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Lorsque je rentre dans l'univers des peintres, je m'aperçois que j'ai toujours du mal à le quitter. Il se dégage toujours une atmosphère riche, foisonnante d'idées, de culture mais aussi un grand goût de liberté. Loin d'être un monde cependant serein, car il faut se battre pour faire sa place, pour être reconnu, ici c'est encore plus le cas car Berthe Morisot est une femme et au 19e siècle les peintres femmes sont très rares, c'est un monde masculin.
Avec Berthe Morisot, Manet, Monet, Degas, Renoir, .. on entre dans l'impressionnisme et c'est un véritable régal que de découvrir leurs tableaux respectifs et les influences des uns sur les autres. Leurs relations mais aussi le caractère de chaque peintre nous est dévoilé, ce qui satisfait ma curiosité mais aussi qui me permet de mieux les identifier et, je l'espère, de mieux retenir la genèse de leursoeuvres.
Plaisir est vraiment le mot qui caractérise ma lecture de "Berthe Morisot". Au-delà des mots lus, j'ai eu également plaisir à regarder sans cesse sur internet les nombreux tableaux décrits ou évoqués dans cette biographie.
Une fois de plus un grand merci à toi visages pour ce beau cadeau.
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Une belle femme en noir qui croise votre regard et le retient, dont vous avez envie de découvrir ce qu'il cache derrière cette douceur apparente, dont Dominique Bona dit «Il y a du feu dans ces pupilles, mais un feu maîtrisé, un feu qui brûle en dedans et communique au-dehors, malgré une grande réserve, beaucoup d'ardeur, beaucoup d'intensité.»
Cette femme c'est Berthe Morisot peinte par Manet dont elle aura été le modèle préféré, une femme aux yeux en réalité verts qu'il a voulu noirs pour ce tableau à propos duquel Paul Valéry écrira à l'occasion de la rétrospective à l'Orangerie en 1932 : "Je ne mets rien, dans l'oeuvre de Manet, au-dessus d'un certain portrait de Berthe Morisot, daté de 1872".

Cette biographie de Dominique Bona, née de la contemplation de ce tableau qui donne envie d'en savoir plus, est passionnante parce qu'elle nous permet de découvrir Berthe Morisot, belle femme secrète dont elle pénètre délicatement le caractère intime, mais aussi toute la vie mouvementée, tant sur le plan artistique que politique et social, qu'elle traverse en demeurant fidèle à elle-même, de cette deuxième moitié du XIXème siècle avec le second empire, la guerre de 1870, la Commune de Paris et les débuts de la IIIe République.
p 184 «Sans hausser le ton elle suit sa voie qui n'est ni classique ni conventionnelle, mais cherchant depuis toujours à être elle-même, elle se reconnaîtra dans ce groupe d'Indépendants qui, comme elle, suivent la voie de leur différence. Elle ne se veut pas seulement solidaire de ces peintres, qui ne vendent pas (ou mal) leurs toiles et sur lesquels la presse s'acharne, elle est l'une d'eux.
(...) Elle ne cède ni aux pressions ni aux arguments. Elle maintient le cap. Et elle se passe d'encouragements. Ce qui l'intéresse, c'est la vérité --- non pas une vérité objective, mais celle que l'on doit à soi-même. Elle y sera fidèle toute sa vie. Toute sa vie, droite et sereine.»

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On peut légitimement se demander pourquoi écrire une nouvelle biographie quand sept existent déjà sur le personnage choisi. Il faut être à mon sens persuadé d'apporter quelque chose de nouveau à la connaissance du sujet en question. Si ce n'est un fait, au moins un aspect resté inexploré de la personnalité. Quelque chose que la sensibilité de l'auteur mettra à jour. Dominique Bona n'avait-elle pas trouvé dans les précédentes biographies de Berthe Morisot l'éclaircissement du mystère que le regard de celle-ci oppose à ses contemplateurs. Car c'est à n'en pas douter ce regard à la fois insondable et mélancolique qui a intrigué Dominique Bona. Regard profond, désarmant, qu'Edouard Manet a si bien reproduit chaque fois que Berthe Morisot lui a servi de modèle.

