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Citations de Viviane Forrester (57)


La délivrance du labeur obligé, de la malédiction biblique, ne devait-elle pas logiquement conduire à vivre plus libre la gestion de son temps, l'aptitude à respirer, à se sentir vivant, à traverser des émotions sans être autant commandé, exploité, dépendant, sans avoir à subir tant de fatigue ? N'avait-on pas, depuis la nuit des temps, espéré une telle mutation en la tenant pour un rêve inaccessible, désirable comme aucun ?
Ce passage d'un ordre d'existence à celui qui s'établit de nos jours, et que nous refusons de découvrir, paraissait appartenir à l'ordre de l'utopie, mais, y songeait-on, c'était pour l'imaginer pris en charge par les travailleurs eux-mêmes, par tous les habitants, et non imposé par quelques-uns, en nombre infime, qui se comporteraient en maîtres d'esclaves désormais inutiles, en propriétaires d'une planète qu'ils seraient seuls à gérer et qu'ils aménageraient pour eux seuls, selon leurs seuls intérêts, des auxiliaires humains en nombre ne leur étant plus nécessaires.
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Carlos Ghosn a osé là où d'autres auraient transigé: 21 000 suppressions de postes à travers le monde sur 148 000 salariés, trois usines d'assemblages et deux unités mécaniques fermées.

Autrefois, c'était déjà dur, on licenciait quand l'affaire marchait mal, c'était discutable mais on pouvait comprendre; maintenant c'est même quand elle marche bien.
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Nos concepts du travail et donc du chômage, autour desquels la politique se joue (ou prétend se jouer), sont devenus illusoires, et nos luttes à leur propos aussi hallucinées que celles du Quichotte contre ses moulins. Mais nous posons toujours les mêmes questions fantômes auxquelles, beaucoup le savent, rien ne répondra, sinon le désastre des vies que ce silence ravage et dont on oublie qu'elles représentent chacune un destin.
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Peut être l’intérêt véritable de la publicité reside-t-il de plus en plus dans ces dernières fonctions : dans la distraction puissante qu’elle suscite; dans l'environnement culturel qu'elle sature, le maintenant au plus près du degré zéro; mais, surtout, dans le détournement du désir, dans cette science du désir qui permet de le conditionner, de persuader d’abord qu'il y en a; ensuite, qu'il y en a seulement là où il est indiqué. Et surtout pas ailleurs.
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Le cri de Van Gogh est indépassable, dont les toiles sont le résidu.
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Leonard ne la voit pas, épuisée, solitaire, aller à la dérive ; il ne la voit pas se laisser aspirer par les lignes qu'elle trace. Il trouve normal de la voir frotter les parquets pour atténuer son angoisse. Il ne la voit pas dépérir loin des autres, isolée avec lui. Il insiste au contraire pour la faire demeurer au calme et dans l'isolement suscité par la guerre. (...)
Il ne l'observe pas, la surveille seulement, au nom de ses vieilles théories ; le verre de lait demeure, liturgique, scellé dans leur routine. Elle est sans appui. Leonard poursuit la vie qu'elle lui a permis de mener, qu'il a su conduire, qui le comble et qu'il a poursuivie avec constance près d'elle, à une distance jusqu'ici propice. Mais à présent, il ne la voit plus, semble lassé d'elle.
Et puis... et puis... le prestige de Virginia Woolf ne la défend plus, aujourd'hui sans écho, sans audience, du moins perceptibles comme avant. L'entourage est dispersé, qui permettait à la femme brillante d'étinceler (sous le regard réprobateur mais impressionné de Leonard), et de s'affirmer, de compter aux yeux de tous, protégée par eux. Le rempart du public, de Bloomsbury a disparu. Elle est seule avec son mari, et semble s'estomper à ses yeux. (...)
Si Leonard connaît, et comme nul autre, la valeur de l'oeuvre, elle est à ses yeux le produit du "génie" de sa femme, et le génie étant lié pour lui à la folie, cette oeuvre ne la protège pas.
Impensable : en janvier 1941, Harper's Bazaar retourne à Virginia Woolf une nouvelle qu'il lui avait commandée. Refusée. "Je bataille contre la dépression, et la mets en déroute (j'espère) en nettoyant la cuisine. En envoyant un article (nul) au N.S. (New Statesman) et en me jetant pour deux jours dans P.H. (Point'z hall) ou dans mes souvenirs. Cet accès de désespoir ne m'engloutira pas, je le jure. La solitude est grande." Et, déjà, ce qu'elle répétera dans trois mois à Leonard : "Nous vivons sans futur. Le nez pressé contre une porte close."

