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3,81

sur 726 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Attention, chef-d'oeuvre! Alors que l'on connaissait davantage Margaret Atwood pour ses récits d'anticipation, celui-là se situe dans une veine plutôt historique : en effet, Captive est en grande partie adapté d'un fait-divers réel qui a défrayé la chronique canadienne du XIXème siècle. Les éléments exposés concernant le crime de Mr Kinnear et de Nancy Montgomery sont rigoureusement exacts et Maragret Atwood a opéré un véritable travail d'archiviste avant de se lancer dans l'écriture : témoignages de l'époque, presse, compte-rendus du tribunal... de ces différentes sources au contenu souvent antinomique (il faut dire que la question de la culpabilité de Grace avait soulevé des avis mitigés), l'auteure tire des citations qui introduisent chaque nouveau chapitre, citations complétées d'extraits de poésie d'Emily Dickinson, Edgard Poe ou Nathaniel Hawthorn, dont les vers semblent soudain avoir été écrit pour Grace. Plus encore, ils apportent dès lors souvent un nouvel éclairage ou tendent à faire tirer des conclusions ambivalentes quant à l'innocence ou culpabilité de la jeune femme. Nous voilà tombés dans les filets de Margaret Atwood... et de Grace elle-même.

Alternant entre une narration à la première personne par Grace et une narration du point de vue du médecin qui la questionne sans relâche, l'auteure se joue du lecteur, lequel se retrouve malgré lui dans la même position que Simon Jordan : Nous souhaitons tout connaître de Grace, en essayant de nous convaincre que la question de sa culpabilité importe peu, que seuls son esprit et sa mémoire nous occupent. Et pourtant, très vite, nous tombons sous son charme. Nos convictions s'ébranlent. Nous souhaitons intimement qu'elle soit innocente. Nous devenons ni plus ni moins que la mise en abyme du Dr Jordan.
le style et l'immersion narrative sont pour beaucoup dans cet effet : il faut applaudir le talent de M.Atwood (et de sa traductrice!) qui parvient à recréer autant de plumes que de personnages, en particulier celle par laquelle Grace s'exprime, qui évoque sincèrement la voix d'une domestique dont le vocabulaire se serait enrichi du contact d'employeurs d'une classe sociale plus élevée, sans se départir des tournures et de la syntaxe propres à un milieu plus modeste (une écriture similaire et toute aussi admirable avait été constatée dans le Mary Reilly de Valérie Martin). Cette plume particulièrement riche apporte un réalisme troublant et donne tout son corps à l'histoire.

A travers cette voix à la fois simple et profonde, Grace pose un regard sur la société qui, derrière un ton qu'on imagine sage et inoffensif, s'avère tranchant et particulièrement perspicace, parfois plein d'ironie. La presse s'évertue à interpréter le message féministe du roman parce qu'il correspond à une mouvance actuelle et qu'il le rapproche ainsi de la servante écarlate, mais en réalité, Captive évoque de nombreux autres sujets. A travers ce personnage de vraie fausse criminelle qui a fasciné des foules entières, son histoire, et L Histoire en général, le filtre que Margaret Atwood vient superposer en tant qu'auteure aiguille le questionnement dans d'autres directions et veut bousculer certaines de nos représentations : la fascination malsaine que provoque le fait divers, la condition de la femme, certes, mais celle aussi de la domestique et de la prisonnière, de même que l'assimilation entre étranger et criminel, ces raccourcis si faciles à nos esprits étroits. Qu'est-ce qui fait, ou qui est-ce qui fait de nous un meurtrier, une meurtrière, un innocent, ou un fou? En quoi cette mise en boite vient-elle rassurer la foule hurlante? M.Atwood nous tend un miroir où se reflètent les travers d'une société vaine et hypocrite...

