Cela faisait longtemps que je souhaitais découvrir l'univers de
Sandrine Collette mais il y avait toujours tant de tentations littéraires autres que j'avais un peu oublié mon envie. Cette rentrée littéraire me donne l'occasion de faire connaissance avec l'auteur à travers "
Ces orages-là".
Et ce fut un vrai orage que déclencha en moi la lecture de ce roman par la puissance de l'écriture, capable de m'insuffler le ressenti de Clémence, comme si j'étais elle, comme si je n'étais pas confortablement installée au chaud.
Le roman s'ouvre sur une scène saisissante, glaçante d'une femme-proie tentant d'échapper à un homme-prédateur, presque nue dans une forêt, la nuit. Puis, total changement de décor; nous faisons connaissance de Clémence, 30 ans, boulangère, qui vient de s'échapper d'une relation toxique, délétère de trois ans avec Thomas; elle a trouvé une petite maison "laide" avec un minuscule jardin, un nouveau travail. Elle est totalement brisée psychologiquement après avoir été rabaissée, humiliée, isolée, terrorisée mais elle a trouvé l'immense courage de fuir pour sauver au moins sa vie. Elle fait la connaissance de son voisin, Gabriel, détruit lui aussi par le suicide de son fils quinze ans auparavant et sa compréhension, son empathie vont aider Clémence sur le dur chemin de la reconstruction.
Nous devenons Clémence, au fil de la lecture, tant l'analyse psychologique est fouillée; l'écriture forte, ciselée, puissante nous fait découvrir une enfant surdouée, qui pour se faire accepter, se dévalorise et continuera à se dévaloriser pour ne pas être seule. On ressent toute son ambivalence; elle fuit mais elle se demande si, finalement, elle ne méritait pas ce qui lui arrive; elle fuit mais elle résiste au besoin de revoir Thomas, elle fuit mais reste dans la même ville que lui. Ambivalence aussi de la nature avec la forêt menaçante, hostile et la petite forêt cocon de son petit jardin où elle trouve un certain apaisement.
Clémence arrive, doucement, avec l'aide de Gabriel, à surmonter sa terreur, sa solitude mais elle se laisse envahir par une rage dont elle va devenir l'esclave. Donc, pas de vraie reconstruction, Clémence restera marquée à jamais par la relation toxique avec Thomas mais aussi par son geste qui clôt le roman.
J'ai également aimé un point plus anecdotique du roman, l'hommage que l'auteur rend au travail très dur du boulanger/e, à sa symbolique, aux gestes, au lien que le pain crée entre les gens.