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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Voici un livre que je classe dans la catégorie des "pas faciles à lire".
Ecrit dans les années 80, il se veut certainement une allégorie de la situation sud-africaine de cette époque (société coloniale sur le déclin, tensions entre les colons et les primo-habitants, ...)
Le roman reflète donc les préoccupations du moment et que l'on peut avoir oubliéés mais qui garde une portée universelle avec l'exploration des thèmes de violence, de l'oppression mais surtout de la résistance.
Les Barbares représentent surtout la peur de l'inconnu et la dévastation qui pourrait survenir à leur arrivée (thème furieusement d'actualité de nos jours, ...)
Le style est tout en précision et simplicité, sans envolée lyrique qui me fait le classer dans les livres "pas si faciles à lire" mais diablement intéressant.
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Nous suivons les réflexions d'un magistrat âgé d'une cité rurale éloignée de tout s'interrogeant sur sa vie, l'humanité et la justice. Certains passages de torture sont assez crus mais supportables. Attention à la quatrième de couverture de certaines éditions qui raconte toute l'histoire : celui de Babelio est bien succinct.

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Une forteresse quelque part, bâtie apparemment sur les terres des " barbares". Un homme, le magistrat, motivé par des valeurs fortes d humanisme va devoir subir l arrivée du "colonel", bien décidé à faire la guerre à ces " barbares". Il ramène des prisonniers au fort dont une jeune fille qui, torturée, devient l objet de toutes les attentions du magistrat...dans un style sans grande surprise, le prix Nobel nous raconte le chemin extrême et jusque boutiste de ce magistrat.
On y parle des corps, ceux de jeunes filles mais aussi celui que la vieillesse vient prendre dans ses doigts noueux, on y parle aussi, d expiation, et de pardon.
La violence est présente tout comme la douceur de certains gestes, on ressent bien dans ce livre les traces laissées par l apartheid.
Je n ai pas totalement adhéré aux différents propos déclinés par l auteur, l attitude du magistrat m a semblé excessive, le tout emmené par un style que j ai trouvé assez quelconque.
Une rencontre mitigée.
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Tant de choses à dire sur ce roman !
Si vous lisez ce livre, vous allez suivre l'histoire à travers les yeux d'un magistrat anonyme, passif et victime de sa propre société coloniale.
L'histoire se passe dans un désert, au milieu de nulle part, dans une époque elle aussi inconnu. Vous l'avez vu avec son titre particulier, le livre ne vend pas de l'action. Pourtant, avec son incipit in media res, nous plongeons dans un univers stressant avec la psychose d'attendre un ennemi inconnu, et à vous de décider de quel ennemi l'auteur parle ; les étrangers, le narrateur lui-même, ou alors le colonel Joll, un tortionnaire colonisateur envoyé par le gouvernement.
Une vraie pépite de la littérature.
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En ces temps de peur et de stigmatisation de l'Etranger, de l'Autre, j'avais besoin de m'offrir un antidote littéraire et le roman de J.M Coetzee : En attendant les barbares m'a paru correspondre en tous points à ce que je cherchais.Dire que je suis déçue serait injuste mais au début de ma lecture ce roman m'a surprise et déroutée.
Cette fable dystopique nous emmène dans un Empire situé hors de l'espace et du temps, avec une omniprésence du militaire et de tout ce qui va avec : obéissance aveugle aux ordres, exactions commises auprès des populations indigènes, ces fameux "barbares" dont on se sait pas grand chose mais que la rumeur populaire présente comme menaçants. le décor est planté et dès le début du récit, on sait que si barbarie il y a, ce sera celle de l'homme civilisé contre les populations autochtones, celles qui vivent aux confins de cette ville de garnison dont on ne connaîtra jamais le nom.
