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Ce livre possède la beauté éteinte du malheur.
L'écriture est maîtrisée, sobre, au service d'un récit qui n'est pas sans rappeler certaines pages d' Eugène le Roy, Alphonse Daudet, Emile Zola ou François Mauriac.... pour n'en citer que quelques-uns
L'écriture du malheur, dans sa hideuse simplicité nimbée d'une effroyable fatalité... C'est le manège de la méchanceté, de l'égoïsme et de la bêtise qui tourne et tourne encore. C'est la ronde de la médisance, des bassesses et des ignominies du terroir: Rien à envier, parfois, aux red necks d'Erskine Caldwell!
Il y a tout de même quelques lumières ténues, dans cette grisaille bien foncée: Marie, l'enfant-narratrice avec Rose la vachette aveugle et Benoît le canard... Et puis le grand-père, tout de même, et Louis le petit frère-rayon d'un soleil rare et vite éteint.
Génie la folle, est un livre tellement triste et pourtant plein d'une vie retenue au fond du regard éteint de Génie. Génie au mutisme et au courage têtus... Génie qui rejoint Emma, Tess et Pomme dans mon album des femmes de la fiction littéraire qui me marquent à jamais.
Merci, Inès Cagnati qui n'êtes plus.
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« Petite Marie, je parle de toi
Parce qu'avec ta petite voix
Tes petites manies, tu as versé sur ma vie
Des milliers de roses... »

Ô Petite Marie, toi qui courais sans cesse derrière celle qu'on appelait Génie la folle, ta mère. Toi qui attendais sans cesse qu'elle revienne de ses longs travaux des champs, éreintée, fourbue, épuisée par tant de méchancetés dispensées par les villageois et rejetée par sa propre mère. Toi qui espérais un mot d'amour, souvent traduit par un « ne reste pas dans mes jambes ». Toi qui rêvais de l'emmener loin au pays où les vignes touchent le ciel. Toi qui aurais tant voulu voir ses yeux autrement que couleur de larmes. Toi qui aimais tant poser ton visage dans son cou et te serrer contre elle, comme les rares fois où elle te laissait faire...
Ô Petite Marie, j'aurais tant aimé que la vie te sourit. Que ta mère Eugénie puisse dénouer son coeur et t'exprimer tout l'amour qu'elle te portait sans jamais y arriver.

Génie, devenue la folle aux dires des braves gens, parce qu'elle ne voulait plus parler après le viol subi à l'âge de dix-sept ans. Se taire était sa défense : avouer le nom de son violeur l'aurait obligée à l'épouser.
Et cette grand-mère, odieuse, qui aurait préféré faire enfermer sa fille pour effacer la faute. Une famille si respectable entachée par cette inconduite ! Car la faute bien sûr est celle d'Eugénie.

Inès Cagnati fait parler la petite Marie à la première personne. Cette petite fille raconte l'immense amour qui la rattache à sa mère, à la peur de la perdre. Les incessantes répétitions renforcent ce sentiment d'angoisse. le récit est à hauteur d'enfant, Marie raconte sa vie comme elle la ressent, le vocabulaire y est simple et les descriptions mêlent réalités et rêves de petite fille. Certains passages sont d'une poésie époustouflante malgré le contexte plus que morose. Une histoire émouvante et triste, mais des personnages extrêmement attachants. Et je remercie Symphonie pour cette très belle découverte :0)
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Toutes deux vivent dans une maison délabrée dans une extrême précarité. Il y a Marie la fille, qui suit sa mère partout où elle est appelée à donner de sa personne dans les fermes environnantes. Lorsqu'on a besoin de ses services pour les travaux des champs, on l'appelle toujours " Génie la folle " Jamais Eugénie, ni Madame, toujours Génie la folle.
Lorsqu'elle traverse le village de son pas pressé, Marie courre derrière elle, habitée par la peur d'être abandonnée. Et lorsqu'elle approche de sa mère, cette dernière lui tient toujours les mêmes propos " Ne reste pas dans mes jambes " ou " va au lit " à l'heure du coucher. Marie sens bien que son coeur est en souffrance et plein de larmes retenues. Elle aimerait pouvoir l'aider à dissiper la solitude dans laquelle elle s'est réfugiée, se faire aimer de cette mère qui tente de l'écarter.

