Le voyage d'Orient n'est pas qu'un inventaire. Je veux le croire. Je dois avouer mon étonnement d'être chaque jour plus émerveillé par la persistance de ces gens. La vie s'accroche. Cette chronique n'est pas celle du renoncement ni celle de l'entomologiste. Le souvenir des haines renverse les cœurs, de l'Euphrate au Nil, ou encore le long des rives du Grand Zab, au croisement du nord de l'Irak et du Hakkaâri, là où la steppe se fracasse au contact des montagnes; une tectonique des plaques qui fut aussi celle des peuples et des religions. Caïn tuant Abel pour une querelle d 'offrande à Dieu. Les pistachiers, les amandiers, les oliviers, les cerisiers et les pieds de vignes refleurissent après chaque hiver, après le froid et la neige. Vues du ciel, les nuances du sol ressemblent à des kilims qui auraient été assemblés avec grâce par une main invisible. L'humain reste au centre de cette existence spirituelle et agricole, dans les monastères, dans les foyers, une vallée, un recoin paisible, une église aux murs bas. Le début du printemps y est humide, l'été brûlant. L'eau dégringole des cours d'eau canalisés pour les besoins de l'irrigation. Les saisons défilent.
Je commence à m'agacer, écrit-il dans un livre d'entretien, d'entendre certains se réclamer de leur connaissance du terrain alors qu'ils y arrivent en avion, sont attendus par une limousine à l'aéroport et dinent à l'ambassade. Le terrain, c'est la marche à pied, la poussière, la chaleur, la rencontre du petit peuple et pas seulement du chauffeur de taxi. Il se plaint que "l’être humain" ait disparu des débats et qu'il soit "théorisé" par des experts autoproclamés que l'on invite sur les plateaux de télévision. Il es facile depuis Paris de décider pour les autres, de leur dire quoi faire lorsque l'o nn'a pas expérimenté dans sa chair l'enlèvement d'un proche ou le mitraillage d'une église. Ceux qui demandent -exigent- à grand cris des intervention militaires sont souvent ceux qui n'on jamais touché une arme de leur vie. - p 100
Je veux parler en Turquie des drames où la parole est interdite, les journalistes en prison le droit des minorités bafoué, mais aussi de cet Orient incompris, celui des frontières ont s'accumulent les ambitions déchues : l'Arménie, l'Irak, la Syrie, et même Israël -le plus ancien allié des Turcs dans la région- pour un étrange retournement de situation. Autant de dossiers qui sentent le soufre. Les erreurs du monde politique, comme la manipulation de l'islam à des fins électorales participent à ce malaise. Nous savons maintenant que la Turquie de Tayyip Eldogan a armé les forces de Daech à ses débuts, aveuglé qu'il était par une haine personnelle contre le Président syrien Bachar al-Assad - l'ancien "frère" - p118
"On peut démontrer au monde que le terme "arabe" ne s'applique pas nécessairement aux musulmans et qu'il comprend aune importante population chrétienne. [...] "le maintien de la présence des chrétiens dans cette partie du monde est indispensable non seulement pour la chrétienté, mais aussi pour l'islam. Il ne concerne pas simplement l'Orient, mais toute la planète" déclare -quant à lui- Mohammed Sammak, un penseur proche du grand mufti du Liban. Les chrétiens ne sont donc pas seuls. mais la voix de ceux qui les défendent reste inaudible, tant dans le monde musulman qu'en Europe, où ces question n'intéressent plus car elles vont à l'encontre des idées reçues, comme d'un certain confort intellectuel. - p98
Les massacres du Sinjar ont eu lieu quelques jours auparavant. Ce massif de petite montagne se trouve en contrebas de Mossoul, vers la Syrie et les Yézidis en habitent traditionnellement les pourtours. [...] Hamadan apparait déjà comme le nom d'un village martyr, avant que les exaction de Kôjo, commises un 15 août ne soient révélées par la presse internationale. On parle de sept cents hommes exécutés de sang froid [...] Ils ont tuté tous les hommes, ils ont pris et vendu les filles, des femmes enceintes ont été éventrées. [...] Nous avons marché trois jours sous le soleil, indique avec colère Bassam, un homme de quarante ans qui était aide soignant. "Il n'y a personne pour nous évacuer. J'entends encore le hurlement des condamnés résonner dans ma tête. Avant hier, des milliers de gens voulaient passer en Turquie, des chrétiens et des yézidis. Pourquoi la frontière est-elle fermée ?" achève t-il. p39
Sébastien de Courtois, Sur les fleuves de Babylone, nous pleurions .Sébastien de Courtois présente son livre Sur les fleuves de Babylone, nous pleurions : le crépuscule des chrétiens d'Orient, aux éditions Stock http://www.laprocure.com/fleuves-babylone-pleurions-crepuscule-chretiens-orient-sebastien-courtois/9782234079120.html