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Nous sommes réticents aux meurtres particuliers, mais permissifs aux génocides et résignés au meurtre général, biologique.
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Tyrannique, l'écriture est libératrice des obsacles, qu'elle traite de secondaires une fois qu'elle les a absorbés pour les définir. Elle a possédé Virginia comme aucun homme ni aucune femme ne l'a jamais possédée.
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"Tonique, vigoureuse même, dynamique, elle a souffert d'états de dépression, de désespoir, traversé les "horreurs" qu'elle redoutait; elle a subi des maux de tête, s'est évanouie deux ou trois fois, elle a vécu des problèmes récurrents de santé, mais rien d'analogue à "la folie". Mais la tension de n'avoir pas écarté la souffrance ou l'extase, de les avoir subis pour aller, démunie de toute défense, à vif et à nu, vers son travail, sa quête, ont sollicité ses nerfs à l'extrême. Elle a vécu de toutes ses fibres. Telle quelle. Et elle était fragile."
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"Mallarmé is a machine gun!"
p 100
Les mitrailleuses sont violentes, parfois indispensables pour éviter le pire, mais leur violence est prévue, elle fait partie du jeu et sert presque toujours le retour éternel des mêmes changements. On aura déplacé les termes, sans changer l'équation. L'histoire est faite de ces sursauts. La hiérarchie se porte bien.
Mallarmé lu, cela suppose acquises certaines facultés qui pourraient conduire à certaines maîtrises et, par là, à l'approche de certains droits? Faculté de ne pas répondre au système dans les termes réducteurs seuls offerts par lui, et qui annulent toute contradiction. Faculté de dénoncer la version démente du monde dans laquelle on nous fige, et que les pouvoirs se plaignent d'avoir à charge alors qu'ils l'ont délibérément instaurée.
Mais pour mieux embrigader, asservir, et cela de quelque bord que soient les pouvoirs, on détourne l'organisme humain de l'exercice ardu, viscéral, dangereux de la pensée, on fuit l'exactitude si rare; sa recherche, afin de mieux manœuvrer les masses.
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Il serait temps de nous éveiller, de constater que nous ne vivons pas sous l'empire d'une fatalité mais, plus banalement, sous un régime politique nouveau, non déclaré, de caractère international et même planétaire, qui s'est installé au vu mais à l'insu de tous, non pas clandestinement mais insidieusement, anonymement, d'autant moins perçu que son idéologie évacue le principe même du politique et que sa puissance n'a que faire du pouvoir et de ses institutions. Ce régime ne gouverne pas, il méprise, mieux, il ignore ce et ceux qu'il y aurait à gouverner.
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Je lisais, je lisais à perdre haleine. Je lisais pour moi, dans l'urgence. J'ingurgitais à la hâte des provisions de vie.
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Sus aux immigrés qui entrent, bon vent aux capitaux qui sortent ! Il est plus facile de s'en prendre aux faibles qui arrivent, ou qui sont là, et même arrivés depuis longtemps, qu'aux puissants qui désertent !
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Chaque jour, nous assistons au fiasco de l'ultralibéralisme. Chaque jour ce système idéologique, fondé sur le dogme (ou le fantasme) de l'autorégulation de l'économie dite de marché, démontre son incapacité à se gérer lui-même, à contrôler ce qu'il suscite, à maîtriser ce qu'il déchaîne. Au point que ses initiatives, si cruelles pour l'ensemble des populations, en viennent à se retourner contre lui par des effets de boomerang, tandis qu'il se montre impuissant à rétablir un minimum d'ordre dans ce qu'il persiste à imposer.
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On peut compter, il est vrai, sur d’allègres impostures, telle celle qui a supprimé des statistiques 250 000 à 300 000 chômeurs d’un seul coup, d’un seul… en radiant des listes ceux qui accomplissent au moins 78 heures de travail dans le mois, soit moins de deux semaines et sans garanties. Il fallait y penser ! Se rappeler aussi à quel point il importe peu que le sort des corps et des âmes camouflés dans les statistiques ne soit pas modifié, mais seul un mode de calcul. Ce sont les chiffres qui comptent, même s’ils ne correspondent à aucun nombre véritable, à rien d’organique, à aucun résultat, même s’ils ne désignent que l’exhibition d’un trucage. Badines espiègleries ! Comme celle d’un gouvernement antérieur, quelques mois plus tôt, criant victoire, ébaubi, se rengorgeant : le chômage avait donc décru ? Non, certes. Il avait au contraire augmenté… moins vite, cependant, que l’année précédente !
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Je me souviens d’un jour où les palmiers dégoulinaient de pluie. On ne distinguait plus le ciel de la mer. Une buée générale où tout semblait perdu. Je découvrais ma mère, assise sur une chaise, seule au milieu du salon. Elle regardait ses pieds, sans doute depuis longtemps. “Maman, qu’est-ce que tu as ?” Et sa voix très basse, l’ombre de sa voix : “Rien. Il pleut, je suis juive” et j’ai pensé “Je ne pardonnerai pas.”
Je me trompais. Ou presque.
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Mais mon cher frère, ma dette est si grande, que lorsque je l'aurai payée, le mal de produire des tableaux m'aura pris ma vie entière et il me semblera ne pas avoir vécu.
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L'emploi si chanté, invoqué, bercé de tant d'incantations, n'est tenu par ceux qui pourrait le distribuer que pour un facteur archaïque, pratiquement inutile, source de préjudices, de déficits financiers. La suppression d'emplois devient un mode de gestion des plus en vogue, la variable d'ajustement la plus sûre, une source d'économies prioritaire, un agent essentiel du profit.
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Ce lieu d'écriture dont je m'entoure,que je construis,dont je m'enchante de savoir qu'il existe et m'attend lorsque je me trouve ailleurs,le sachant mien,disponible,en attente.Mon royaume.Volupté.
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Ne sommes-nous pas effarés, nous aussi, piégés au sein d’un monde familier mais passé sous une emprise qui nous est étrangère ? Sous l’empire mondialisé de la « pensée unique », au sein d’un monde qui ne fonctionne plus à la même heure que nous, qui ne répond plus à nos chronologies, mais dont l’horaire commande. Un monde […] auquel nous nous agrippons, acharnés à demeurer ses sujets douloureux, à jamais éblouis par sa beauté, par ses offrandes, ses échanges, et désormais hantés par le souvenir du temps où, submergés de travail, nous pouvions encore dire : « Nous ne mourrons pas, nous sommes trop occupés ».
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