Et puis il y a la grand-mère, celle qui a chassé sa fille enceinte, pour avoir déshonoré une famille respectable en portant l'enfant d'un amour impossible. Depuis, Génie ne parle plus, ne sourit plus, ne chante plus, elle qui fût si joyeuse autrefois. Seul le grand-père accorde de petites attentions à Marie. Une pomme, des noix, des noisettes qu'il lui glisse dans les poches à l'abri du regard de sa femme acariâtre ne supportant pas la vue de l'enfant de la honte. Et Voilà qu'un beau jour, arrive Rose, une vache aveugle, cédée malhonnêtement à sa mère pour ses services chez le maire. Mais Marie n'a que faire de l'obscurité de Rose, sa Rose qui embellit ses journées au même titre que l'attente d'épouser Pierre à son retour de guerre, rencontré sur le quai d'une gare.

Et lorsque Antoine, un paysan au passé trouble, presse Génie de venir s'installer chez lui, elle accepte la perspective d'une vie dans une maison plus confortable. Et le miracle se produit. Tandis que Marie poursuit ses études en internat à la Rochelle, Génie renaît, retrouve sa gaieté perdue et parfois même se remet à chanter.
Mais quand le mauvais sort décide de s'acharner...

Il est des lectures qui vous marquent, comme un tatouage gravé sur le coeur et vous transperce l'âme ; Génie la folle de Inès Cagnati fait partie de celles-là et rappelle, par certains côtés Les demeurées de Jeanne Benameur, riche en poésie.

Difficile de rédiger un billet sur le destin de Génie la folle et de la petite Marie sans avoir une boule au ventre.
Une pépite !
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Un roman sombre, profondément émouvant, d'une tristesse infinie, dont la lecture met mal à l'aise et bouleverse par tant de malheur subi.

Pauvre petite Marie, fille "bâtarde" de d'Eugénie dite Génie la folle, une fille de bonne famille, bannie par sa famille, en particulier par sa mère, obligée de vivre dans une maison délabrée au bord de la rivière et de travailler comme domestique agricole. Brisée, exploitée, usée par le dur labeur de l'aube jusqu'à tard le soir, dans les champs et les fermes, Génie a peu de temps pour sa fille ; prostrée dans son mutisme, elle ne peut lui témoigner de l'affection. Et pourtant Marie aime sa mère, elle lui voue un amour sans bornes. Elle la suit, l'attend désespérément, va à sa rencontre et se fait chaque fois rabrouer.
"Ne reste pas dans mes jambes", "Rentre à la maison" ou "Va te coucher".
Cette quête inconditionnée d'amour maternel, cette peur d'être abandonnée, c'est Marie qui nous la raconte, avec ses mots à elle et sa sensibilité d'enfant. La plume d'Inès Cagnati est simple, très fluide, marquée par de nombreuses répétitions. Toujours les mêmes phrases, les mêmes répliques, les mêmes émotions, comme une histoire sans fin, désespérante où les malheurs et les drames se succèdent à l'infini.

Néanmoins ce livre réaliste décrit avec précision le monde de la campagne et des agriculteurs, les travaux des champs, la nature environnante et les traditions ancestrales. Il dénonce aussi hélas la méchanceté, l'intolérance, les mesquineries et la petitesse d'esprit.

#Challenge illimité des départements français en lectures (47 - Lot-et-Garonne)
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Eugenie dite "génie la folle" est une fille de bonne famille, reniée par cette dernière pour cause d'avoir eu Marie, petite batarde... Il ressort de cet écrit un amour immense, un espoir et une force.

Ce roman, date, je me le suis procuré à la bibliothèque, mais si vous avez l'occasion de le lire, franchement vous ne serez pas déçus.

Le seul hic à mon goût : les répétitions des expressions et situations, sauf "et moi je n'ai rien eu " qui est nécéssaire , mais peut être est ce pour insister sur les mots qui marquent Marie.
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Ce roman, véritable poème en prose est d'une tristesse absolue. Pas une page, pas un moment pour racheter l'autre, du destin tragique de Génie la folle au travers du regard de sa fille née d'un viol qui provoqua le bannissement, au fond du jardin, d'Eugénie, fille de bonne famille, qui dès lors va se transformer en esclave volontaire de tous ceux et celles qui la connaissent, connaissent son histoire, son malheur et ne tendent pas la main.

