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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
En l'espace de deux ans, environ, vingt-huit enfants dont l'âge varie de 7 ou 16 ans, ont été assassinés. le seul point commun : ils sont tous noirs, issus de familles pauvres. L'enquête piétine, on évoque au passage la main du Ku Klux Klan, dans cette ville du Sud, dont les dirigeants sont noirs. On n'envisage pas d'emblée que le tueur puisse être noir, jusqu'à ce que le FBI mette en évidence ce qu'il a appelé « un faisceau d'indices » et curieusement un homme noir est arrêté.

Mauvais endroit au mauvais moment ? il aurait été trouvé sur les lieux d'un des crimes mais pourquoi ? Tout ceci est un peu capillotracté car on va le juger en fait sur deux meurtres, en sous entendant qu'il est coupable des autres aussi, c'est tellement plus simple.

James Baldwin, appelé à se rendre à Atlanta va essayer de décortiquer l'histoire, en mettant en parallèle des notions fortes : les relations entre Blancs et Noirs, la déségrégation qui pour lui aurait été la solution plutôt que l'intégration. Il met en relation la pauvreté, qui est toujours dans les mêmes quartiers, et la manière dont ces enfants sont souvent dans la rue, car ils y sont mieux qu'à la maison, et non pour le plaisir de traîner la nuit.

Il pose la question de la culpabilité : est-on coupable d'office si l'on est noir ? est-ce que Wayne Williams est vraiment le meurtrier ou était-il temps de mettre un terme à ce drame pour calmer le jeu ? il est le coupable idéal car c'est un jeune homme peu agréable, arrogant, qui avait tendance à être violent avec ses parents : le mauvais garçon, qu'on n'a aucun scrupule à condamner d'office. (Même si d'autres meurtres ont été commis pendant son incarcération) …

Comment les jurés ont-ils peu le désigner coupable et le condamner sans véritable preuve ?Certes, je le répète, c'est le climat engendré par ces meurtres qui l'a conduit au banc des accusés. D'un point de vue judiciaire, il est accusé de deux assassinats. Et pourtant, il est présumé coupable de vingt-huit meurtres, pour lesquels il est jugé sans être inculpé !

James Baldwin revient, avec brio, sur l'esclavagisme, la manière dont s'est déroulée la période après l'abolition de l'esclavage, le poids de l'homme blanc dans l'exploitation des pauvres, les effets de la colonisation, la manière dont les différents présidents américains ont été élus, et sur quels critères, et surtout la manière dont ils ont envisagé le racisme et la lutte éventuelle à mener pour en venir à bout, dans ce pays où la violence est omniprésente et où les marchands d'armes sont tout puissants.

Il aborde aussi l'Afrique du Sud et l'Apartheid, et il n'aura pas eu la chance de connaître, de son vivant, Madiba président…

Autre question soulevée : les soldats noirs ont un comportement héroïque pendant les guerres, mais ils ne seront pas mieux considérés pour autant, ceci se retrouve aussi dans les guerres plus récentes (Afghanistan, Irak…) ils ont le droit de mourir en héros, mais s'ils reviennent ils doivent faire à nouveau profil bas, situation que l'on peut retrouver dans les pays colonisateurs.

Il évoque aussi la notion de communauté qui ne doit pas aboutir à une exclusion ou encore le fait que certains voudraient être des blancs et se comportent comme eux. Il compare aussi la situation à Harlem à celle d'Atlanta, rivant son clou au passage à « autant en emporte le vent » de Margaret Mitchell bien trop complaisante à ses yeux.