Mais tout cela constitue - du moins à mes yeux - une toile de fond pour un récit plutôt centré sur un personnage, celui du narrateur, un magistrat vieillissant et fatigué, n'aspirant plus qu'au repos et la quiétude. Et c'est bien malgré lui qu'il va se trouver confronté à une situation qu'il ne pourra accepter au nom de ses valeurs. C'est un personnage complexe, à mi-chemin entre l'anti-héros et le héros tragique, qui au début du roman va se boucher les oreilles plutôt que d'entendre le cri des suppliciés. Sa lucidité désespérée n'a d'égale que le dégoût qu'il éprouve pour son propre corps vieillissant. Cette thématique du délitement, qu'il s'agisse du corps ou du paysage désertique qui entoure la ville est d'ailleurs omniprésente dans tout le première partie du récit duquel se dégage une ambiance délétère et oppressante qui n'est pas démentie par le caractère très répétitif de certaines scènes à l'érotisme éthéré entre le Magistrat et la jeune nomade qu'il a enlevée aux griffes de la soldatesque.
Heureusement que la deuxième partie change de tonalité et donne à voir aussi à travers la révolte du magistrat contre les tortionnaires que sont devenus les soldats, une autre facette du personnage : celle de son refus de la torture et des sévices infligés aux victimes. Là encore le corps est omniprésent et l'on suit le Magistrat devenu lui aussi ennemi et supplicié dans tout le long parcours qui va le faire passer du paroxysme de la douleur à sa domestication. J'ai beaucoup aimé certaines scènes très fortes où la plume de Coetzee s'envole, s'enflamme et cerne au plus près les ressentis et les émotions liés à la souffrance physique et morale.
Pour conclure, je dirais que même si cette thématique des difficultés liées à l'engagement personnel n'est pas celle à laquelle je m'attendais, j'ai été conquise par le traitement littéraire qu'en fait Coetzee. Mais j'aurais aimé qu'elle survienne plus rapidement et qu'elle prenne aussi plus vite le pas sur cette thématique du corps vieillissant en proie aux tourments d'une sexualité dans laquelle il ne se reconnaît plus.
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Coetzee a décidément une écriture très singulière, à la fois sobre et profonde, froide mais puissante, à l'image de ce qu'il reflète lui-même. Au coeur d'un paysage de bout du monde, aride en été, glacial et venteux en hiver, avec le désert pour horizon et dans ce désert, la présence de ce peuple autochtone que l'on appelle les Barbares, parce qu'ils nous sont étrangers et forcément dangereux. le magistrat de cette petite ville qui semble avoir été oubliée, vieil homme se bat entre ses désirs charnels qu'il peut difficilement dissimuler aux yeux des habitants, et sa lutte pour la justice et la raison, est confronté à l'arrivée de tortionnaires décidés à éliminer ces Barbares qui menacent leur civilisation.
En nous plongeant dans le coeur et le corps de ce vieil homme, Coetzee nous invite à nous interroger, d'un point de vue intime, sur la place que prend le corps vieillissant dans la société et les relations conjugales, et d'un point de vue plus politique, sur les limites d'une justice qui se montre inique. C'est un roman aux questionnements mouvants, relatifs aux événements, à ce qui est imposé au corps, tour à tour torturé et soigné, repus ou affamé. Finalement, sous un premier aspect plutôt froid et sec, c'est un roman brûlant, passionné par la vie, coûte que coûte, intense et qui remue bien des choses au niveau moral.
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Etape envoûtante sur mon chemin de découverte des Nobel. Celui-ci, comme de nombreux d'autres, offre dans ce roman un propos universel qui laisse sa marque grâce notamment au choix de la forme s'approchant du conte symbolique, que le lecteur peut situer où et quand il veut : dans l'apartheid en Afrique du Sud, aux confins d'un empire, au fond du coeur des hommes.

Le narrateur, magistrat d'un poste avancé de l'empire, administre son petit royaume en bonne intelligence avec les tribus nomades alentour, appliquant dans ses décisions un corpus de valeurs qu'il croit bonnes puisque déterminées par le maintien de "la paix, la paix à tout prix". Or, quand le colonel Joll dépêché par la capitale s'en vient poursuivre ces barbares et fait entrer l'arbitraire du pouvoir et l'abjection de la torture dans les murs de la citadelle, le narrateur se rebelle quand il prend conscience qu'il n'est finalement avec le tortionnaire que l'autre face d'une même pièce, servant les mêmes intérêts.

