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sur 7499 notes
Dans cette société où les rôles et les fonctions des individus, notamment celui des femmes, sont ségrégées, Defred est La Servante écarlate, et c'est par son récit atemporel, et à l'aide de quelques rares références spatiales que l'on découvre une société américaine post-apocalyptique, post coup d'état - une société contraignante pour les individus - qui s'est construite sur la défiance et l'interdit. En tant que Servante écarlate , au service du commandant et de son épouse, trop âgée pour être mère, son rôle assigné est celui d'enfanter ; d'autres femmes sont les Marthas, cuisinières ou femmes de ménage, et chacune des catégories de femmes est identifiée par une couleur spécifique. Mais Defred a connu le monde ancien et, au fil de ses souvenirs, elle tente de retrouver les bribes de ce monde d'avant, celui où elle avait pour amie Moira, où elle a rencontré Luke, avec lequel elle a eu une petite fille, tous deux disparus depuis que ce nouvel ordre du monde est apparu et ses souvenirs sont de plus en plus ténus...

Dans ce récit dystopique Margaret Atwood imagine un monde aux confins de ceux de 1984 - une société sécuritaire, de Fahrenheit 451 - où les interdits sont nombreux notamment ceux concernant le savoir, ou celui du meilleur des Mondes où les fonctions des individus sont sériées et différenciées par fonction, à la mode du taylorisme...Seule la parole de Defred nous apporte l'éclairage du passé, elle reste une des dernières à pouvoir encore se rebeller avec quelques rares autres qui montent un réseau de résistance qui reste fragile.
Margaret Atwood propose donc une vision pessimiste mais crédible d'une société refermée sur elle-même poussant l'aliénation au maximum, dans un style distancié qui renforce l'inhumanité de ce nouveau monde terrifiant.
Une lecture très intéressante et une auteure que j'apprécie de plus en plus...
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Dans un pays (une grande partie des États-Unis, en fait) où des hommes puissants ont réduit les femmes en général et les hommes pauvres en servitude, June (de son vrai prénom) renommée Defred d'après le prénom de celui auquel elle "appartient", cherche à s'en sortir et à survivre tout simplement. Elle fait partie de la catégorie des Servantes, toutes habillées de rouge (de pied en cape, c'est le cas de l'écrire), avec une cornette blanche pour être invisibilisées, celles qui donne la vie - des enfants à celles qui ne peuvent plus en avoir. Avec les Marthas, employées de ménage et cuisinières et les Épouses, femmes des hauts gradés mais au sort guère plus enviable, elles mènent une vie de recluses, assignées à résidence dans un périmètre bien défini, sous peine de mort. Les Tantes, sortes de religieuses, ont un pouvoir important limité cependant par celui des gouverneurs. Les ennemi.e.s sont partout, June-Defred réussira-t-elle à échapper à cet univers infernal pour se réfugier au Canada, pays libre et voisin ?
L'héroïne, qui n'est pas une battante comme sa mère et ses amies, semble souvent se laisser porter par les évènements, baisser les bras (est-ce à cause de tout ce qu'elle a subi ?).
Ce récit donne à réfléchir , même s'il m'a paru quelque peu exagéré. Et pourtant, Margaret Atwood précise, dans sa préface fort intéressante (une conférence donnée en Allemagne), que tout les faits sont tirés d'histoire s'étant déjà produites ; par exemple, pour écrire son roman, elle a rencontré des résistants.
Ce roman dystopique offre un condensé de toutes les oppressions d'hier et d'aujourd'hui, en un mélange plus ou moins digeste. C'est cette juxtaposition d'horreurs qui m'a le plus gênée.
J'ajoute que ce livre est devenu un symbole pour les féministes (cf. encore une fois la préface où l'autrice indique que parfois celles-ci revêtent les habits de la Servante lors de manifestations).
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Nous sommes ici sur un abord différent du monde post-apocalyptique tel qu'il est habituellement traité, Margaret Atwood s'attaque à un fait sociétal et je dois dire que cette histoire, qui fait froid dans le dos, est absolument passionnante. Écrite du point de vue d'une jeune mère devenue servante dans un monde où la femme n'est guère plus qu'un objet, un ventre, nous découvrons à travers ses souvenirs ce qu'est devenue la société dans laquelle elle vit. Froide, brutale, cette narration semble dénuée de sentiments, d'émotions, nous découvrons pourtant au fil du livre que cette distance lui est nécessaire afin de ne pas perdre l'esprit. O
n lui a tout pris, à elle mais aussi aux autres
Lien : http://livresque78.com/2020/..
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Je viens de terminer la lecture de « La servante écarlate » et j'en sors laminée.
C'est certainement un des livres que j'avais le moins envie de lire mais il était difficile de passer à côté de ce roman phénomène qui a également inspiré une série.
J'ai donc sauté le pas et je dois avouer que je ne le regrette pas.
Le roman aborde plusieurs thématiques actuelles : l'écologie, la religion et surtout la condition féminine.
À la suite de la détérioration de l'environnement, la race humaine connait une chute de natalité.
Une montée de l'obscurantisme se produit et des fanatiques arrivent à prendre le pouvoir dans la république de Gilead.
Très rapidement, ils limitent la liberté des femmes et en choisissent certaines. Celles-ci sont destinées à porter des enfants pour des couples n'arrivant pas à procréer.
Defred fait partie de ces servantes écarlates, arrachées à leur ancienne vie, sans nouvelle de leurs proches et surveillées par d'autres femmes complices du système.
Son quotidien se résume maintenant à des cérémonies religieuses, peu de contacts entre les femmes, quelques promenades et bien entendu des rencontres épisodiques avec le Commandant.
Se pourrait-il donc qu'il y ait une issue à cette situation ?
Ce roman m'a vraiment touchée. Il renvoie nécessairement à la montée de l'intégrisme, aux esclaves sexuelles de Boko Haram, au recul des droits des femmes qu'on constate dans de nombreux pays…
Pas ou peu de violence physique dans le roman, mais une violence psychologique que les mots de Margaret Atwood rendent tellement tangibles.
C'est certainement un des livres les plus marquants que j'ai lus ces dernières années.