Les artistes ont tous leur part d'ombre. du fond de laquelle ils vont puiser cette limpidité que fait jaillir leur inspiration. le talent consistant à abreuver les autres à cette source confidentielle. Berthe Morisot, artiste secrète s'il en est, n'exprimait jamais mieux ses intentions que dans sa peinture. Surement pas dans le bavardage, défaut bien féminin dont elle a été préservée selon Dominique Bona. Son art dévoilait à son entourage ce qu'en femme introvertie son coeur n'exprimait qu'avec circonspection.

Elle avait en son temps le double handicap d'être une artiste avant-gardiste dans un courant pictural, l'impressionnisme, qu'il était tout autant, et d'être une femme. Au XIXème siècle la femme était vouée à la frivolité et n'existait que lorsqu'elles devenaient mère de ses enfants. Berthe Morisot n'a pas dévié du chemin qu'elle s'était tracé. Elle a voulu être femme pour elle-même, et ne séduire que par son art. Exprimer ainsi ce que sa nature profonde ne savait dire qu'au bout de ses pinceaux. Femme et artiste au XIXème siècle, deux raisons de disparaître qui lui ont donné deux raisons d'exister.

Le mot mystérieux est celui qui revient le plus souvent dans les pages de Dominique Bona à l'écriture très agréable. Berthe Morisot augmentait le mystère du féminin d'un autre, celui de l'observatrice taciturne du monde qui l'avait vu naître et avec lequel elle ne communiquait bien qu'avec son art. Les confidents en paroles et en écrits étaient rares à cette femme dont le détachement aux choses du monde pouvait paraître froideur : sa soeur Edma, le poète Mallarmé, sa fille Julie. La femme inspirée par une muse qu'elle partageait sans doute avec celui qui l'a le mieux figée sur la toile, Edouard Manet, n'aura de cesse de vouloir s'en démarquer, se singulariser, mettant en oeuvre une « peinture tantôt aérienne, tantôt aquatique, qui ne tient à la terre que par un fil. » le réalisme a vécu, Berthe Morisot veut peindre le mouvement, donne du flou au trait et ouvre la porte à l'abstrait.

C'est avec une grande acuité et une forme de communion que Dominique Bona scrute ce regard et tente de découvrir qui était la femme dissimulée derrière l'artiste ô combien prolifique. Elle avait fait métier de sa passion. Dans la chaleur énigmatique de ce regard merveilleusement restituée par Edouard Manet, elle cherche les reflets dorés qui dévoileront le secret de la femme en noir, sous-titre de son ouvrage, au regard tout aussi noir tourné vers son intérieur, dans une pudeur ténébreuse et fière. Superbe biographie d'une artiste dont Manet vantera la « beauté du diable », énigmatique sans doute parce que de sa personne émanait tous les antagonismes, chaleur du regard-froideur au contact, incommodant à qui aurait voulu lire à livre ouvert dans un visage fermé à la lecture des émotions.

Cette biographie de Dominique Bona n'en est pas une de plus. Elle en est une autre. Une approche différente d'un personnage par sa sensibilité et non pas par la chronologie des événements de sa vie. Une femme cherche à en comprendre une autre dans son époque, son environnement affectif, son obsession de peindre. Un travail de documentation fouillé autant que le regard est sondé pour décoder un personnage plus cérébral que sensuel. Beau document qui établit un rapport entre femmes, une autrice et son sujet, artiste à qui sans doute le bonheur a toujours échappé dans le douloureux accomplissement de la femme-artiste.
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Mon ami, Henri Fantin-Latour, un des copistes du Louvre, me présenta Edouard Manet un jour de l'hiver 1868 alors que j'étais occupée à peindre dans la Galerie Médicis au Louvre les formes sensuelles des robustes flamandes figurant au premier plan du « Débarquement de Marie Médicis à Marseille » de Rubens. J'avais déjà 27 ans et la peinture était ma vie depuis une petite dizaine d'années. Je peignais des paysages sous les conseils du maître Camille Corot. Mon admission pour la première fois au Salon officiel de1864 avec deux paysages des bords de l'Oise fut un grand jour pour moi.

