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4,35

sur 6085 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Au début, j'ai eu un peu de mal avec cette sorte de religion un peu idiote qui dit qu'il y a un paradis à la source du vent. Car elle force les hommes à déployer une énergie folle pour remonter le vent plutôt que de bâtir pour s'en protéger. Une fois dépassé cette bizarrerie, l'histoire est très prenante et l'univers totalement imaginaire aussi riche que passionnant.
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Un livre impressionnant avec de nombreuses qualités, mais pourquoi tant d'hermétisme?

ce roman décrit le futur d'un monde dévasté, livré à des vents furieux, d'une humanité confinée à part quelques castes, dont une Horde de guerrier(e)s formée depuis l'enfance à remonter à pied le vent jusqu'à sa source pour en percer le secret, et formée de membres dont chacun a sa spécialité ... et sa propre narration, indiquée dans le texte par un signe ésotérique au lieu des incises classiques.
l'expérimentation littéraire est totale, le texte sensoriel, précis, bourré de lexique médiéval, de néologismes et d'audaces syntaxiques; l'empathie est là pour cette galerie de vingt personnages et narrateurs, dont chaque intervention est chargée d'un style spécifique.
pas moins impressionnant, la science inventée par l'auteur autour du vent , autour de laquelle s'est adaptée cette civilisation (avec retranscription pictographique de séquences de vent), la finesse de la narration qui nous introduit peu à peu dans cet univers au sens propre du terme (géographie, philosophie, langage).

Dès lors on est un peu gêné que tout ce génie , et le terme n'est pas volé, s'abîme régulièrement au détour de considérations ésotériques parfaitement absconses, comme cette longue séquence de dialogue de la bibliothèque, où l'auteur bâtit de toutes pièces des concepts et raisonnement auxquels il est compliqué de trouver une source de plaisir ou de clé voire de plaisir narratif, sinon, éventuellement , pour apprécier la fioriture exotique que cet hermétisme apporte à l'ensemble... mais au prix de pages pénibles à lire.

C'aurait pu être un chef d'oeuvre (et quelque part, ç'en est un), mais cette prétention conceptuelle, qui va au delà de la prétention d'embarquer le lecteur, laisse l'impression un peu désagréable que l'auteur se fiche un peu du monde.. et quand ce monde se trouve être le lectorat, eh bien...
cela étant, un livre est un tout : à prendre ou à laisser. et je suis bien embêté de me situer à mi-chemin.
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Lecture intéressante et originale tant sur le fond que sur la forme.
Toutefois, mon bilan reste mitigé sur l'ensemble du livre que j'ai trouvé poussif et avec de nombreuses longueurs. Il aurait pu être écourté d'au moins 200 pages. de nombreux passages sont parfois très complexes à lire ou comprendre.
Il reste une lecture intéressante avec de nombreux concepts et questionnements sur la quête, le sens de la vie…
J'apprécie beaucoup l'auteur en interview, j'aurai aimé apprécié d'avantage le livre…
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Bien qu'édité dans ces collections, ce n'est pas de la SF. On est plus dans le fantastique au vu du bestiaire et de la métaphysique globale.
Surtout, ce livre est une aventure humaine avant tout. Il faut le savoir.

Style pompeux dans les premiers chapitres. Lourdaud dans des champs lexicaux techniques (marine, alpinisme, aéronautique et j'en passe).
Vocabulaire vieille france des années 50 qui détonne avec ce que devraient être certains personnages. Frisant le ridicule par moments.
Un brouillard général un peu snob surplombe ce roman.

Critique qui revient souvent (et légitime), 22 personnages : 22 narrateurs... Original, mais inutile. le style n'en est pas plus efficace. Les conventions ont parfois du bon.
Ces aller-retours incessants en page 1 pour reconnaître les glyphes de chacun des personnages prenant la parole dans les dialogues est juste usant...

