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sur 978 notes
💙💙💙💙💙💙💙💙 "Le ghetto intérieur " de Santiago H. Amigorena
aux éditions POL.
💙💙💙💙💙💙💙💙

Quand mon mari regarde à la télévision des reportages sur la deuxième guerre mondiale et les nazis , je quitte souvent la pièce car je n'arrive pas à les regarder ; trop douloureux, trop présents encore dans mon esprit . C'est pourquoi, lorsque j'ai reçu "Le ghetto intérieur " dans le cadre du #grandprixdeslectriceselle2020, qu'est ce que j'ai appréhendé cette lecture. Et puis , page après page, je me suis laissée emporter par la beauté du texte, par tous ces sentiments qui explosent au fil des phrases. Tantôt la joie, le bonheur, l'amour, tantôt le doute, la crainte, la peur, la honte, la détresse, la tristesse, le chagrin, la douleur...
Vincente était le grand-père de Santiago ; c'est un pan de son histoire que celui-ci nous raconte. Des années terribles. Ce jeune homme juif polonais , réfugié en Argentine, marié et père de 3 enfants va se trouver confronté à une telle culpabilité qu'il va se murer dans le silence . Plus de mots, plus de phrases, plus d'expressions sur son visage... Plus rien...
Vincente a fui la Pologne en 1928. Plus exactement, il s'est éloigné de sa mère et d'un pays où il ne se sentait plus heureux. Il aurait pu faire venir sa mère et le reste de sa famille ( frère, soeur, et leurs conjoints ...) mais il n'a jamais vraiment insisté pour que cela se fasse. Il a même eu du mal à tenir sa promesse d'écrire souvent à sa mère.
Et puis la guerre arrive et tout s'accélère en Europe; la Pologne souffre à son tour. Même si les informations arrivent très en retard en Argentine et si les journaux ne disent pas tout ce qui se passe en Europe , Vincente prend peu à peu conscience des traitements infligés aux personnes juives. Commence alors dans sa tête un long questionnement : qui est-il ? est-il encore un juif ? Mais qu'est-ce ça qu'être un juif ? Est-il polonais? Est-il argentin? Pourquoi peut-il manger à sa faim, lui ? Pourquoi vit -il des moments agréables, heureux ? Alors que le reste de sa famille souffre loin de
lui et qu'il est impuissant ,qu'il ne peut rien faire...

Et puis tout s'accélère. Des lettres de plus en plus terribles arrivent; sa mère évoque le sort qui leur est réservé dans Varsovie et son ghetto: la faim, la peur, la mort qui est tout autour d'eux, la violence. Alors Vincente n'en peut plus de penser, d'entendre son cerveau lui parler. Il va se déconnecter de tout, de sa vie familiale, de son travail, de ses amis , il va se taire.
Les journaux finissent par évoquer ce qui se passe : les trains,les convois, les camps ; Vincente s'enfonce de plus en plus et comme son épouse, nous sommes impuissants face à sa souffrance . Nous la comprenons mais ne pouvons l'aider. Et c'est très éprouvant pour le lecteur d'assister à sa descente. Jusqu'où va-t' il aller? Jusqu'au suicide? N'y a t 'il rien ni personne pour arriver à briser ce mur de silence ?
Heureusement, le 8 mai 1945 marque la VICTOIRE de la France et ses alliés contre les bourreaux nazis.Toute l'horreur de cette guerre éclate encore plus au grand jour, et le nom de Shoah sera finalement choisi pour l'évoquer.
Et Vincente va revenir tout doucement à la vie , se remettre à parler .
Ce roman figure dans la sélection pour le Goncourt. Je ne sais quel sera le choix de l'Académie, mais ce que je sais, c'est que ce roman fera parler de lui quoiqu'il arrive. Impossible de rester indifférent face à ce magnifique témoignage.



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Dans ce roman, l'auteur parle de son grand-père, Vincente Rosenberg, un Juif polonais qui a émigré en Argentine en 1928 et dont la mère restée à Varsovie sera victime de la Shoah. À des milliers de kilomètres, Vincente se renfermera sur lui-même, sous le poids de la culpabilité et de l'horreur.
Il est toujours très pertinent de rappeler les atrocités du nazisme aux lecteurs d'aujourd'hui et en ce sens les passages documentaires sont intéressants. J'ai été beaucoup moins convaincue par l'aspect romanesque de l'ouvrage. L'écriture m'a semblé terne et répétitive. En bref, un sujet fort et un angle original, mais un style scolaire. Dommage.
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Un livre bien particulier que celui-ci, qui m'a à la fois touchée tout en me laissant un sentiment d'inachevé…