Troublée par le charme qui se dégageait du dandy Edouard Manet j'avais écouté révérencieusement ses quelques conseils distraits de maître à élève. Je n'arrivais pas à croire que j'avais devant moi le peintre qui révolutionnait régulièrement le Salon depuis ses scandaleux « Déjeuner sur l'herbe » et « Olympia ». « Il faudra que l'on se revoie mademoiselle » m'avait-il dit avant de repartir d'un pas rapide. Edouard Manet n'avait pas été sans remarquer le charme de la jeune femme, son regard sombre et son teint pâle qui s'accorderait si bien avec sa couleur préférée : le noir.

Rapidement, Edouard me demanda de poser pour lui. L'année suivante, en 1869, il m'installa au premier plan du « Balcon » engoncée dans une robe en mousseline blanche, le regard perdu dans une rêverie intérieure. J'allais devenir son modèle préféré. Il m'appelait « la beauté du diable » et me peignait constamment, trouvant toujours de nouveaux angles pour me croquer : allongée sur un canapé, en tenue de soirée noire, le visage caché par un éventail ou une voilette… Mon tableau préféré, et le plus beau qu'il ait fait de moi « Portrait de Berthe Morisot au bouquet de violettes », était un chef-d'oeuvre à mes yeux : dans un contre-jour, quelques mèches de cheveux fous sous un chapeau noir, une expression lointaine se découpant entre ombre et lumière. Un bouquet de violette accroché à mon corsage se perdait dans le noir de la robe. Les noirs de Manet… Des noirs puissants comme ceux de Vélasquez et Goya…
Je prenais du plaisir dans notre intimité amicale avec Edouard qui m'inspirait une grande affection. Je l'admirais. J'aimais mes longues séances de pose en tête à tête avec lui et les odeurs de peinture de son atelier se mêlant aux parfums d'autres femmes venant poser pour ce grand séducteur.

Le vrai début de ma carrière commença l'année 1874 où Edouard me peignit pour la dernière fois avec un éventail et une alliance au doigt. J'étais devenue sa belle-soeur par mon mariage avec son frère Eugène Manet. Au printemps j'avais participé à la première exposition du groupe des futurs impressionnistes chez Nadar à Paris. J'étais la seule femme et tous ces hommes m'intimidaient. Ils me respectaient comme peintre car nous parlions le même langage. Ils étaient l'avenir de la peinture : Monet, Pissarro, Sisley, Degas, Renoir, Cézanne, Guillaumin.
Une charmante toile de Claude Monet avec un gros soleil rouge s'infiltrant au milieu des brumes et se reflétant dans l'eau fut appelée par Monet « Impression, soleil levant ». Un critique se moqua et titra « L'exposition des impressionnistes ». Nous étions catalogués : « impressionnistes ». Mon « Berceau » fut remarqué.
Malgré mon indépendance, je serai de toutes les expositions du groupe des impressionnistes jusqu'à la dernière en 1886. Ma palette s'éclaircissait, mes toiles présentaient une impression d'inachevé. Je réalisais l'oeuvre nouvelle et singulière que j'avais toujours souhaité obtenir.

