée dans une course folle, ce livre est une pétillante méditation sur le temps et le rapport au monde, en même temps qu’un vertigineux instantané d’un Israël coincé par un passé et un présent colonial qui rendent bien difficile toute projection d’avenir.


Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Jacob, Jacob

Valérie Zenatti signe avec son roman : Jacob Jacob une histoire bouleversante, qui nous émeut au-delà des frontières, d'un pays, de l'histoire d'un pays : l'Algérie.

Jacob, c'est d'abord l'histoire d'un juif pied-noir qui vit dans une pays, une ville qu'il aime : Constantine .

Il est jeune, très jeune, dix -neuf -ans quand il est enrôlé dans l'armée française en 1944. Il participe dans un premier temps au débarquement de Provence.

Comme le dit si bien Valérie Zenatti, quel étrange paradoxe :

" Il sera le défenseur d'une Europe qui avait tué ou laissé mourir ses juifs mais qui l'avait bien voulu, lui , pour la délivrer, alors que trois ans avant son incorporation on ne l'avait pas jugé suffisamment français pour l'autoriser à franchir les portes du lycée d'Aumale "

Jacob n'aura jamais vingt ans, quelle émotion en lisant ces lignes, cette incantation à laquelle il se livre, répétant son nom: Jacob Jacob pour s'endormir.



" Alors quand les secondes d'insomnie résonnent dans son crâne comme la scansion d'une défaite, que l'angoisse du jour qui se lèvera sur une nuit blanche étouffe sa poitrine, pour se bercer et réussir à s'endormir enfin, Jacob répète doucement son prénom : Jacob , Jacob, Jacob

Après la Provence, sa destination finale sera l'Alsace où Jacob meurt presque d'une balle perdue.

Ce livre en dit long, très long sur l'horreur de la Guerre, sur les massacres et les ruines de ceux qui restent.

Ce livre en dit long sur la bêtise humaine, sur les préjugés raciaux qui s'abat sur la vie des hommes.

Ce livre est un pavé jeté contre la haine des hommes, un baume donné à tous ceux qui doivent fuir, s'exiler dans une autre vie.



Un petit récit mais un immense roman.

Je le dédie à mon père qui a aujourd'hui 87 ans , né à Constantine, une très belle ville que je ne connais pas
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Dans le faisceau des vivants

« Le 4 Janvier 2018 : Dans le taxi qui me conduisait à l’aéroport, à 7 h 04, une alerte du quotidien israélien Haaretz s’est inscrite sur l’écran de mon téléphone, annonçant : L’écrivain Aharon Appelfeld, lauréat du prix de littérature d’Israël, est mort cette nuit à l’âge de 85 ans ».



Cet ouvrage émouvant est tout à la fois un hommage et des confidences. Valérie Zenatti s’épanche sur la perte de cet ami dont elle traduisait depuis 2004 tous les ouvrages, depuis le bouleversant « Histoire d’une Vie ». Cette amitié inestimable venait de subir un arrêt sur image brutal. Elle se remémore cet état de sidération dans lequel elle a vécu les quelques jours qui ont précédé l’enterrement d’Aharon, cette perception d’une vie qui bascule dans l’inconnu avec l’annonce du décès de l’ami qu’elle avait espéré retrouver sur un lit d’hôpital à Tel Aviv mais qu’elle ne verra plus. Le vide s’installe, le besoin de silence se fait prégnant jusqu’au dimanche des obsèques. Ce jour-là, il fait très chaud à Jérusalem. Toujours dans un état second, elle assiste aux obsèques et devant le corps frêle enveloppé dans son châle de prière, ses larmes se mettent à couler.



Ce n’est qu’à l’aéroport, sur le chemin du retour vers la France, que Valérie formulera la question qui fait mal, celle qui s’impose dans de tels moments « Je ne sais pas comment je vais vivre maintenant, tu vois, je ne sais pas comment vivre sans Aharon ».



« Qu’elle est lourde à porter l’absence de l’ami », ces paroles de Bécaud me viennent à l’esprit.



