Dans une boîte à livres, c'est la couverture très noire de ce roman qui a attiré mon attention ainsi que son titre énigmatique. La mention rouge "Polar Corse" a fini de me séduire car il y a bien longtemps que je suis tombée sous le charme de l'Ile de Beauté. Mes quelques recherches sur internet à propos de son auteur Olivier Collard, n'ont pas donné grand-chose. Je sais seulement qu'il n'est pas originaire de l'île.
Le roman commence par un hommage personnel et posthume rendu par le Commissaire Lagarce à son Brigadier Gabriel Mordiconi. Cela fait en effet 10 ans que ce dernier a choisi de quitter le monde terrestre. Lagarce évoque l'affaire Séraphini qui fut résolue grâce à la perspicacité de son subalterne, un de ses nombreux talents cachés jamais reconnus par sa hiérarchie.
C'est donc l'enquête, menée par les deux hommes, épaulés du Sous-Brigadier Beauger, sur le meurtre barbare d'une vieille dame, qui va se dérouler sous les yeux du lecteur. Il va assister à toutes les réflexions personnelles du Commissaire, aux discussions entre les 3 flics et bien sûr aux interrogatoires des différents suspects. Avouons dès le début qu'ils ne sont pas très nombreux et que comme chacun sait, en Corse, on ne parle pas beaucoup... surtout à la Police. De ce fait, c'est drôle, le verbe corse est là pour apporter de la crédibilité mais pour l'action, vous repasserez. Olivier Collard dépeint une ambiance, c'est réussi, mais il m'a manqué le rythme. Ne vous attendez pas non plus à une visite touristique de l'île car l'intrigue se déroule en huis-clos dans un petit village de montagne.
Je pense que pour bien saisir les liens qui unissent les 3 hommes avec les autres protagonistes de l'histoire, il vaut mieux avoir lu leurs aventures précédentes car ce livre est une suite. J'ai trouvé que le Brigadier Mordiconi à qui il était rendu hommage au début, était plutôt effacé dans cette enquête. Quant au dénouement, il vient de très loin mais il fait le lien avec le titre "Murza" qui est le nom corse de l'immortelle, cette fleur très résistante qui embaume le maquis corse. Un peu frustrée par ce voyage, je lui accorde un 11/20.
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J'avançais sans but précis, pieds nus dans le sable. En pressant le pas, comme pour me défouler. Alors qu'une curieuse providence me dirigeait vers une dune, j'aperçus à ma gauche - accroché à un massif rocailleux - un parterre de fleurs sèches, oui, des fleurs en abondance. J'en ramassai une. C'était une immortelle. "Murza", comme on dit en corse. A son aspect rabougri, je devinai qu'elle était de l'année passée. La prochaine floraison serait pour bientôt, dès la fin du mois pour les plus précoces. Mais toutes celles qui parsemaient la rocaille dataient de l'an dernier. Elles s'étaient certes desséchées, mais elles avaient enduré une année entière, en dépit des embruns et des vents violents qui balayent les côtes du Cap Corses. Des vents qui peuvent souffler ) près de 200 kilomètres heure. Et pourtant, elles avaient tenu bon. Et elle semblaient reparties pour une saison de plus. Une manière de faire honneur à leur nom.
Sans l'avoir vraiment formulé, Tortora avait vu juste : son ennemi juré, charcutier de son étal, ne me semblait pas capable d'un coup tordu comme celui-ci. Un truc bien sournois, qui ne lui ressemblait pas. Quand on a quelqu'un dans le nez, il est bien plus facile de le surprendre dans le maquis et de lui vider un chargeur que d'échafauder un scénario pareil. Surtout pour quelqu'un qui chasse depuis sa plus tendre enfance. Et qui se vante de tuer encore ses cochons "à l'usu", autrement dit à la 22 long rifle, en prétextant que le label A.O.C. ça sert juste à fliquer les éleveurs, et que l'abattoir le plus proche est à deux heures de route. Pour un rustre de cet acabit, tuer son pire ennemi ne représente aucune difficulté. C'est bien plus facile que de s'excuser, par exemple. Alors si le charcutier avait vraiment voulu régler ses comptes, il aurait coincé Tortoza entre les arbousiers ou à l'orée d'un bois. Sans se prendre la tête.
Elles se prénommaient Toussainte et Baptistine. Elles étaient d'âge respectable, et leur tenue surannée renforçait cette impression anachronique. DE prime abord, ces deux-là semblaient très différentes. Toussainte était corpulente. Elle affichait une jovialité sans faille et son large sourire dévoilait les dents du bonheur. Baptistine, quant à elle, était toute émaciée, et l'expression de son visage était rude et austère. Néanmoins, les deux amies avaient ceci en commun : elles étaient, l'une comme l'autre, toujours disposées à tendre l'oreille, au dernier ragot de derrière les fagots. A tendre l'oreille, mais pas forcément à colporter. Enfin... Pas à des inconnus, en tout cas. Surtout s'ils font partie de la Police !
- Je me demande bien ce qui a pu amener la veuve Seraphini dire une chose pareille...
- A dire quoi ?
- Mais enfin, ce qu'elle a dit sur sa petite fille. Comme quoi c'était le diable en jupons, et tout et tout.
- Bah, ce n'était peut-être qu'une parole en l'air.
- Possible. En tous cas, il y a quelque chose qui ne colle pas.
- C'est-à-dire ?
- A voir sa tête de première de la classe et son sourire d'ange, je me demande comment sa grand-mère adoptive pouvait parler comme ça de la belle Gilda. Vous comprenez, la gamine a l'air tellement... Tellement charmante.
- Bah, la vioque l'aura surprise en train de se bécoter avec un petit ami. Ou bien de se maquiller à l'as de pique, de s'habiller ras-où-je-pense, qu'est-ce que j'en sais, moi ?
Du coup, pour les bigotes, cette gamine c'était le diable en jupons. Mais uniquement pour les vieilles toupies. Pas de quoi en faire un brocciu.