Berthe Morisot était une passionnée et son art lui interdisait toute facilité. Dès le début des années 1880, elle recevra les éloges des critiques et amateurs influents qui reconnaitront son originalité : « son pinceau effleure la toile de traits vifs, spontanés ». « Elle est l'impressionnisme par excellence … disaient certains. Son ami Stéphane Mallarmé lui fit ce beau compliment : « C'est peut-être la plus délicate des peintres impressionnistes ».
Installés au milieu de ses amis peintres, elle apportait une touche de charme, de distinction qui faisait son originalité. Dans son « Salon » de 1877, la vision d'Emile Zola était la bonne : « Ils peignent le plein air, révolution dont les conséquences seront immenses. Ils ont des colorations blondes, une harmonie de tons extraordinaires, une originalité d'aspect très grand. D'ailleurs, ils ont chacun un tempérament très différent et très accentué. »
Jusqu'à son décès en 1895, à seulement 54 ans, la vie de Berthe s'écoulera lentement, heureuse, entre ses trois amours : la peinture, son mari Eugène Manet et la petite Julie, sa fille, qu'elle ne cessait de peindre.

J'ai lu l'excellent livre de l'académicienne Dominique Bona comme un roman. Celui-ci m'a inspiré cette présentation sur le ton de la fiction.
Le secret de la femme en noir Berthe Morisot, celui de cette femme peintre d'un immense talent, ne serait-il pas la modeste ambition de sa vie d'artiste : « Fixer quelque chose de ce qui passe ».
Il s'agit de la meilleure des biographies sur Berthe Morisot qui recevra en 2000 le Goncourt de la biographie.

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Berthe Morisot est née le 14 janvier 1841 dans une famille bourgeoise établie dans le Cher. Son père est préfet de ce même département et occupe tour à tour des postes importants dans l'administration française. Il est, entre autres, un descendant du célèbre peintre Fragonard. Elle est la cadette de trois filles, Yves l'ainée née en 1838, Edma nait quant à elle en 1839. Les filles Morisot sont très tôt initiées à la musique et prennent des cours de piano chez un grand professeur : Stamaty fils. C'est là que Berthe éprouve sa première émotion d'artiste peintre en tombant sur un dessin de Ingres qui la fascine bien plus que les notes de musique.
Sa mère va lui permettre ainsi qu'à sa soeur Edma de prendre des cours de dessin en privé d'abord avec Chocarne puis avec Guichard qui reconnait de vrais talents d'artistes dans le travail des deux soeurs. L'entrée aux Beaux-Arts est alors encore interdite aux femmes et ce jusqu'en 1897. L'étape suivante permettant aux filles de sortir de leur huit clos est le musée du Louvre où il est permis aux jeunes artistes de s'adonner à la reproduction d'oeuvres exposées, au copiage. C'est là que Berthe et sa soeur vont rencontrer des peintres qui s'exercent tout comme elles à la copie de grandes oeuvres. Néanmoins, une parole de Gustave Courbet reste ancrée en Berthe, cette jeune fille assoiffée de liberté et de créativité : « Fais ce que tu vois, ce que tu sens, ce que tu voudras ». Les deux soeurs continuent de peindre ensemble, comment ne pas alors devenir rivales ou chercher à se comparer?
Au salon exposition de 1865, les toiles exposées sont rejetées pour la plupart. Manet est moqué, on rit de ses toiles telles que « Olympia » ou « le déjeuner sur l'herbe ».
En 1868, Berthe expose et les impressionnistes sont davantage pris au sérieux. En hiver de cette année, Berthe fait la connaissance d'Édouard Manet. Celui-ci vit alors chez sa mère avec son épouse hollandaise : Suzanne et son beau-fils Léon 16 ans. Ce dernier fera plus tard fortune dans le domaine bancaire.
Edma, la soeur de Berthe se marie en 1870 et laisse sa soeur seule à peindre dans leur atelier. Elle devient de plus en plus proche de Manet. La peinture « le balcon » place Berthe au centre de l'oeuvre. Elle sera néanmoins rivalisée par d'autres femmes, notamment Eva Gonzales en 1869, peintre elle aussi et bien d'autres encore.Elle continue de peindre et d'exposer, ses toiles se vendent.
En 1874, elle épouse Eugène Manet, le frère d'Édouard et ils auront ensemble une fille Julie en 1878. Sa peinture évolue, elle excelle et se plait à peindre l'aquarelle. Elle participe à plusieurs expositions. le couple Manet côtoie les artistes de leur temps tels que Renoir, Monet, Degas, Mallarmé. Berthe peint son entourage, sa soeur, son époux et sa fille. Les coups de pinceau sont maitrisés, le rendu donne l'impression d'inachevé, d'esquisse ce qui rend les tableaux de Berthe Morisot uniques.
Une exposition temporaire qui vallait le détour a été organisée au musée d'Orsay l'an dernier. Il n'a pas été aisé de rassembler les oeuvres de Berthe Morisot car elles sont, pour une grande partie, possédées par des particuliers.
Berthe décède en 1895 et laisse derrière elle toute une vie de peinture, d'art du ressenti, de l'expression de la mélancolie sur le visage des femmes de son époque.
Une grande artiste qui a marqué son temps, une femme parmi les hommes qui a su tracer son chemin par sa féminité et sa sensibilité.
Dominique Bona décrit parfaitement ce parcours, un livre riche en anecdotes, en détails précis, un travail érudit.
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Une biographie de Berthe Morisot bien fouillée et descriptive de ses oeuvres et de son époque.