Challenge Multi-Auteures SFFF





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Pour valider un critère du challenge multi défis 2019, il me fallait lire et critiquer une dystopie. La première étape a consisté à aller chercher la définition ! Merci au passage à Gwen21 et à SabiSab28 qui indirectement m'amènent à enrichir mon vocabulaire. remarquez que je fais de la pub pour ce challenge chaque fois que l'occasion m'en est donnée, ce qui, en toute modestie risque d'augmenter encore votre travail pour l'année prochaine.
J'ai donc porté mon choix sur la servante écarlate après avoir lu de bonnes critiques sur mon site préféré.
Je reconnais les qualités narratives de l'ouvrage mais j'ai ressenti un certain malaise tout au long de la lecture et c'est, je pense le but recherché par Margaret Atwood.
Cet univers froid, totalitaire, déshumanisé m'a rappelé 1984 de George Orwell ou le film Seven Sisters sorti il y a un an ou deux et qui traite, lui aussi du contrôle des naissances. Pas question d'amour ou d'amitié ni de simple complicité dans les relations humaines. Non, cette dictature est aux mains de fanatiques sectaires et tout est sous contrôle. L'héroïne se souvient du monde d'avant mais la génération suivante ne saura plus de quoi l'on parle car la télévision est censurée et les livres ont été brûlés.
Oui, cette lecture est dérangeante, cela manque d'air, de spontanéité, de poésie et cela nous amène à reconsidérer la chance qui est la nôtre, malgré tout de vivre ici et maintenant, même si, on voit poindre ici ou là, des tentatives pour faire émerger un monde tel que celui décrit dans ce roman.
Profitons de la vie et luttons pour conserver toujours notre liberté, voilà pour moi le message de ce texte.
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J'avoue être très mitigée sur cette lecture et ne pas savoir trop quoi en penser. J'ai été déstabilisée par la lenteur et la passivité du récit. Je comprends bien qu'il s'agit pour l'auteur de faire ressentir au lecteur ce que subit Defred : l'ennuie, le manque d'activité, de stimulation intellectuelle… de ce point de vue c'est assez réussit. le problème c'est que je me suis vraiment beaucoup ennuyée mais surtout je n'ai pas réussi à ressentir la moindre empathie pour Defred. Son manque de combativité et sa résignation m'ont profondément agacé.
D'un autre côté et assez paradoxalement vu ce que je viens de dire, l'écriture de Margaret Atwwood m'a beaucoup plu c'est d'ailleurs ce qui m'a permis de tenir jusqu'à la dernière page. Mais justement la dernière page quelle déception ! Toutes ces questions qui restent en suspend je voulais savoir moi! Et bien oui j'avoue donc qu'il y a un certain suspens et que malgré l'ennuie j'étais intéressée par l'histoire et je voulais en savoir plus. Et bien non je suis punie, je reste avec toutes mes questions ce qui fatalement me met de mauvais poil.

