Gaston Compère, une fois de plus, nous invite dans un de ses labyrinthes que ce soit de prose ou de vers, de fantastique ou de lyrique: son écriture voile plus qu'elle ne dévoile. Et avouons-le, la voulons-nous vraiment la clef de l'interprétation ou préférons-nous rester perdu quelque part dans un monde imaginaire riche en allusions ou symboles mais qui garde ses mystères pour lui ?
Et cette fois, l'ami, le compère a fait très fort : deux textes, une série de poèmes et un récit de superposent : récit en haut de la page, vers en bas; le tout avance se répond ou se brouille dans sa complexité; deux textes mais aussi un schéma pour son labyrinthe. Est-ce un parcours initiatique circulaire, qui se mord la queue ? Ou une autre de ses énigmes posées au lecteur en guise de couche d'interprétation supplémentaire.
Il y est fait allusion d'un théâtre, d'un directeur de théâtre, d'une pièce à jouer l'an prochain autour du personnage de Satan tandis qu'au programme se joue encore Bérénice. On y retrouve aussi la relation père-fils, de l'ingratitude, de la déchéance du père puis celle du fils (plus cruelle mais en quelque sorte expérimentale en guise d'art de vivre) ainsi que du théâtre. On y décèle encore l'antagonisme bleu et noir qui qualifie le regard mais aussi l'humeur du narrateur : bleu espoir et noir renoncement à l'écriture; antagonisme tantôt très fort qui pourtant se résorbe "oeil bleu autant dire noir"
En contrepoint pour ne pas dire en échos inversés, les poèmes hallucinés, empreints d'une forme subtile de religiosité, de compassion, de communion, tour à tour adressent un hommage des plus amicaux à 7 écrivains contemporains.
Et le plan, me direz-vous: À quoi ressemble-t-il ? Plié en 8 sous la jaquette, il se présente comme une roue tendue de vers ou de bribes de phrases extraites du livre. le plan propose deux chemins : celui du prosateur et celui du poète. le plan ? Il nous souligne ce qui ponctuait les poèmes : la respiration.
Tout se résout-il, je veux dire les antagonismes, Satan/religiosité, bleu/noir, espérance/déchéance, solitude/communion, théâtre/vie dans ce parcours initiatique par la fascination de la poésie ? La question restera non répondue.
"Être, vivre, agir" tels sont pourtant les thèmes des derniers poèmes. Voilà sans doute notre destin.
J'y ajouterais lire et écouter !
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Il vivait sans vivre, tenant tout autre vie que la sienne propre pour nulle et misérable. «Non, dit-il, même pas misérable : nulle, oui, nulle. Il n'est pas de comédien qui ne soit mort. Le spectacle multiplie la mort, et les morts. Le metteur en scène est un entrepreneur de pompes funèbres. Je suis un entrepreneur de pompes funèbres. Et le mort en même temps. C'est un peu
comme si je cumulais. »
l'oeil est noir que j'ai fermé
Oh Salah vous le savez mieux que moi
(salez vos yeux ils pleureront)
mieux que moi qui ne sais rien
Vous le savez qu'il faut m'interdire tout rêve
et que les routes du ciel se cherchent comme
l'épouse et l'époux au-delà de leurs doigts déserts
Entrer enfin dans le théâtre est notre sort
Prendre enfin le chemin des coulisses est notre sort
Sortir des coulisses enfin est notre sort
Nous jouerons
Nous marcherons
Nous tomberons
Rencontre avec Gaston Compère - 2