Une passion impressionniste, une époque chargée de rencontres d'artistes. Des témoignages, des lettres, des critiques, des ressentis, des pulsions, de l'amour non consenti.
On débute dans sa jeunesse, avec sa soeur Edma. Elles font toutes deux de la peinture sous la tutelle de Camille Corot et Berthe se détache déjà par un style bien appuyé. Elle sera repérée par ses professeurs. La famille Morisot possède une grande demeure sur Passy et côtoie de nombreux artistes : peintres, musiciens et écrivains. Elle est l'arrière petite Nièce du peintre Fragonard.
C'est la rencontre d'Edouard Manet, peintre reconnu, qui en premier lieu fera d'elle, sa muse et pose de longues heures pour lui. Il est marié, mais sa réputation volage déstabilise les pensées de Berthe. Il reste le peintre vulgaire, impudique et provocateur par deux toiles reconnues à ce jour (Déjeuner sur l'herbe ou le bain et l'Olympia, commande de son ami Baudelaire). Elles furent méprisées par le style, par les couleurs et leurs sujets incompréhensibles de l'époque. Zola fut un de ces pairs à croire en lui. Lors d'une soirée mondaine chez les Morisot, Berthe fera la connaissance du jeune frère d'Edouard, Eugène. Lui- même peint également, mais restera dans l'ombre de son frère. Ils sont amis avec Degas. Un autre peintre reconnu fut un des leurs, Henri Fantin-Latour qui fera un magnifique portrait d'Edouard Manet.
Les balades sur les bords de Seine rappellent à Berthe la passion commune qu'ils ont tous les deux. La même sensibilité face aux oeuvres, et c'est à ce même moment qu'elle sera attirée par Édouard.
Pendant les expositions, ses toiles sont souvent refusées, ce qui de son côté va donner à Berthe un vent de liberté. Elle ébauche, tâche, s'exprime différemment des autres peintres et provoque sa famille, surtout sa mère qui ne prend pas bon usage de ce métier d'artiste peintre pour une femme. Première exposition avec « Souvenirs sur les bords de l'Oise ». Des peintures de Lorient en Bretagne. Mais cela doit rester un hobby, sans un atelier. Il faut la marier. Avoir un beau foyer, un homme à choyer et faire des enfants et surtout, ne pas traîner avec cette bande de peintres refusés des salons.
Elle se marie au frère Manet, Eugène. Arrive la naissance de Julie. Tous son art se focalise sur sa famille.
Rebelle, elle sera la Première femme à se regrouper pour de longues années avec Renoir, Degas, Monet, Sisley, Pissarro … les artistes associés anonymes.
1870, la guerre est très présente, Franco Prussienne et la chute de Napoléon III. Beaucoup de ses amis peintres sont peinés par la barbarie de celle-ci, fuit Paris, ils partent vers la Normandie, la Bretagne ou le midi. Berthe reste auprès de ses parents à Paris. Des moments de vaches maigres… elle part avec sa mère à Saint-Germain-en-Laye. 1872, elle est reconnue et une vingtaine de ces peintures sont achetées par divers mécènes de l'époque. Elle sera aimée par Puvis de chavannes, peintre symboliste. Après la mort de son père, elle retrouve son groupe d'amis, commence la belle époque et le charme de ce nouveau mouvement, les impressionnistes.