Heureusement la majorité s'effacent progressivement, d'autres prennent le pas en importance. Cette aberration numéraire fait également qu'on se dessine très mal physiquement les personnages. La description de chacun étant succincte. Malgré quelques maigres rappels, on peine à savoir qui ressemble à quoi. Frustrant.
Certains personnages importants sont caricaturaux, avec des comportements illogiques comme on en voit parfois dans les mangas ou récits pour ado.

A propos du postulat de base, psychologiquement ça ne tient pas la route, aucun être humain sain d'esprit ne suivrait ce mode de vie, par pur choix, sans abandonner.

On retrouve également à intervalles réguliers quelques aberrations scientifiques à propos de la résistance/force des hordiers, alors qu'ils sont parfois stoppés par des broutilles au vu de ce qu'ils ont maîtrisé auparavant.

Au bout de quelques chapitres on comprend vite comment seront construits les enchaînements narratifs, et c'est un peu trop mathématique pour être plaisant sur le long terme.
S'ajoute la redondance des élucubrations sur le "vif", cette force extra physique qui habite le monde. C'est sympa au début car ça donne du sens au côté métaphysique de l'univers du roman. Mais ça devient quelque peu du remplissage au fil des chapitres, le concept reste plutôt survolé au final.

Comme énoncé dans d'autres avis, nous balader pendant 700 pages pour la fin la plus cliché qui soit, est des plus décevant. On dirait la fin d'un vieux téléfilm. Franchement dès le début du roman et de l'explication de la quête des hordiers, on se dit illico "pitié, pourvu que la fin ne soit pas 'ça'...".

Certes le roman se tient de lui-même, par la force de sa narration et le côté philosophique et humaniste qu'il développe, mais il n'y a eu aucun effort sur ce point et on referme le bouquin avec un profond sentiment d'inachevé. Car toute la trame du livre nous rabâche cette unique finalité à atteindre.

Comme dans beaucoup de pavé que j'ai pu lire, on arrive fatidiquement à un moment où on se dit, là c'est trop. J'ai déjà lu ça dans un autre chapitre. Ascenseur émotionnel nourri aux cliffhangers pétard mouillé.

Sans révéler quoique ce soit, il subsiste également des points qui restent en suspens. Des précisions qu'on aimerait voulu avoir sur le pourquoi de certains événements. Avec le recul, quelques éléments sont finalement inutiles à l'histoire, ont servi à broder, alors que présentés comme importants durant la narration.

En fin de lecture, j'en garde le sentiment global d'un récit un peu décousu, mais il faut reconnaître que j'ai voulu néanmoins aller à la fin, sans vraiment me forcer. Damasio a ce "quelque chose" qui vous pousse à dévoiler la page suivante. On ne peut pas lui retirer ça, soyons honnête.
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Très probablement n'ai je pas encore le niveau pour ce genre d'ouvrage.
Je reconnais toute la poésie des personnages, et l'originalité du monde proposé, toutefois j'ai eu beaucoup de mal à entrer dans l'histoire et j'admets que je l'ai terminé plus par entêtement que par plaisir.
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Que dire de ce livre si ce n'est que finalement, il m'a profondément déçue.

Pourtant, tous les ingrédients étaient là.

J'ai aimé le style, le parti pris de la pagination (qui fait sens une fois le livre terminé), l'univers dans lequel nous plonge chaque personnage. J'ai aimé les accompagner dans leur quête, leurs souffrances (et les lecteur·ices ne sont pas épargné·es de ce côté là). Je croyais à chacun d'entre eux. Leur manière de s'exprimer, leurs histoires, leurs croyances, l'auteur nous les rend réels !

Mais ce qu'il me reste une fois la dernière page tournée, c'est vraiment de la déception et de l'amertume. Tout ça pour ça ? La fin que je voyais se dessiner bien 200 pages avant le dernier chapitre finit par arriver, abrupte, fade et définitive. Avoir construit un tel univers pour le balayer d'un revers de main, cela me fait l'effet d'un enfant qui passe des heures à ériger un magnifique château fait de minuscules pièces en bois pour finalement mettre un coup de pied dedans. Quel gâchis.