Vivant avec lui les catharsis successives de l'amour, de la vieillesse, du voyage et de la souffrance, le lecteur est amené à partager la réflexion profonde et habitée du magistrat sur le pouvoir, l'inégalité, la barbarie inhérente à la condition humaine, l'engagement, aidé en cela par une atmosphère de lointain et la magnifique fluidité de la plume de l'auteur. L'expérience n'est pas de tout repos, c'est un voyage à travers une littérature en action qui ébranle quelques certitudes et pousse à l'empathie : splendide illustration du pouvoir des livres.
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La lecture d'"En attendant les barbares" m'a par moments évoqué celle du "Désert des tartares" de Dino Buzzati. En effet, l'action du roman de John Maxwell Coetzee se déroule en un lieu, la Cité, dont les habitants (les colons) attendent, en vain, une éventuelle attaque des indigènes (les barbares). Cette attente, comme dans le roman de Dino Buzzati, finit par prendre un caractère irréel, symbolique.

Mais à la différence de l'auteur italien, qui exploite cette morne expectative comme prétexte à une réflexion sur la fuite du temps, il m'a semblé que l'objectif de John Maxwell Coetzee était d'amener son lecteur à un questionnement d'ordre plus conjoncturel et sociétal, portant notamment sur la légitimité morale de l'expansion coloniale, et sur les dérives du pouvoir.

Autre point commun entre les deux oeuvres : l'absence de référence spatio-temporelle qui permettrait de situer historiquement ou géographiquement le récit. Nous savons simplement que l'action se déroule au sein de l'Empire, dans une ville fortifiée aux portes d'un désert. de même en ce qui concerne les protagonistes, qui ne sont pas désignés par leur nom mais par leur fonction ou l'une de leurs caractéristiques.

Le personnage principal, entre autres, est le Magistrat. Il ressemble assez aux héros masculins qu'a l'habitude de mettre en scène John Maxwell Coetzee dans ses romans (du moins ceux que j'ai lus). On ne peut pas dire qu'il soit au départ particulièrement attachant. C'est un individu qui se place dans une démarche analytique vis-à-vis de ce qu'il ressent, qui fait preuve de recul face à ses émotions. Et pourtant, il manifeste -grâce justement à sa capacité d'analyse et à son intelligence- une humanité rassurante au sein d'une société inique et cruelle dont les travers ne sont pas sans évoquer les heures sombres du colonialisme. Je pense à cette façon d'humilier, de rabaisser l'indigène et de se convaincre de sa propre supériorité pour se justifier d'actes innommables, pour légitimer l'existence d'un Empire qui, telle une montreuse entité, se nourrit de son besoin d'expansion, s'invente des ennemis pour assouvir sa soif de violence et de domination. Je dis "s'invente" car il semble bien en effet que cette hypothétique attaque barbare ne soit qu'un mythe, un fantasme, dont chacun se persuade, par commodité ou ignorance.

Pour les soldats qui, dans l'attente de l'assaut, occupent la cité, agiter devant la population le spectre d'une invasion menée par ces êtres primitifs et immoraux que sont les barbares permet, en toute impunité, de se comporter eux-mêmes comme des sauvages irrespectueux de leurs semblables. le fait de désigner un ennemi commun et étranger permet de prévenir les éventuelles récriminations de civils qui subissent le comportement abusif d'une armée censée les protéger de l'hostilité et de la convoitise des indigènes...

Le héros quant à lui se prend d'une étrange attirance pour une jeune barbare capturée par des soldats, et dont le père est mort des suites des tortures qui lui ont été infligées. Contrairement à la plupart de ses semblables, lui accepte de se rappeler que les rapports qu'ils ont eu jusqu'à maintenant avec ces barbares étaient pacifiques (ces derniers venaient ponctuellement faire du troc à l'entrée de la Cité) et il perçoit l'absurdité du comportement de ses concitoyens et de ses supérieurs hiérarchiques.
Face aux injustices et au mépris que subissent les indigènes, sa conscience s'élève peu à peu jusqu'à un point de non retour où il n'aura plus d'autre choix que celui de crier son refus de devenir lui-même un barbare, non pas au sens où l'entendent les colons, mais dans la définition plus large du terme.