En bref : Un récit qui puise sa source historique dans un fait divers sanglant du XIXème siècle pour mieux se jouer de nos convictions en posant un regard révélateur sur la société. Nous devenons les victimes volontaires de Grace qui, innocente ou manipulatrice, a tout compris d'un monde qui nous a dévoré, et nous balade entre fiction historique et enseignement philosophique à demi-dissimulé. Une pépite qui nous habite encore longtemps après avoir refermé l'ouvrage...
Lien : https://books-tea-pie.blogsp..
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Pour une première lecture et donc découverte de cette auteur, je fus franchement surprise et captivée !

L'auteur a fait beaucoup de recherches et ça se ressent !
La plume est unique, une narration qui change en fonction du personnage.

Il y a beaucoup de questions et sûrement peu de réponses mais c'est la force de ce roman !

Bref, un véritable petit bijou que j'ai particulièrement apprécié !
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Ayant vu la mini série sur Netflix, j'ai été curieuse de lire ce pavé de 600 pages environ. Je n'ai pas été déçue . L'écriture est tellement fluide qu'on ne s'ennuie jamais . Tout est bien dosé de mon point de vue . Et c'est la première fois que j'aime le livre et la fiction audiovisuelle !
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J'ai eu plaisir à retrouver dans « Captive » la plume tranquille de Margaret Atwood, que j'avais découverte dans « La Servante écarlate ». Atwood écrit le quotidien avec un mélange de lenteur et de nervosité qui rend son style très addictif. Dans « Captive », on lit la vie des pauvres gens, surtout des pauvres femmes, du milieu du XIXè siècle.
« Captive », c'est aussi un mystère historique : celui de la culpabilité ou de l'innocence de Grace Marks, accusée et condamnée pour le meurtre de son employeur et de sa femme de charge. Tout au long du roman, le doute subsiste : est-ce une manipulatrice hors pair ou une pauvre enfant naïve ? Quelques remarques glissées çà et là permettent de maintenir le doute de bout en bout, de même que les chroniques judiciaires n'ont jamais su tirer au clair l'implication exacte de Grace Marks dans ce double meurtre. C'est ce qui fait aussi la force de ce roman.
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Mon premier livre de Margaret Atwood, et une très jolie découverte. L'histoire, la forme, le rythme.. j'ai été vite transportée dans cette étrange succession d'événements dont on ne décroche pas avant la dernière page..
Je recommande vivement.
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Ce crime réellement commis au Canada le 23 juillet 1843, brosse un portrait des femmes de condition modeste à cette époque, avec la prison et l'asile psychiatrique.

Démente, innocente ou criminelle ?

Le docteur Jordan, jeune spécialiste de la maladie mentale, veut découvrir la vérité sur Grace Marks.

Peut-être Grace n'est-elle d'ailleurs qu'une victime de ce système fait d'humiliations, de corvées et de brimades qui aura fini par la broyer.

J'ai moins apprécié l'analyse "médicale" que l'on faisait pour les « fous » à cette époque :

Lettre du Docteur Samuel Bannerling le 20 avril 1859

« La plupart des personnes souffrant de très graves désordre nerveux et cérébraux ne peuvent être soignées, mais simplement contenues, pour ce faire, la camisole, le châtiment, une petite diète, les ventouses et les saignées destinés à limiter une vitalité excessive se sont par le passé avérés assez efficace…
La folie est dans le sang et cette tare ne peut s'effacer avec un gant et un peu de savon noir ou vert ».

Il ne faisait pas bon souffrir de désordres mentaux.
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J'ai été captivée par ma lecture dès les premiers chapitres.
Je me suis plongée dans cet univers du 19e siècle avec curiosité car Margaret Atwood y abordé différents thèmes qui me sont chers, à savoir la santé mentale et l'univers carcéral.
Alors forcément, je me suis retrouvée confrontée à ce que je n'aime pas de l'histoire de la santé mentale, les asiles, les mauvais traitements, les diagnostics médicaux féminins digne d'une bonne société patriarcale... et cela s'étend également à la conditions des femmes mais aussi des domestiques, mais aussi des migrants... bref ce livre dépeint une quantité impressionnante de sujet en étant toujours très intéressant à suivre.
C'est un quasi coup de coeur pour moi.
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Je connaissais déjà Margaret Atwood avec « la servante écarlate » et « les testaments » . J'adore son écriture très fluide, je lis généralement ses livres en quelques jours mais je reconnais que j'ai toujours du mal à accrocher dès les premières pages, à contrario, après celles-ci, une fois que je suis lancée, j'enchaîne les autres à un rythme très soutenu !

