Une poésie qui parle de terroir, de tout ce qui aujourd'hui disparaît.
Je garde ce livre précieusement.
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Poésie très rurale, même un peu rustre, mais puissante, qui parle de thèmes campagnards, de thèmes du terroir. C'est un recueil parfait pour retrouver des traditions, des us et coutumes du Québec d'autrefois.
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Une grande poésie trop méconnue en France.....
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Rondel d’automne
Le ciel est gris, le vent est froid, la terre est rousse;
L’automne est revenu par septembre apporté,
Et les arbres, devant la mort du bel été,
Pleurent des larmes d’or et de sang sur la mousse.
Cherchant pour leurs ébats une plage plus douce,
Les outardes, au sud, s’en vont d’un vol pointé;
Le ciel est gris, le vent est froid, la terre est rousse;
L’automne est revenu par septembre apporté.
Mon misérable cœur a l’aspect de la brousse:
Chassés par le vent froid de la réalité,
Mes rêves les plus chers un par un l’ont quitté,
Et sur l’arbre d’amour se meurt l’ultime pousse.
Le ciel est gris, le vent est froid, la terre est rousse.
Les récoltes
C’est un midi du mois où va naître l’automne :
Septembre. Le soleil indistinct garde encor
Sa chaleur verticale et son visage d’or.
Mais déjà la fraîcheur des ombrages détonne.
Les blés dorment aux champs du sommeil monotone
Qu’ont les maturités paisibles et la mort,
Mais, parfois, une brise u fait de bord en bord
Rouler un ondoiement de golfe qui moutonne.
L’heure a l’envoûtement de parfums endormeurs;
La langueur des échos prolonge les rumeurs
Que soulève la vie humaine des vallées;
On dirait qu’une brume invisible emplit l’air;
Tant — venu des lointains que bordent les allées —
L’aigre crépitement des lieuses est clair.
Paysage d’automne
Une atmosphère grise enveloppe la terre
Et donne au paysage une figure austère;
Une égale rousseur a terni le gazon.
Dans le brouillard lointain, échancrant l’horizon,
Les grands monts, en ce jour lourd et sombre d’octobre
Ont l’air de rois déchus qui mourront dans l’opprobre.
Mais voici que soudain un rayon de soleil,
Comme un œil qui regarde après un long sommeil,
Se faufile à travers un fouillis de nuées
Et s’en vient éclairer des branches dénuées
Qui végètent au fond boueux d’un petit val.
L’existence ressemble à ce jour animal :
La joie et le bonheur, soleil des cieux intimes,
Ne réchauffent souvent que des vallons infimes,
Tandis que tout autour, il est de fiers sommets
Où leur chaude clarté ne se pose jamais.
Hymne au vent du nord
Sans toi, l'amour disparaîtrait durant ces heures
Où l'hiver nous retient cloîtré dans les demeures.
Le tête-à-tête pèse et devient obsédant
S'il ne plane sur lui quelque épouvantement.
Sans toi, l'amant serait bientôt las de l'amante;
Mais quand ta grande voix gronde dans la tourmente,
La peur unit les corps, l'effroi chasse l'ennui
Le cœur sent la pitié chaude descendre en lui,
L'épaule ingénument recherche une autre épaule,
La main transie, avec douceur, se tend et frôle
Une autre main, la chair est ravissement;
La mère sur son sein réchauffe son enfant,
Et les époux, qu'avaient endurcis les années,
Ont retrouvé soudain leurs caresses fanées.
Le lit triste s'emplit de capiteux parfums
Que répandaient jadis les fleurs des soirs défunts;
Le nuage de l'heure ancienne se dissipe;
Et dans l'étreinte ardente où l'âme participe,
Comme le corps, parfois s'incrée un rédempteur.
Hymne aux grands vents du Nord
O vent, emporte-moi vers la grande Aventure.
Je veux boire la force âpre de la Nature,
Loin, par delà l'encerclement des horizons
Que souille la fumée étroite des maisons!
Je veux aller dormir parmi les cimes blanches,
Sur un lit de frimas, de verglas et de branches,
Bercé par la rumeur de ta voix en courroux,
Et par le hurlement famélique des loups!
Le froid et le sommeil qui cloront mes paupières
Me donneront l'aspect immuable des pierres!
O rôdeur immortel qui vas depuis le temps,
Je ne subirai plus l'horreur ni les tourments
De l'âme enclose au sein d'un moule périssable;
J'oublierai que ma vie est moins qu'un grain de sable
Au sablier des ans chus dans l'Éternité!
Et quand viendront sur moi les vagues de clarté
Que l'aube brusquement roulera sur mon gîte,
Je secouerai l'amas de neige qui m'abrite;
Debout, je humerai l'atmosphère des monts,
Pour que sa force nette emplisse mes poumons,
Et, cambré sur le ciel que l'aurore incendie,
Je laisserai ma voix, comme ta poudrerie,
Descendre sur la plaine en rauques tourbillons,
Envelopper l'essaim maculé des maisons,
Afin que, dominant le bruit de son blasphème,
Je clame au monde veule, ô mon Vent, que je t'aime!