Citations de Vincent Villeminot (643)
"Le jour se leva dans le sous-bois. C'était une magnificence fantastique dans la forêt, une beauté irréelle, et dans l'odeur du musc des bêtes, dans le bourdonnement des insectes et des parasites qui occupaient leurs fourrures, dans la pesanteur de leurs sabots, chacun voulait s’ancrer à chaque pas dans le sol, elle sentait les vibrations de la terre. Mère louve. Centaure. Elle ne craignait plus rien."
Mais ils avaient raison. Spartacus avait raison. On ne peut pas continuer toute sa vie en esclave.
Il n'y a pas plus grande inconscience que se promettre l'amour pour toujours - sinon, peut-être, faire des enfants...
Marche sur tes humiliations comme sur la peur. Ne tiens compte de rien, concentre-toi sur ce que tu cherches à obtenir, deviens tendu comme l'arc, insensible comme la flèche.
Elle est importante, la pitié, c’est une bouffée d’amour et de protestation du monde quand il t’arrive une chose aussi insensée que la mort de ta mère. Elle t’aide à comprendre que ça n’aurait jamais dû arriver. Que c’est un scandale, le plus vieux et le plus commun des scandales – la mort de ceux qu’on aime.
[...] parce qu'il ne t'écoute pas le monde, il ne croit pas que tu puisse le déranger fût-ce un instant ; il va rouler sur toi comme un torrent, un fleuve même,
chose impossible à endiguer,
sans que tu puisses rien y faire.
Il a les années pour lui, et la multitude, le nombre, l'habitude, tout le reste.
Tu vas t'épuiser, à nager à contre-courant,
Et tu seras finalement un débris dans son flot, quand il t'aura rompue, et lentement, lentement, tu descendras vers le fond. Une alluvion. Un sédiment.
Mais tu ne te laisses pas faire.
Est-ce cela qu’il vont faire ? Se retrancher ?
Se soustraire ? Refuser le combat ? Disparaître ?
Se retirer, alors que cela demande tant d’efforts d’être au monde, simplement ?
Est-ce lâcheté ? Fuite ?
Est-ce que ça demande encore plus de courage ?
Elle sait ce qui se trame avant tout le monde. La Houle le lui a dit : Ce soir, on s’en va. Elle sait qu’ils n’ont pas le choix. Partir. Ses parents ont fait ça, plusieurs fois, ils ont franchi des déserts, traversé une mer, un tombeau, sur un esquif fragile, ils sont morts de soif, de faim, plusieurs fois, ont continué – ses frères se sont glissés dans des trains d’atterrissage – ses amis sont partis – pour venir. Ici. Sans savoir. Et c’est son tour. Partir, pour des rêves. Conquérir. Autre chose. Aller décrocher la lune.
Une toute jeune fille pêche au harpon, debout dans la rivière. La lumière du jour pénètre à cet endroit – trouée rare dans la canopée -, descend sur elle et l’illumine. Une cascade de cheveux très blonds, d’une blondeur irréelle même dans ce soleil, coule sur ses épaules nues. Les frondaisons de la forêt, entre elle et le ciel, mouchettent d’ombres légères son dos, un de ses bras et la surface tremblante. La forêt est immense, infinie autour d’elle.
Mais nous ne revendiquons rien ! Je sais que c'est dur à entendre, mais nous ne vous demandons rien. Nous avons choisi de nous passer de vous, parce que nous ne voyons pas d'autre issue. Nous allons nous tromper, sûrement, mais nous allons essayer...
La forêt est ce monde où la mort fait partie de la vie.
Il a répété deux fois les mots à l'infirmière qui nettoyait ses mains : " Pierre est mort ". " Mon frère Pierre... il est mort. "
Elle hochait la tête : oui, elle comprenait...
Elle ne comprenait pas.
T’écrire, c’est pour moi une façon d’espérer ne pas vous perdre tout à fait.
Trois fois, j'erre dans le parc, du côté des logements des filles, à la recherche de son pavillon. qu'espéré-je apprendre sur elle ? simplement l'apercevoir en ombre chinoise, à la fenêtre de sa chambre ?
La quatrième fois, je finis par trouver. La baie vitrée de son salon brille dans la nuit.
Elle semble deviner chaque mouvement de mon âme, comme si elle effleurait les pages d'un livre ouvert.
Les cellules cancéreuses ont proliféré, tout colonisé. Elles dévorent son corps.
Je vois tout. Les soins, précisément, ce qu'ils font dans son corps, ce qui se joue en lui. J'ai toujours cette lucidité froide, clinique, quand je suis devant mon père. Depuis toujours, j'ai vu son âme puis son corps malades comme un champ de bataille, et j'ai regardé ses armées s'affronter - leurs retraites, leurs assauts, leurs défaites, leurs rares cessez-le-feu...
Trois fois, alors que je buvais mon café à la fenêtre avant l'aube, je la vis traverser en courant le sous-bois du parc, silhouette fantomatique, fine, sportive, pas très grande, obstinée sous la pluie et les réverbères.
Alors, si tu comptes leur signifier ton mépris, amusons-nous à leurs dépends.
Je plonge dans un puit noir, sans fond. Les visages de Nathan et de maman m'observent dans les ténèbres.
Passage choisie par izuki_uchiwa
Elle ferme son sac, prend congé, sort.
Lebrun veut reprendre son cours.
Touk-E lève la main, comme un élève discipliné pour une fois.
- La copine de mon pote a posé une question intéressante, avant de prendre congé. Vous pourriez y répondre ?
Dans le désordre qui s’ensuit, il se tourne vers moi et sourit :
- Dangereuse … Mortellement dangereuse pour toi, mon pote. Une blonde bien roulée, méprisante, et qui parle d’économie, c’est noël au mois d’avril, non ?