Dans la Folle randonnée d'Hubert Perruchon, JP Yvorra, s'il a abandonné la piste du polar, explore une autre face de ce qui constituait la trame de l'histoire des personnages des précédents romans -La Maltaise, Sable rouge,
La traque finale – la confrontation d'individualités d'origine et de culture différentes.
Malmenés par l'existence, victimes d'accidents de la vie qu'ils subissent sans en connaitre précisément la raison, ils font preuve de résilience et trouvent des solutions pour survivre malgré leurs différences
Hubert Perruchon n'a rien d'un héros. Il a une sensibilité à fleur de peau qui le conduit à prendre des décisions souvent jugées irrationnelles ou peu lisibles par son entourage et le commun des mortels.
Contrairement à ses collègues du STO, il ne saute pas de joie, après l'armistice de 1945, à l'idée de retrouver la France.
Il choisit de rester près de Magda l'agricultrice allemande qui l'employait.
Est-ce par amour ? Hubert est incapable de le dire. Expliquer ainsi sa décision semble trop simple à ses yeux.
Il la quitte comme il a décidé de rester. Après une longue délibération des circonvolutions obscures de son cerveau.
En 1950, il entreprend un périple fou vers la France, dans une Allemagne occupée, dévastée par la guerre dont les habitants n'ont qu'une seule raison de vivre : survivre.
Il transporte son univers intérieur complexe au milieu de ce désastre. Paradoxalement, cela le protège. Il va donner et prendre, surprendre et être surpris par les êtres humains qu'il rencontre, certains ayant vécu des douleurs comparables à la sienne.
Durant ce qui s'apparente à un véritable voyage initiatique, il va sans cesse confronter son histoire à celle des vivants qu'il croise au gré du hasard.
Il évoque son enfance, sa relation complexe avec sa mère Marinette, son frère Maurice, son père Edouard, ses camarades de classe, son patron Dario, la comptable de l'entreprise, la jeune Emma.
Les femmes qu'il croisent sur sa route compensent l'absence d'amour maternel et de bienveillance de ses premières années de vie.
Magda, la serveuse de la station-service, la postière, Andréa la Polonaise sont toutes des substituts de la mère défaillante.
Pour autant il ne se résout pas à oublier ses géniteurs et retournent vers eux
Avec sensibilité, émotion, humour parfois, JP Yvorra dresse un portrait attachant d'Hubert Perruchon et par la même celui d'une époque disparue.
Son périple est interrogé parfois de façon brutale. Il y a ceux qui l'incitent à poursuivre et à ne pas renoncer et les autres qui doutent de la sincérité de son objectif et l'incitent à abandonner.
Lui arrive-t-il de penser par fois à cette maxime connue et redoutée des amoureux : « Les gens qui vous aiment sont ceux qui vous laissent partir. »
A méditer.
Le roman se termine sur l'annonce du Tome 2 relatant la poursuite du périple d'Hubert Perruchon. Impatience du lecteur.