Morphine est une courte nouvelle de
Mikhaïl Boulgakov, publiée en 1927. Les faits se déroulent entre 1917 et 1918, en campagne isolée.
Le court bonheur du Docteur Bomgard s'éteint quand lui parvient l'appel au secours énigmatique d'un ancien camarade de classe. Celui-ci lui cédera le témoignage (l'anamnèse) des Enfers qui l'auront rongé pendant 12 mois. (La
morphine, vous l'aurez compris)
Les dégâts de cet antidouleur si communément utilisé en médecine, et dont l'idée de réglementation n'en était qu'à de vagues balbutiements et débats, ne saurait laisser un médecin indifférent.
J'ai peu d'intérêt pour les troubles addictifs lourds. J'avais donc un apriori évident sur cette lecture.
Je l'ai choisie pourtant parce que
Boulgakov est un auteur que j'apprécie beaucoup.
Je ne le regrette pas. Cette nouvelle très intime (l'auteur a lui-même été victime de morphinomanie en 1917) m'aura aspirée quelques heures dans un univers qui m'était inconnu et qu'on ne peut quitter sans compassion.
Le travail des descriptions est riche et atypique. On reconnaît nettement le regard d'un médecin sur les corps et leurs manifestations, transmis par un esprit naturellement doué pour la littérature ; et l'âme profonde d'un mal que l'auteur a partagé avec son personnage.
À travers les mots de
Boulgakov, on ne voit pas seulement ce que l'on lit. On le ressent. Chaque atmosphère trouve ses mots.
L'auteur brille là encore par sa plume, imprégnée comme toujours de ses personnages - et toujours aussi d'un morceau de lui-même.
Pourtant, je dois bien avouer que le style particulier de cette nouvelle a légèrement perturbé ma lecture sur les 30 premières pages (peut-être parce qu'il est aux antipodes de mes lectures précédentes et que je suis quelqu'un qui a besoin de temps pour s'imprégner).
J'ai préféré reprendre depuis le début pour l'apprécier avec la fluidité qu'elle mérite. Une fois rentrée dedans, la lecture m'a été fluide et facile ; trépignante - fiévreuse parfois.
Je recommande vivement pour qui sait ce qu'il veut y trouver.