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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Et, je reviens écouter la musique d'Erri de Luca, sa poésie, sa langue chantante, imagée et sensuelle ! Elle me transporte pour une centaine de pages inoubliables ! Ses phrases sont légères, ses mots chargés de sens :
Une caresse pour l'âme ! Une volupté de l'esprit !

« Les poissons ne ferment pas les yeux » raconte un moment précis de l'enfance de ce petit garçon Napolitain : Il a dix ans !
Dix ans, ce lieu commun ! La mue de l'enfance ! L'enfance muette !
Des questions sans réponse, des définitions non appropriées.
Il ressent ce besoin irrépressible d'ouvrir cette carcasse d'enfant, obliger son corps à changer !
Dix ans : la première fois où on écrit son âge avec un chiffre double
 « L'enfance se termine officiellement quand on ajoute le premier zéro aux années. »
Dix ans, le moment où le cocon s'ouvre sur l'extérieur
"À dix ans, on est dans une enveloppe contenant toutes les formes futures. On regarde à l'extérieur en adultes présumés, mais à l'étroit dans une pointure de souliers plus petite."

C'est un été initiatique : il observe les adultes, s'interroge sur le verbe aimer qu'il ne comprend pas et trouve que les adultes exagèrent ce mot à l'excès. « Au plus fort du verbe, les adultes se mariaient, ou bien se tuaient. »
Maintenir : son verbe préféré à dix ans
« Il comportait la promesse de tenir par la main, maintenir ! »
Il passe ses vacances avec sa mère, son père parti en Amérique à la recherche d'un sort meilleur. Sur l'île « une main ouverte », il retrouve le monde des pêcheurs, observe leur travail, les accompagne.
C'est un solitaire, il ne partage aucun loisir avec ceux de son âge, préfère les rébus et mots croisés. Il lit.
Sur la plage cet été là il y a aussi la fillette . Elle lit des polars à toute vitesse. Il la regarde avec curiosité
"J'étais sous le charme quand elle parlait, je la regardais en face, carrément dans la bouche."
C'est elle qui va prendre l'initiative en lui prenant la main :
« maintenir » "mon verbe préféré était arrivé ! "
Et puis tout se met en marche : la découverte de l'amour, le désir de liberté, la violence, la jalousie que peut provoquer cette amitié.
Il découvre « les antipathies », devenu la cible de trois garçons, les combats de mâles.

L'auteur qui est aussi le narrateur nous offre un puissant récit d'initiation d'une écriture somptueuse et simple.
Un récit à lire ou relire
Un petit bout d'enfance ! ...

🎶 🎶 🎶 🎶
J'ai dix ans
Je vis dans des sphères où les grands
N'ont rien à faire, j'vois souvent
Dans des montgolfières, des géants
Et des petits hommes verts
Si tu m'crois pas, hé
T'ar ta gueule à la récré
J'ai dix ans
Je sais qu'c'est pas vrai mais j'ai dix ans
Laissez-moi rêver que j'ai dix ans
Ça fait bientôt quinze ans que j'ai dix ans
Ça paraît bizarre mais
Si tu m'crois pas, hé
Tar' ta gueule à la récré
🎵. 🎵. 🎵. 🎵





