Comme d'habitude en ce qui me concerne, les livres sont des rencontres. Je note les titres et les autrices puis quand je croise leur chemin en bibliothèque j'en profite pour les inviter à ma table pour quelques jours.
Je m'étais dit qu'il ne fallait plus que je choisisse des textes concernant la seconde guerre mondiale car j'en ai déjà lu de nombreux et surtout parce qu'il existe tant et tant de sujets importants que je connais si mal. Mais tout cela c'était sans compter sans
la carte postale d'
Anne Berest, croisée sur le challenge plumes féminines d'Allantvers.
Par le biais d'une carte postale reçue chez sa maman il y a déjà de nombreuses années, l'autrice va tenter de démêler l'écheveau des souvenirs, des faits afin de reconstruire un pan de l'histoire de sa famille, cette histoire dont elle n'était même pas consciente d'en faire partie, tant sa grand-mère, seule survivante de la shoah est toujours restée discrète voire mutique sur cette partie douloureuse de sa vie.
Il s'agit d'un texte agréable à lire, si on peut choisir cet adjectif pour parler d'un texte relatant la Shoah. le fait qu'elle mêle enquête, témoignage, réflexions personnelles sur sa judéité rend ce roman différent de ce que l'on peut lire habituellement, et nous donne vraiment envie de tourner les pages afin d'en savoir plus. On la suit dans ses réflexions, dans ses démarches pour retrouver des documents, des témoins.
Il s'agit d'une famille banale, comme celles que l'on a déjà rencontrées de nombreuses fois dans les films ou dans les livres. le père n'arrive pas à imaginer ce qui va arriver, on lui propose plusieurs fois de partir vers les USA ou d'aller en Israël chez ses parents, mais il ne voit pas pourquoi il leur arriverait quelque chose, n'est-il pas ingénieur ayant un travail, à la tête d'une petite entreprise, intégré en France?
La famille n'a pas vu arriver la guerre et ses horreurs, elle a toujours imaginé que cela ne pouvait pas se passer comme ça … et sincèrement, lire ce texte cette semaine, dans le contexte de la guerre en Ukraine m'a fait énormément réfléchir sur la situation de ces personnes qui vivent là, qui hésitent à fuir, pour aller où, dans quelles conditions? Certains partent, plus à l'Ouest, et ne comprennent pas que les bombes tombent là aussi … C'est tellement "simple" d'analyser avec des années de recul ou dans son salon devant la télévision et le flot d'informations dont on nous abreuve. Mais quand on le vit au quotidien, quand on est pris dans la propagande, quand on est patriote même sans être extrémiste, comment imaginer qu'un gouvernement, qu'un président puisse décider d'aller tuer vos frères?
Une lecture divertissante tout en étant terriblement inspirante, je ne regrette pas du tout d'avoir finalement à nouveau succombé à un texte évoquant la Shoah.