Abélard Louisy
On ne sait pas si Abélard Louisy est paresseux ou épuisé. Il ne sort jamais de chez lui. Il demeure allongé, très pâle, luisant et grassouillet, sur ou dans son lit. Quelquefois il se lèvre, mais titube et se réinstalle immédiatement sur son lit en gémissant d'une voix de petit enfant.
C'est lui qui m'a tout facilité. Il m'a prêté de l'argent, une faible somme à vrai dire, lorsque j'ai crée ma salle d'attente (que je tiens certains après-midi); et comme il est abonné à toutes sortes de revues, il me les donne dès qu'il les a lues, afin que je les présente sur la table de ma salle d'attente.
La seule fois que je l'ai vu hors de chez lui, c'est quant il m'a fait la surprise de venir en taxi, jusqu'à la salle d'attente, peu après que je l'eus aménagée. Il savait qu'elle se situait de plain-pied sur la rue. Il s'était enveloppé d'un grand manteau, et en souriant il a frappé à la vitrine. Le taxi attendait. Que cela m'a touché! Je n'oublierai jamais l'expression de son visage ce jour-là. Certains de mes clients non plus. Ils m'en reparlent.