En lisant les nouvelles du Grand labeur, le lecteur est brutalement privé de ses repères. Une écriture de la cruauté et des états limites, à travers des espaces-temps imaginaires où les pulsions humaines se réalisent dans leur brutalité, leur aveuglement, leur folie. Pourtant, on trouve une innocence absolument intacte dans le coeur de certains personnages: par exemple chez Charlie, malmené par la bande de copains fascistes de son père, ou chez les deux enfants qui se cachent de la guerre dans la carcasse d'un boeuf. Une écriture qui ne craint pas de dire l'absurdité des affaires humaines, la petitesse des hommes, mais qui s'appuie sur elles pour réaffirmer la valeur du courage, de l'effort et du dépassement de soi.
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Mille chants s'allument dans la nuit. Et je les vois au loin, fourmis éparpillées sous le bleu du ciel, arrachant la mer au désert. Ils ont déjà bouclé la première vague, ficelée en gerbes. Tous encordés, certains chargés de sacs de houle sur le dos, ils tirent, ils tirent de toutes leurs forces, accélérant des deux mains le passage des cordages sur les treuils, dépêtrant la mer de son fouillis d'écume et d'embrun.