A Paris, vacillante, prise d’un tremblement qui allait crescendo, elle se relie dans son silence intérieur à Aharon. Elle évoque leur relation, la richesse de leurs dialogues, l’affection mutuelle qui les unissait, les conseils avisés que lui transmettait Aharon. Du fil de sa mémoire, elle nous fait l’immense cadeau d’extraire de très belles phrases écrites par Aharon : ces phrases simples comme les écrivait Aharon, inspirées de son douloureux vécu, « J’en ai tant vu dans mon enfance, mais j’ignorais qu’il s’agissait de prodiges. Je marcherai d’un endroit à l’autre jusqu’à ce que je sois passé par tous les lieux où nous avons été et partout ceux sur lesquels j’ai entendu des histoires ».

Aharon, bien qu’écrivain, se méfiait des mots, ces mots qui peuvent trahir comme « les idéologies ont perverti le langage, quel plus grand mensonge que les mots Arbeit macht frei sur le fronton d’Auschwitz ». Elle retiendra cette méfiance.



Elle cherche l’isolement pour mieux recevoir la voix d’Aharon, retrouver sa sonorité, elle a tellement peur que cette voix s’éloigne avec les jours qui défilent. Elle ressent avec acuité la joie de l’avoir connu et d’avoir été aimée de lui comme sa propre fille. Il y a de la Lumière dans l’Obscurité et de l’Obscurité dans la Lumière se dit-elle. Vivre sans cet homme ravive la trace imprimée en elle. Elle est habitée par Aharon. Il n’avait qu’à lui exprimer une pensée, une phrase en hébreu, elle pouvait la traduire sans trahir son auteur, ils étaient comme des jumeaux, fusionnels et l’hébreu les rassemblait, cette langue qu’ils avaient tous les deux appris à l’adolescence, cette langue adoptive et adoptée, cette langue qui allait comme un gant à Aharon dont il disait ; « C’est une langue concrète, les phrases sont courtes, vont droit au but, sont dénuées de fioritures linguistiques. Il n’y a pas de sophistication, peu d’adjectifs, j’ai compris très vite que c’était une langue qui correspondait à ce que j’avais vécu. On ne peut écrire sur des grandes catastrophes avec des mots trop grands. »



Cette absence va la mener jusqu’à Czernowitz où Aharon est né en 1932. Cette ville, aujourd’hui ukrainienne, faisait partie de la Roumanie à cette époque. Il y régnait une grande effervescence culturelle, on y parlait entre autre l’allemand, il y régnait un petit air de Mitteleuropa. Valérie marche dans les rues enneigées, parfois dans l’obscurité. De la Synagogue à l’Eglise où se rendait Victoria, cette jeune domestique catholique qui a appris le Chema à Erwin (Aharon au temps du bonheur), d’un petit musée juif à de petites rues, elle tente de reconstituer la vie du grand écrivain, à l’imaginer, peut-on humer la présence de quelqu'un ? Ce qui interroge, ce sont les rencontres qu’elle va y faire dans une atmosphère qui flirte avec le fantastique comme cette enseigne de boutique au nom de Valérie. Mais c’est là, à Czernowitz, le 16 février 2018, pour l’anniversaire d’Aharon, que ses trembleront cesseront.



J’ai lu ce récit avec, de temps à temps, les yeux embués de larmes. J’ai une grande tendresse pour cet auteur, son écriture me touche, elle a une âme et je la reçois comme un présent. Ce livre, écrit par Valérie Zenatti, condense à la fois le recueillement, l’affection, la puissance du lien par-delà la mort, le temps qui passe et qui se mêle à l’histoire d’un grand écrivain et de l’amitié indéfectible qui l’unissait à sa traductrice. Il méritait bien toute notre admiration ce grand homme. Tout au long de cette intimité entre Valérie et lui, j’ai apprécié de découvrir la sagesse nichée au creux des phrases d’Aharon, de participer à ses interviews ainsi qu’aux échanges entre Aharon et Valérie. Là, la traductrice ne s’efface plus devant son auteur, elle ne fait plus qu’un avec lui et elle cherche, aujourd’hui, à dégager les racines des thèmes de ses livres, c’est bouleversant et magnifique à la fois. Est-ce un Kaddish ou un mémorial au Grand homme ?