Je n'avais jamais lu auparavant de livres de Santiago H. Amigorena, dont les trois titres de ses romans précédents me laissent euh… pantoise : Une enfance laconique, Une jeunesse aphone ou encore Une adolescence taciturne. Comme ça, de prime abord, on peut être tenté de se dire que le type ne va pas fort ! Après quelques recherches sur lui, j'ai appris que son thème de prédilection était le silence, ce qui se confirme avec le ghetto intérieur qui porte incroyablement bien son titre. J'ai également appris qu'il s'agissait d'un Argentin vivant en France, scénariste et réalisateur de films (il a écrit le péril jeune de Klapisch quand même !) et qu'en plus il est le père des enfants de Julie Gayet (j'aime les infos people).

Cet opus relate l'histoire du grand-père de l'écrivain : Vicente Rosenberg.
Vicente est un polonais juif exilé en Argentine en 1928 pour vivre sa vie, se couper de l'armée polonaise et de sa mère décrite à ce moment-là comme un poil étouffante. Arrivé en Argentine, il découvre la liberté, l'espagnol, la suavité de l'Amérique Latine. Tout roule pour lui, il se fait des amis, rencontre Rosita (une juive de l'Est également dont les parents sont aussi émigrés, mais née en Argentine), a plusieurs enfants, reprend le magasin du beau-père. Il est heureux.

Mais voilà, à partir des années 30, en Europe, fascisme et nazisme gagnent en importance. Suivant cela au début du coin de l'oeil, Vicente vit un calvaire d'exilé découvrant année après année, mois après mois, que sa famille restée en Pologne vit l'horreur, d'abord enfermée dans le ghetto de Varsovie, puis en route vers les camps…

C'est évidemment un livre tragique dont on connaît la fin. Donc je ne vous apprends rien. Ce qui est très bien traité, c'est l'enfer des proches éloignés qui comprennent qu'il se passe quelque chose de très grave sans savoir quoi réellement (car le reste du monde ne savait qu'assez peu l'ampleur des évènements), et sans pouvoir avoir de nouvelles. Vicente culpabilise énormément d'être parti, de ne pas être avec sa mère, mais aussi de ne pas l'avoir fait venir en Argentine, comme l'ont fait certains de ses amis polonais émigrés avec leurs parents, parce que dans le fond il ne voulait pas vivre avec sa mère, l'avoir dans la même ville pendant ses années de bonheur. Cette culpabilité va le tuer à petit feu : d'un homme gai et joyeux, il devient prisonnier d'un silence inédit, rongé par sa culpabilité et sa peur, laissant femme et enfants complètement paumés devant cet homme qui ne répond plus à rien ni de rien.

Un livre franchement dur donc, mais qui donne à voir ce que l'on connait moins : la culpabilité de ceux qui restent, qui ont réussi à sauver leur vie, parfois au détriment de leurs proches. Mais aussi évidemment les répercussions, encore présentes, de la Shoah qui n'a jamais que 70 ans et qui continue de ruiner des générations entières survivantes, ou proches de survivants.

Mais j'ai un sentiment d'inachevé car le livre se termine sur la fin de la guerre, mais sans savoir réellement ce que vit Vincente après, une fois qu'il comprend et découvre l'horreur de la vérité. Or l'auteur a tellement invité le lecteur à suivre ce chagrin, cette déperdition, que terminer ainsi, c'est un peu nous laisser sur la touche.


Jo la Frite

Lien : http://coincescheznous.unblo..
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Savoir ou ne pas savoir ? Quel est le pire ? Quand l'innommable s'abat sur vos proches ? Quand vous vous découvrez impuissant à les secourir ? Quand l'imagination n'arrive même pas au chevet de la réalité ?

Comment ne pas devenir fou quand vous apprenez qu'à 12 000 km de là, des hommes, des femmes et des enfants sont affamés, massacrés, anéantis simplement parce qu'ils sont nés juifs, comme vous ? Comment tenir encore debout quand vous découvrez que parmi eux figurent votre mère, votre frère et votre belle-soeur ?

Comment parvenir à avaler encore une bouchée du rôti concocté par belle-maman quand votre propre mère n'a même pas de quoi rassembler 200 calories par jour pour survivre ?

Comment ne pas s'en vouloir d'être parti un beau jour, il y a des années de ça ? Comment ne pas culpabiliser d'avoir un jour pris une décision qui a sauvé votre peau en laissant vos proches sur le carreau ?

