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Critiques filtrées sur 2 étoiles  
Bordaçarre Olivier – "La France tranquille" – Fayard, 2011 – réed en format poche cop. Bragelonne 2016 (ISBN 978-2-8112-1887-4)

L'écriture est honnête : même s'il s'agit de son premier roman policier, l'auteur a déjà écrit d'autres romans et pièces de théâtre. L'intrigue se lit bien, c'est correctement agimolé, en suivant les recettes les plus classiques.

Dès la moitié du texte cependant, le lecteur repère son principal moteur : le racisme social et géographique le plus éculé de la littérature française, reposant sur le mépris de ce que l'on nomme maintenant "la France périphérique" (cf recension : Guilly Christophe, – "La France périphérique : comment on a sacrifié les classes populaires"), de ce que les parvenus et néo-parisiens nommaient dédaigneusement "la province" il y encore peu de temps.
Ce cliché a envahi la littérature franchouillarde dès le dix-neuvième siècle : la liste serait tellement longue que je me borne à quelques exemples "Le journal d'une femme de chambre" d'Octave Mirbeau (recension), les vaticinations de Rimbaud (recension) ; ou encore dans le secteur du roman policier, "Femmes blafardes" de Pierre Siniac qui évoque carrément "la mécanique de la ville" (cf recension) ou "La guerre des vanités" de Marin Ledun (cf recension).

Autre cliché archi-usé : les petits commerçants sont forcément des abrutis, tournant rapidement aux fascistes assoiffés de sang : on peut citer là encore Mirbeau et son "journal d'une femme de chambre", mais aussi Didier Daeninckx "La mort n'oublie personne" (cf recension) ; cela nous renvoie sans doute à la chanson de la révolution française "la boulangère a des écus qui ne lui coûte guère" ???
Bien évidemment, la famille n'est que le lieu des rancunes les plus rances et de la délation, allusion à peine déguisée au pétainisme (p. 199). Les préjugés les plus standards de l'auteur s'épuisent dans le père petit commerçant qui frappe sur son fils récalcitrant (p. 200).

Pour ce qui concerne l'enquêteur qui se suicide par la bouffe, l'auteur emprunte (ou plagie ?) le roman d'Antonin Varenne intitulé "Le gâteau mexicain".

Mais pour faire moderne et branché, ou tout simplement parce qu'il appartient lui-même à ce milieu bobo, l'auteur rajoute quelques autres clichés devenus incontournables pour un certain lectorat.

D'abord celui de la femme si tant plein libérée et branchée qu'elle a plaqué mari et fiston pour aller "vivre sa vie" évidemment à Paris, c'est tellement mieux que Nogent-les-Chartreux en Beauce (caricaturé p. 15), n'est-ce pas ? Bien sûr, elle a trouvé à se faire entretenir par un toubib, ce que nos grands-mères (cataloguées parmi les potiches par ces gens-là) eussent condamné sans hésitation, mais bon...
Cette femme libérée est doublée d'une jeune femme encore plus anti-conformiste, Elise, dont la posture "sociétale" (comme elles et ils aiment à dire) nous est résumée p. 218 : elle va lutter contre "le système" grâce au désir libéré, ben voyons, et surtout au fait de "bouger" (on nage en plein vocabulaire branchosss).

Ensuite le sabir parlé par le fiston, émaillé de termes anglais genre "dad" pour apostropher son père, avec le corollaire indispensable des titres de variété anglaise servant de toile de fond sonore au récit : l'auteur barbote décidément dans le lieu commun.
Sans oublier les allusions littéraires, comme le strabisme sartrien (p. 199), servant à bien baliser l'entre-soi avec le lectorat visé : on n'est pas des ploucs, on est tout plein cultivé.
Le fiston finira tout de même par reprendre le flambeau paternel en sauvant sa dulcinée, victime d'une scène de tortures nouvelle mode qui ouvre le roman (autre lieu commun de ces dernières décennies).

Pour couronner le tout, l'auteur nous balance le jeune couple parti au Burkina-Faso (il a probablement trop regardé Arte pour croire ainsi trouver le paradis dans un pays du Tiers-Monde), et il termine sur une citation d'Apollinaire (toujours l'entre-soi) au sujet du quartier Montparnasse, sans voir à quel point ce quartier est maintenant totalement défiguré, avec - entre autres horreurs – sa tour absurde.

Heureusement, d'autres auteurs de romans policiers se montrent beaucoup moins méprisants lorsqu'ils évoquent la "France périphérique" – raillée ici sous l'intitulé "la France tranquille" – comme par exemple l'inusable Pierre Magnan, ou plus récemment Frank Courtès ("Sur une majeure partie de la France" cf recension) ou Benoît Minville Benoît ("Rural noir" cf recension).

Pour bien comprendre les préjugés de cette caste abreuvant de ses préjugés le "bon-peuple-imbécile-qui-a-besoin-d'être-éclairé", rien ne vaut la lecture de Christophe Guilly...
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