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Qui-vive

Dans son dernier ouvrage en forme de récit autobiographique, « Dans le faisceau des vivants », Valérie Zenatti se rendait en Ukraine à Czernowitz, la ville natale d’Aharon Appelfed, dont elle fut l’amie et la traductrice, sa manière de dire adieu au grand écrivain israélien.



Dans ce nouvel opus, la narratrice Mathilde apprend le 11 novembre 2016 la mort de Leonard Cohen, un chanteur qu’elle chérit depuis toujours et qu’elle regrette de n’avoir jamais vu en concert. Professeure d’histoire, en couple avec Julien et mère de Lola, une adolescente pétillante, Mathilde pense avoir surmonté le retour du tragique, qu’elle égrène en quelques dates devenues des symboles, 11 septembre, 7 janvier, 13 novembre, 14 juillet...



Au cours du confinement, elle perd le sommeil et se réfugie dans le visionnage compulsif d’une vidéo de Leonard Cohen. Quatre minutes et deux secondes, captées lors du début d’un concert à Jérusalem en 1972 où le chanteur canadien tente d’expliquer au public qu’il va devoir interrompre sa prestation.



« Si ça ne s’arrange pas, je vais arrêter et vous rembourser. Vous savez, il y a des nuits où l’on vole, et d’autres où l’on ne parvient pas à décoller. Il ne sert à rien de se mentir les uns aux autres. Ce soir, nous ne décollons pas. Dans la Kabbale il est écrit que celui qui n’arrive pas à s’élever doit rester à terre. »



Un moment hors du temps, où Cohen sent que l’inspiration est absente, choisit de ne pas mentir et de quitter la scène. Backstage, c’est la panique, on tente de convaincre le chanteur de revenir sur sa décision. Leonard s’entête, semble reprendre ses esprits en se rasant et en blaguant, puis remonte sur scène où la foule chante en choeur « evenou shalom alerhem ».



Les jours passent, Mathilde continue de perdre pied, perd le sens du toucher, tente en vain de percer le mystère que recèlent ces quelques feuillets retrouvés à la mort de son grand-père. Le septième jour suivant l’invasion de l’Ukraine par la Russie, elle se rappelle ces mots prononcés par Cohen devant une foule impatiente. « Autant ne pas se mentir ».



Elle annonce à Julien et à Lola ébahis son départ pour une destination et une durée inconnues. « Comprenez, je ne peux plus tricher, faire comme si je savais alors que je ne sais plus rien. » Son compagnon et sa fille ne le savent pas, mais Mathilde part évidemment pour Jérusalem, sur les traces de Leonard Cohen.



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La force de percussion de « Qui-vive » tient, notamment, au fait que le roman a été écrit avant le 7 octobre 2023, cette nouvelle date maudite qui s’ajoute à la liste des dates symboliques égrenées par la narratrice au début du récit.



Après un voyage en Ukraine qui précédait de quelques années le début du conflit russo-ukrainien, Valérie Zenatti nous conte un voyage en Israël qui précède de quelques mois une nouvelle fissuration du monde. Une forme de prescience troublante, qui est aussi une manière de nous rappeler que la fin de l’Histoire, que certains envisageaient dans les années 90, n’était qu’une douce illusion.



« Qui-vive » évoque un tableau impressionniste, abordant par petites touches le surgissement du tragique dans un monde qui tangue, entre terrorisme islamiste, pandémie mondiale et retour de la guerre en Europe. Si Mathilde est fascinée par la vidéo d’un Leonard Cohen désorienté, abandonné par le feu intérieur qui hante une oeuvre aussi mystérieuse qu’habitée, c’est parce qu’elle se sent en « syntonie » avec le chanteur qui nous a quitté en 2016. Elle est devenue étrangère en ce monde, un monde dont le sens lui échappe, et préfère se réfugier dans une écoute assidue de chansons à la beauté languide, nimbées d’une poésie étrange.



