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EAN : 9782742765959
Actes Sud (07/02/2007)
4.5/5   1 notes
Résumé :
Les onze nouvelles réunies dans cet ouvrage restituent une période charnière de l'Empire ottoman dans les Balkans : fin du XIXe-début du XXe siècle. Elles éclairent aussi les tragédies récentes dans cette région ravagée par les conflits ethniques et confessionnels. Chacune des nouvelles pose le problème des mutations des cadres traditionnels de la vie sociale, de la naissance des nouvelles identités, des revendications politiques des différentes communautés dans un ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Ce livre m'est tombé entre les mains un peu par hasard et ayant entendu récemment parler des guerres balkaniques du début du 20ème siècle, j'ai eu la curiosité de le lire : au final une belle surprise.
Pourtant c'est à un voyage dépaysant dans le temps et l'espace que convie ce recueil de nouvelles de l'écrivain turc Necati Cumali, mort en 2001. Macédoine ? Ce nom commun nous est familier pour désigner un mélange de légumes. Mais quid de cette région à la fin de l'empire ottoman ? Écoutons l'auteur : « Au début du 20ème siècle, les Balkans étaient appelés le panier de crabes, la poudrière de l'Europe. Turcs, Grecs, Macédoniens, Valaques, Bulgares, Serbes, Albanais, Arméniens, Juifs, Gitans, en plus des levantins d'Istanbul, Géorgiens, Iraniens, Occidentaux, qui se trouvaient dans les Balkans pour des raisons diverses, y cohabitaient tous ensemble ». Sous l'autorité de l'administration ottomane, une coexistence relativement pacifique était de règle. Mais avec le déclin de l'influence impériale et le réveil des nationalismes, la région toute entière fut déchirée par des guerres sanglantes.
Contrastant avec la couverture assez bucolique du livre, les nouvelles de N. Cumali vont évoquer ces temps troublés. Certes il commence par le souvenir de ses grands-parents et de leur vie de paisibles commerçants turcs dans le cadre pittoresque de la petite ville de Florina (aujourd'hui en Macédoine grecque), mais très vite on voit apparaître les exactions des brigands, bulgares en la circonstance, les pillages, incendies, viols et meurtres auxquelles vont répondre de terribles vendettas. Même si le motif de la vengeance est privé (Dame Dilà), elle sera sans pitié, à plus forte raison s'il s'agit de conflits sur fond d'affrontements ethniques, où l'auteur se révèle un maitre du suspense quand il décrit la soif du sang qui anime les bandits d'honneur, quel que soit leur bord. Chaque peuple a ses héros de légende et rapporte la geste de leurs exploits, ce qui ne manque pas de rappeler l'univers de l'auteur albanais Ismaïl Kadaré.
Mais l'originalité du recueil ne tient pas seulement dans ces récits suggestifs et haletants, mais plutôt dans la dimension humaine que l'auteur sait toujours garder à ses personnages même au milieu des pires cruautés. Des justiciers impitoyables sont atteints du mal d'amour, des voisins de communautés différentes se protègent mutuellement, deux voyageurs turcs échangent des cigarettes avec un détachement grec qui aurait pu les massacrer, des prisonniers turcs injustement condamnés s'évadent sans tuer ni priver de leurs armes des gendarmes grecs chargés de les convoyer, quand la sieste les réunit dans un même sommeil sous la canicule écrasante. Ces moment d'humanité, de tolérance et parfois même d'amitié réunissent ceux que des haines aveugles devraient opposer.
Pour Necati Cumali, dans un contexte de guerres ethniques meurtrières, les relations interpersonnelles, les échanges entre êtres humains menacés par la même destinée, restent primordiaux, permettant aux peuples déchirés par des luttes intestines de trouver une parcelle d'humanité, un répit au milieu de l'hostilité générale. Il ne s'agit pas pour lui de prêcher une entente utopique mais de montrer à coup d'anecdotes, vécues notamment par son père, à quel point elle est possible et survient plus souvent qu'on ne croit.
Des nouvelles qui tiennent en haleine, écrites et traduites dans un style dense et évocateur et finalement une belle leçon d'humanisme malgré la toile de fond de guerres sans merci entre communautés adverses.
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Il s'agit d'un recueil de nouvelles, se passant à la fin du XIXe et début XXe siècle en Macédoine, d'abord partie de l'empire ottoman, puis se séparant de ce dernier. L'auteur, né à Florina en Macédoine, s'est largement inspiré des souvenirs de sa famille pour ses récits. Son père et son grand-père sont des personnages principaux dans certaines nouvelles. Mais il ne s'agit pas que d'une histoire de famille, c'est avant tout le récit d'une contrée, à un moment de changement et de transformation, et la famille de l'auteur est avant tout une famille musulmane typique en quelque sorte, qui vit les événements, illustre une mentalité, et donne à voir un monde maintenant disparu. D'ailleurs d'autres récits laissent complètement de côté la famille de l'auteur pour s'attacher à d'autres personnages. Souvent des personnages haut en couleur, bandits ou rebelles. Et de récit en récit, de nouvelle en nouvelle, se déroule l'histoire de la région, d'abord sous l'autorité ottomane de plus en plus en plus contestée, puis le passage à d'autres maîtres, les luttes pour le pouvoir, les violences et massacres qui les accompagnent, et les souffrances des petites gens. Et enfin l'exil inévitable des populations turques.

C'est une lecture plaisante, l'auteur possède l'art du conteur, crée des personnages vivants, et sait maintenir un suspens, et ces récits ne manquent pas d'humour par moments. C'est aussi l'occasion de découvrir un pan de l'histoire de la région, ce qui est facilité par une postface qui explicite les données historiques. Mais en même temps, il m'a manqué un petit quelque chose. L'auteur cite d'autres auteurs qui ont évoqué les Balkans, et parmi eux, le seul que je connaisse vraiment, Ivo Andrić. Et pour moi, il n'a pas les qualités de ce dernier, ni dans l'écriture, ni dans la construction du récit, ni dans la complexité de l'analyse. Il a du mal à s'abstraire du point de vue turc par moments, et même si ces récits sont vivants et sympathiques, ils ont une certaine tendance à la simplification, ce qui peut d'ailleurs faire une partie de leur charme, avec un état d'esprit de récits populaires.
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