AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,6

sur 846 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
J'ai découvert ce roman sous format audio chez Audiolib, et lu par Marie Bouvet.

Clémence est une jeune femme effrayée. Elle fuit un conjoint violent. Après trois ans à vivre un véritable calvaire auprès de Thomas, elle a décidé de partir loin de lui et s'est installée dans une maison dont Thomas ignore l'adresse. Pourtant, la peur ne quitte pas la jeune femme, craignant qu'à tout moment il puisse la retrouver. Peu d'espoir dans son quotidien, si ce n'est son travail de boulangère et un voisin qui l'intrigue au plus haut point.

Narration

D'emblée, j'ai accroché à la voix de Marie Bouvet qui a lu ce texte d'une manière bouleversante. Elle a su faire passer les émotions de Clémence à la perfection.

Marie a bien veillé à changer les inflexions de sa voix en fonction de la tension qui montait crescendo. Avec cette thématique qui est très difficile, et la voix de la narratrice qui a su insuffler toute l'émotion nécessaire, cela m'a totalement bouleversée.

Marie a une voix très douce, mais jamais monotone. Elle sait changer de ton pour que l'on comprenne bien les dialogues et l'on ne se perde pas au moment de savoir quel personnage s'exprime. J'ai ressenti beaucoup de tension sur certains passages, de par la narration effectuée avec brio.

Intrigue

Je ressors chamboulée par cette histoire dramatique. D'emblée, j'ai ressenti une énorme tristesse pour Clémence et ce que Thomas lui a fait subir. Dès les premières pages, j'ai découvert une jeune femme détruite mais qui pourtant va tout faire pour se reprendre en main.

L'auteure prend bien le temps de poser son intrigue. Ici, il n'y a pas vraiment d'action ni de suspense. Tout passe davantage par la psychologie du personnage principal et l'on assiste à sa reconstruction.

J'ai beaucoup aimé la relation que Clémence va entretenir avec son voisin. L'auteure veille à garder une touche d'espoir malgré la brutalité des événements auxquels a été confrontée la jeune fille.

Vue d'ensemble

La plume de l'auteure est très introspective mais émotive également. La voix de Marie se fond parfaitement au texte écrit et le tout s'accorde avec brio. Je ressors conquise par cet audio-livre que je vous recommande.

Un roman puissant, bouleversant, dans lequel l'auteure a su instaurer une tension qui monte peu à peu au fil des chapitres. À découvrir.

Lien : https://mavoixauchapitre.hom..
Commenter  J’apprécie          210
Sandrine COLLETTE. Ces orages-là.

Un coup de coeur. C'est le deuxième depuis le début de l'année, après Betty, de Tiffany Mc DANIEL. Sandrine COLLETTE, nous plonge dans un univers angoissant. Cela prend aux tripes.

Clémence a trente ans. Elle vient de louer une véritable masure afin de se terrer, de disparaître du monde, d'être le moins visible aux yeux des autres, elle la maigrichonne, l'effacée.. Pourquoi ? Elle fuit son compagnon Thomas. Elle a vécu une passion orageuse avec cet homme. Pendant dix-huit mois, il a été gentil, prévenant, attentionné. Puis les dix-huit mois suivants il s'est révélé sous son véritable aspect. C'est un prédateur, un manipulateur, un homme dangereux, un être machiavélique. Il a pris le temps de tisser sa toile pour emprisonner Clémence afin qu'elle se livre de son plein gré à son bon vouloir. Les jeux de rôles pervers qu'il lui fait subir, la nuit, dans la forêt, courir pendant des heures, quasi nue, deviennent de plus en plus dangereux, toxiques. Clémence va enfin trouver la force de le quitter. Mais il lui faut vivre. Elle ne possède plus rien, elle a tout abandonné. Elle retrouve un nouvel emploi, dans une chaîne de boulangerie, son premier métier. Il lui faudra utiliser nombre de stratégies pour se déplacer, emprunter chaque jour des parcours différents pour se rendre sur son lieu d'activité, distant d'une bonne dizaine de kilomètres. En effet, Manon, sa meilleure amie et son soutien l'informe que Thomas la recherche. du soutien, en trouvera-t-elle, auprès de ses collègues, de ses voisins, en particulier, Gabriel, un chercheur qui détient un secret et vit en solitaire.

