AVERTISSEMENT : tous les propos relatifs à Ca contiennent une forte probabilité d'erreurs en tout genre. La lecture de cette duologie remonte à des siècles, tout commentaire sur l'oeuvre sera donc basé sur des souvenirs lointains, ne vous vexez donc pas s'il vous plaît si ces souvenirs sont inexacts ou imprécis.
« Bonjour les Babélionautes ! Aujourd'hui, on va faire une petite incursion…
-Une petite de plus de 600 pages, quand même…
-… dans la littérature horrifique, avec
Nuit d'été, de
Dan Simmons, le grand.
Or donc, c'est le dernier jour d'école dans les sixties du siècle dernier et dans la ville d'Elm Haven. Les enfants attendent sagement l'heure de la sortie. Tous ? Non ! Tubby s'ennuie et décide d'explorer un peu. Hélas, il ne reviendra jamais des toilettes où s'est ouvert un trou mystérieux... Personne ne semble s'affoler plus que ça, mais Duane, Mike, Dale, Lawrence et Jim comprennent vite qu'il se passe des choses étranges dans leur petite ville… Etranges, disais-je ? Non : peut-être même qu'il y a « des choses étrangères » *ajouter ici un gros clin d'oeil dont la subtilité est vendue séparément*
-Oui, Déidamie, tout le monde a compris que tu faisais finement allusion à Stranger Things, la célèbre série de Netflix.
-Ah, ouf, j'avais peur que ça ne se voie pas…
-Ben de toute façon, quand tu vois comment la série plagie le roman…
-Quoi ?! Mais non ! Il y a juste… euh… beaucoup de points communs…
Bref, pour en revenir au texte : je ne suis pas une amatrice de
Stephen King, loin de là, ses romans d'horreur me dégoûtent plus qu'autre chose, et quand je parle de dégoût, je ne pense pas à un dégoût plaisant.
-Ah, parce que le dégoût, c'est plaisant ?
-Mais non ! Enfin, si ! le dégoût que j'ai éprouvé en lisant Ca relève plutôt du malaise profond, un sentiment de gêne mêlée de répulsion, de répugnance, de colère, aussi. Je n'éprouvais que des émotions négatives, rien ne me rassurait, rien ne me consolait, tout me plongeait dans un monde privé d'espoir. Ce n'était pas agréable du tout.
Je précise pour les fans que je ne suis pas en train de dire que King c'est de la daube, j'ai très conscience que ma perception est personnelle et marginale, et je suppose que je suis trop une chochotte émotionnelle pour supporter les textes de
Stephen King.
Bizarrement, j'ai apprécié le texte de
Dan Simmons. Il présente énormément de similitude avec Ca, pourtant, là où ça ne marchait pas avec King, la même trame fonctionne avec Simmons.
J'ai donc pris grand plaisir à suivre les aventures de la Cyclo Patrouille. J'ai adoré le travail sur le contexte et les caractères des enfants : Dale, le grand frère attentionné, Duane, adulte trop tôt, qui garde cependant des émotions d'enfant, Mike, le tendre costaud… l'une des grandes réussites de ce roman se trouve dans les relations qu'ils entretiennent entre eux et les gens qu'ils aiment.
Je crois d'ailleurs que c'est là où le roman réussit chez moi là où Ca échouait : dans mon souvenir, l'horreur ne cesse jamais. Lorsque les enfants ont fini de jouer, d'enquêter, d'affronter Grippe-Sou, ils vivent d'autres souffrances : les familles violentes, maltraitantes à divers degrés, le harcèlement...
Dans
Nuit d'été, la violence reste présente, bien sûr, mais elle connaît des instants de pause pendant lesquels tu vois que des personnages s'aiment. Mike et Memo, Dale et Lawrence, Duane, son pater et Wit… Ces pauses dans la tension représentent à la fois de véritables bouffées d'oxygène (tout n'est pas si dégueu), ainsi que des ressorts dramatiques intenses : bien évidemment, les êtres chers… on va vouloir les protéger du mal.
J'ai beaucoup aimé aussi l'exploitation des peurs ordinaires des enfants : le placard, la cave, le dessous du lit, le cimetière… ces endroits qui servent de planque aux monstres ou d'ouverture entre les dimensions.
Et en dernier lieu, j'ai adoré l'aspect organique de l'horreur. L'horreur possède une chair (moche), une consistance (gluante), une odeur (puante), un son (effrayant). Et, vu l'abondance de puanteur, ce roman occupe désormais une place dans ma toutoute première liste, les livres mentionnant des odeurs !
-Mais vas-y, comment elle se la joue Youtubeuse, maintenant… « Lâchez un pouce, ça va aider la chaîne ! » En plus, une liste à quatre bouquins, ça ressemble à rien, c'est n'importe quoi.
-Bref, les images de
Dan Simmons fonctionnent et lorsqu'il décrit les monstruosités, il est facile de se les représenter.
-Ben moi, je suis pas si enthousiaste que toi, Déidamie. Je vais passer sur les clichés « gamins en vélo auxquels il arrive des trucs de fou » dont on est gavés depuis ET l'extraterrestre, on va dire que c'est devenu un genre… mais l'arme qu'ils trouvent, sérieusement ? Ca m'a énervée ! C'est comme si le mal rongeant Elm Haven était l'ennemi de Dieu ! Que c'est banal ! Mes dieux, mais que c'est banal !
Ensuite, j'ai pas aimé qu'on ne connaisse pas la nature du mal. Tu vois, c'est un peu comme dans les séries policières : un des meilleurs moments, ce sont les résultats de l'autopsie. Si tu n'as pas les résultats, aaaah, la frustration ! En fantastique, j'adore les explications sur la définition des choses, pour moi, c'est l'équivalent de l'analyse du médecin légiste en termes de « passage obligé délectable ». Et là, on n'en aura pas. Même pas un petit monologue de méchant.
Dan Simmons m'a obligée à me construire ma propre théorie sur le mal. Super, merci mec. Chuis même pas sûre d'avoir raison. Ca me gonfle !
Et en dernier lieu… aaarh, je ne Supporte pas les scènes d'amour enfantines. Ca me crispe, mais ça meuh crispe ! Aaarh, j'étais super mal à l'aise.
-Ben quoi ? Il ne se passe rien de foufou, le regard n'est pas malsain sur la fille… pourquoi tu te sens mal ?
-Je n'en sais rien ! On n'a qu'à dire que je suis une vieille bique coincée du uc, et ça m'ira très bien, j'assume.
-Chais pas si les vieilles biques parlent verlan, mais si tu veux, d'accord.
Pour conclure : j'ai passé un fort bon moment avec
Nuit d'été, qui m'a réconciliée un peu avec le genre horrifique. Je précise pour les plus sensibles que, aussi paradoxal que cela puisse paraître, c'est une horreur « tout public », les moments affreux sont nombreux, certes, mais ne durent pas indéfiniment ni ne deviennent insoutenables. »