Je suis tout à fait d'accord avec Gangoueus, qui écrivait que "ce texte peut livrer plusieurs niveaux de lecture" : parabole sur les méfaits de l'impérialisme, conte mettant en lumière la propension de l'homme à la cruauté et à l'intolérance, portrait d'un individu quelconque que sa révolte face à la barbarie finit par rendre extraordinaire..., et sans doute ce roman aborde-t-il encore d'autres thèmes que je vous laisse le soin de déceler...

Toujours est-il que le récit de John Maxwell Coetzee ne laisse pas indifférent, et permet de nous mener sur de passionnantes pistes de réflexion.

Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Il y a comme un parfum de Désert des Tartares, de Rivage des Syrtes, voire même de Falaises de marbre dans ce En attendant les barbares. A la frontière ouest de l'empire, un magistrat régit une colonie : en fait un poste avancé de la civilisation face aux tribus barbares. Ces derniers n'ont pas de nom. Ce qui les fait barbares, c'est leur mode de vie nomade. Incapables d'ériger des villes, de construire cette grande fiction institutionnelle qu'est l'Etat, ils vivent d'élevage, de chasse, de troc aussi avec les habitants de la colonie. Bien-sûr, par leur mode de vie, par leur refus de la politique telle qu'elle doit raisonnablement se construire, les barbares constituent une menace. On s'inquiète, on enquête. le magistrat reçoit dans sa cité un membre du Troisième Bureau, formation d'élite de l'empire, qui ramène des prisonniers dans la cité et les interroge. Durement : jusqu'à la torture. Il n'y a que sous la douleur la plus extrême que les accents de la vérité se font entendre.

De ces premières expéditions, une jeune femme est rapportée. Durant les séances d'interrogatoires, elle a les pieds brisés, les yeux aveuglés et son père, battu devant elle, humilié, est tué après avoir cédé à la folie. le magistrat prend la jeune femme en pitié. S'ensuit des semaines où la jeune femme vit chez le vieux magistrat : il la caresse, explore de ses mains et de ses doigts son corps, seulement en surface, seulement pour constater sa jeunesse, ses blessures irréparables, sa nature de barbare. Puis, lorsque l'hiver repart, il la remmène auprès des siens, dans un territoire hostile où même les chevaux, ces bêtes de somme, peinent à survivre. A son retour, il est accusé d'intelligence avec l'ennemi, puis est emprisonné.

Il règne, dans le livre de John Maxwell Coetzee, des accents de Julien Gracq, de Dino Buzzati. Cette frontière sur laquelle veille le magistrat, dans sa colonie, est celle des territoires incertains. La muraille, comme le fort de Buzzati, donne l'illusion de la protection. Il règne aussi, au début du livre, cette torpeur propre aux moments heureux et qui sont, par essence, fragiles : comme dans les Falaises de marbre d'Ernst Jünger, une menace approche et, bientôt, balaiera tout sur son passage. Mais, contrairement à ces romans, celui de Coetzee ne définit pas de certitude quant à la nature du pouvoir de l'empire. le magistrat attend les barbares, oui. Mais qui sont-ils ? Sont-ces ces hordes dépenaillés d'éleveurs et de pêcheurs qui survivent tant bien que mal ? Ou sont-ce ces officiers, élégants et sûrs de leur bon goût, et de leur bon droit, qui capturent à tout va, torturent puisque le droit le leur permet, imaginent des guerres insensées ?

Le magistrat, en homme libre et plein d'idéaux, s'oppose à la guerre et au traitement inhumain des barbares. Pour cela, il sera rabaissé au rang de bête, battu et brimé, brisé, avili. Son histoire rappelle que ce sont les vainqueurs qui écrivent l'histoire, c'est-à-dire ceux qui possèdent la force. Ecrire l'histoire, c'est aussi choisir les mots, les interpréter ; c'est catégoriser les choses et les êtres, les valoriser ou les dévaloriser, c'est aussi manipuler les mots, notamment les mots du droit, pour dire ce qui est juste et ce qui ne l'est pas. La morale, cette gardienne intime des valeurs humaines, n'a rien à voir avec cela.