Je rajouterais même que la toute fin du livre m'a mise en colère puisque dans son édition de 2004, l'auteur choisi d'ouvrir ses remerciements par les paroles d'une chanson de Bertrand Cantat un an après le meurtre de Marie Trintignant.
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Yaaaak ! Êtes-vous fait de l'étoffe dont sont tissés les vents ? Prêt à contrer ?
C'est grâce à mon amie Nicola que j'ai tenté le grand saut. Pas celui en parachute, mais dans le domaine du contre, de la horde, la horde du contrevent.
Je n'aurai sans doute pas tenté l'aventure seule tant ce livre m'intimidait. Mais à la faveur d'une lecture commune, des ailes m'ont poussé et j'ai fait le grand saut dans le vide.
Fffflousschh !!!! dérapage sans trop de casse dans le sable, attention aux projections de gravier au passage.
Je redoutais cette lecture et après avoir ingurgité mes 701 pages, le voyage a tenu ses promesses en termes d'enchantements et d'embûches.
Le démarrage s'est avéré laborieux et ardu, Damasio n'épargne pas son lecteur et en guise d'introduction, il lui plonge la tête directement dans le sable, en vérifiant que les grains crissent aimablement sous les dents. J'ai eu la sensation d'être emmurée sous une gangue de sable, lorsqu'à la plage des gamins vous enterrent sous le sable mouillé et que vous arrêtez de rigoler au bout de 2 minutes quand vous avez l'impression qu'il va être difficile de s'en sortir sans une aide extérieure. le sable je l'ai avalé, recraché, comme une sensation de vent violent qui me le remettait dans la bouche sans se lasser. Après cette première mise en bouche originale, le lecteur atterrit brutalement dans la flaque de Lapsane, où là, l'idée est plutôt de vous plonger la tête sous l'eau pour vous empêcher de respirer. Cette eau, elle va s'infiltrer en vous par tous les pores de la peau. Mais dommage pour vous, une fois la tête sortie de l'eau, ne vous croyez pas aussi facilement sorti d'affaire, vous ne pourrez que constater qu'un immense siphon s'est formé, prêt à vous aspirer.
Heureusement, entre deux sablés, une petite noyade et un combat mortel, M. Damasio vous a prévu des petites récréations bienvenues.
Comme le vent, unique héros de cette horde, mon ressenti a beaucoup fluctué lors de cette lecture, tantôt happée, ferrée, tantôt détachée par des pseudos considérations technico-vento-métaphysiques, un charabia sans queue ni tête qui m'a fait lever les yeux au ciel et survoler certains paragraphes.
Parfois un peu trop de testostérone à mon gout, la majorité des personnages sont masculins et les femmes réduites à des rôles très classiques, bonnes à faire la cueillette, la popotte, jouer à l'infirmière, râleuse, en passant de la chaudasse de service à la pure intello qui n'est intéressée par rien d'autre que la science et son nombril … Quand les stéréotypes ont la vie dure, même dans les autres mondes…
Les personnages masculins sont bien plus attachants et sympathiques ; la verve de Caracole, la bienveillance de Sov, l'intégrité de Pietro, la douceur de Steppe, la fraîcheur d'Arval, la relation joyeuse et fusionnelle des jumeaux Hosrt et Karst. En revanche, la volonté sans faille de l'imperturbable, bas du front et violent Golgoth ne m'a pas convaincue.
Le bilan est une lecture que j'ai trouvé trèèès longue, ardue, avec des personnages qui manquent parfois de nuances (je ne sais pas pourquoi, mais j'ai l'impression de creuser ma propre tombe là, peut-être rapport aux nombreux fans dont je sens les yeux dans mon dos me lancer des éclairs/voire tirer des balles).
Cependant, j'ai été bluffée par la maîtrise de la langue française de Damasio et ses innombrables jeux de mots, son incroyable scène de joute verbale par Caracole, son inventivité à créer des mots, les détourner de leur sens premier (de quoi donner un sacré fil à retordre aux traducteurs, je serai curieuse de savoir comment ils s'en sortent pour les palindromes).
L'auteur a su créer un univers unique, une multitude de personnages, je salue en particulier des éléments typographiques vus dans aucun autre livre auparavant (en ce qui me concerne tout du moins, si des lecteurs connaissent d'autres livres avec ce type d'audaces, racontez-moi !) : des pages numérotées à l'envers comme un compte à rebours de leur fabuleuse quête, des personnages identifiés à chaque paragraphe par un symbole permettant au lecteur de savoir à chaque fois qui s'exprime).
La quête de l'Extrême-Amont a pour moi quelque chose de mystique, chacun y cherche son graal, son paradis, la définition de ce dernier étant bien sûr différente pour chacun. le décompte jusqu'à l'atteinte de l'objectif s'égrène comme les pages. Les chiffres défilent comme le temps, en parabole de la vie, pleine d'idéaux lors de notre jeunesse, d'objectifs, qui se muent au fil des ans en cortège de désillusions, d'embuches, de renoncements, des décès des gens aimés qu'on croyait éternels.
Trois semaines de lecture marquantes et inconfortables, parfois intenses, ou décousues. Je sais que je vais en garder des magnifiques plans-séquences, des mondes bruts et terrifiants avec leur part de mystère...
Une aventure marquante, qui même si elle ne m'a pas complètement embarquée me laissera de beaux souvenirs. Tous en goutte derrière Golgoth !
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Long et verbeux, je ne suis pas surprise que les premières pages en découragent beaucoup.
La horde a quand même enflammé mon imagination et les 250 dernières pages m'ont tenue en haleine comme ça m'arrive trop peu souvent

