Le tournis...Je finis ma lecture avec le tournis, les virages à 90 degrés tout au long de la lecture de ce livre survolté, certes addictif et haletant, m'ont quelque peu éreintée et je vais attendre un peu avant de passer au tome 2 car, figurez-vous, il y a 10 tomes dans cette saga dont on ne connait pas l'auteur. Un auteur assurément qui a dû prendre des psychotropes pour pondre un tel objet littéraire non identifié…Je suis persuadée qu'il s'agit d'un duo de choc qui a imaginé une telle histoire, échevelée, filant à 100 à l'heure, l'association de deux monstres géniaux. Oui, je suis certaine que
Stephen King a persuadé Quentin Tarentino d'écrire ce livre avec lui. le King pour le côté suspense, horreur, surnaturel, les références clin d'oeil aux années 60 et aux héros emblématiques américains, et Tarentino pour les personnages pittoresques, les combats d'arts martiaux, les giclées de sang, l
a présence des vampires, les scènes de combat surréalistes et l'humour noir. Pour la narration très cinématographique, gros plans et travelings, accélérés et ralentis maitrisés de main de maitre au sein d'une histoire improbable dans laquelle jaillit Elvis, Catwoman,
Bruce Lee et tant d'autres. Pour le côté un tantinet série B et héros sombres.
Imaginez
Billy Summers dans Kill Bill, ou dans Les huit salopards. Les deux ambiances, si singulières, se retrouvent dans ce livre, accumulant les clichés, les clins d'oeil, les références, les apartés, comme les deux artistes savent si bien le faire, l'un dans les livres, l'autre dans les films…
« Sanchez, toujours spectateur de la scène derrière son comptoir, s'apprêtait à se mettre à couvert hors de portée des giclements de sang et de cervelle, sans parler des balles perdues, qui d'un instant à l'autre voleraient dans tous les sens, lorsqu'il aperçut quelque chose du coin de l'oeil.
Des ténèbres profondes où était plongé le fond de la salle, une nouvelle silhouette se détacha pour prendre part à la petite fête. Elle était vêtu d'une sorte de barboteuse blanche avec de gros boutons noirs sur le devant. le visage était maquillé de blanc, les yeux rehaussés de traits noirs et épais. Une grosse larme noire avait été peinte à la commissure de l'oeil gauche. A cela s'ajoutaient une paire de chaussons noirs pointus et un chapeau comique mi-noir, mi-blanc. Un clown. Pas un clown de cirque, mais un de ces Pierrot tristes de pantomime qu'on trouvait sur les scènes d'Europe. de ses longues manches, il tira soudain deux fusils à canon qu'il pointa en direction de la tête d'El Santino ».
Ça commence tel un western mexicain et ensuite…ensuite ça frôle l'ésotérisme, la science-fiction, le bon vieux polar, le roman noir, le Kung-Fu, les histoires de vampires. J'en ai perdu mon latin, riant et grimaçant tour à tour, avec la sensation par moment d'un côté « too much » que j'acceptais quand même volontiers mais bon, hein, faut pas pousser trop mémé dans les orties. Sans doute, ne suis-je pas la cible idéale pour ce livre musclé et punchy rempli de testostérones. Quoique. Survitaminé et décomplexé, ce livre a le mérite de sortir totalement des sentiers battus avec ce mélange surprenant des genres. Moi qui aime être étonnée en littérature, je peux dire sans conteste que je l'ai été et j'ai trouvé ce livre dans le livre bien vu, très malin, et proprement vertigineux : Ce livre sans nom, nous le retrouvons en effet dans l'histoire et ça fait froid dans le dos : chaque personne qui a lu ce livre sans nom et sans auteur, a été tué. Vous voilà prévenus…
Cette histoire, c'est d'abord un lieu : la ville de
Santa Mondega probablement en Amérique du Sud, ville étant connue comme étant la plus dangereuse au monde (mais ne cherchez pas vous ne la trouverez sur aucune carte) et c'est, très souvent, un bar, le Tapioca. Je reprends la critique de @Hugo dont je vous conseille fortement la lecture si ce livre vous intéresse : « En fait là-bas, c'est le pays du second degré, de la violence gratuite, du malsain gentillet qui fait marrer, ça se prend pas du tout au sérieux, ce n'est jamais vraiment glauque, c'est juste d'une vulgarité « sans nom »… tellement jouissif et addictif qu'on en redemande… »
Cette histoire, ce sont des personnages hauts en couleur, une bande de sacrés voyous, pour ne pas dire les pires raclures qui peuvent exister, tous plus roublards les uns que les autres, incarnés selon les différents archétypes du mal, depuis la pire pègre mafieuse jusqu'à la corruption, mais avant tout un personnage : le
Bourbon Kid. Un homme encapuchonné à l'origine d'une tuerie d'anthologie il y a cinq ans faisant 300 victimes, devenant en effet particulièrement incontrôlable dès qu'il boit du Bourbon. Verre de Bourbon rempli, exige-t-il de sa voix rocailleuse aussi glaçante que la voix du Diable. Ses meurtres sont signés : des meurtres abominables, victimes énucléées et langue tranchées, entre autres.
Mais il y a aussi les deux moines, Kyle et Peto, entre moines shaolin et chevaliers Jedi. Il y a Jessica, rare survivante de la folie meurtrière du
Bourbon Kid, qui a survécu à la fusillade malgré les 32 balles qui l'ont plongée dans un profond coma de cinq années et dont elle sort enfin, mais devenue amnésique. Il y a les deux commissaires Jensen et Somers qui mènent l'enquête…
Cette histoire enfin, c'est la volonté de toutes et tous de posséder une pierre mystérieuse, magique, sans doute la plus précieuse au monde : L'oeil de lune. Gardée dans un couvent, elle a été volée mais sa puissance est terrible. Qui la possède devient immortel, qui la possède le jour de l'éclipse de soleil peut faire dévier à jamais le satellite de son orbite, qui la possède a ainsi un pouvoir immense. Et le
Bourbon Kid veut à tout prix cette pierre qui lui a déjà échappée il y a 5 ans. Et la pierre de passer de mains en mains répandant le sang sur son passage…
Si vous ajoutez à tous ces ingrédients une éclipse totale de soleil, un tournoi de baston sur un ring, le sosie d'Elvis Presley, un carnaval dont les déguisements de superhéros américains donnent des scènes très cocasses, une baston dans le noir total, une cadillac jaune…vous aurez une première idée de ce qui vous attend avec ce livre devenu mythique,
le livre sans nom. C'est jubilatoire, aussi drôle que sanglant, c'est à prendre au second degré pour en apprécier comme il se doit son côté survitaminé et drôle…Et ce, d'autant plus que le livre se décompose en 65 chapitres plutôt brefs se terminant par du suspense. On ne lâche pas le livre et les chapitres ne cessent de s'enchainer. Bref, c'est à découvrir mais gare au tournis, pour ma part il y aura quelques livres plus calmes entre chaque tome. Histoire de digérer car il faut l'admettre, on frôle par moment l'indigestion. Mais quelle claque cette orgie, quelle claque !