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La tentation est immédiate de se plonger dans toute nouvelle publication d'un livre d'Erri de Luca. Ce petit opuscule ouvert, la lecture de ce roman autobiographique est rapide, vive, franche et alerte comme le style de l'auteur qui ne s'encombre pas de superlatifs.
L'argument est simple, ce sont les vacances du jeune Erri avec sa mère, alors que ce dernier avait dix ans et que son père absent cherchait fortune aux États Unis.
Entre les baignades quotidiennes,la plage avec ses jeux et ses lectures, les pêcheurs et leurs filets, les glaces du goûter que l'on imagine extraites d'une de ces voiturettes de glaciers des années 50, tout aurait été parfait si une jeune fille de dix ans également et trois autres garçons n'étaient venus rompre la belle harmonie du jeune Erri en vacances.
Erri de Lucca cristallise autour de cet été là, ses premières expériences marquantes, celles du passage de l'enfance à l'adolescence. Il nous présente des relations singulières, parfois franchement oedipiennes, avec sa mère. Il évoque son père, qui en recherche d'un eldorado aux Etats-unis occupe par son absence, on l'aura compris, une place étrange dans cet univers rude de la Naples d'après guerre, ville éprouvée, ville d'existences rationnées où "chaque goutte d'eau compte", où pour l'enfant Erri l'absence du père a dû être une authentique souffrance.
Ce livre n'est assurément pas une autobiographie à la Doubrovsky ou s'étalent sans vergogne toutes les avanies d'un psyché désabusé.
Au contraire, ici tout n'est que densité, retenue, les faits ne servent que de liens impérieux entre les souvenirs d'enfance, et ce que l'homme adulte en a fait. Sont ainsi évoquées les premières expériences de l'autorité, de la violence, de la féminité par cette fillette-femme sorte de Lolita qui semble l'ignorer, de l'amour authentique qui dans la cosmogonie d'un enfant de dix ans, n'a pas encore ce nom, de l'amitié, de la solitude, de ce combat qu'est parfois la vie......
On aimera ce livre pour le style épuré de l'auteur et l'authenticité profonde du propos. On aimera ce livre pour l'évocation sublime du premier baiser.
On sera probablement un peu surpris par la très forte maturité des réflexions et pensées du jeune Erri de 10 ans, mais la mémoire n'est-elle pas aussi un prodigieux miroir déformant? Pour les amoureux de l'auteur, un livre indispensable afin de mieux comprendre le monde qui l'a construit et comment sa personnalité s'est forgée par ces minuscules expériences de l'enfance hautement fondatrices.
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Les poissons ne ferment pas les yeux est un très beau récit autobiographique où l'auteur se penche sur l'année de ses dix ans.
C'est sur l'été passé sur la plage d'une île au large de Naples, l'île d'Ischia, que se concentre le texte. Son père est parti aux Etats Unis avec sa soeur. Il se trouve seul avec sa mère. Il veille sur celle-ci, porte son sac, lui prépare un café. Comme une parenthèse dans la vie d'Erri de Luca, ces vacances sont le théâtre d'une transformation chez l'enfant qui accède à une grande liberté sur l'île. Plutôt en retrait de ses camarades, il fait l'objet de harcèlements. Il perçoit leurs persécutions comme une nécessité, presque fatale, comme un rite initiatique. Il sent que la fin de son enfance est arrivée. Ce moment est aussi marqué par la rencontre d'une fillette de son âge dont il ne se rappelle plus le nom. Elle s'impose à lui comme une figure féminine déterminante et marquante.
L'écriture d'Erri de Luca est fine et sensible, souvent poètique aussi. Elle sait exprimer la sensualité qui se dégage des êtres et de la nature. Elle est intelligente et pleine de réflexion sur des sujets variés, comme le sens du verbe aimer, ou l'attirance pour les Etats Unis d'Amérique à la période d'après guerre. Les livres sont très présents, ceux que lisent sa grand-mère et la fillette, les polars, les lectures de sa mère à la plage, et ceux qu'écrivent la fillette - elle est écrivain et se passionne pour les histoires d'animaux.
En 2016, Erri de Luca confie à Christine Marcandier dans son grand entretien : « Je suis partout comme un autre, dépourvu d'invitation ». Dans les poissons ne ferment pas les yeux, ce sentiment d'être étranger au monde est très présent ( Il est assez voisin de la posture des personnages de Camus). L'auteur l'a certainement ressenti dès ses plus jeunes années. La relation mère-fils est aussi touchante. Aux liseuses de Bordeaux (https://liseusesdebordeaux.org/), il explique la place privilégiée qu'occupe encore sa mère dans sa vie d'adulte : "J'avais ma mère comme première lectrice. Depuis sa mort, je n'en ai plus. Je suis moi-même mon lecteur."
La clairvoyance de l'enfant qui n'occulte pas sa candeur est très bien rendue. Son sens de la justice et la distance qu'il met dans son appréhension du monde en font un être particulièrement attachant.

