Le cerveau interprète les impulsions nerveuses chaotiques provenant des sens en imposant l'ordre et en établissant des liens avec des souvenirs. Si ces processus sont indispensables à notre fonctionnement dans le monde, toutes les grandes traditions mystiques semblent s'accorder à dire que ces processus génèrent un voile illusoire dissimulant la véritable nature des choses. Pour atteindre à notre potentiel le plus élevé, nous devons apprendre à reconnaître la distorsion de nos perceptions et de nos pensées.
Dans la Kabbale, cette distorsion du fonctionnement quotidien de l'esprit est évitée en se concentrant sur les Noms de Dieu. L'ineffable Nom en quatre lettres (Y-H-V-H) dérive de la racine verbale "haya" (être). D'un point de vue grammatical, ce Nom est une forme complexe incluant à la fois le passé et le futur. Dans les textes kabbalistiques, on trouve une extension de ce Nom : "Il était, Il est, Il sera" qui a une valeur numérique de 72, ce qui le lie à un autre Nom de Dieu également équivalent à 72. Au regard de ces allusions, nous pouvons concentrer notre attention sur deux idées fondamentales : le Nom de Dieu représente à la fois "être" et la "transcendance du temps". Les pratiques complexes découlant de la contemplation du Nom entraînent une prise de conscience du noyau indifférencié enfoui dans l'inconscient. Dans l'état mystique, passé, présent et futur semblent fusionner dès lors que nous nous rendons compte que le temps est davantage que ce qu'il paraît être dans les états normaux de conscience.
La valeur numérique des mots hébreux requiert quelques explications. Chaque lettre hébraïque est aussi un nombre, si bien que chaque mot a une valeur numérique. Cette caractéristique de l'hébreu est au fondement de la gématrie, un outil herméneutique employé dans tous les récits rabbiniques et d'une importance capitale dans la Kabbale. Selon le concept de la gématrie, les mots ayant une même valeur numérique partagent une certaine équivalence sémantique.
[...] Historiquement, le nom "Israël" fut donné à Jacob après qu'il eut lutté toute la nuit avec un "homme" qui se révéla être l'ange de son adversaire, Esaü (Genèse XXXII, 24-32) Selon les termes de la Genèse, ce changement de nom donna à Jacob la capacité de lutter "avec Dieu et avec des hommes et à être vainqueur"