Encore une fois ma critique est trop courte !
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3 étoiles car je suis resté partagé par ce livre.
Les points positifs sont pour moi son originalité autant dans la structure du récit que dans le monde qui est décrit. Les personnages ont chacun leur personnalité et l'on prend plaisir à les suivre, on tremble pour eux, etc.
Mais, en essayant de ne pas spoiler, on devine la fin assez rapidement (enfin, ça a été mon cas et les critiques montrent que je ne suis pas le seul).
On se dit "non, ça ne peut pas être ça"... et si...
L'aventure est intense et va crescendo, il est donc dommage de finir à plat de la sorte.
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La lecture commençait fort : le premier chapitre a très bien fonctionné sur moi, je l'ai trouvé superbement immersif avec une plongée dans l'action des plus enthousiasmantes. J'étais curieuse de voir où la Horde allait nous emmener et de découvrir cet univers dont les clés n'étaient pas offertes sur un plateau. Avec Alberte, ma copine de lecture, nous nous sommes interrogées sur le mystère de l'origine du vent, sur les buts des hordonnateurs (ceux qui forment et envoient les Hordes), sur les implications de la Poursuite. Nous nous sommes passionnées pour les chrones, ces phénomènes mystérieux, créatures inédites capables de changer la nature des choses qui se sont révélées bien plus importantes qu'un simple bestiaire original – et que les hordiers détournent à un moment le pouvoir potentiellement mortel pour soigner, ce que j'ai trouvé une jolie illustration de la nature à la fois bienfaitrice et dangereuse. Nous avons cherché à deviner les liens avec le temps et son écoulement, notant tous les indices qui nous frappaient, à percer les secrets des personnages, à anticiper la fin (j'ai d'ailleurs eu la surprise de retrouver à l'ultime phrase la confirmation d'une de mes suggestions).
Et puis, je me suis attachée. À Caracole, pour le plaisir des mots, pour son excentricité réjouissante, pour ses côtés plus secrets aussi, pour ses facettes plus ambiguës qui se dévoilent au fil du récit. À Sov, pour sa douceur, sa tempérance, son attachement sincère aux membres de la Horde. À Oroshi, pour son savoir, son intelligence, sa prestance.