De Tel-Aviv à Jérusalem, en passant par Capharnaüm, la narratrice, qui parle hébreu, découvre un pays dont elle ignore tout. Elle retrouve un cousin qu’elle a brièvement connu enfant, et découvre au cours d’un « road trip » guidé par le hasard, l’intensité des tensions internes à ce petit pays, où cohabitent des visions du monde totalement antagonistes.



Parsemé d’incises méditatives, « Qui-vive » évoque un roman d’Aharon Appelfeld. On y retrouve la douceur, la forme d’étonnement presque enfantin, et surtout la profondeur qui irrigue l’oeuvre de l’écrivain israélien. Si Mathilde nous narre ses nombreuses rencontres, le roman nous conte avant tout le voyage intérieur d’une femme qui s’est perdue et tente de se retrouver. Une femme qui, à l’instar de son chanteur préféré, refuse de se mentir, de faire semblant. Une femme qui n’hésite pas à se perdre encore davantage dans les dédales obscurs de la Terre sainte, car elle pressent que si ce chemin est escarpé, il est aussi l’unique moyen de se retrouver.



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« As for the fall, it began long ago

Can't stop the rain

Can't stop the snow »



The Goal - Leonard Cohen



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L’extrait du début du concert de 1972 qui hante Mathilde est disponible à l’adresse suivante :



https://www.youtube.com/watch?v=tixwvZbEpME





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Une bouteille dans la mer de Gaza

Tal est une jeune fille de 17 ans qui vit à Jérusalem. Elle se pose beaucoup de questions sur le conflit israélo-palestinien : des attentats surviennent fréquemmment dans son voisinage, ses parents militent en faveur de la paix. Il vient l'idée à Tal de confier à son frère une bouteille à jeter dans la mer de Gaza avec un message destiné à une jeune Palestinienne. C'est finalement un garçon, "Gazaman", qui trouve le message et qui lui répond par mail. Commence alors une relation épistolaire entre Tal et ce jeune homme bourru, cynique, parfois dur...

Un magnifique roman plein de tendresse, de réflexions intéressantes sur ce sujet politique grave et difficile mais aussi sur des questionnements d'adolescents. La grande sensibilité des personnages les rend très attachants. Le côté bourru de "Gazaman" ajoute parfois une note d'humour aux échanges... Pas de mièvrerie dans ce livre avant tout destiné aux adolescents mais tout aussi émouvant pour les adultes. Il est par exemple intéressant de savoir qu'en Israël, le service militaire reste obligatoire pour les garçons (3 ans) et pour les filles (2 ans), qu'un jeune homme vivant à Gaza peut être bouleversé en découvrant la liberté dont jouissent les jeunes occidentaux... Le roman présente également une mise en garde sur les mirages du net, même si, ici, tout semble idyllique.

A découvrir dès 15 ans !

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Dans le faisceau des vivants

J'ai découvert Valérie Zenatti, en 2018, à une soirée à la maison de la poésie en hommage à Aharon Appelfeld mort quelques mois auparavant.

C'est là que j'ai appris qu'elle était la traductrice d'Appelfeld. Cette femme aux yeux pétillants et rieurs, au sourire charmeur m'a beaucoup émue.

Dans le faisceau des vivants, elle tente de chercher comment elle va dépasser et accepter la mort d'Aharon Appelfeld qui nous l'avons compris, représente tant pour elle.

Pour la date anniversaire d'Aharon, le 16 février, elle décide de se rendre à Czernowitz, la ville natale d'Appelfeld, sans savoir quoi chercher mais être en communion avec lui peut-être.

