Il s'agit là de mon premier
Maxime Chattam, autant dire que je ne suis peut-être pas très objectif ; toujours est-il que j'ai passé un très bon moment avec ce roman très kingien dans l'âme.
Le coup de la petite ville américaine dans laquelle tout le monde se connaît, c'est déjà vu, chez King mais aussi chez d'autres auteurs ; on pourrait craindre de se retrouver avec beaucoup trop de personnages à retenir (King nous avait fait le coup avec Dôme), mais non :
Chattam ne se concentre que sur une poignée de personnages, chacun ayant une personnalité propre, et c'est vraiment très appréciable. Les interactions entre eux sont réalistes, même si je regrette qu'il n'y ait pas plus d'aspérités dans leurs échanges, histoire qu'on y croit davantage. A propos de "trop lisse, trop parfait", la famille Spencer me semble justement tomber dans ce schéma ; certes, les enfants se chamaillent parfois, mais c'est vite oublié. Quant aux parents, ils se taquinent plus qu'ils ne se disputent. le mari qui fait une découverte bien étrange et qui le cache à sa femme n'a pas à fondre en excuses quand celle-ci découvre qu'il
lui ment, on passe vite à autre chose. Mouais.
Parmi les personnages kingiens on retrouve la brute du patelin, ce
lui qui terrorise et frappe les filles, et le vieux voisin qui connaît des secrets. Un peu comme le vieux dans
Simetierre. le clin d'oeil est sympathique (en tout cas pour moi :
Simetierre est l'un des romans que je préfère chez
Stephen King).
J'avais peur que
Chattam aille chercher du côté de
Lovecraft, surtout quand son personnage de Tom découvre un livre ésotérique, le de Vermis Mysteriis, mais non, c'est un clin d'oeil très léger. J'ai horreur de ces auteurs contemporains qui, parce qu'ils n'ont aucune imagination, pillent l'oeuvre de
Lovecraft ou font de leurs monstres une entité cosmique arrivée sur Terre parce que Jean-Michel Taré a ouvert
le Necronomicon. Sérieux, si vous n'avez aucune imagination au point d'aller chercher du côté de
Lovecraft, dites-vous que vous n'êtes peut-être pas fait pour l'horreur et/ou l'écriture. Je n'aime
Lovecraft que chez
Lovecraft, je le trouve très mauvais chez les autres. le terme "lovecraftien" m'abîme les yeux et les oreilles aussi joyeusement que si je me les ponçais avec le papier de verre le plus rêche possible. Je digresse.
L'horreur en elle-même est ici jouissive : cauchemardesque, ultra-violente, les morts sont toujours très gores et bien douloureuses. Ne vous attachez pas à un personnage, vous risquez de pleurer sa mort. Ca m'est arrivé, c'est vraiment pas agréable. Gemma, à jamais dans mon coeur (oui j'aime les rousses, et alors ?)
Parmi les petits reproches que je peux faire (outre des personnages parfois trop lisses), je trouve une écriture trop cinématographique, trop proche d'un script, trop "novélisation d'un film d'horreur ou d'un épisode de série".
Chattam a une façon ici d'écrire le suspense comme s'il décrivait ce qu'il voyait sur un écran géant et... ça ne marche pas. le cinéma, l'audiovisuel et la littérature ont des procédés narratifs propres ; ce que vous pouvez faire pour l'un ne fonctionne pas avec les autres (dans les dents, celles et ceux qui adooooorent comparer un roman et son adaptation pour dire que "de toute façon le roman sera toujours meilleur que le film ou la série". Ca n'a aucun sens.).
Globalement je suis très satisfait de cette lecture, ne comprenant pas pourquoi j'ai attendu aussi longtemps avant de m'y plonger vraiment. le côté
Stephen King et "famille parfaite", je pense. Encore que j'aime lire les héritiers actuels de King.