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Citations sur Psychothérapie de Dieu (122)

Les bénéfices de la religion sont incontestables. Un enfant ne peut se développer qu'au contact du corps de celle qui le sécurise et lui apprend à vivre en prenant soin de lui. Quand une telle proximité sensorielle imprègne dans sa mémoire biologique une trace non consciente, l'enfant acquiert une confiance en lui qui lui donne le plaisir d'explorer et d'apprendre le monde des choses et des gens. Au cours de sa troisième année, quand l'enfant a appris à parler, il continue à développer ce processus de sécurisation-exploration. Mais, à ce niveau de son développement, ce n'est pas seulement le corps de sa figure d'attachement qui lui sert de base de sécurité, c'est aussi ce qu'elle dit. C'est à partir de ce que racontent ses parents que l'enfant apprend à voir le monde. Sa représentation du réel dépend désormais de l'éclairage verbal énoncé par ses figures d'attachement. Le fait de partager les mêmes récits et de croire au même monde invisible crée un sentiment de familiarité, une appartenance sécurisante et fortifiante. Les rituels domestiques et religieux constituent des exercices de mémoire où l'on apprend à vivre avec ceux qu'on aime. Ils organisent des sortes d'entraînements à la transcendance où les chants, les prières, les objets de culte, les comportements synchronisés, beaux et étranges, impulsent “l'élévation de l'âme”.
p. 291-92
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Aujourd'hui les travaux en neuro-imagerie, en psychologie et en psychosociologie éclairent ce débat dont les résultats sont présentés dans ce livre.
Trois idées ont orienté nos réflexions :
1. La religion est un phénomène mental qui caractérise la condition humaine, universellement, quelle que soit la culture. Mais chaque culture donne à cette tendance une forme différente.
2. La religion a un effet organisateur du groupe. Elle agit sur les individus qui composent la communauté et tutorise leurs développements neurologique, affectif et psychologique. La théorie de l'esprit permet d'observer et d'expérimenter comment s'établissent les transactions entre le développement du cerveau qui donne l'aptitude à se représenter l'invisible et les récits d'alentour élaborés au cours de l'histoire du groupe.
3. L'effet socialisateur des âmes et des scénarios rituels, la hiérarchie des valeurs qui crée un sentiment de soi moral et estimable, la merveille des œuvres d'art religieuses et de l'élan transcendantal sont mis en lumière par les religions. Mais il existe aussi des mondes mentaux sans dieu. Les agnostiques et les athées en parlent peu puisqu'ils ne s'en préoccupent pas, alors que les croyants organisent leur vie quotidienne autour de l'élation qui les amène à Dieu.
La principale différence entre les sans-dieu et les théistes se trouve dans le sentiment de sacré que certains ressentent comme une évidence, alors que d'autres n'en éprouvent pas le besoin. Cette différence sentimentale organise leur représentation du temps.
p. 290
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Depuis quelques années, de nombreux chercheurs sont en chantier pour comprendre l'effet psychologique de la croyance en un dieu. Ils ne sont ni historiens ni prêtres, certains sont croyants, d'autres ne le sont pas, mais ils veulent découvrir l'influence d'une croyance sur un psychisme. Comment a-t-on accès à une représentation impossible à percevoir qui pourtant gouverne notre existence ? Comment ce monde invisible se met-il en place au cours du développement neurologique, affectif et narratif dans un contexte culturel donné ? Quels sont les bénéfices mentaux et sociaux d'un tel processus, et pourquoi dérivent-ils souvent vers des maléfices ?
p. 289
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À L'AUBE DE LA SPIRITUALITÉ
L'homme est le seul animal capable de s'arracher à la condition animale grâce à sa créativité.
p. 273
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Le désir de sexe devient une souillure, les contractures du visage, les spasmes du corps sont les stigmates honteux de la jouissance. Il faut purger son âme, comme on purge son ventre, il faut expulser le désir afin de purifier sa conscience.
Un plaisir honteux contamine le regard de celui qui éprouve ce sale désir : « Quiconque regarde une femme [...] a déjà commis l'adultère avec elle », puisque le simple fait de la désirer est une souillure. « J'étais tranquille, j'étais pur quand il n'y avait pas de femme. Il suffit que l'une d'elles apparaisse pour que la tentation me torture. Elles sont coupables puisque lorsqu'elles ne sont pas là, nous, les hommes, sommes de purs esprits consacrés à Dieu. Si elles n'existaient pas, nous ne serions que béatitude et spiritualité. De quel droit nous rabaissent-elles et nous attirent-elles vers la salissure sexuelle ? » Ce phénomène de projection est classique dans la psychopathologie du quotidien : c'est une « opération pour laquelle le sujet expulse de soi et localise dans l'autre [...] des qualités, des sentiments, des désirs [...] qu'il méconnaît et refuse en lui ».
p. 262-63
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LE SEXE ET LES DIEUX
Depuis longtemps on associe le sexe et la maladie. Même un acte sexuel moral qui implique un risque de maladie est un peu dégoûtant, alors vous pensez bien que les homosexuels sont encore plus dégoûtants, eux qui ne connaissent pas l'acte moral de la procréation et n'éprouvent que le plaisir immoral de la fornication.