Parmi les choses qui ont immédiatement happé mon attention, il y a eu cette invention d'un langage spécifique intuitivement compréhensible même sans pouvoir donner une définition précise et avec lequel on se familiarise au fil du livre. Il n'y avait pas vraiment de dialecte 100% imaginaire – d'ailleurs, les rares mots qui semblaient relever d'une langue fictionnelle m'ont dérangée, disséminés comme ils l'étaient, survenant comme un cheveu dans la soupe –, mais un jargon aux sonorités patoisantes dans la bouche de Golgoth (« Je ne sais pas ce qui berdança dans leur calebasse toute la nuit, ils étaient debout, les cinq, à parloyer, tout affourbaudis autour du tas de centre. J'entendis Oroshi se rebrailler et filer les rejoindre, moi je m'enfouillai dans le duvet pour pas chercher à savoir. ») et, évidemment, tout le champ lexical lié au vent. Sans surprise, le vent est omniprésent : sous ses différentes formes physiques (furvent, slamino, crivetz, etc.), dans la musique (hélitrompes, orgue éolien, accordéoles…), dans les transports (vélichar, voilice, aéroglisseur…), dans les jeux et jouets (hiboos, hélicoons, cerf-violent…). Ainsi que cette écriture du vent à la manière d'une partition musicale puisant dans les signes de ponctuation pour décrire ses mouvements, ses intensités, ses variations, ses pauses…

Il faut ensuite signaler qu'il s'agit d'un roman choral où l'on saute fréquemment d'un personnage à l'autre (fréquemment, c'est-à-dire que ce n'est pas un chapitre par personne, mais parfois plusieurs personnages par page). Aussi, surprend instantanément cette utilisation des signes de ponctuation (encore eux) pour identifier les protagonistes et situer le point de vue. Ces signes de ponctuation – que l'on connaît rapidement par choeur sans se référer à l'aide – ne surgissent pas de nulle part : ils sont le symbole de la fonction de chacun tatoué dans leur chair. (Cependant, si certains liens se font facilement, d'autres sont plus flous à mes yeux.) Quoi qu'il en soit, au-delà de l'originalité qui aurait pu être un peu factice, j'ai trouvé le procédé astucieux pour ne pas alourdir le texte (mettre le prénom aurait donné un air trop théâtral à l'ouvrage) tout en correspondant à ce jeu de ping-pong, ces échanges permanents entre les membres, toujours côte à côte et partageant toutes les expériences simultanément, de la Horde.
C'est du moins ainsi que je voyais les choses au début de ma lecture et je m'attendais à côtoyer chaque membre et ainsi apprendre à les connaître à travers ce puzzle éclaté constitué aussi bien des incursions dans leur tête que du regard des autres hordiers. Finalement, il s'avère qu'il y a des personnages plus principaux que d'autres et que certains resteront très anecdotiques. Les connaissant mal, l'attachement ne se fait pas et leur sort indiffère. C'est un défaut fréquent dans les romans mettant en scène des bandes importantes et, si je comprends la nécessité d'avoir une horde importante – aussi bien pour la pluralité des rôles endossés pour ce voyage d'une vie que pour illustrer la dangerosité du périple par quelques pertes tout en amenant une équipe suffisamment conséquente à la fin du récit –, je l'ai néanmoins regretté dans ce récit qui m'avait donné d'autres attentes au début de ma lecture.
Concernant cette pluralité de voix, j'ai apprécié les distinctions entre chacun. Nonobstant le signe qui précède leur prise de parole, l'on peut souvent savoir qui parle grâce à d'autres indices. Silamphre est attentif aux sons, à la musique, il aborde souvent les événements sous un prisme auditif ; Pietro est davantage dans la description visuelle ; Caracole joue avec les mots, se complaît dans les joutes verbales, folâtre diverge tord s'amuse avec la langue ; Golgoth a son parler à lui ; Larco parsème ses réflexions d'interruptions, ici entre parenthèses. Et les voix des femmes alors ? J'ai bien dit « distinction entre chacun » et le masculin n'était pas neutre car les femmes peinent à se distinguer, leur narration est classique et assez uniformisée, blotties comme elles sont dans leur douceur, leur sagesse, leur pondération. Ce qui nous amène…

