Les équipes françaises d'Harlequin ont toujours la lourde tâche de concocter des recueils pour leurs collections en piochant dans celles d'outre-Atlantique. Ici, les deux romans, tous deux situés dans des ranchs et dont les héroïnes sont de jeunes veuves et mamans solo, n'appartenaient même pas à la même collection à l'origine : « Les contours de la vérité » (titre VO : « Wrangling the Rich Rancher ») est ainsi paru dans la collection Desire (au contenu ressemblant à celui de la gamme Azur (Harlequin Presents), mais en version « 100% USA »), « Idylle à Ranch Rivers » (titre VO : « Her Man on Three Rivers Ranch », ooooh bravo, ils ont presque gardé le titre intact !) figurait lui dans la collection « Special Edition », pour laquelle nous n'avons pas vraiment de correspondance. Voilà qui suffit à expliquer le côté très légèrement jet-set du premier et celui, plus ancré dans le quotidien, du second. Pour le reste, l'ambiance campagnarde est identique et les deux récits vont très bien ensemble.
En VO, « Les contours de la vérité » est le premier roman de la série « Sons of Country », dont « Un enfant pour Sophie » (« en VO : « Nashville Rebel ») est également paru chez nous au sein d'un volume double. Pourquoi n'avoir fait nulle mention de la série ici, mystère et boule de gomme... Tout comme le choix de ce titre français et le résumé à côté de la plaque : Libby n'est pas journaliste en quête de scoop, mais la biographe mandatée par le père de Matt pour recueillir sa contribution. Il n'y a donc de secret nulle part : Libby sait qui est Matt dès le début de l'histoire et révèle à celui-ci le motif de sa présence à la page 3. On pourrait croire que celui-ci, qui n'a pas digéré l'abandon de son géniteur, se méfierait de la charmante fouineuse... mais non. Ou du moins, pas pour cette raison : Libby lui rappelle beaucoup trop son ex. de son côté, la jeune femme se jure de rester professionnelle mais flirte allègrement avec lui environ deux minutes après s'être fait cette promesse. de la logique ? N'en cherchez pas dans ce début de roman, il n'y en a pas. Et il faut avouer que le rapprochement extrêmement rapide de ces deux-là sonne faux, peu crédible, mal amené. Bref, ça commence mal, avant que le développement de leur « amitié avec bénéfices » n'approfondisse réellement leur relation. Comme il n'y a aucun a-côté (pas même l'écriture du livre, qui ne sert que de prétexte), celle-ci se révèle bien plus réussie que ce que l'on pouvait craindre au premier abord, même si tout ça reste d'une part très rapide, et que d'autre part l'entêtement de Matt à se voiler la face finit par agacer. Néanmoins, on suit leurs échanges avec plaisir, et, bien que
Sheri Whitefeather ait fait mieux, le roman se lit tout même plutôt bien. (6/10)
Qui, mais qui s'occupe des résumés chez Harlequin France ? Quelqu'un qui ne lit pas les livres, en tout cas : dans « Idylle à Ranch Rivers », à AUCUN moment il n'est question que Kat travaille au ranch : elle a déjà un emploi dans un établissement scolaire ! Elle ne « revient » pas non plus dans sa ville natale : voilà déjà plusieurs années qu'elle est là, et c'était pour s'occuper de son vieux père alcoolique. Blake ne lui rend pas davantage visite : ils se télescopent dans la rue. Bref, l'histoire que l'on découvre est COMPLÈTEMENT différente de celle vendue par le résumé. D'accord, on a un peu l'habitude, mais à ce point, c'est carrément de l'art (abstrait).
Bon, et le livre, dans tout ça ? En tombant par hasard sur son vieux crush d'adolescence, Kat ne s'attendait pas du tout à l'intéresser. Seulement voilà : échaudée par la vie, pas question pour elle de se lancer à corps perdu dans une histoire qui a, à ses yeux, toutes les raisons d'échouer. Si
Stella Bagwell ne perd pas de temps et entre directement dans le vif du sujet, le rythme de son histoire se révèle en réalité très posé. Et surtout, aussi réaliste que crédible, avec des personnages qui prennent leur temps pour se connaître et construire lentement quelque chose. Si Kat est particulièrement sur ses gardes, son fils Nick, lui, avec tout l'enthousiasme de l'enfance, mettrait volontiers la charrue avant les boeufs ! Non seulement il s'entend bien avec Blake, mais le ranch de celui-ci l'intéresse au plus haut point. Un côté « famille », très présent donc, qui ne prend à aucun moment le pas sur la romance mais n'en est jamais très loin non plus, que ce soit à travers les moments que le trio (ou quatuor, selon que la jeune nièce de Blake les accompagne) passe ensemble ou via la tribu de Blake.
Enfin, si le tout manque un peu de décors, on voyage néanmoins un peu en Arizona à travers le ranch et sa gestion, évoquée par petites touches. On pourra toujours râler que le plot twist final est mal amené, mais les explications atténuent un peu le côté illogique de la chose sur le moment. Pas de quoi gâcher une excellente histoire. (8/10)