Génie la folle expie et sa fille subit. Génie la folle se meurtrit et sa fille rejetée, mal aimée, adore cette mère qui ne lui donne rien, cette enfant désirant tant apparaître aux yeux de sa mère, comme quelque chose, un fardeau, mieux une récompense, un objet d'amour.

Poétique, l'écriture est répétitive, psalmodique même et d'une noirceur désespérante mais aussi d'une puissance folle. On aimerait alors tant serrer ces deux êtres dans ses bras !
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Quelle claque !
Un roman qui à la puissance "Des souris et des hommes" écrit avec le génie de la sobriété pour raconter l'injustice et la cruauté. La prose singulière est la marque incontestable d'un grand écrivain.
C'est une histoire tragique dont on ne sort pas indemne et le récit avec ses répétitions lourdes de sens créé une intimité avec les personnages avec lesquels on partage la fatalité de la souffrance et la résignation à un funeste destin.
Un regret, ma découverte trop tardive de cet auteur.
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La petite Marie est une enfant qu'on a envie de serrer dans ses bras tant la pauvre enfant n'a pas de chance...l'amour, la recherche de l'amour, l'attente de l'amour, le rejet de l'amour, la cruauté de l'amour...c'est toute sa vie! Elle Marie, la batarde de Génie la Folle, ne recherche finalement qu'un peu d'affection, un peu d'attention auprès de cette mère trop occupée à leur survie, trop fatiguée pour prolonger les rares moments d'affection, trop usée pour les rêves que l'enfant voudrait leur construire...Cette mère pourtant l'aime, on le sent, on le devine mais elle ne le montre pas :"dors, encore un peu", "ne reste pas dans mes jambes"...sont les seuls mots d'amour qu'elle lui adresse et pourtant cette mère va se battre, se montrer têtue pour lui permettre de réaliser son rêve de voir la mer mais surtout d'avoir une meilleure vie que la sienne. Et lui Pierre, l'aviateur, Marie l'attend lui aussi...Toujours attendre, toujours voler quelques minutes de bonheur...Et Pépé, lui aussi à sa façon c'est un peu d'amour qu'on lui donne...des noix, une pomme...le vieil homme est bien la seule famille, avec sa mère, à se soucier d'elle...Et puis arrivent Rose la vache, Benoît le canard...et on croit que le bonheur enfin lui sourit...mais c'est ne pas connaître l'acharnement du destin qui s'obstine à cogner, fort et dur, des êtres déjà éprouvés par la vie...la vie n'est pas tendre, l'amour qu'on reçoit peut être arraché...et une enfant ça ne comprend pas qu'on peut attendre, attendre longemps et que le bonheur peut tarder à venir, ou ne venir jamais...Voilà un livre attendrissant, émouvant, et profondément triste. L'écriture est simple et en nuances, c'est le récit d'une enfance écorchée et courageuse d'une petite fille qui voulait juster aimer et être aimée. A lire!
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Marie suis inlassablement sa mère, d'une ferme à l'autre, sur des chemins de terre où elle peine, de ses petites jambes à garder le rythme. A peine croit-elle la rejoindre, que celle-ci reprend sa route en lui disant : "Ne reste pas dans mes jambes".

Inès Cagnati utilise le "je" et se met dans la peau de cette petite fille qui souffre de voir sa mère, que tout le monde appelle "Génie la folle", s'échiner aux travaux des champs, ne jamais se plaindre, ne parler à personne et garder toujours un regard lointain et vide.

Comme une complainte l'auteur dit et redit la peur de la petite de voir sa mère la laisser, ne pas revenir, mais toujours la mère revient et même si la seule chose qu'elle dise soit "couche-toi", le coeur de Marie "devient fou".