Je finirai par ces phrases émouvantes et fortes qu'elle écrira après ce voyage

"Il m'a fallu du temps pour comprendre tout ce qui se passait à travers la bouche, mais petite déjà je sentais que chaque chose avait un goût particulier et pas seulement ce qui se mangeait, L'angoisse avait un goût de métal rouillé, la gaieté un goût de fraises des bois, la tendresse un goût de fleurs d'orangers et les langues aussi avaient le leur, le français était une brioche beurrée, l'arabe un mélange de pain bis et d'olive et plus tard, l'hébreu à eu la consistance d'un fruit vert et acide qu'il fallait mâcher longtemps mais dont le jus me rafraîchissait, j'aurai besoin d'une vie entière pour dire les goûts qu'ont eus mes silences d' enfance, qu'importe, lorsque j'ai commencé à traduire les livres d'Aharon, ils se sont fondus dans les siens "



Un grand merci Valérie Zenati pour tous ces mots.
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Qui-vive

Qui-vive, ou qui tente de mieux le faire par ici, vivre, c'est bien Mathilde la narratrice, mise en alerte par le fourbi de ses sens. La mode pandémique est à la perte du goût ou de l'odorat, et c'est la fugue du toucher chez Mathilde en plus de son ouïe et de son odorat qui s'exaltent, sans oublier sa perception chamboulée d'un monde insensé. « Percutée par les évènements », en conflit avec le kaléidoscope d'un monde fragmenté, la prof d'histoire est censée l'expliquer mais il lui échappe, quand l'insomnie la rattrape et l'invite dans son « bal secret ».

« Ouvrez la porte arrière, je voudrais descendre ». Pourquoi ne pas descendre en effet, surtout que son grand-père aussi a disparu, en « si bémol majeur » depuis sa retraite en sénilité poétique. Rien ne retient désormais Mathilde si ce n'est son doux mari Julien et sa pétulante Lola en pleine verve, et surtout en pleine adolescence. Est-on fou quand on ne va pas bien dans un monde qui ne tourne pas rond ? Partir oui, malgré « l'amicale des gens qui [la] pensent folle », aller en Israël à la rencontre erratique de l'histoire et de ce « temps qui passe et ne passe pas par [elle]», à la rencontre de gens qui rêvent « d'être du bon côté », à la rencontre aussi d'elle-même et de son inadéquation au monde. Mais partir aussi sur les pas de Léonard Cohen, en fil conducteur de ce roman depuis sa disparition, et la découverte par Mathilde d'une vidéo de Jérusalem en 1972 où il quitta la scène faute d'y arriver, en proposant de rembourser.

Plus qu'un roman initiatique, la trajectoire de Mathilde figure ici la quête de sens au moment si couru d'une crise de middle-life mais pas tout à fait comme l'une d'elles non plus, en mettant en relief le décalage entre les évènements extérieurs et la difficulté à les absorber pour Mathilde, ou les différences entre orient et occident. Mais ce court roman est surtout signé, nerveux et réceptif, un peu débridé aussi à l'image du monde en « boule à facettes », j'ai retrouvé lors de cette plongée dans un monde intérieur sensible l'empathie si séduisante de l'autrice de « Jacob, Jacob », sa verve et sa capacité à faire vibrer les liens de ses personnages, vivants ou en hommage. Après Aharon Appelfeld dans «  le faisceau des vivants », ici c'est Léonard Cohen qui pourra insuffler le tempo et la teneur des émotions, à l'image d'une de ses chansons et son « truc un peu acide quand tu es à la fois heureux et triste ».
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Adieu, mes 9 ans !



Pour celles et ceux qui ne seraient pas encore au courant, selon la petite héroïne de cet "Adieu", les 3 âges les plus importants dans la vie sont : 1 minute, 10 et 100 ans. Ayant dépassé depuis fort longtemps la première minute de son existence, notre petite Tamara va donc être confrontée à la 2ème date charnière de son curriculum. Devenir centenaire n'est, bien entendu, pas encore un problème pour l'immédiat. Même sa mère spirituelle, l'illustre Valérie Zenatti, n'est pas encore arrivée à la moitié de cette lointaine perspective. Et ce n'est pas une blague de premier avril de ma part, mais il se trouve qu'en effet le 1.4.2020, la méritante Niçoise aura tout juste achevé sa première moitié de siècle.

