Le fils du roi Arthur, Tedros, le plus beau de l'école du bien, se languissait d'une véritable idylle, quelque chose de moins acquis, différent de ces princesses qui se pâmaient à longueur de journée à la seule contraction de ses muscles. Il y avait bien cette drôle d'élève toute vêtue de noire, aux yeux globuleux. Agatha. Elle lui résistait à coup de claques et de vocifération certe mais pourtant quelque chose les poussait l'un vers l'autre. Elle avait tout d'une sorcière. Il y avait erreur sur le casting. Elle avait toute sa place désignée à l'école de l'autre côté du pont, l'école du mal. Agatha était d'ailleurs amie avec une élève de cette école, ce qui était interdit. L'autre, blonde et vêtue de soie rose, Sophie, faisait les yeux doux à Tedros à coup de cils papillon. Elle clamait haut et fort qu'elle était, elle, destinée à être princesse et ne cessait de vouloir entrer dans son école, bravant la surveillance des gargouilles. Quelle calamité ces deux-là! Elle risque de gâcher leur future histoire de conte de fée.
: Cartoonesque est le mot. En effet, l'évocation de cette série est "cartoonesque", rappelant un peu une douce folie fantastique entre Shrek et les animés de
Tim Burton. L'histoire de
Soman Chainani n'est pas à prendre au sérieux, au grand jamais, non pas que les contes le soient, mais les lecteurs seront juste toujours invités à rire tout du long. Ceci permettra d'ailleurs de digérer avec plus de facilité l'épaisseur du pavé. Les lecteurs se gratifieront d'une bonne grosse tranche de gâteau sucré et non d'une pauvre brique qui calera le pied de la table.
Soman Chainani s'approprie l'univers des Contes et nous invente des origines amusantes pour nos héros d'enfance, une école de princes, princesses, sorcières et autres personnages de légende. Mais attention, la légende doit se créer, les rôles se distribuer, du preux guerrier au compagnon de route, jusqu'au méchant, avant même le début de l'histoire promise à chacun ( ou pas!). Que se passera t-il si l'on est promis à rien?
Et puis, il y a d'autres lecteurs, c'est aussi le nom des humbles et plus modestes citoyens du monde de Gavaldon, des personnages qui célèbrent la magie des contes merveilleux et maudissent aussi un peu l'enlèvement réguliers de leurs enfants pour les alimenter. Si les enfants redoutent un peu de quitter leur famille, si celles-ci barricadent les portes des maisons le soir de la collecte et laissent le soin à d'autres d'amuser pour la postérité, Sophie, elle, se pare de sa plus belle robe pour son premier jour d'école et ouvre grand ses fenêtres pour accueillir son destin. de princesse! Sinon, quoi d'autre?
Sophie a bien pris soin d'être charitable et de se faire amie avec une laissée pour compte de l'élégance, Agatha la "gothique". Agatha est aussi grognon que Sophie est imbue de sa personne, un drôle de duo. Et pourtant, Agatha y croit en ce début d'amitié au point où quand les oiseaux de Stymphale les enlèvent et met par erreur Sophie dans l'école du Mal ( celles des monstres et sorcières) et Agatha dans l'école du bien (celles des licornes, princesses et autres bontés), cette dernière n'hésite pas à braver les règles de l'école pour retrouver son amie et repartir à la maison. Mais qui rentre à l'école ne peut plus revenir. Et aucun personnage de l'école des vilains ne peut être amis avec ceux des valeureux. Pourtant un vilain est-il foncièrement mauvais et ne peut-il être un héros? L'école du bien est-elle si chouette que ça?
L'auteure apporte une nuance et défait les jugements en emporte-pièce grâce au caractère de ses deux personnages. le premier tome emportera ses lecteurs à travers les forêts bleues dangereuses après que chacun est appris à découvrir son rôle, jeter des sorts, brandir le bouclier et siffler les animaux à la rescousse. Etape après étape, chapitre après chapitre, une véritable amitié va se nouer entre les deux héroïnes qui continuent de défier une mauvaise règle toute faite. Sans le vouloir, Sophie et Agatha réussiront à confirmer l'erreur avec humour et leurs colocataires leur donneront un coup de main pour remettre du sens à cette pagaille. Mais n'est ce pas là aussi une naissance d'amitié dans le coup de pouce? Bigre, qu'elles sont fortes ces deux là! A découvrir!