Un très bon roman psychologique. C'est une véritable chasse entre homme-femme qui s'engage, à rapprocher de son précédent roman, « Animal », partie de chasse entre un être humain et un animal, un ours, en l'occurrence. IL y a du rythme, de l'action, de l'intrigue. L'écriture est incisive, juste. Je vous conseille également de cette auteure, « Animal », « Juste après la vague », « Et toujours les forêts ». L'univers de Sandrine est toujours angoissant, mais il reflète tant de vérités. Une auteure à suivre pour son univers obsessionnel, angoissant, terrifiant. Lorsque l'on s'empare d'un de ses romans, on ne peut plus le lâcher avant d'avoir atteint la dernière page et de découvrir le mot : « fin ». (07/03/2021).
Lien : https://lucette.dutour@orang..
Commenter  J’apprécie          180
Wahou !
Une pépite.
Première lecture de cette auteure.
Les mots me manquent....
Un roman qui traite des relations toxiques avec un pervers manipulateur de folie. D'ailleurs, il est fou.
Clémence, petite chose au sortir de cette relation, s'est sauvée et a déménagé dans une toute petite maison.
La suite, vous l'apprendrez plus tard, je ne dévoilerai rien de l'intrigue.
Sauf que j'ai adoré la fin....
Cette auteure est miraculeuse avec son écriture terriblement efficace, précise, au scalpel.
Elle décortique tout, elle ne tombe pas dans le piège de la facilité, du sordide, du sale, du moche. Non, elle est d'une finesse et d'une précision étonnantes.
Ce livre remue les tripes, il nous renverse, nous piétine, nous laisse hagard, presque en sidération, parce qu'elle a ce don unique de nous faire vivre les sentiments de Clémence. On vit ce qu'elle écrit.
On a peur avec Clémence, on attrape le SPT (Stress Post Traumatique) en même temps qu'elle ( car il faut le savoir, une relation très toxique laisse des restes, et rend toute personne en proie à ce SPT).
On devient presque folle comme Clémence, on a peur, on panique, en épouvante, la terreur n'est pas loin, non, non il peut la retrouver, la ramener, lui qui aimait tant la rabaisser, l'humilier, l'enterrer vivante dans une caisse en bois dans la forêt.
Et puis il y a Gabriel, comme l'ange, son voisin qui prendra soin d'elle.
C'est son être de lumière Gabriel, il lui prouve qu'elle est forte.
Et puis il y a des retrouvailles à la fin.
Bouleversantes.
Voilà.
J'ai ADORÉ cette lecture puissante, incontrôlable, les mots comme une pluie bienfaisante.
Cette pluie de ces orages-là.
Une auteur de grand talent.
Merci pour cette magnifique lecture.
Commenter  J’apprécie          165
Sandrine Collette est certainement l'auteur qui, par la force de son écriture, me fait ressentir le plus d'émotions, souvent contradictoires, puisqu'elle n'évolue pas dans un monde manichéen. Rien n'est jamais tout noir ou tout blanc. À moi, elle apprend le sens des nuances, la faculté d'appréhender les choses sous des angles différents en pondérant les émotions en fonction du vécu. « Les larmes noires sur la terre » est sans doute le roman qui m'a permis d'apprécier et de comprendre l'écriture de Sandrine ; la façon qu'elle a de vous tirailler, de déclencher la compassion sans verser dans le pathos, de plonger tête baissée dans son univers. Dans « Juste après la vague » paru en 2018, elle aborde une thématique singulière : l'incident climatique qui jaillira sur le destin de toute une famille et bouleversera à jamais son équilibre. Idée qu'elle poursuit en 2020 avec « Et toujours les forêts » où le monde brûle et s'écroule autour de Corentin. Place à la fin du monde, à la nécessité de survivre et à la solitude qui emprisonne l'âme de son personnage principal.