Il y a longtemps que je voulais me plonger dans un texte de James Baldwin et je n'ai pas été déçue du voyage, sa démonstration est brillante, même si elle ne peut rien changer au cours des choses, l'affaire étant considérée comme résolue. le raisonnement de l'auteur est brillant, même si on n'est pas toujours totalement en accord avec lui. Afin de ne pas trop divulgâcher, j'ai choisi de limiter ma chronique aux éléments du discours de l'auteur qui m'intéressaient le plus, mais il évoque beaucoup d'autres thèmes tout aussi passionnants les uns que les autres.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Stock qui m'ont permis de découvrir ce livre qui est toujours terriblement d'actualité et n'a pas pris une ride trente-cinq après avoir été publié pour la première fois. C'est le genre de livre qu'il faut déguster en prenant son temps et dont je pourrais parler pendant des heures, alors un conseil : si ce n'est pas déjà fait, lisez-le !
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Ce que je remarque en premier lieu en ouvrant ce livre c'est que le titre, plutôt, racoleur n'est en rien celui donné par l'auteur :
"The evidence of things not seen"
Ce que l'on pourrait traduire par :
"L'évidence des choses non vues"
C'est plus évident que penser qu'il s'agit d'un roman policier, même si il y a des morts, un homme arrêté et un jugement.
Pour faire court : un homme est accusé de deux meurtres et comme 28 enfants ont été assassinés, tout simplement, la police et la justice essaie de coller la totalité à ce bonhomme. On fait d'une pierre deux coups et on diminue les frais
Ah, j'oubliais, l'accusé est noir, les morts aussi.
Atlanta c'est en Géorgie, le sud des Etats Unis d'Amérique, pays de coton, si on voit ce que je veux dire.
"Georgia on my mind" dont chantait un certain...
Bref, l'auteur, journaliste pour ce "fait divers", emploie ce récit sous forme d'essai pour attirer l'attention de ses lecteurs sur la condition des noirs à cette époque. C'est à dire en 1985.
D'aucuns diraient que rien n'a beaucoup changé depuis lors. Peut-être pas tout à fait mais pas loin.
Baldwin met cette suprématie blanche au dessus de ces pauvres qui existent dans ce pays depuis bien longtemps et il n'hésite pas à faire des indiens, des chicanos et des noirs un ensemble qui ne trouve pas sa place dans la vie de cette nation.
Qui dirige, qui gouverne, qui dicte et fait la loi, qui la fait respecter : des blancs, depuis toujours et même si depuis l'espérance aura pris le visage d'un certain président ce n'était pas le cas à l'époque de l'écriture.
La plaidoirie de l'auteur pour cette, ces, communauté(s) passe bien avant ces meurtres et ce procès qui ne sont qu'un prétexte, un de plus à la persécution subie de mille façons par la communauté noire. Puisque c'est de ça dont on parle.
De fait n'y a t-il pas 8 jurés blancs pour 4 noirs?
Comme disait Bob Dylan : vous pouvez sortir vos mouchoirs, il est temps de pleurer.
Il fallait draguer la rivière pour savoir s'il n'y avait pas d'autres morts, aussi on a retrouvé un cadavre d'homme noir inconnu, puis un autre et encore un autre et ainsi de suite. Alors on a arrêté de draguer la rivière...
En 1996 Atlanta a organisé les jeux olympiques. Les visiteurs recevaient un plan de ville...coupé à la limite de la ville blanche! La ville noire ayant été purement supprimée. Mais c'est Mohamed Ali qui a allumé la flamme olympique, alors...
Il faut lire ce livre!
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Quelle claque !
En refermant ce livre j'ai l'impression de tenir entre les mains un révolver brûlant duquel s'échappe une trainée de fumée.

James Baldwin est envoyé dans le sud des États-Unis, à Atlanta, pour rédiger un article journalistique sur une série de meurtres. Il va faire bien plus, puisqu'il va mener sa propre enquête et réaliser une étude sociologique du présumé meurtrier et des différents protagonistes de son procès. C'est ce travail qui servira de base à cet essai.

Dès les premières lignes le ton est donné, Baldwin monte sur le ring, déterminé à mettre KO l'adversaire. Il fait preuve d'une telle éloquence que je n'ai pu m'empêcher de lire la majeure partie du livre à voix haute. le discours est rude, violent, les arguments sont affûtés, percutants, et chaque coup porté fait mouche.

C'est qu'il a de quoi être remonté car les incohérences sont nombreuses :
- une affaire qui malgré son ampleur reste inconnue du public, jusqu'à ce que l'association des familles de victimes alerte les médias
- un accusé officiellement inculpé pour le meurtre de deux adultes, mais officieusement présumé coupable (et jugé) pour le meurtre de vingt-huit enfants dont la série de meurtres précède celle des deux adultes
- une "série" de meurtres dont, hormis l'origine ethnique des victimes, personne ne sait dire quelles en sont ses caractéristiques, alors même que les causes de décès des victimes sont "diverses et variées"
- un verdict, "condamné pour un nombre indéterminé de victimes", qui ne satisfait personne

Le thème central de cet essai est bien entendu la condition de l'homme Noir aux États-Unis, mais avec le talent qu'est le sien Baldwin va bien plus loin et parvient à généraliser son propos. L'oppression des non-blancs par les blancs étant selon lui au coeur de l'histoire récente de l'humanité.