J'en profite pour être le tout premier, je m'imagine et j'espère, à lui souhaiter un joyeux anniversaire et "mazel-tov" !



J'ai une profonde admiration pour Valérie Zenatti pour 2 raisons majeures. D'abord pour son ouvrage, "Jacob, Jacob", que j'ai eu le bonheur de lire peu après sa sortie, début 2015, et qui m'ai fasciné et même ébloui. Avec ce roman à mes yeux, elle a ramassé une montagne de crédits largement suffisants pour fêter dignement un autre anniversaire, le 1.4.2070 !

Je ne suis pas le seul dans mon jugement, car rien que sur Babelio ce livre a reçu 103 critiques, la plupart allant de favorables à très favorables, voire dithyrambiques. Ce roman a été récompensé du Prix du Livre Inter, mais à mon humble avis, il méritait un prix plus prestigieux.



La 2e raison de ma considérable admiration pour Valérie Zenatti est pour l'extrême qualité de ses traductions de l'Hébreu vers le Français. J'ai envie d'écrire qu'elle est la meilleure, mais cela ne serait pas très correct envers des traducteurs excellents comme Stéphanie Amar, Sylvie Cohen (qui a traduit plusieurs oeuvres d'Amos Oz), Laurent Schuman, Rosie Pinhas-Delpuech, Michel Eckhard-Elial (le spécialiste de Yehuda Amichaï) et quelques autres

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Valérie Zenatti a traduit 11 livres d'un de mes auteurs préférés, Aharon Appelfeld. Et traduire cet artiste des formulations très personnelles et des phrases très courtes n'est sûrement pas simple. Personne de tous ces braves traductrices et traducteurs ne me contredira, je présume, si j'avance que ce sont exactement les phrases courtes qui sont les plus difficiles à traduire : chaque mot y a un poids en béton armé.



J'étais ravi de trouver sur le net une photo du duo Appelfeld-Zenatti, que je me suis dépêché d'ajouter à la bibliothèque virtuelle de Babelio.



Un peu perdu dans mes éloges pour l'artiste et créatrice, j'ai failli perdre de vue la petite héroïne de cet opus relativement court : 76 pages. Si je devrais le résumer en un mot, c'est le qualificatif "charmant" qui me viendrait spontanément à la tête.



Tamara ressemble, en fait, à la gamine de l'illustration de couverture par Audrey Poussier : intelligente et studieuse.

En plus, elle ne manque pas d'ambition. Dans son journal très intime, elle note : "devenir Présidente de la République française", ce qui n'est tout de même pas évident lorsqu'on a 9 ans.

Mais l'Élysée est bien sûr un bon endroit pour remédier à un certain nombre de choses qui vont de travers, à commencer par les guerres, la violence, la pauvreté et le réchauffement inquiétant de notre planète.



J'ai donné 5 étoiles à cet "Adieu", ce qui est probablement légèrement exagéré, mais il faudra me pardonner si avec Valérie Zenatti je ne réussis pas à être rigoureusement objectif et sévère.

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Les âmes soeurs

Voilà un bien beau portrait de femme. Une parenthèse d'une journée, c'est ce que s'offre Emmanuelle, sans prévenir les siens. Quelles heures volées aux contraintes, aux rythmes effrénés d'une vie de citadine. Les souvenirs qui remontent, la lecture d'un livre qui coïncide avec l'humeur du moment. L'amitié d'Héloïse trop vite disparue, l'absence d'un être cher, comment concilier sa vie de famille, sa vie de femme , sa vie professionnelle. Tout cela est écrit avec délicatesse, talent et pudeur. Une femme du vingt et une siècle attachante et sensible. Je relirai avec grand plaisir cette auteure.

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Jacob, Jacob

Un ouvrage court et lumineux lu d'une traite qui nous transporte de Constantine la blanche, resserrée autour de son rocher, fière de son pont suspendu et des quatre autres ponts tendus autour d'elle, ville forteresse amoureuse des gorges en Algérie, aux cieux funestes et opaques des terres d'Alsace en guerre, à l'hôpital de Colmar, oú le 20 janvier 1945, Jacob, jeune juif Algérien , amoureux des vers de Victor Hugo, issu d'une famille très modeste , ne participera pas à la bataille qui durera trois semaines......