Comment ne pas faire peser cette peine incommensurable sur ceux qui vous entourent et vous aiment ? Sur votre femme et vos enfants qui payent à leur manière aussi un lourd tribut à cette guerre qui ne les concerne pas directement.

A partir du jour où Vicente, émigré polonais installé à Buenos Aires depuis des années, comprend ce que sa mère est en train de vivre à Varsovie, sa vie a perdu tout son sens. Au lieu de crier sa haine et sa rage, il se plonge dans un profond mutisme pour éviter d'embarquer d'autres victimes dans son drame intérieur. Il fuit comme il peut les pensées qui le ramènent à sa mère. Il ne veut pas savoir, ne veut rien entendre, ne rien voir. Il lui est impossible de verbaliser ce qu'il ne parvient même pas vraiment à concevoir.

Vicente Rosenberg est le grand-père de l'auteur. Ni déporté, ni gazé, Vicente n'entre pas dans la comptabilité des victimes de la Shoah. Il ne fait pas partie de ces 6 millions de juifs victimes de ce génocide, de cet Holocauste ou n'importe quel autre mot sordide pour qualifier l'inqualifiable. Vicente n'est pas une victime, il a même plutôt eu une chance inouïe d'y échapper. Mais en son for intérieur, il était là parmi les siens. Il a souffert lui aussi. Il a vécu lui aussi dans ce ghetto, fusse-t-il seulement intérieur…

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Beaucoup de choses ont changé depuis les horreurs de l'Holocauste, mais le monde est toujours menacé par des autocrates déterminés à terrifier, envahir et occuper des pays pacifiques et démocratiques. Et combien d'exemples en avons-nous ? le dernier en date étant l'invasion de l'Ukraine.

Le Ghetto intérieur est un entrecroisement des éléments historiques du règne de terreur d'Hitler et des éléments douloureux de la propre histoire familiale de l'auteur. le protagoniste a choisi de laisser sa mère et ses deux frères et soeurs en Pologne afin de déménager en Argentine pendant la préparation de la Seconde Guerre mondiale. Alors que la communication avec sa mère devient de plus en plus sporadique et dérangeante, le fils/frère déplacé devient de plus en plus découragé et dysfonctionnel.

Les aspects les plus difficiles de cette histoire tragique sont les problèmes conflictuels d'identité du protagoniste. Il ne reconnaît pas initialement son héritage juif comme fondamental. Il choisit plutôt de se définir comme polonais, argentin, voire allemand avec nostalgie, avant d'être forcé de reconnaître que c'est la judéité qui est la clé pour comprendre les horreurs qui s'abattent sur sa famille. La culpabilité, le regret, le remords et la honte menacent de vaincre sa capacité à fonctionner comme fils, mari, père, ami. Amigorena nous rappelle que les victimes n'étaient pas seulement les plus de 6 millions de Juifs qui ont été exterminés par la « solution finale » ou les quelques-uns qui sont restés et ont survécu. Ce sont aussi ceux qui sont partis et ont à jamais remis en question leurs décisions, devant vivre avec la culpabilité du survivant de la manière la plus profonde. La vie continue, mais les cicatrices restent pour toujours.

Quel exemple de ce malheur plus frappant que le suicide de Primo Levi ?
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Depuis 1928, Vicente Rosenberg a quitté la Pologne pour l'Argentine. Loin de sa famille, il a décidé de s'affranchir de sa mère et de construire sa propre vie. Il a rencontré Rosita avec qui il a eu trois enfants. Marchand de meubles à Buenos Aires, son quotidien est bien éloigné de son ancienne vie.

Vicente commence à recevoir des lettres alarmantes de sa mère restée à Varsovie en plein coeur d'une Europe plongée dans la seconde Guerre Mondiale. A mesure qu'il reçoit ces courriers inquiétants et perçoit les conditions de vie de sa mère, l'angoisse monte.

Une culpabilité immense commence à prendre possession de lui et Vicente s'emmure dans le silence. Ce mutisme devient son unique refuge pour vaincre son impuissance grandissante.