Un livre éprouvant, beaucoup de personnages perturbent la lecture, la fluidité et le déroulement des vies de chacun.
Un style un peu froid pour moi, un brin de romance aurait apporté de la légèreté à cette histoire. Mais il en ressort avec une grande évidence, la force, le courage que Berthe a dû démontrer à cette époque. Une femme peintre.

J'ai hâte de retrouver cette ambiance dès le 18 octobre pour l'exposition « Berthe Morisot et l'art du XVIII ème siècle. Au musée Marmotan Monet.
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Découvrir la rétrospective des oeuvres de Berthe Morisot au musée Marmottan m'a furieusement donné envie d'en apprendre plus sur cette femme dont l'art illumine l'école des Impressionnistes par sa douceur, son élégance, la spontanéité de son trait, sa lumière. Une vie qui aurait pu aussi être un roman, aussi courte que dense, toujours tendue vers la perfection, sans aucune complaisance devant son art, pourtant si éclatant aujourd'hui.
Cependant, en cette époque « collet-monté » du Second Empire, devenir peintre professionnel n'est pas évident pour une jeune fille. Berthe doit à sa mère d'avoir été encouragée dans cette voie. Avec ses deux soeurs, Yves et Edma. Elle recevra une solide formation sans pouvoir entrer à l'Ecole des Beaux-Arts, réservée aux garçons. Mais elle copiera les grands Maîtres au Louvre. Inséparable de sa soeur aînée Edma, elle aussi peintre talentueuse, Berthe Morisot est une mince jeune fille au regard sombre, à la chevelure rebelle, mystérieuse, farouche, un peu brusque. Elle va pourtant s'intégrer pleinement à ce groupe des peintres « Refusés » par le Salon académique et fréquenter Beaudelaire, Cezanne, Degas, Renoir, Fantin-Latour, Whistler, Thiers, Nadar, Puvis de Chavannes, Mallarmé, Monet, Mary Cassat, et surtout Edouard Manet. Surtout lui, qui refuse l'étiquette « impressionniste », qui veut qu'on le reconnaisse au point de payer de ses deniers une exposition où ses oeuvres font scandale comme le déjeuner sur l'herbe et Olympia. Berthe le tient en grande admiration, et pose pour lui, le regarde peindre. Il fera d'elle quatorze portraits, dont l'extraordinaire Berthe Morisot au bouquet de violettes et le Balcon. Mais, pendant les séances de pause, la mère de Berthe sert toujours de chaperon…
Berthe Morisot appartient à la grande bourgeoisie. C'est une jeune fille comme il faut, et elle est animée d'une ardeur au travail extraordinaire. Manger ne l'intéresse pas, se marier non plus. Elle souffre d'anorexie, il lui arrive de tomber d'inanition devant son chevalet, elle n'est jamais satisfaite de son travail. Sa mère désespère lui trouver un époux convenable. Elle a éconduit Pierre Puvis de Chavannes, mais elle acceptera finalement d'épouser, à 33 ans, Eugène, le frère cadet d'Edouard Manet. Mystérieusement, ce mariage de raison se transformera en amour profond et leur unique enfant, Julie, deviendra le modèle absolu pour sa mère.
Au-delà de cette tranche de vie si représentative des changements majeurs de cette période agitée, qui voit la fin d'un Empire, le siège de Paris, l'insurrection de la Commune, l'éclosion en France d'un style pictural jamais égalé depuis, Dominique Bona décrit les émois et les attentes d'une femme complexe, talentueuse mais fermée, qui meurt prématurément d'une grippe compliquée d'une pneumonie, à 54 ans , dans la plénitude de son art, et ayant enfin acquis, si ce n'est la gloire, du moins une certaine sérénité. Une vie de femme exceptionnelle, si féminine parmi ce monde d'hommes, parfois si brutes…
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C'est une biographie minutieuse de l'artiste Berthe Morisot que nous livre Dominique Bona. C'est le portrait d'une femme secrète, introvertie, ‘mystérieuse' mais animée d'une volonté exceptionnelle. Il lui en fallait bien de la volonté pour mener un double combat sa vie durant : combat contre les préjugés de son époque sur ce que devait être la vie d'une femme et aussi combat artistique puisqu'il lui a fallu faire face jusqu'à la fin aux attaques des critiques sur la peinture impressionniste. Force est de constater que le mot peintre, pas plus qu'alors, n'existe pas au féminin.