Dans « Ces orages-là », Clémence, héroïne du roman est en exil volontaire. Elle a choisi l'éloignement pour survivre, la quarantaine impérative, l'autoréclusion indispensable. Elle se cache, plus qu'elle ne vit en trouvant asile dans une petite maison fissurée… comme elle… une maison à son image, des murs qui tiennent on se sait comment, et dont le jardin sauvage est indompté. le lieu où atterrit Clémence est à son image : instable et bancal. Car Clémence a fui, avec l'énergie du désespoir, son compagnon Thomas et par là, s'est soustraite à une relation sous emprise protéiforme. « la sensation dérangeante d'être en danger en même temps qu'à la bonne place, exactement. » Chez Sandrine Collette, je vous le disais plus haut, les choses ne sont jamais toutes blanches ou toutes noires, et c'est au gré des pages que le lecteur s'infiltre dans le labyrinthe des émotions de Clémence : partir, rester, revenir, fuir, et qu'avec elle, il chemine vers la reconstruction de son âme, la mise en ordre de son jardin secret, le colmatage des parois internes démolies. Il suit surtout ses déambulations psychologiques, ses velléités de faire marche arrière, son cheminement personnel qui la fait passer de l'état de victime à l'état de rescapée, ses incertitudes, ses peurs, les étapes de son deuil personnel : le déni parfois, la colère dans la narration de son passé, la dépression accompagnée de la tristesse inhérente à la décision prise, l'acceptation du bien-fondé de son choix. Au rythme de la vie qui renaît, de nouveaux personnages qui croisent sa route, d'autres émotions naissent, d'autres étapes sont franchies, d'autres idées germent. Tout doucement, la torpeur s'en va, les effets d'une longue anesthésie s'estompent, les muscles se remettent à fonctionner et avec eux les idées.

Sandrine Collette démontre ici sa finesse dans l'approche psychologique de Clémence, mais pas seulement. Un autre personnage arrive à pas feutrés pour prendre une place énorme et contribuer, de façon bien involontaire, à une quête. Car rien n'est laissé au hasard. La vie est remplie de hasards qui se télescopent, de planètes qui s'alignent, d'opportunités qui se créent. À titre d'exemple, j'évoquerais simplement le choix des prénoms qui est tout sauf anodin. le prénom Clémence vient du latin qui veut dire douceur et indulgence. Elle était en couple avec Thomas, qui en araméen veut dire jumeau. Ceci explique sans doute l'intensité de leur relation…La meilleure amie de Clémence s'appelle Manon, prénom dérivé de Myriam en hébreu, la voyante, celle capable de prédire les destinées. le voisin, qui devient un personnage clé porte le prénom d'un ange, Gabriel. Il est le messager de dieu, un prénom dont la contraction est force et Dieu, celui qui affirme « Je suis certain que je peux vous aider. » Gabriel sait « (…) elle est au bout. À bout. En miettes. Elle a beau ramasser les morceaux, donner l'illusion, il la voit comme un vitrage feuilleté qu'on aurait essayé de briser : debout — avec mille fissures en étoiles à l'intérieur. »

« Ces orages-là » est un roman noir très psychologique dont l'approche spirituelle, la quête de soi se fait toute en finesse, exercice de haute voltige parfaitement maîtrisé. On se laisse embarquer sur un chemin, totalement happés par ce qui est écrit, ce qui est suggéré et ce qui se lit entre les lignes, plus important encore que ce qui est vraiment énoncé. L'utilisation des traits d'union suggère plus qu'il ne dit véritablement, mais c'est cet effet de style qui donne au récit une force impressionnante. La virtuosité de son maniement permet, dans une même phrase, d'expliciter la complexité et l'ambiguïté des émotions, tout et son inverse, le moral et l'amoral. Il est beaucoup question de pardon dans ce texte. le pardon est-il un cadeau que l'on se fait à soi-même ou un cadeau que l'on « offre » à l'autre ? « Quand vous serez grande et forte, alors, vous pourrez pardonner. Quand on peut pardonner, on peut guérir. (…) En vérité tout son être se braque en silence. En elle, il n'y a pas de pardon, il y a la colère. Devenir grande et forte, dans la tête de Clémence, ce n'est pas fait pour pardonner : c'est pour cogner. C'est pour gagner. Et pardonner ah là là, excusez-moi, mais — ce n'est pas gagner, car c'est se soumettre à l'humiliation qui ne s'arrête pas, consentir à sa propre faiblesse, c'est se laisser pisser dessus. » À travers la quête de sérénité de Clémence, ses doutes, ses trois pas en avant et ses deux pas en arrière, Sandrine Collette évoque avec brio le vécu d'une victime, mais aussi les reproches qu'elle peut se faire, l'ambivalence de ses émotions, ses doutes, la distanciation à laquelle elle doit parvenir en faisant fi de ses émotions, les mensonges qu'elle s'invente mis en parallèle avec les réalités bien factuelles. Ce poison qui dévore les entrailles de Clémence, oscillant entre l'oubli et la colère, la volonté d'avancer, mais aussi sa fièvre passagère de haine est le symbole de toute victime qui doit se placer en face d'elle-même pour guérir. « Maintenant, il est à la fois sa hantise et la seule chose vivant en elle, quand tout le reste est anesthésié. » Ressentir, même si c'est de la haine et de la colère, du ressentiment, c'est être encore un peu vivant, ne pas être tout à fait mort, respirer encore un peu…