"Enfin, le soir venait. Je rentrais à la course. J'attendais son retour dans le chemin, assise sous l'églantier aux branches retombantes. Dès que j'entendais son pas, je me dressais, le coeur four. Arrivée près de moi, elle disait :
- Rentre à la maison.
et je rentrais derrière elle, avec Rose.
Je voulais toujours lui dire que j'étais là à l'attendre, que j'étais si contente, si contente qu'elle soit revenue ce soir encore, que moi je l'aimais. Mais elle avait le visage plein de silence."


Mieux que n'importe quel traité Inès Cagnati nous parle de la condition féminine, de la place qui lui est réservée dans une société patriarcale où la maternité est souvent un moyen de la dominer et de la posséder, où la révolte contre cet ordre se paie par la mise à l'écart et où la "folie" vaut mieux que le déshonneur d'une famille.
Lien : https://meslecturesintantane..
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Non, malgré le titre, ce roman ne parle pas d'une démence au sens médical du terme, quoique, d'une certaine façon, si l'on considère que le malheur est une maladie, oui, Génie est folle, et avec elle la plupart des personnages de ce livre terrible, bouleversant, un livre qui, littéralement, vous prend aux tripes.
Inès Cagnati (1937-2007) nous a laissé seulement trois romans et un recueil de nouvelles, ["Le Jour de congé", (1973), "Génie la folle" (1976), "Mosé ou le Lézard qui pleurait" (1979), "Les Pipistrelles" (1989)], mais cette oeuvre, si modeste qu'elle soit, mérite d'être connue, d'abord par la qualité d'écriture de l'autrice, qui est remarquable (l'écriture, mais je pense qu'Inès devait l'être aussi), et ensuite, et surtout, par la puissance d'émotion qu'elle fait naître, avec une sensibilité extrême, d'où émergent une tendresse immense et une grande pitié pour ses personnages sur lesquels s'acharne le malheur.
L'histoire de "Génie la Folle" se passe dans le sud-ouest de la France, il n'y a pas si longtemps. Les émigrés italiens qui ont fui l'Italie de Mussolini, se sont implantés en grand nombre dans le Sud-Ouest, entre Garonne et Pyrénées. Pour la plupart ouvriers agricoles, ils ont mené une vie de misère auprès de fermiers qui les considéraient à peu près comme des esclaves (je peux en témoigner, plusieurs membres de ma famille ont connu ça en arrivant en France dans les années 30). C'est dans ce milieu qu'a grandi Inès, et ce milieu rude et cruel qu'elle dépeint dans "Génie la Folle". Marie est une petite fille, qui n'a pas de père, seulement une mère, rejetée par tous (pensez donc elle a été violée, cette traînée, elle l'a bien cherché), on l'appelle Génie la Folle. Pas folle zinzin, bonne pour le cabanon, mais bizarre, enfermée dans un mutisme farouche, n'ouvrant la bouche que pour donner brièvement de sèches consignes : "Lève-toi", "va te coucher". Et pourtant Marie lui voue un amour immodéré, comme si le malheur opérait des connexions, comme ça, entre les êtres. Mais elle est comme ça, Marie, avec son grand-père, avec la vache, avec le canard, avec son ami Pierre. Avec sa mère, elle tombe sur un mur, mais elle attend, elle attend qu'un jour une porte s'ouvre, c'est sûr un jour Génie la Folle retrouvera le sourire... Mais il n'y a pas que dans la Grèce d'autrefois que la machine infernale du malheur met en branle ses mécaniques terribles...
"Génie la Folle" est un roman pathétique qui décrit l'amour d'une petite fille pour sa mère qui, traumatisée, ne sait pas y répondre. Avec une infinie pudeur, mettant en vis-à-vis l'innocence de l'enfant et la méchanceté, la malignité, la cruauté extrême du monde qui l'entoure, Inès Cagnati écrit un roman d'une grande intensité et d'une grande force, faisant le portrait de deux femmes, la mère et la fille, que vous n'êtes pas prêts (ou prêtes) d'oublier.
Je n'ai pas lu le recueil de nouvelles ("Les pipistrelles"), mais je vous recommande les deux autres romans ("Le jour de congé" et "Mosé le lézard qui pleurait"), de la même veine, et preuve d'un réel talent littéraire (disponibles chez Folio)
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