C'est un portrait très complet de cette femme à la force tranquille, animée et habitée par son art, acharnée au travail à la recherche d'une perfection qui semble toujours lui échapper. C'est aussi la description d'une femme fidèle, constante, aux amitiés solides, de celles que l'on garde toute une vie avec Manet, Monet, Degas, Renoir, Puvis de Chavanne, Mallarmé.

J'ai lu cette biographie avec intérêt et sans ennui, car elle permet aussi de découvrir un pan de la vie d'autres grands peintres. Elle donne vie à l'artiste mais aussi à la femme et à son caractère et permet de revisiter ses tableaux sur internet au fur et à mesure de leur exécution.
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J'ai découvert ce roman par hasard parce que j'aime la peinture impressioniste simplement. Mais quelle surprise non seulement j'ai adoré ce roman et j'ai pu découvrir Dominique Bonna
mais surtout j'ai pu découvrir l'oeuvre de Berthe Morisot. J'ai eu l'immense chance de voir une exposition de Berthe Morisot au Musée d'Orsay à Paris. Je n'oublierais jamais la foule tout au bonheur de contempler ces magnifiques tableaux. La douceur des sujets, les couleurs restées intactes. Personne ne voulait partir. Les gardiens du musée ont été obligés de nous pousser dehors pour faire circuler la foule tellement émerveillés de ce que l'on voyait.
Le seul bémol : le décès de Berthe Morisot. J'ai versé des larmes de savoir que sa fille allait se retrouver seule à 14 ans orpheline sans parents proches. Je ne sais pas pourquoi mais j'ai vraiment eu de la compassion et du chagrin. Orpheline au début du siècle sans les recours que nous avons de nos jours. Mais Julie Manet a réussi à s'en sortir et a vécu jusqu'à un âge avancé. Tant mieux pour cette famille que j'adore et pour cette grande peintre. Fan de Berthe Morisot. 💕
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Portrait du peintre Berthe Morisot, rare peintre féminin. Née dans un milieu ouvert, elle a pu continuer à peindre après son mariage tardif (33 ans pour l'époque) avec le frère de son ami Manet. Rares étaient les femmes qui le pouvaient puisqu'elles devaient se consacrer comme une de ses soeurs à leur époux et leurs enfants. Les jeunes filles des milieux aisés apprenaient la peinture mais cela devait demeurer un art d'agrément.
Contrairement à ses collègues masculins, elle n'a jamais possédé d'atelier, ce qui aurait été inconvenant, mais elle peignait dans le salon de ses parents puis dans celui de son domicile.
Une femme au caractère anxieux, ombrageux mais passionnée, lettrée. Nous découvrons de nombreux artistes impressionnistes, des écrivains, Mallarmé en particulier qui fut le tuteur de Julie la fille unique de Berthe à la mort de ses parents. Plongée dans le monde mondain, politique ou artistique des années 1870-1880.
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