Valérie Zenatti rend un hommage vibrant à son jeune oncle? ( roman familial?) disparu trés loin des siens pour libérer la France, un pays dont Rachel,sa mére , aimante,illettrée, dont le courage force l'admiration du lecteur, comprend si peu la langue.....

Malgré la longueur des phrases , ce roman sensible et puissant, poétique et vibrant , nous fait revivre Jacob, candide,sincère et doux, parti faire ses classes puis son régiment, envoyé en France combattre les allemands, titulaire de son bac à une époque où ses frères, pauvres et frustes et les autres membres de sa famille n'avaient pas eu accès aux études.....un trés beau personnage, malgré le désespoir, la tristesse de cette famille oú les hommes étaient durs, les femmes obéissaient et se taisaient, à la fois fortes et soumises....je n'en dirai pas plus.Jacob dit "Jacob Jacob" apportait la joie aux siens, chacun attendait le retour de ce fils prodige , qui faisait leur fierté .....

Un roman puissant et bouleversant pour lutter contre l' oubli où les questions se bousculent , souvent sans réponses....un ton juste et empathique pour les personnages, on va garder longtemps en soi le doux souvenir de Jacob! Une époque qui prélude à de plus forts tourments encore et des déracinements qui vont apporter la violence et chambouler tant de familles de l'autre côté de la Méditerranée ! Peu d'ouvrages explorent cette période, je vais aller à la recherche des autres récits de Valérie Zenatti que je ne connais pas ! Un livre où la grâce surprenante de l'écriture (qui peut ne pas plaire à tout le monde) donne à la force des sentiments une couleur et une saveur particulières!

A lire!





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Jacob, Jacob

Ce beau jeune homme intelligent qui chante merveilleusement bien et est le préféré de Rachel, sa mère, c’est Jacob. Un juif de Constantine qui va quitter son pays et sa famille, des mères aimantes, des femmes soumises à des hommes violents et frustres, la misère des siens dont il est le soleil, pour aller faire la guerre là-bas, dans un pays qu’il ne connait pas, de l’autre côté de la méditerranée. Après la chaleur et la violence des combats du débarquement en Provence, sur le chemin qu’il le mène en Alsace, il connaîtra l’amour, puis le froid et l’horreur de la mort des soldats.



Avec Jacob, Jacob, Valérie Zenatti raconte l’histoire de sa famille. Un récit forcément romancé puisqu’elle ignore ce qu’a vécu Jacob quand il a quitté l’Algérie pour aller se battre en France. Ce qu’elle sait c’est ce que sa grand-mère lui a dit et ce qu’elle a lu dans les livres. La douleur de Rachel à la recherche de son fils, le dénuement de leur vie algérienne, les enfants expulsés des écoles après les lois de Vichy contre les juifs, le départ forcé des pieds noirs vers la France, quelques années plus tard.



Jacob, Jacob ou le très bel hommage d’une jeune femme érudite, dont Jacob le grand-oncle bachelier serait le double, à sa famille pauvre qui ne maîtrisait pas la culture, des gens traversés par l’Histoire entre l’Algérie et la France qui a décidé ce qu’ils sont devenus.


Lien : http://livreapreslivre.blogs..
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Une bouteille dans la mer de Gaza

Qui oserait écrire un message sur un petit papier, le glisser dans une bouteille, le jeter dans la mer et attendre ?... Attendre dans l’espoir que tout serait chamboulé, qu’il y aurait un avant et un après plein de tous les espoirs du monde…



Tel-Aviv, septembre 2003.