Margaret Atwood a le don de nous tenir en haleine jusqu'à la fin mais... sans réellement apporter le dénouement que l'on recherche. ⁣
J'ai eu le sentiment que l'auteure cherche à ce que l'on imagine notre propre fin, suivant nos réflexions et ce qu'on a ressentis de la lecture, suivant notre subjectivité face au thème abordé. Ça a été le cas avec CAPTIVE qui m'a (pour le coup) réellement captivée. Je voulais à tout prix connaître le vrai du faux car le mensonge s'emmêle sans cesse avec la vérité, on a envie de savoir ce qui s'est vraiment passé mais la réponse ne sera jamais explicitement écrite. Margaret Atwood lance des pistes, une en particulier mais tout en continuant de plonger le lecteur dans cette interminable tourbillon de la vérité, de la réalité, de ce qu'on croit être vrai, du faux, de ce qu'on pense être faux...⁣

D'ailleurs ça me fait penser à une question purement philosophique: la vérité est-elle toujours vraie? je vous laisse méditer là-dessus.
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Très belle découverte d'une grande écrivaine contemporaine !
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Alias Grace est le troisième roman que je lis de Margaret Atwood, et j'aime toujours autant son style, à la fois détaché et incisif.

Cette fois, elle s'est inspiré d'une histoire vraie, un fait divers qui a fait beaucoup de bruit au Canada au XIXème. le côté réel ressort avec les extraits de journaux, de rapports ou de lettres qui parsèment les débuts de chapitres.

J'ai trouvé difficile de rentrer dans le roman au début, le style d'écriture étant axé XIXème avec un vocabulaire riche et de nombreuses descriptions, mais une fois l'histoire lancée, il m'a été difficile de reposer le roman. L'ambiance est assez particulière, j'ai trouvé qu'il y avait quelques longueurs parfois, notamment avec les lettres échangées par certains personnages. Cela ne gêne en rien la lecture, mais je pense qu'on aurait pu s'en passer.

L'histoire est racontée de deux points de vue différents : celui de Grace à la première personne, et celui du Dr Jordan à la troisième personne. L'ordre de narration est plutôt aléatoire, et si cela m'a surprise au début, je m'y suis rapidement faite. Cela donne, je trouve, encore plus de profondeur au personnage de Grace.

D'ailleurs, parlons-en de Grace. J'admire Margaret Atwood, parce qu'elle a su créer un personnage très complet en restituant avec brio la complexité de la psychologie humaine. Grace nous apparaît alors tour à tour ingénue et sans défense, voire un peu stupide, puis intelligente et manipulatrice. Elle m'a tout simplement fascinée, comme elle a fasciné à l'époque tous ceux qui l'ont approchée de près. C'est vraiment elle qui porte tout le roman, et je l'ai trouvée magistrale. A chaque instant je me suis posé la question : a-t-elle commis ce meurtre oui ou non ? Grace cache très bien son jeu, elle garde ses secrets et ne révèle la vérité que par petites bribes, ce qui est à la fois frustrant et intriguant.

Le roman monte peu à peu en puissance, au fur et à mesure que Grace raconte son histoire et que l'on approche du moment fatidique du meurtre. En parallèle, on suit le Dr Jordan qui, lui aussi, est confronté à une situation qui devient de plus en plus compliquée et oppressante. A cela s'ajoute une sensualité sous-jacente, teintée de violence.

Bref, Alias Grace est une pépite ! J'ai beaucoup aimé ma lecture, et je suis curieuse de voir comment le roman a été adapté en série sur Netflix.

Lien : http://mybooksntea.wordpress..
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