Au premier abord, la couverture de ce livre a plutôt agi sur moi comme un repoussoir ; pourquoi tout ce rose ? Il restait la quatrième de couverture qui m'effrayait un peu. En fait, j'ai pensé très fort « voilà encore un livre qui parle de filles en surpoids qui s'en plaignent en mangeant des choux à la crème… ». Je vais être honnête, je n'attache vraiment aucune importance au physique des gens, du moment qu'ils se sentent bien dans leur peau et que cela ne nuit pas à leur santé, mais s'il y a bien une chose que je ne supporte pas c'est les gens qui se plaignent en faisant tout pour aggraver leur cas, tout en se lamentant que leur problème ne puisse pas disparaître sans effort. Bref, vous l'aurez compris je partais avec un gros à priori. Heureusement, une de mes collègues de travail passait par là, et m'a expliqué combien ce livre est génial, puis une autre et encore une autre.
Il ne me restait plus qu'à le lire, ce que j'ai fait presque d'une traite. Eh oui, j'ai a-do-ré ! J'ai ri, mais ri, parce que ces jeunes filles sont tout ce que j'aime. Elles ne passent pas leur temps à se dandiner devant un miroir en pleurant, elles voient leurs défauts et elles en rient, comme les gens équilibrés. Et ça, ça fait un bien fou ! Mireille se gausse allègrement de tout et de tout le monde, en mode autodérision presque permanent, elle laisse les insultes des plus crétins glisser sur elles ou les utilise comme des boomerangs. C'est particulièrement jouissif. Et ce qui est magnifique, c'est qu'elle utilise cette force de caractère et de conviction pour soutenir ces deux « boudinettes », qui ont plus de mal à faire face aux insultes et aux jugements des autres.
Ce road-trip joue le rôle d'un vrai passage à l'âge adulte, d'une quête pour apprendre à se connaître et à s'accepter tel que l'on est, d'un voyage pour apprendre que l'amitié ou l'amour n'a rien à voir avec l'apparence. On ne choisit pas ses amis pour leur beauté ou alors ils n'ont d'amis que le nom.
Ces trois petites bombes sont accompagnées dans leur périple par Kader, le frère aîné blessé à la guerre d'Hakima. Sa présence est aussi l'occasion de parler de la guerre, de la politique et du racisme avec toujours autant d'irrévérence. Elle apporte au livre la part de profondeur qui lui aurait manqué, car Kader a survécu à une embuscade, mais pas ses camarades. C'est un poids lourd à porter, toute sa beauté et son intelligence n'y changent rien. Il doit faire avec le jugement des autres et celui qu'il s'impose. Une autre forme de rejet de la société. Peut-être parce que j'ai lu ce livre avec le regard d'un adulte, c'est mon personnage préféré de l'histoire, celui qui m'a le plus touchée, alors qu'il parle et prend si peu de place au fond.
Ce roman présente donc une lecture à plusieurs niveaux à la façon des animés de Miyazaki : une part pour l'enfant qui est en nous, une autre pour l'adulte que nous sommes devenus. Mais quelle que soit celle que vous visez, elle sera touchée, n'en doutez pas.
À lire sans modération.
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