« Ces orages-là » risque de surprendre le lectorat fidèle de Sandrine Collette. C'est un texte à part, avec un dénouement à part auquel elle ne nous avait pas habitués. Elle démontre jusqu'où peut aller l'instinct de survie par le truchement d'étapes ou de paroles inexorables, comment il devient viscéral de prendre un chemin plutôt qu'un autre, à quel point les blessures ancrées au plus profond de la chair peuvent prendre toute la place. La relation Clémence-Gabriel, porteuse d'espoirs, car fondée sur l'honnêteté et la vérité de l'Autre peut évoluer très différemment de ce que le lecteur s'était imaginé, car sous la plume de Sandrine les démons rôdent parfois, les instincts se réveillent, et les destins s'accomplissent. le roman refermé, il reste le cheminement intérieur de Clémence, un choix, une démarche intime, une conception personnelle de la liberté.

Encore une fois, l'émotion a été au rendez-vous, portée par cette plume inimitable et singulière, précise et acérée. Et toujours cette appréhension que le pire déambule en attendant sa proie…

Lien : https://aude-bouquine.com/20..
Commenter  J’apprécie          161
Après le succès colossal de Et toujours les Fôrets, l'autrice nous revient avec Ces orages-là, un roman foudroyant d'intensité et d'émotion.

Clémence, jeune trentenaire, à la silhouette fine et au regard hagard. Après trois longues années d'humiliation, et complètement désespérée, elle décide de quitter Thomas, son bourreau. de mettre enfin un terme à cette relation toxique. Repartir à zéro. Son rêve ? Devenir grande et méchante..

Elle se réfugie dans une petite maison toute biscornue, entourée d'un petit jardin anarchique. Mais Clémence vit toujours avec la peur au ventre. Cette peur de voir revenir Thomas, car à tout instant il peut ressurgir. Cette peur de le retrouver et de céder à la tentation. La peur coule toujours dans ses veines. Mais elle lutte, et son combat ne nous laisse pas insensible.

Au fil du temps, cette petite maison devient son refuge, et de nouvelles rencontres vont forger sa nouvelle vie..

Il y a quelque chose d'animal, de bestial, dans l'écriture puissante de Sandrine Colette, qui nous arrache à nous-mêmes, nous happe dès les premières lignes et ne nous lâche plus. Elle ne lâche jamais sa proie, et sa proie, c'est le lecteur.

Porté par un sens du récit des plus cinématographiques, l'autrice brosse avec autant d'énergie que d'efficacité le portrait d'une femme bouleversante brûlée au fer rouge.