Pourtant tous les éléments sont là mais ça reste tiède, fade. Pour moi ça manquait de rythme. Pourtant tout était sous-jacent, comme un volcan prêt à rentrer en éruption mais qui finalement se rendort. Et bien moi tout cela m'a frustrée. J'ai attendu désespérément le moment où le livre commençait, ou on entrait dans le vif du sujet. J'étais prête à en découdre avec cette société effrayante. Raté !

Donc comme cette lecture était mi figue mi raisin je n'ai pas d'autre choix que de lire un autre livre du même auteur. Mais attention, si elle me refait le même coup je la boude définitivement.
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♫ Imagine all the people, ♪ Living life in peace… ♪ (John Lennon – Imagine)

Et c'est là que l'aiguille a rayé définitivement le disque car dans cette dystopie, le Imagine de Lennon serait plus qu'un rêve, ce serait un péché.

Imaginez un monde où certaines femmes n'auraient pour unique fonction que celle de reproductrice (les servantes écarlates), un peu comme dans un élevage de chevaux où on mettrai les meilleures juments à la disposition d'étalons…

Mais ici, c'est nous, les femmes, qui occupons cette fonction dévolue en temps normal à des animaux d'élevage.

Attention, il est interdit de séduire l'homme ou de copuler en dehors des moments d'ovulation. L'épouse de votre commandant vous tiendra fermement pendant que monsieur vous la mettra dedans afin de vous ensemencer. le tout sans sentiments, sans jouissance aucune, sans bruit, sans se toucher… Pire que des bêtes !

Vos droits ? Vous n'en avez pas, vous n'en avez plus. Vous n'avez plus d'argent, plus de comptes en banque, l'interdiction d'exercer un métier, sauf si vous êtres une Martha, qui sont les bonnes à tout faire ou une Tante, qui sont les espèces de formatrices au centre et qui feront de vous de parfaite petites femmes formatées jusqu'au bout des ongles…

Prête à assurer les fonctions de reproductrices puisque les autres ne savent plus…

Dans l'hypothèse où vous seriez un rebut de femme, on vous enverra aux Colonies où vous crèverez à petit feu à force de barboter dans des déchets toxiques. Là bas, il y aura aussi les invertits, les traitres, les pervertis, les contestataires… tout ce qui n'est pas net pour la nouvelle société, ce qui ne rentre pas dans le moule.

La Religion est omniprésente, mais on a vachement interprété les Évangiles pour les faire coller à la dictature que l'on a instaurée. Ne faites pas un pas sur le côté où il vous en cuira. La corde vous attend… Haut et court vous serez pendu(e).

Fermez votre gueule, avancez les yeux baissé dans ce monde formaté à l'extrême et tâchez de produire des beaux bébés bien formés parce que, à cause de la pollution et de l'utilisation massive de produits chimiques (Bayer-Monsanto, si vous me lisez…), la fertilité est plus basse encore que celle qui régnerait dans un couvent de soeurs stériles déflorées par des moines grabataires castrés.

Le bandeau-titre annonce que ce livre a fait trembler l'Amérique de Trump, pourtant, Trumpette fait plus peur que ce roman, à mon avis.

Attention, je ne suis pas en train de dire qu'on ne frissonne pas en lisant l'histoire que nous raconte Defred, servante écarlate de son état (jument reproductrice), nous détaillant son quotidien et ce qui s'est passé avant, quand tout a changé et que personne n'a bougé.

Oui, le récit fait froid dans le dos parce qu'il n'est pas aussi SF qu'on voudrait le croire, il a même des relents contemporains quand on voit comment certains montent au créneau pour nous faire perdre nos maigres droits, à nous les femmes, au nom d'une religion qu'ils ne comprennent pas toujours ou qu'ils adaptent selon leur humeur ou selon leurs désidératas.

Le récit alterne les moments présents et les moments dans le passé, quand le changement à eu lieu et quand les gens étaient satisfaits de certaines décisions car elles leur agréaient et ne les concernaient pas directement.

Après vint le désenchantement pour certains et certaines tandis que d'autres proliféraient sur le terreau de la privation de libertés et se rengorgeaient d'avoir des postes importants.

