D'abord, merci à Babelio et à « Masse Critique » de m'avoir permis de lire cet ouvrage.
Le livre d'
Isabelle Masson-Loodts traite des « séquelles environnementales de la Grande Guerre », comme l'annonce le sous-titre : un angle intéressant que je méconnaissais. J'ai lu des livres abordant les traumatismes des soldats mais qu'en-est-il du cadre même de la guerre, de la terre, de la flore, de la faune? D'ailleurs y-a-t-il eu un travail portant sur les dommages psychologiques des animaux utilisés pendant la guerre? En tapant ces mots, je pense au roman de Morpurgo Cheval de guerre.
Bref, l'ouvrage de Masson-Loodts est une entrée originale pour aborder le souvenir de la Grande Guerre.
Ce livre se lit très vite, il n'est pas épais, il est vrai, mais surtout s'il est une étude sur la question, sa forme pourrait passer pour un ouvrage romanesque ou un reportage où l'on suit la journaliste dans son enquête sur la question. C'est donc très agréable à lire et très littéraire, en fait : il y a une part de narration quand
Isabelle-Masson-Loodts nous relate le jeu de piste qui la conduit des sources écrites aux différents spécialistes (historiens, garde-forestiers, chercheurs) qui lui donnent un éclairage différent sur son thème de recherche et lui permettent aussi de l'approfondir. D'autre part, elle émaille son récit de références littéraires d'auteurs contemporains de la Guerre, qui ont été sur le front, ce qui permet de nous replonger dans le contexte historique alors que son enquête se fait a posteriori, bien longtemps après, avec la distance et le détachement que cela implique. Enfin , elle ne cache pas l'émotion ressentie lorsqu'elle se rend sur les lieux-mêmes; cela n'enlève en rien l'aspect documentaire de son travail mais ajoute, selon moi à l'aspect romanesque. Son travail sur les séquelles naturelles de la Guerre peut se lire comme une aventure à la rencontre de la mémoire sur le conflit.
L'ouvrage qui en résulte me semble ainsi à la confluence de différentes démarches : historique et journalistique; ce qui correspond à ses différentes casquettes (elle est archéologue et journaliste).
On peut distinguer deux grandes idées dans le travail d'
Isabelle Masson-Loodts : d'un côté, la pollution et les marques physiques qui restent de la guerre et de l'autre, la nature qui a repris le dessus et s'est relevée des ravages subis.
Je n'avais pas imaginé que cent ans après, le problème de la pollution due aux produits chimiques existait encore, ni que les agriculteurs en Flandres récoltaient toujours des obus lors de leurs travaux des champs. Ou que par ailleurs, s'étaient développées des espèces végétales obsidionales arrivées avec les belligérants, ou que des espèces particulières animales avaient crû dans les restes de la guerre (casernes, trous d'obus) et qu'une grande part du champ de bataille de Verdun était devenue une réserve écologique en même temps qu'on en avait fait un lieu de mémoire protégé.
Bref, une lecture plaisante et instructive d'un petit ouvrage que j'ai dévoré comme un roman!