Un livre glaçant, révoltant, nécessaire, qui témoigne de ce qu'il faut de courage pour se reconstruire.
Commenter  J’apprécie          132
La frêle et timide Clémence vient de s'extirper d'une relation toxique avec Thomas. Thomas, qui avait instauré avec elle un jeu nocturne pervers, sadique, faisant d'elle sa chose, son jouet. Clémence s'est enfuie, échappée tel un animal blessé. Boulangère, elle a retrouvé un emploi, une petite maison, un jardinet avec un bassin trouble où nagent quelques poissons rouges.
Fragile, désespérément seule, elle tente d'oublier, de se reconstruire, de dompter sa peur, mais ses démons la hantent. Thomas la terrorise et l'attire comme un aimant... Saura-t-elle rester tapie dans le refuge où elle a fui loin de lui ? Et lui, pourra-t-il la retrouver ? Car il la cherche, c'est sûr... Manon le lui a dit... Ce texte est une course effrénée vers la reconstruction d'une femme détruite par la folie d'un homme. Mais comment trouver la force de se relever, de "faire du beau avec du grave" ? Un roman violent, surprenant... jusqu'à la dernière page !
Commenter  J’apprécie          130
Cela faisait longtemps que je souhaitais découvrir l'univers de Sandrine Collette mais il y avait toujours tant de tentations littéraires autres que j'avais un peu oublié mon envie. Cette rentrée littéraire me donne l'occasion de faire connaissance avec l'auteur à travers "Ces orages-là".
Et ce fut un vrai orage que déclencha en moi la lecture de ce roman par la puissance de l'écriture, capable de m'insuffler le ressenti de Clémence, comme si j'étais elle, comme si je n'étais pas confortablement installée au chaud.
Le roman s'ouvre sur une scène saisissante, glaçante d'une femme-proie tentant d'échapper à un homme-prédateur, presque nue dans une forêt, la nuit. Puis, total changement de décor; nous faisons connaissance de Clémence, 30 ans, boulangère, qui vient de s'échapper d'une relation toxique, délétère de trois ans avec Thomas; elle a trouvé une petite maison "laide" avec un minuscule jardin, un nouveau travail. Elle est totalement brisée psychologiquement après avoir été rabaissée, humiliée, isolée, terrorisée mais elle a trouvé l'immense courage de fuir pour sauver au moins sa vie. Elle fait la connaissance de son voisin, Gabriel, détruit lui aussi par le suicide de son fils quinze ans auparavant et sa compréhension, son empathie vont aider Clémence sur le dur chemin de la reconstruction.
Nous devenons Clémence, au fil de la lecture, tant l'analyse psychologique est fouillée; l'écriture forte, ciselée, puissante nous fait découvrir une enfant surdouée, qui pour se faire accepter, se dévalorise et continuera à se dévaloriser pour ne pas être seule. On ressent toute son ambivalence; elle fuit mais elle se demande si, finalement, elle ne méritait pas ce qui lui arrive; elle fuit mais elle résiste au besoin de revoir Thomas, elle fuit mais reste dans la même ville que lui. Ambivalence aussi de la nature avec la forêt menaçante, hostile et la petite forêt cocon de son petit jardin où elle trouve un certain apaisement.
Clémence arrive, doucement, avec l'aide de Gabriel, à surmonter sa terreur, sa solitude mais elle se laisse envahir par une rage dont elle va devenir l'esclave. Donc, pas de vraie reconstruction, Clémence restera marquée à jamais par la relation toxique avec Thomas mais aussi par son geste qui clôt le roman.
J'ai également aimé un point plus anecdotique du roman, l'hommage que l'auteur rend au travail très dur du boulanger/e, à sa symbolique, aux gestes, au lien que le pain crée entre les gens.
Commenter  J’apprécie          132
Clémence vient de fuir le foyer conjugal, son conjoint Thomas qui la violente depuis si longtemps qu'elle en a oublié le temps d'avant. Elle s'est installée à 13 kilomètres de lui, dans une maison petite et laide et a retrouvé un travail de boulangère. Son existence se borne à fuir et à tenter de se défaire, maille après maille, de l'emprise de cet homme. Mais elle prend conscience que le départ n'était rien, une simple propédeutique à une douleur plus grande encore : car peut-elle se défaire de Thomas ? Et le veut-elle ? Les orages de l'âme sont sûrement les plus violents quand ils éclairent le désastre que les catastrophes ont produit.

« Ces orages-là » est un terrible roman noir écrit par Sandrine Collette. Il prend d'emblée aux tripes, aux pensées et aux os, il broie par la violence symbolique que chaque mot transporte, il happe le lecteur dans la souffrance brute et brutale vécue par Clémence.

Avec un style incisif, burinée à l'encre des coups, l'auteure rend admirablement l'épreuve que traverse Clémence. Elle dépeint cette femme étique qui est arrivée à l'extrême limite d'elle-même, porteuse d'un épuisement qu'elle essaie de contenir dans une course effrénée en avant ; et qu'elle entretient du même coup. le point de vue narratif adopté est celui de Clémence, porté en troisième personne. Cela autorise une distance au personnage, et pourtant, nous sommes immergés dès le départ dans l'intrigue, la tentative de Clémence de se reconstruire et se défaire de l'emprise de Thomas. L'auteure nous en décrit la mécanique : il l'a séduite, valorisée, puis isolée de ses connaissances, et enfin a commencé à l'abîmer psychologiquement, l'humilier, l'inférioriser et lui faire croire que lui seul pouvait la sauver.