Tout y passe, il évoque ainsi Martin Luther King, Malcolm X, Nixon, Kennedy, le Ku Klux Klan... le colonialisme européen, l'esclavagisme, les afrikaners, le nazisme, l'extermination des indiens par les pionniers américains...

En bref, du grand Baldwin, un essai sociologique incontournable qui reste malheureusement d'actualité dans ces "États dits Unis" où les mentalités n'ont jamais su se défaire des fantômes du passé. Et où l'homme Noir doit lutter en permanence pour que ses droits soient reconnues et son intégrité préservée.
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Comment se fait-il que ce livre ne soit pas plus connu en France ? Paru pour la première fois en 1985, il est aujourd'hui édité à nouveau par Stock. J'ai envie de vous dire : ne lisez pas mon avis, lisez le, lui !

Cet essaie parle de meurtres, à Atlanta, en Georgie, un état qui tint un rôle important dans la guerre de Sécession, côté sudiste. UN homme,noir, fut condamné pour deux meurtres, mais surtout, un homme noir qui fut implicitement accusé de la mort de vingt-huit enfants, sans que l'enquête soit suffisamment approfondie pour prouver qu'il était bien le coupable – voire même pour trouver LE coupable.
Point commun de tous ces morts ? Ils étaient tous noirs, ils étaient tous pauvres, et leur mort n'a pas suscité beaucoup d'intérêt. Leur mort n'a pas bouleversé l'économie locale, elle n'a pas entraîné une psychose, elle a eu loin des quartiers où vivent les Blancs.

"personne ne protège les pauvres, ils doivent se défendre eux-mêmes. Les pauvres n'existent pour les autres que comme une gêne, une menace, une occasion de faire du fric ou une oeuvre missionnaire ou parfois l'envie de faire une bonne action sincère. « les pauvres, vous les aurez toujours avec vous », disait le Christ. Soit, mais vous les voyez rarement et ne les écoutez jamais."

Ce n'est pas tant l'enquête qui est reconstituée, que ses errances, ses erreurs, les peurs qu'elle engendra, les idées reçues qu'elle fait ressurgir. le procès est inclus aussi, sans oublier le procès, implicite, fait à la famille de l'accusé – cet homme qui n'avait pas réussi, aux yeux de la société, à devenir pleinement un homme. Cette affaire est le point de départ d'une réflexion sur la condition des Noirs, aux Etats-Unis mais aussi dans le monde entier, mais aussi sur la pauvreté. A une époque (les années 80) où beaucoup pensaient que les droits des Noirs avaient nettement progressé, James Baldwin montre, démontre que ce n'est pas du tout aussi évident qu'on le pense – du point de vue des Blancs. Oui, ce livre contient de profondes réflexions sur le racisme, la culture, les droits que les Blancs octroient à tous les autres (ou pas), les droits que les Blancs s'octroient de se mêler des affaires des autres, d'aller rendre ce qu'ils estiment être la justice, ailleurs, dans n'importe quel autre pays tant que cela correspond à leurs intérêts économiques. Les USA se présentant comme sauveurs du monde, cela ne date pas d'aujourd'hui, et James Baldwin montre bien que cela continuerait : il ne s'était pas trompé.

En lisant cet essai, j'ai pensé aux discours de certains hommes politiques, discours fortement orientés – parce que l'Histoire est écrite, toujours, par les Blancs :

"L'Histoire est un hymne aux Blancs écrit par des Blancs. Nous autres, tous les autres, avons été « découverts » par les Blancs, qui détiennent le droit de nous laisser entrer ou non dans l'Histoire."

Un essai remarquable.
Lien : https://deslivresetsharon.wo..
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Parfois vous vous dites que peu importent les mots que vous emploierez vous ne pourrez jamais rendre justice à un ouvrage, votre avis ne pourra jamais retranscrire ce qui émane d'un tel texte.

Tout commence au début des années 80 à Atlanta, 28 cadavres d'enfants noirs et pauvres sont retrouvés en 22 mois... Tout se poursuit par une inculpation et un procès, celui de Wayne Williams, noir de 23 ans, accusé de deux homicides d'adultes.
Le lien entre ces 2 faits tient à la "magie" de la justice américaine...cet homme inculpé de 2 homicides a finalement été jugé légalement pour 30 meurtres...
Voilà le point de départ de cet essai, car ce procès est l'occasion pour James Baldwin de revenir sur les lieux pour mener sa propre enquête. Mais c'est surtout l'occasion pour lui de dresser le portrait d'une Amérique qui ne s'est toujours pas affranchie de son passé ségrégationniste. Baldwin signe un texte fort abordant de nombreux thèmes : le racisme évidemment, la religion, l'esclavagisme, le colonialisme, L Histoire, les communautarismes...