… à l'énorme point noir qui m'a fait rager dès les premiers chapitres : les femmes. La Horde du Contrevent, ou un bel exemple de male gaze. Classiquement, elles ont des rôles globalement très féminisés : Aoi est cueilleuse et sourcière, Alme soigneuse, Callirhoé est « feuleuse » et s'occupe du feu qu'elle maîtrise en toutes circonstances et peut allumer en toutes circonstances (mais aussi de la cuisine du coup)… Toutefois, que je sois claire, les femmes contrent avec les hommes depuis le début du voyage, elles affrontent les mêmes dangers et, comme eux, elles ont été séparées de leurs familles et entraînées depuis leur plus tendre enfance.
Pourtant, nous savons qui est considérée comme jolie ou pas, qui couche avec qui (avec un relent de jugement selon le nombre de partenaires), et cela est dit et redit mille fois (or, à quelle fin ?). Nous avons la « belle et ingénue » Coriolis, « l'incomparable douceur » d'Aoi, la « chaleur » de Callirhoé (certes le terme est en rapport avec sa fonction, mais en l'occurrence, ce n'est pas ça que ça m'évoquait, plus encore en ayant lu la suite) tandis qu'Alme apporte la « douceur » et Oroshi « l'élégance », bref, des femmes qui, lors d'une – autrement géniale – présentation de la Horde, seront introduites par les mots « blotties et couvées, lovées, fragiles, notre bien le plus précieux ». Coriolis (à qui s'accolera à un moment donné l'expression « ma belle chienne de Trace », je pose ça là, faites-en ce que vous en voulez) est l'objet de bon nombre d'attentions lourdingues et joue le rôle de la nouvelle mignonne à « l'enfantine grâce » (enfantine, mais avec des seins qui ne cessent de se manifester allant jusqu'à « étincel[er] en silence pour Caracole ») sur lesquels ils sont nombreux à baver tandis qu'Alme prend cher une bonne partie du roman (je ne vais même pas citer les propos qui sont tenus à son égard, mais j'ai été choquée par le mépris de ses « camarades »). Enfin, Callirhoé est la victime d'une scène à la violence inouïe psychologiquement qui aurait pu avoir l'avantage de cristalliser des tensions, des dissensions, des émotions dans la Horde si on ne passait pas si rapidement dessus. À mes yeux, tout cela a vraiment contribué à égratigner l'image de la Horde. (Et quelques femmes croisées en route ne seront pas pour leur reste…) Seule Oroshi, l'érudite aéromaîtresse, est respectée et écoutée (et se trouve être l'un des personnages principaux) et parviendrait presque à s'extraire des deux cases « mère ou pute » si ce n'était cette fin…
Ainsi, que Golgoth soit rude, qu'il est un problème avec à peu près tout le monde, qu'il ne soit pas très stable, c'est une chose, mais sa violence sexiste m'a lassée tout comme ses insultes homophobes : sa virilité n'aurait-elle pu s'exprimer autrement qu'à coup de « fiotte » et de « tafiole qui tremblote » ? Il n'est cependant pas le seul visé et même les personnages que j'ai préférés ont su me refroidir par des paroles misogynes (sauf Steppe, peut-être… et peut-être parce qu'il ne prend pas suffisamment la parole pour en avoir le temps comme l'avait justement souligné Alberte !).