Tal Levine, jeune fille israélienne, espère rentrer en contact avec quelqu’un qui vivrait dans ce monde qui lui est interdit, - de l’autre côté du mur dit de séparation, construit par les israéliens - l’aiderait à comprendre cette situation de fou qui n’en finit pas de durer…



A quelques temps de là, à quelques kilomètres de Jérusalem vit un jeune homme qui vit dans la bande de Gaza. Il récupère la bouteille et répond par mail à Tal sous le pseudonyme de Gazaman. Il ne peut pas sortir de la prison à ciel ouvert qu’est Gaza, elle ne peut pas s’y rendre, mais ce n’est pas seulement le mur de 700 km qui enferme les Palestiniens, ses barbelés, ses miradors, ses interminables postes de contrôle qui les séparent : ils ne sont pas du même camp.



Pourtant de mail en mail, c’est une relation a priori impossible qui se construit entre eux comme un pont fragile qui vacille au gré des peurs, des doutes, des interrogations, des interdits. En passant d’un camp à l’autre, on découvre l’univers de chacun imprégné de rêves, de désirs et de projets.



Au final, un beau message d’espoir.

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Jacob, Jacob

Rechercher ses racines, remonter le cours du temps pour faire revivre les êtres disparus, encore chéris dans la mémoire collective d'une famille, par les photos ou les derniers mots d'une grand-mère.



En 1944, les alliés viennent de débarquer en Normandie, la guerre va vers son dénouement et l'Algérie va contribuer à la libération de la métropole par l'envoi de troupes, des jeunes hommes, parfois à peine sortis de l'adolescence.



A Constantine, la ville des ponts, c'est l'heure de la mobilisation pour Jacob. Laissant dernière lui une famille juive algérienne dans l'attente des nouvelles, il va connaitre les combats du débarquement en Provence, la liesse des villes libérées, l'amour dans les bras d'une fille, l'hiver et la mort de compagnons en Alsace...



Un destin qui remet en mémoire les images du film Indigènes, aux combattants venus des colonies, sanglés dans leurs uniformes pour combattre le froid, sonnés par le fracas des combats, ballotés par la peur de la mort, la chance de survivre, le déracinement et la fascination d'un monde aux codes différents de leurs racines.



En marge de la guerre, c'est aussi le récit extrêmement touchant d'une vie de famille vécue de l'intérieur, un quotidien simple et modeste, meurtri par les aléas : attente du retour du combattant, difficulté de subsistance, règles de vie familiale où la femme est assujettie à un univers masculin, indigence pour exprimer des sentiments d'amour et de peine.



Une famille comme tant d'autres, pieds noirs enracinés dans la culture musulmane, qui devra faire dans un futur encore lointain, un choix de déracinement, emportant les souvenirs d'un pays qui fut le sien, et où restent des tombes oubliées.



Une écriture ample, aux phrases longues et denses, qui donne à la narration un rythme de doux ressac, de mer qui ondule lentement, charriant les faits, des brides de pensées, des bulles de réflexion. Puis le rythme s'accélère dans l'urgence des combats, les mots se bousculent. La plume est sans contexte le bijou de ce livre, récompensé par le Prix du Livre Inter 2015.



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Vérité, vérité chérie

Comment vivre avec un secret de famille lorsqu’on est enfant ? Ce thème est raconté du point de vue de Camille qui « est une petite louve parfaite ». Elle a plein d’amis et ses parents sont fiers d’elle car ses notes sont excellentes. Hélas ! comment faire lorsque le maitre de chasse demande à ses élèves de faire le portrait de leur grand-père. Camille a peur, que va-t-elle raconter elle qui, ne connait rien de ses grands-pères. Et sa mère semble bien embarrassée par le sujet. Mais la petite louve s’obstine et part à la recherche de la vérité. Elle croisera sur son chemin plusieurs personnes à l’écoute qui la mèneront vers le but de sa quête, enfin.



Cette quête de la vérité à hauteur d’enfant est très humaine. Avec une tendresse pleine d’humour et avec ses allusions à des célèbres contes, Valérie Zenatti nous offre une histoire sincère et pleine de sagesse. On réalise qu’un enfant peut passer outre les préjugés et les silences et comprendre des évènements dramatiques qu’on a voulu lui cacher. Cette « vérité, vérité chérie » est donc salutaire.

Une jolie histoire qui explore les secrets de famille

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