Un roman qui décrit un monde qui fait froid dans le dos, où l'amour est banni, la bagatelle aussi, la jouissance de même, le café ainsi que l'alcool, les revues porno, le maquillage, les beaux habits, les enseignes lumineuses, le droit à la parole, à la liberté… et où l'on vit dans un univers aseptisé qui ne me donne qu'une seule envie : aller me pendre.

Un roman où il est difficile d'entrer en empathie avec les différents personnages et où la lecture se déroule avec des angoisses. J'ai essayé de prendre de la hauteur afin de ne pas trop flipper et le fait de ne m'être attachée à aucun personnage, hormis un peu Defred, a fait en sorte que je n'en suis pas ressortie trop traumatisée.

Une dystopie que je conseille, même si elle m'a fait moins mal aux tripes que « Fahrenheit 451″ dans lequel j'étais entrée violemment.

Lisez et surveillez bien qu'un jour, on ne recommence pas à brûler des livres ou à éliminer la culture… Et ce jour là, ne regardons pas à côté.

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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La servante écarlate est un roman choc, une dystopie qui fait réfléchir sur la place des femmes dans la société et sur ce qui pourrait arriver si certains fanatiques prenaient le pouvoir. Certaines réflexions sur l'absence de réaction de la population m'ont d'ailleurs fait penser à Matin brun de Franck Pavloff.
Le conte de la servante écarlate est raconté par Defred - on ne connaît pas son ancien nom - de façon extrêmement poignante, dans un long monologue où elle passe du présent au passé, de la réalité à l'imaginaire.
L'histoire est bien servie par le style de l'auteur, avec une écriture très particulière, simple et forte à la fois, et surtout très rythmée.
J'imagine que ce roman se prêtait de ce fait très bien à une adaptation à l'écran, même si je n'ai pas encore vu la série (je tenais à lire le livre avant).
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La Servante écarlate est à considérer comme un récit douteux, pas moins pourtant que les notes historiques qu'il a inspirées au Professeur James Darcy Piexoto dans le cadre du Douzième Colloque d'Etudes Giléadiennes en juin 2195. Pourquoi douteux ? Alors que la société giléadienne semblait avoir proscrit toute forme d'individualisme –pire : alors qu'elle semblait avoir aboli toute capacité réflexive-, comment un de ses membres, une femme de surcroît, aurait-elle pu écrire le récit de ses jours avec autant de distanciation critique ? Sur cet état de fait d'apparence paradoxal –une société totalitaire ne l'est pas vraiment si elle conserve encore le droit d'expression même le plus intime, ce qui n'était plus le cas par exemple dans 1984 d'Orwell-, le Professeur Piexoto s'interroge, et à travers lui Margaret Atwood prévient d'emblée les controverses que pourrait susciter son conte de la Servante écarlate.


Le titre de ce récit désigne une des castes sociales en vigueur dans la société giléadienne. Les Servantes écarlates sont des femmes fertiles, mises au service d'Epouses stériles afin de concevoir des enfants. Régulièrement, les Servantes écarlates se livrent à leur Commandant attitré –le mari des Epouses- et mènent à bien une relation sexuelle à visée exclusivement productive. Les Servantes se résument à leur matrice : aucun sentiment ne doit être suscité en elle ni à travers elles, c'est pourquoi elles vivent recluses, obéissent à des cérémonials stricts et sont privées de toute source d'émancipation sexuelle et individuelle. Parmi ces éléments, on trouve aussi bien des objets d'apparat tels que le maquillage, la garde-robe, les magazines féminins, que des objets à visée intellectuelle tels que les jeux de réflexion, les journaux ou les livres. L'individu doit s'effacer pour la bonne marche de la société giléadienne et surtout pour le renouvellement de sa population.


Margaret Atwood décrit cette société en prenant son temps, rebondissant régulièrement du récit à ses préquelles par l'intermédiaire des souvenirs de la Servante écarlate. Ici, contrairement à d'autres récits dystopiques tels que le meilleur des mondes ou 1984, la prise de pouvoir politique d'une partie de la population par rapport à une autre n'est pas le motif causal de son organisation mais bien plutôt la conséquence nécessaire d'une catastrophe écologique qui pourrait bien se produire demain. Baisse de la natalité, stérilité, malformations génétiques et hausse de la mortalité infantile : tel serait le programme des années à venir, piégés que nous sommes entre nos inhalations prolongées de perturbateurs endocriniens et nos expositions répétées aux irradiations. Dans ce contexte, les Servantes écarlates constituent le dernier espoir de renouvellement de la société. Capturées parmi le sérail des dernières femmes productives de la société pré-giléadienne, elles n'ont pas d'autre choix que de se reproduire au service des Epouses. le sacrifice semble vain car malgré des fécondations répétées, déshumanisées et désagréables, les grossesses sont rares et lorsqu'elles se produisent, elles aboutissent souvent à une fausse couche, à un mort-né ou à une chimère.