Entre réflexion sur la force de la culpabilité, le poids de l'identité et de l'exil, cette lecture m'a beaucoup marquée. Porté par une plume vive et sobre, je recommande ce roman douloureux et poignant.
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Ce récit, dense et terrible, est une réponse au silence, à l'indicible.
L'auteur porte en lui les blessures de ses ancêtres, et notamment celles de son grand-père rongé par la culpabilité de « ne pas avoir été là » et de ne pas avoir pu empêcher le meurtre de sa mère et de son frère durant la Shoah, alors que lui avait fui en Argentine depuis une dizaine d'années. La souffrance de cette culpabilité l'avait détruit au point de le murer dans le silence, dans un « ghetto intérieur ».
En racontant cette histoire, son petit-fils choisit la vie, il répare le passé.
C'est fort et essentiel.
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Pour moi, ce livre est déjà un classique. Il est traversé par un sentiment, un seul, celui de la culpabilité de son héros qui s'est installé en Argentine dans les années 1930, laissant sa mère en Pologne, dans ce qui deviendra le ghetto de Varsovie. C'est un livre bouleversant, d'une tristesse infinie, à l'image des lettres de cette pauvre femme qui s'estompent avec le temps avant, évidemment, de s'arrêter. Livre fort et puissant qui devrait être lu à l'école.
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Vicente, juif-polonais ou polonais-juif, vit en Argentine avec sa femme et ses trois enfants. Ils sont gais et insouciants.
Il n'a pas réussi à convaincre sa mère de le rejoindre ; elle ne pouvait pas abandonner sa fille exilée en Russie et son autre fils, médecin, qui aide ses compatriotes.
Et la guerre arrive avec ses nouvelles lointaines, peu fiables. Comment croire à ce qu'on lit alors que la communauté internationale ne s'émeut pas ?
Mais lui commence à douter, les rares lettres de sa mère son terribles ; le font vaciller.
Alors il s'enferme dans son ghetto intérieur, il devient mutique.
Un livre sur la culpabilité, sur les origines, sur la religion, sur l'incapacité à venir en aide.
L'écriture est fluide, la rythme lent avec quelques longueurs.
Un roman agréable à lire mais une petite déception car je m'attendais à une envolée d'émotions au regard des critiques dithyrambiques que ce roman a reçu.
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Si vous voulez vous faire une idée du Ghetto Intérieur de Santiago H. Amigorena (éd. POL), ce roman très remarqué lors de la dernière rentrée littéraire, évitez de vous référer au 4e de couverture, pour le moins aride. Il est vrai que la prestigieuse maison littéraire – comme beaucoup de ses consoeurs – n'a jamais été très inspirée pour ses textes de présentation – du moins, lorsqu'elle en proposait.
Le Ghetto intérieur est le récit poignant du silence de Vicente Rosenberg, le grand-père de l'auteur, immigré en Argentine dans les années 20. Alors que cet homme originaire de Pologne a trouvé en Amérique du Sud une nouvelle vie – une femme, Rosita, avec qui il aura deux enfants, un emploi à responsabilités, des amis immigrés comme lui et une nouvelle patrie – sa conscience est resté dans son pays d'origine et sa famille juive.
Le roman de Santiago H. Amigorena démarre en septembre 1940, lorsque la seconde guerre mondiale fait déjà rage, le point de départ du cauchemar juif. Vicente Rosenberg se renseigne sur les nouvelles dans son pays, de plus en plus rempli d'angoisse pour ce qui s'y passe, et en particulier pour sa mère qu'il n'a pas su convaincre de l'accompagner en Argentine. de mois en mois, la réalité de ce qui se passe dans la Pologne en guerre rattrape cet homme exilé à des milliers de kilomètres : "Comme tous les Juifs, Vicente avait pensé qu'il était beaucoup de choses jusqu'à ce que les nazis lui démontrent que ce qui le définissait était une seule chose : être juif."
La grande force de ce court récit familial est de parler de la manière dont cet homme va vivre son isolement loin de sa mère et de son pays natal. Santiago H. Amigorena ponctue son livre de passages sur la Solution Finale, auxquels répond l'incapacité de Vicente de se confier ne serait-ce qu'à sa femme : "Il voulait parler, mais, prisonnier du ghetto de son silence, il ne pouvait pas parler. Il ne savait plus."
Face à l'indicible, désespéré et démuni ("Brutalement, à ce moment-là, Vicente était devenu étranger à lui-même. Il était devenu un autre, un autre vide de sens, vide d'espoir, vide d'avenir"), cet immigré juif va peu à peu s'enfermer dans un insupportable silence ("Il voulait parler, mais prisonnier du ghetto de son silence, il ne pouvait pas parler. Il ne savait plus"), que l'auteur a choisi de mettre fin : "J'aime à penser que Vicente et Rosita vivent en moi, et qu'ils vivront toujours lorsque moi-même je ne vivrai plus."
Lien : http://www.bla-bla-blog.com/..
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