Quentin Bell, l'auteur de cette remarquable biographie de
Virginia Woolf, était le fils de
Vanessa Bell, née Stephen, la soeur aînée de Virginia. Outre l'accès à des documents inédits et la mobilisation des sources familiales (courriers échangés entre Virginia et les membres de sa famille, les mémoires de Vanessa), sa connaissance intime, personnelle de l'écrivaine rend son travail précieux et passionnant.
Ce tome I s'intéresse aux années 1882-1912, de la naissance de Virginia à son mariage avec
Leonard Woolf. Cette période est marquée par des deuils familiaux successifs, véritables fractures dans l'existence de l'adolescente, puis de la jeune femme, jouant très certainement un rôle accélérateur dans son émancipation, mais forgeant également des traumatismes psychiques générateurs d'épisodes dépressifs graves.
L'humour de Bell surgit en contrepoint aux drames vécus par sa tante, humour dont elle n'était pas dépourvue, mais qui prenait régulièrement pour cible ses proches ou ses relations. Mais il serait injuste de dépeindre le caractère difficile de l'écrivaine, ses fragilités, ses angoisses face à la création, sans évoquer aussi sa curiosité passionnée pour la littérature, son goût pour le débat d'idées et la sincérité de ses élans dans l'amitié.
Une partie de l'ouvrage est consacrée à la naissance du groupe de Bloomsbury, véritable incubateur de la modernité après le long règne de la reine Victoria (1837-1901) et vecteur des aspirations de la jeune génération à un nouvel ordre social, esthétique, politique, philosophique.
Strictement historique de l'avis de son auteur, ancré dans les faits, ce premier tome n'en dresse pas moins une peinture très fine et vivante de la famille Stephen et de la jeune Virginia.