« Les chances sont d'une sur quatre, nous l'avons appris au Centre. L'atmosphère est devenue trop saturée, un jour, de produits chimiques, rayons, radiations ; l'eau grouillait de molécules toxiques, tout cela prend des années à se purifier, et entre-temps cela vous rampe dans le corps, assiège vos cellules graisseuses. Qui sait, votre chair elle-même peut être polluée, sale comme une plage huileuse, mort certaine pour les oiseaux du littoral et les bébés pas encore nés. Peut-être un vautour mourrait-il s'il vous mangeait ; peut-être êtes-vous lumineuse dans le noir, comme une horloge démodée. »


Peut-être parce que le sacrifice semble vain, les moyens de faire entorse au strict règlement se développent et laissent apercevoir leurs portes d'accès pour qui ouvre l'oeil et désire lui faire faux bond. Mais la méfiance règne toujours et l'individu qui veut se retrouver doit échapper aux membres de la caste de l' « Oeil » ainsi qu'aux autres Gardes, Servantes, Epouses ou Commandants trop orthodoxes.


Dans cette atmosphère étouffante, rongée par le spectre de la disparition de l'humanité, les sacrifices propitiatoires font figure d'aberration et traduisent la position paradoxale d'un système qui semble vouloir précipiter sa destruction. Toute ressemblance avec un système existant serait purement fortuite…et c'est peut-être pourquoi nous, lecteurs qui ne connaissons pas encore réellement cette société giléadienne, devons nous réjouir des dernières libertés qui nous échoient encore. Tout le récit de la Servante écarlate traîne à sa suite un diffus parfum de nostalgie qui s'attarde là où nous l'attendions le moins, qu'il s'agisse des magazines féminins et de leurs promesses d'éternité, du Scrabble et de ses fonctions sociales et culturelles improductives, ou encore des pissenlits et de toutes les légendes imaginaires qui leur sont associées. Là où Freud décelait en chaque comportement l'action inconsciente de la libido, Margaret Atwood exacerbe l'instinct sensuel qui motive nos activités, lui donnant une légitimité salvatrice à une époque qui l'aura définitivement banni.


Dans le genre du récit dystopique, Margaret Atwood rivalise d'inhumanité avec George Orwell ou Aldous Huxley tout en tenant un discours différent. Ici, ce n'est pas particulièrement par la surveillance ou par l'asservissement politique que ses personnages sont déshumanisés, mais par la privation de leur sensualité. Restent cependant des points communs qui sont l'abolition du concept d'individu, de sa capacité réflexive ainsi que de sa répartition en castes.


La Servante écarlate ne nous prive heureusement ni de sensualité ni de plaisir intellectuel. A l'ouverture du récit, cela semblait loin d'être gagné : les propos étaient souvent incompréhensibles car imprégnés du jargon giléadien, mais le texte s'éclaircit au fur et à mesure que la servante se révèle personnellement et se défait des concepts qui lui ont été inculqués, à la recherche d'un épanouissement marginal. Outre la passion révélée pour ce récit, Margaret Atwood fait encore mieux : elle révèle à nos consciences la passion que devrait nous inspirer une société futile, animée par des intérêts sensuels, sexuels et intellectuels –mais reste floue et donc effrayante quant à la limite décente d'intérêt que nous devons leur consacrer pour ne pas que la pulsion de vie ne se transforme en pulsion de mort et ne nous précipite dans une société giléadienne nécessitée par la catastrophe écologique des individualismes exacerbés.
Lien : http://colimasson.over-blog...
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Je me suis laissée envahir par ce roman, malgré quelques longueurs, qui dépeint un avenir terrible pour les femmes, toujours possible si l'on n'y prend pas garde, et peut-être même sous certains aspects déjà en marche... Mais finir comme ça en ne sachant plus quoi penser, c'est encore plus terrible ! Mince alors !!
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