L'homosexualité est, pour ces croyants, plus choquante que la sexualité des prêtres, qui sont des hommes après tout. Il leur arrive de désirer une femme, c'est bien normal. Ils ont fait vœu de célibat, mais pas toujours de chasteté. Et puis, les femmes sont tellement séductrices, n'est-ce pas ? Pour une croyante chrétienne, un prêtre est un homme prestigieux. Il côtoie Dieu, il lui présente les nourrissons le jour du baptême, il aide les mourants à gagner le Paradis. Tous les dimanches, il est le chef de chœur des chants et des prières, il nous élève vers la spiritualité dans une église où l'on se sent bien. Un tel homme attire de nombreuses femmes pour qui l’admiration, l’affection et la sexualité sont des sentiments mêlés, si bien qu’un prêtre sur deux a des “maîtresses régulières” au cours de son sacerdoce.
p. 257
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La jouissance conjugale, combattue par l'Église, fut appelée « fornication » pour signifier la débauche d'une rencontre sexuelle sans fruit. Ce terme religieux s'appliquait aux prostituées et aux couples mariés qui se rencontraient sans avoir l'intention de faire un enfant, juste pour le plaisir ! Les modèles de l'amour chrétien sont asexués : la Vierge, Joseph et le Christ sont trop purs pour pratiquer le sexe. Seule la sexualité de reproduction est morale.
La Torah juive accorde aux époux le « droit de se réjouir mutuellement ». Le plaisir est acceptable si la fonction sociale du couple est pérenne, alors que ce plaisir est totalement interdit à l'extérieur.
L'hindouisme et le bouddhisme fournissent aujourd'hui les champions de l'abstinence, alors qu'à l'origine le sexe était considéré comme un simple élément naturel de la condition humaine. L'acte était source d'éveil, à condition que le désir, toujours suspect, n'entrave pas le progrès spirituel. Le sexe est céleste puisqu'il donne la vie, expression de la danse divine — le Kama-sutra en est l'illustration.
p. 250-51
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Le christianisme, lui aussi, a pris forme lentement. C'était une secte juive jusqu'à la conversion de Constantin en 312. Séduit par cette religion d'amour, il en a fait une religion d'État au concile de Nicée (325)8. La population a adhéré sans contrainte ni massacres à “l’illumination” de l'empereur qui, en se rapprochant de Dieu, a remporté la victoire. Partager la religion du chef est une machine unificatrice efficace.
L'islam connaît les convulsions qui précèdent le dogme. Dès la mort du prophète, chiites et sunnites sont entrés en guerres fratricides, comme l'a été le christianisme jusqu'à l'Inquisition qui a fait cesser les guerres intestines (1231-1233) et rassemblé la chrétienté. La haine du plaisir sexuel se retrouve dans de nombreuses religions.
p. 249-50
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Les jeunes Chrétiens aujourd'hui sont plus permissifs que leurs parents. Les relations prénuptiales sont moins considérées comme une grave transgression, le mariage est une entente entre jeunes gens, et non plus une autorisation donnée par le prêtre ou la famille. Le divorce est une triste libération et non plus une faute honteuse. Dieu et la société, n'ayant rien dit pour l'union, n'ont rien à dire pour la désunion.
Au milieu de cette chrétienté souriante, les jeunes fondamentalistes s'accrochent aux anciennes valeurs. Ils sont fiers de respecter la morale divine. Les hommes se sentaient grandis par leur rôle de chef de famille et les femmes acceptaient cette hiérarchie vertueuse qui consistait à “héroïser”, donc à sacrifier les pères et à entraver les femmes pour les consacrer à la famille.
p. 246
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Les jeunes, de moins en moins respectueux des religions, sont de plus en plus intéressés par la spiritualité. Ils en font une transcendance, un mélange d'art, de don de soi et de sens donné à l'existence. Afin de réaliser un projet de vie, ils s'engagent dans les ONG, dans l'armée ou dans des activités sociales où ils offrent les aides affectives et utilitaires que leurs parents trouvaient dans les pratiques religieuses.
« La foi aveugle envers les textes sacrés du bouddhisme, c'est de la stupidité* », a dit le Dalaï-Lama. Les jeunes Chrétiens, en Europe, élaborent une foi personnelle, pimentée de bouddhisme. Les laïcs et les religieux s'intéressent à la science du fonctionnement mental où les découvertes récentes de la neurobiologie expliquent la dimension spirituelle de tout être humain. Pourra-t-on demain croire en Dieu, l'aimer et le célébrer sans se soucier de la religion ?
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* Dalaï-lama, Conférence à l'université de Strasbourg, 17 septembre 2016.
p. 242-43
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