L'éditeur a renoncé au quatrième de couverture et à toute autre présentation, que ce soit sous forme de préface, postface ou avertissement quelconque. La couverture reprend une oeuvre graphique (2012) de Ioan Iacob, page de journal « überzeichnet ». Vingt et un textes et une table des matières se suivent sans qu'on sache cependant s'ils ont fait l'objet d'une première publication ailleurs. Un peu dommage, car même si le récit est toujours à la première personne, ainsi le premier texte commence par « j'ai cinquante-cinq ans » revendiquant en quelque sorte l'aspect autobiographique de l'ensemble, par moments on hésite entre la déception de la réalité et l'espoir qu'il s'agisse de fictions. Je songe ici notamment au texte qui donne le titre au recueil « L'oeil brun de notre amour » et qui démystifie le thème de la gémellité dans l'oeuvre de
Mircea Cartarescu mais je ne vous en dirai pas plus si ce n'est que l'émotion est au comble mais que pour ceux qui, comme moi, trouvaient que le génie de
Cartarescu consistait précisément en cette exploration, le coup peut être dur à encaisser. Et ce n'est pas la liste, qui pourrait être celle des « partenaires commerciaux » aux pages 169–170 autour de l'appellation pas très contrôlée par l'auteur « Ovidiu » (il y a aussi Ovidiu Lipan Tandarica), qui va vous remonter le moral.
Pour terminer sur une note plus optimiste, quoique, je mentionne la référence à « Blonde On Blonde » de
Bob Dylan à la page 48, la reconnaissance envers le maître Ovid Crohmalniceanu et son rôle dans le long poème «
Le Levant » (p. 79–87) et « last but not least » l'évocation d'un
Geo Bogza ou d'un
Gheorghe Craciun que l'auteur a connus personnellement. C'est à l'occasion de la mort en janvier 2007 de ce dernier que
Mircea Cartarescu se souvient avec « Une immense tristesse » : « Nous nous sommes rencontrés de nombreuses fois dans des cénacles, à l'époque il y en avait encore, et rarement à d'autres occasions : à Brașov, chez lui, j'ai écouté vers 1987 « Desire » de
Bob Dylan, dans un train, vers 1993 on a parlé postmodernisme. En 1990 quand nous sommes arrivés tous les deux à Paris, nous n'avions jamais osé en rêver auparavant, nous avons pris une bière sur une terrasse au coin d'une rue ensoleillée. Ces derniers temps nous nous étions rapprochés : nous nous étions rendus ensemble en Pologne puis à nouveau en France. Il y a deux ans, avant de remettre son dernier roman «
Pupa russa » à l'éditeur Humanitas, il est venu chez moi prendre conseil. Je l'ai encouragé autant que j'ai pu. Ce soir-là nous nous sentîmes plus proche que jamais, pour la première fois dans notre longue histoire commune. » (p. 139).