Ces propos sont fort, puissants et encore tellement d'actualité que j'avoue que ça m'effraie.

Je n'avais jamais entendu parler de ces meurtres, ni de Wayne Williams, qui est toujours incarcéré à ce jour, ni d'Alex Baldwin dont les textes mériteraient pourtant d'êtres enseignés.

Je remercie sincèrement les éditions Stock de republier cet essai et de m'avoir permis de découvrir cet auteur.

Et je ne peux que conclure mon humble avis en vous invitant à lire cet ouvrage, mais aussi cet auteur, pour ma part je vais m'y atteler.
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À partir du meurtre de deux enfants pour lequel Wayne Williams, un jeune Noir est coupable, James Baldwin extrapole avec rigueur les réactions ségrégatives de la ville d'Atlanta et de la Géorgie , état du dus des USA connu pour ses positions racistes.
D'abord, on essaie de coller 28 meurtres sur le dos de Williams puisqu'ils présentent des similitudes dans le modus operandi, on retrouve des fibres, mais là encore, tout est sujet à caution. James Baldwin montre comment on aimerait que Williams soit coupable des 28 meurtres et un tueur en série. Depuis le début, toujours selon Baldwin, le monde est fait par les Blancs et que la déségrégation n'est qu'une façon pour les Noirs d'intégrer ce monde de Blancs, de devenir Blanc.
L'histoire esclavagiste et ségrégationniste a laissé des traces ("Things not seen"). Parmi la communauté noire, les enfants sont souvent élevés pour devenir des Blancs et ceux qui se révoltent, souvent en empruntant les chemins de la délinquance, sont mis au ban de cette même communauté. James Baldwin aimerait perpétuer le "rêve" de Martin Luther King Jr mais reste pessimiste au regard de l'histoire. Pourtant, aux USA, les Noirs représentent une population équivalente aux Blancs mais ce sera toujours le triomphe du capitalisme sauvage et blanc, si tant est que "capitalisme blanc" ne soit pas un pléonasme.
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James Baldwin (1924 - 1987) a été toute sa vie un ardent militant de la lutte pour les droits civiques, un opposant acharné au racisme anti-noir, il a lutté également pour la cause homosexuelle. « Meurtres à Atlanta » (1985) est son dernier livre paru, sous le titre « The evidence of things not seen » (la preuve des choses non vues). Dans cet essai, James Baldwin nous parle de l'affaire des meurtres d'Atlanta. Entre 1979 et 1981, vingt-huit enfants noirs furent retrouvés morts étranglés dans la ville d'Atlanta, aux États-Unis.
Au-delà de l'enquête pour résoudre ces meurtres, c'est la place de l'homme noir dans la société américaine qui est questionnée. Trente-cinq ans ont passé et le mouvement “Black lives matter”, mouvement politique dans la communauté afro américaine qui milite contre le racisme qui sévit aujourd'hui encore contre les afro américain, poursuit ce combat antiraciste. La mort de George Floyd (2020), parmi d'autres, rend ce livre incroyablement actuel car le racisme, décrit par James Baldwin, perdure malheureusement aux États-Unis et ailleurs. La question de ce livre n'est pas tant de savoir si le criminel noir est coupable ou pas, mais il vise à questionner la place de l'homme noir au sein du peuple américain.
C'est un texte puissant, moderne, incisif, celui d'un homme révolté par les outrages subis par les hommes, femmes et enfants noirs pour leur couleur de peau. On ne peut qu'être touché par ce combat. La justice, le système capitaliste, les rapports humains sont questionnés. Ce livre, réédité aujourd'hui, 35 ans après, mérite d'être lu, au vue d'une réalité qui n'a que peu changé.
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Alors que la ville d'Atlanta est victime d'une vague de meurtres en série dans sa communauté afro-américaine, l'écrivain, poète, dramaturge et essayiste James Baldwin, s'interroge sur l'image et l'impact de sa communauté et de son existence dans le pays qui l'a vu naître.

La question de l'identité est un enjeu crucial aux États-unis car elle est synonyme d'appartenance, de fierté et d'amour à une terre et à un peuple. Mais qu'advient-il lorsque l'ensemble du système américain regarde ailleurs et tourne le dos à ses propres citoyens...

Un essai révélateur, important et essentiel, fluide et d'une plume incroyable, "Meurtres à Atlanta" se révèle être un enseignement pour tous et pour toutes les générations !!!
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