Avec cette tragédie en forme de conte, John Maxwell Coetzee fait preuve d'efficacité. le propos est limpide, son enseignement aussi. L'histoire qu'elle écrit peut s'appliquer à nombre de nos exemples historiques : est-ce la conduite de la France en Algérie que l'on croit reconnaître ? Est-ce celle de l'Etat raciste sud-africain, promoteur de l'apartheid ? Est-ce encore les Etats-Unis, cette nation qui s'est construite (pas seulement, heureusement !) par ses conflits intérieurs contre les Noirs et contre les Indiens ? On pourrait multiplier les références. Lorsque la civilisation s'oppose à la barbarie, elle en prend d'autant plus volontiers les apparences. le bourreau est aussi victime : c'est l'humanité, la plus brillante comme la plus sombre, que l'on justifie et que l'on assassine.
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JM Coetzee nous propose une histoire bien étrange, avec son roman En attendant les barbares. On ne sait pas trop où ni quand elle se déroule et ce n'est pas vraiment important. le narrateur est le magistrat d'une ville frontalière repliée sur elle-même. Au-delà des murailles, dans le désert montagneux, aride et froid, se cachent des barbares. On ne sait pas beaucoup de choses sur eux, sinon que tout ce territoire leur appartenait autrefois, il y a très longtemps. On les craint mais on ne sait pas trop pourquoi. Sans doute parce que l'Empire en a décidé ainsi, il faut un ennemi commun alors on invente cette menace. Pourtant, les rares barbares qu'on a vus vivaient misérablement dans des huttes près du lac et de la rivière. Quoiqu'il en soit, le lecteur assiste surtout au malaise croissant dans la petite communauté puis à l'arrivée réjouissante d'une compagnie armée envoyée en renfort. Mais le narrateur, lui, voit cette arrivée d'un mauvais oeil…

Beaucoup comparent En attendant les barbares avec le désert des Tartares, de Dino Buzzati. Oui, il y a des ressemblances. Parr exemple, cette forteresse, ce bastion de la civilisation aux frontières de nulle part. Mais, alors que le héros de Buzzati perd la raison en croyant accomplir son devoir absurde de tenir tête à un ennemi invisible (peut-être même disparu ?), celui de Coetzee doit faire la guerre aux siens. C'est que l'Empire redoute ces barbares qui sont à ses portes. D'ailleurs, la nouvelle compagnie armée tout droit de la capitale disperse quelques groupuscules de ces barbares, en fait quelques uns prisonniers et les torture. le magistrat s'y oppose, les prend en pitié, surtout leur vient en aide. D'ailleurs, il recueille l'une d'entre eux chez lui. Ce geste lui vaut l'animosité des soldats et l'incompréhension des civils, qui se détachent de lui. Pourquoi les aime-t-il ? Est-il en ligue avec eux ? » La peur, toujours la peur gouverne les esprits, alors on s'acharne davantage sur les barbares, on les provoque.

Coetzee nous propose une réflexion sur la condition humaine. Au nom de la civilisation, plusieurs protagonistes commettent les pires atrocités. C'est beaucoup dire. Mais, finalement, la compagnie armée est défaite et éparpillée, les rares soldats à revenir laissent tomber les armes. Les civils sont maintenant sans défense. Et le magistrat est maintenant trop vieux et isolé pour y faire quoi que ce soit. Il ne reste plus qu'à attendre les barbares. Alors que leur avancée menace la ville, les passions se déchainent, on s'entre-déchire. Les civils qui le peuvent s'enfuient, pour les autres, c'est la déchéance. On se rend compte à quel point la civilisation est fragile… C'est tout un retournement : les barbares, les indigènes reprennent leurs droits sur leurs terres ancestrales. Beaucoup y voient une allégorie, on peut en effet comparer cette situation avec le régime ségrégationnsite qui sévissait en Afrique du Sud, assurant la suprémacie des Afrikaans sur les Noirs. On peut dire que, avec En attendant les barbares, l'auteur avait vu juste car l'Apartheid fut abolie onze ans plus tard…
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