Cette année, on fêtera en septembre, les dix ans de la mort de
Françoise Sagan. Mais, il y a aussi les soixante ans de la publication de
Bonjour tristesse, le premier roman de
Sagan et celui qui l'a révélée. A cette occasion,
Denis Westhoff, le fils qu'elle a eu avec Robert Westhoff, a demandé à
Anne Berest d'écrire un livre sur sa mère : "je voudrais qu'on se souvienne ce que cela a représenté, dans la société de 1954, la sortie de
Bonjour tristesse."
Avec ce roman,
Anne Berest nous livre sa vision de la jeune
Sagan avant qu'elle ne devienne célèbre et l'histoire intéressante du livre qui a changé sa vie, qui a fait d'elle le "charmant petit monstre" bien connu et qui a défrayé la chronique en 1954.
Anne Berest a écrit un livre particulier, difficile à classer dans une seule catégorie. On a à la fois un journal, une biographie, un roman mêlant fiction et autofiction, parsemé de photographies de
Françoise Sagan. Elle a écrit à la fois le "journal de l'année 1954 qui raconterait la parution de
Bonjour tristesse" mais aussi son journal au fil de l'écriture de ce roman :
"6 janvier
Ce livre qui prend forme et que je dois écrire dans la hâte se dessine peu à peu.
Il ne peut être ni une biographie, ni un journal, ni un roman. Disons que c'est une histoire.
J'y raconterais toutes les étapes de la vie d'un écrivain naissant : l'excitation, la peur, l'attente.
Ce serait un livre sur le cheminement d'un autre, depuis l'envoi du manuscrit jusqu'à la consécration d'un prix littéraire."
Alors elle imagine
Françoise Sagan, quand elle était encore Françoise Quoirez, 19 ans (et donc pas encore majeure en 1954), vivant chez ses parents bourgeois Marie et Pierre, passant le temps à Paris avec son amie Florence
Malraux et son frère Jacques. Elle a écrit un livre pendant l'été 1953 et elle envoie à plusieurs maisons d'édition et c'est finalement René Julliard qui publiera
Bonjour tristesse, qui obtiendra un succès immédiat et le prestigieux prix des Critiques.
Anne Berest s'est beaucoup documentée sur
Sagan : elle a lu ses biographies, ses entretiens et ses mémoires, mais elle a aussi rencontré Florence
Malraux qui a su lui apporter des éléments sur la vie de
Sagan a cette époque. Cette époque, c'est avant qu'elle devienne la "légende
Sagan", que l'on connait tous, faite de vitesse, alcool, vie mondaine et scandales.
Anne Berest a voulu imaginer ce côté-là peut-être moins connu de l'écrivain et lui donner une autre image, plus originale. Nous entrons dans l'intimité de la jeune Françoise, la "petite kiki" si choyée par sa famille, et qui paraît déjà différente des jeunes filles de son époque : déjà en 1954, "elle n'avait peur de rien, ni de personne".
J'ai apprécié l'espèce de relation amicale qu'
Anne Berest tisse avec
Sagan, y puisant du courage pour traverser une étape difficile dans sa vie. Elle "se revêt de la vie de Françoise pour oublier la sienne". Pourquoi pas ? J'ai bien aimé l'idée. Mais, ces éléments autobiographiques me laissent quand même un avis mitigé :
Anne Berest dévoile un peu de sa vie par-ci, par-là mais il y a trop peu de liens avec
Sagan pour que cela devienne pertinent. En outre, on s'attend quand même à un roman sur
Sagan et
Bonjour tristesse, mais heureusement
Anne Berest ne l'a pas oublié.
Enfin, puisque ce livre est aussi l'histoire de la publication d'un livre, il fallait quelqu'un qui connaisse bien le monde de l'édition.
Anne Berest nous apporte son expérience d'écrivain, mais aussi de lectrice d'une maison d'édition : "Je connais donc la vie des manuscrits, denrée étrange, répulsive, nécessaire, excitante ; objet de tous les mépris et de toutes les attentions." J'ai beaucoup aimé la scène très drôle qu'imagine
Anne Berest et dans laquelle René Julliard découvre le manuscrit de
Bonjour tristesse, incapable de croire qu'une fille mineure pouvait écrire un tel roman.
Au final, le roman d'
Anne Berest m'a beaucoup plu, par la qualité de son écriture et parce qu'elle a réussi à recréer le personnage de
Sagan jeune fille telle que je me l'imagine.
Livre lu grâce à Masse Critique de Babelio et aux éditions Stock. Merci beaucoup !
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