Au risque de m'attirer des foudres, je dois bien avouer que d'autres éléments n'ont pas su me convaincre du tout.

Le récit s'écrit comme un texte à trous, sautant des jours, des mois, voire des années : un choix parfois déroutant, souvent frustrant quand, comme moi, on aimerait tous savoir et les côtoyer constamment, mais le récit se complète dans notre tête. Et jusqu'à la fin, des mystères perdureront, ce qui, d'une certaine manière, colle avec la tonalité du roman. de même que cette sensation étrange, parfois, de ne pas tout interpréter intellectuellement ce qui était amené dans l'histoire, mais d'en comprendre néanmoins l'idée de manière plus viscérale, d'être face à des passages que je n'aurais pu expliquer mais qui faisaient sens malgré tout.
Sauf que j'ai parfois eu l'impression que Damasio se regardait écrire et se complaisait dans tes passages pseudo-philosophiques à rallonge et certaines scènes dans la seconde moitié du roman m'ont crispée lorsque la jeune Coriolis pose des questions et qu'elle se fait rembarrer avec mépris par Oroshi (« J'espérais que tu avais au moins compris cela. », « Tu ne veux pas mûrir, tout simplement ? »…) alors que ses questions amènent malgré tout des réponses. Des réponses qui semblent autant adressées à nous qu'aux hordiers, d'où l'impression de me faire insulter en même temps qu'elle. Or, dans la vie, je prône plus de Coriolis avouant son ignorance en ayant la curiosité de comprendre et moins d'Oroshi/Damasio étalant leur supériorité intellectuelle ! Comme le formulait Alberte, il y a parfois un manque d'équilibre entre des scènes un peu cryptiques suivies de passages plus didactiques pour les lecteurices à la traîne et les boulets du fond de la classe.

Si le bout de la route de certains protagonistes a su me toucher, je reste quelque peu froide devant ce message de dépassement de soi permanent. Les personnages vont au bout de leur quête – quête lié au contre et à l'origine du vent, mais aussi et surtout quête d'eux-mêmes –, quitte à brûler, soit, mais il y a un petit côté moralisateur qui donne l'impression que ne pas tout remettre en jeu chaque jour est une faiblesse, que ne pas se dépasser sans cesse fait de nous un·e abrité·e mollasson·ne, que seule compte l'ambition. Se dessine un sous-texte à la fois jugement et développement personnel (« c'est le chemin qui compte, pas le voyage », « ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort », etc.) qui ne me plaît pas. Peut-être que je surinterprète – et je ne doute pas que tout le monde ne sera pas d'accord – mais c'est ainsi que je l'ai reçu.

Et pour terminer, sans être réellement frustrée par l'issue du roman (nous anticipions une immense déception avec une véritable non-fin, donc nous étions un peu préparées à tout), je l'ai néanmoins trouvée un peu rapide pour la partie touchant à un certain scribe, un petit goût de survolé à ce niveau-là.

Roman culte, entre fantasy et science-fiction, aussi enthousiasmant pour certaines facettes – sa langue, sa construction, des scènes géniales – qu'exaspérant sur d'autres – son sexisme écoeurant, ses conseils philosophiques. Je ne vais pas mentir : la misogynie est, à elle seule, l'écueil sur lequel s'est fracassé mon engouement pour cette lecture. J'ai passé un bon moment, c'était original et prenant, mais le sexisme élevé à ce niveau-là, c'est rédhibitoire.
J'ai lu un roman de Damasio, je ne le regrette pas, mais je doute fortement de retrouver cet auteur à l'avenir : il est peut-être culte, mais j'ai envie de trouver d'autres valeurs dans mes lectures futures.

(Et félicitations à celles et ceux qui auront contré jusqu'au bout de cette chronique.)
Lien : https://oursebibliophile.wor..
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