L'histoire de l'estampe est liée, au Japon, à l'évolution d'une nouvelle société, laquelle après une longue période de guerres civiles, connut l'effondrement de la féodalité qui libéra la caste des samouraï. D'autre part, la bourgeoisie, qui sortait enrichie et puissante de ces guerres, se livrait aux plaisirs d'une vie facile et favorisait pour son divertissement la prospérité des courtisanes, des acteurs, des peintres. Des contacts s'établirent entre l'élite cultivée mais appauvrie des samouraï et la caste des marchands nouvellement enrichie ; ensemble ils contribuèrent à l'épanouissement de l'école de peinture dite d'ukiyo-e.
Méprisée de la noblesse, cette école eut un succès retentissant auprès de ceux à qui elle s'adressait ; une large diffusion jusqu'alors utilisée pour les oeuvres religieuses, conduisit à emprunter au bouddhisme ce qui allait le plus contribuer à répandre les images « d'une vie facile », « d'un monde éphémère et mouvant » : la technique de l'estampe. Ce procédé de gravure sur bois, utilisé par les moines dès le VIIIe siècle, allait servir au XVIIe siècle pour illustrer les premiers livres profanes qui étaient, pour la plupart, des oeuvres poétiques ou des récits de légendes anciennes.
À partir de 1670 environ, et après quelques balbutiements, l'ukiyo-e commence véritablement son envol avec Moronobu qui est considéré généralement comme le fondateur de l'ukiyo-e, et, en tout cas, comme celui qui a su fédérer les premiers efforts pour en faire un nouveau genre abouti.
Suivront nombre d'artistes éminents qui ont fait évoluer l'école et ses techniques comme Utumaro ou Harunobu.
Après avoir atteint son âge d'or entre 1780-1810, notamment dans le domaine de la représentation d'acteurs de kabuki, le sommet de l'ukiyo-e sera atteint avec Sharaku. Mais déjà, le caractère spectaculaire et excessif de ces estampes montre qu'il sera difficile d'aller plus loin. D'autres grands artistes s'apprêtent à renouveler le style de l'école : Hokusai et hiroshige.
Hokusai, le plus grand de tous, fut un maître incontesté de l'estampe. Peu d'artistes ont eu un tel rayonnement dans le monde.
Très vite, cependant, il se lassa de peindre et d'illustrer des poèmes érotiques. Ecrivain lui-même, il devint l'auteur de nombreux romans destinés aux femmes et aux enfants. Grâce à lui, on vit une floraison de romans populaires très en faveur auprès du public. En 1814, il décida d'abandonner les textes et entrepris la célèbre série de croquis de la « Mangwa ».
Sa série d'estampes la plus connue (et la plus célèbre) : les Trente-Six Vues du Fuji.
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Découvert avec émerveillement en France, puis dans le reste de l'Europe, dans la seconde moitié du XIXe siècle, Hokusai enthousiasme les artistes autant que les collectionneurs. On voit se diffuser très vite, dans tous les arts, les motifs de la Manga, tandis que les Trente-six vues du mont Fuji font sensiblement évoluer les codes et la pratique de la peinture.
Si Hosukai a écrit l'une des plus grandes pages de l'histoire de l'estampe, les peintures qui nous sont parvenues révèlent une liberté admirable qui culmine dans sa dernière période de création. A près de 80 ans, l'artiste s'adonne enfin pleinement à l'exercice du pinceau et livre l'une de ses plus émouvantes leçons.
C'est par ses paysages que s'est illustré avec le plus d'éclat le génie d'Hokusai, laissant une empreinte décisive dans l'histoire de l'estampe. Sensible très tôt au regard des artistes occidentaux, toujours plus soucieux de saisir le principe des choses, l'artiste mêle la minutie à la maîtrise des effets et donne à ses illustres séries l'ampleur d'une méditation.
On ne peut guère saisir la complexité de l'oeuvre de Hokusai sans plonger dans le Japon de la fin d'Edo, sans chercher à comprendre l'esprit de l'époque et ds son art. Dans un pays de traditions en proie à un bouleversement social et économique sans précédent, l'effervescence de l'édition illustrée révèle la force et les enjeux d'une nouvelle culture populaire.
L'oeil occidental met souvent en exergue les qualités graphiques extraordinaires des oeuvres de Hokusai. Si l'on ne peut, à proprement parler, séparer du reste de son art la pratique du dessin, une grande part de son fascinant génie se joue dans la capacité de saisir par le trait l'essence du vivant.