« Ces orages-là » est d'un grand réalisme, glacé et glacial. L'intrigue restitue bien la condition psychique de Clémence, à bout de souffle et d'existence, en lisière d'être. Et il pointe de manière très sensible toutes les ambivalences qui l'animent et meurtrissent son âme. Mesurant sa solitude extrême, le dénuement et le vide auxquels elle confronte, Clémence se demande s'il ne vaudrait pas mieux qu'elle retrouve Thomas : peut-être que le mépris et l'humiliation seraient moins insupportables à endurer que la solitude la plus nue ?

Ce roman noir est d'une dureté cruelle, un minéral brut ; un diamant peut-être car il nous dit la force de Clémence, par-delà l'épuisement, un diamant noir en somme. le propos est d'une grande finesse psychologique, d'une lucidité si aigue qu'elle n'en est que plus douloureuse ; de celle dont la blessure est la plus rapprochée du soleil, selon une formule de René Char.

Et puis vient le temps de la fin, une fin en pirouette, car décidément, l'humain reste insaisissable, qui ne se réduit jamais à une simple équation. Douloureusement magistral.
Commenter  J’apprécie          120
Elle court, Clémence. Elle court en pensées. Pour oublier. L'oublier - lui. Oublier. Tout le mal. La souffrance. La peur. La forêt. La nuit. Oublier les humiliations sans nom. La maltraitance psychologique. Ça court dans sa tête. Son corps se met en branle - nausée. Effarement. Comment - comment a-t-elle pu ? Comment a-t-elle fait ? Pour rester si longtemps. Trois ans, Clémence - comment a-t-elle pu supporter aussi longtemps ?

Dans sa tête, il y a toujours la forêt. Ses jambes qui la poussent à courir - encore, Clémence. Encore un peu. Instinct de survie. Jusqu'à ce que le jour se lève. Cours, Clémence, cours.

Un jour, Clémence a pris ses jambes à son coup. Elle s'est enfuie. Elle savait bien que ce ne serait pas facile - l'emprise, bordel. L'emprise. Insidieuse. Encore. Toujours. Elle le revoit, lui et son charme. Son beau sourire de tombeur. Qui l'attire dans son filet.

Cours, Clémence. Cours. Elle s'arrête. le temps de reprendre son souffle. Se reconstruire, ça prend du temps. Elle s'arrête et ose laisser entrer quelques autres dans sa vie. Elle court toujours dans sa tête - instinct de survie.

Elle court. Pour enfin, peut-être, se libérer.

Sandrine Collette signe un roman sur les affres d'une femme qui tente de se libérer de l'emprise. Une emprise qui a tout détruit sur son passage. Avec sa verve et son écriture qui frappe, elle expose à merveille à quel point ces « elle aurait dû... » n'ont pas leur place. Avec sa poésie qui claque, elle parle d'une terrible émancipation après les peurs, les pleurs, les cris et les chutes.

C'est d'une beauté incroyable. Un uppercut littéraire dont on ressort un peu sonné et complètement accro. On en devient un peu maso et on en redemande : frappez encore, Sandrine, avec vos mots.
Commenter  J’apprécie          122
Je pense toujours que cette auteure ne pourra pas continuer à me surprendre, à me transporter dans chaque nouvel univers qu elle partage avec ses lecteurs lorsqu'elle écrit un nouveau roman. Je constate avec bonheur que si,une fois encore je suis epoustouflee par la puissance de son écriture, par l analyse très profonde de ses personnages, par sa facilité à nous entraîner vers une fin que je n attendais pas.A peine ce roman terminé, je rêve du prochain. Où va t elle pouvoir nous emporter ?
Quel talent !
Commenter  J’apprécie          120




Lecteurs (1643) Voir plus



Quiz Voir plus

Des noeuds d'acier

Quelle a été la durée de la peine de prison purgée par Théo ?

16 mois
17 mois
18 mois
19 mois

15 questions
78 lecteurs ont répondu
Thème : Des noeuds d'acier de Sandrine ColletteCréer un quiz sur ce livre

{* *}