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Comme dans Montedidio, Erri de Luca vient convoquer les souvenirs de son enfance mais dans un cadre plus restreint cette fois puisqu'il aborde l'été de ses 10 ans.
Comme d'habitude sa plume est précise et touchante (J'ai failli écrire tout chante), chauqe mois est pesée et on retrouve des thèmes qui lui sont chers : la langue napolitaine, la découverte de l'amour et de la justice, son profond respect pour le verbe juste et d'autres que ses habitués sauront identifier sans peine.
J'ai encore beaucoup apprécié cette lecture même si je n'y ai pas retrouvé autant d'intensité que dans Montedidio.
Il n'en demeure pas moins que je vais continuer volontiers à découvrir l'oeuvre d' Erri de Luca.
Lien : https://christophegele.com
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Mais qu'il est beau ce livre. Déjà un joli titre et un contenu si poétique .
Ce petit garçon de 10 ans veut grandir , veut changer de corps. A cet âge , il apprend la vie avec d'un côté la méchanceté et la brutalité de ses camarades et de l'autre côté , il apprend l'amour avec une petite fille de son âge . Et il ne ferme pas les yeux quand elle l'embrasse.......
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C'est l'histoire d'un enfant, un enfant de dix ans, qui est déjà un homme dans sa tête, alors que son corps est celui d'un enfant.
Pendant l'été de ses vacances dans une île italienne, il va chercher à grandir, ou plutôt à faire grandir son corps, en le soumettant à diverses épreuves. Mais le corps ne grandit pas si vite, tout au plus un petit centimètre. Alors l'amour va apparaître, inattendu, et va prendre au dépourvu deux êtres, tellement vivants, tellement vibrants.
"Eve et son époux, sortis du jardin, avaient déjà eu tout le bien du monde. La vie ajoutée ensuite, loin de cet endroit, n'a été que divagation."
C'est un roman autobiographique, qui prend à la fois le point de vue de l'enfant qu'il était et celui de l'homme qu'il est devenu.
L'écriture de Erri de Luca est d'une force incroyable, sa musique persiste dans notre tête longtemps après la lecture.
Ici, pas de redondance, les mots sont choisis avec soins, précision, peut-être avec douleur parfois.
C'est un auteur de la famille de Christian Bobin ou René Fregni.
Je conseille vivement ce livre, y compris à de jeunes adultes.
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J'ai lu dans "Les poissons ne ferment pas les yeux" qu'"En lisant, on rencontre des phrases sismiques". Et bien avec Erri de Luca c'est exactement ça, un auteur qui écrit des phrases sismiques. On pourrait trouver des citations à chaque page de ce roman publié en 2010, tellement les phases sont belles.
Alors qu'il a soixante ans, l'auteur italien raconte son enfance, celle d'un petit garçon de dix ans qui croit tout ce qu'il y a écrit dans les livres et c'est pour ça qu'il en lit beaucoup. Il apprend le monde en lisant, surtout celui des grands. Mais il y a un mot qu'il ne comprend pas, c'est le verbe aimer. Comme il le dit très bien "C'était une friandise obligatoire pour moi indifférent à la pâtisserie".
Sur la plage où il est en vacances (on reconnaît l'île d'Ischia dans la baie de Naples), il rencontre une petite-fille qui écrit des livres sur les animaux. Pour elle, il veut grandir et se fait rosser par une bande de voyous sans se défendre pour mettre son corps à l'épreuve.
L'histoire de son enfance en famille est récurrente chez Erri de Luca mais il a beau déjà l'avoir racontée dans son premier roman «Une fois un jour » je trouve que c'est toujours aussi passionnant. Cela fait partie de son oeuvre, cette façon de tourner autour d'un sujet comme le fait d'ailleurs Marguerite Duras que j'adore (mais pas uniquement).
Et puis, il y a un clin d'oeil admiratif à l'écrivain Vasco Pratolini qui est à signaler.
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A chaque roman de Erri de Luca la magie opère : ses mots me collent aux tripes et me prennent au coeur grâce à sa poésie lyrique et enchanteresse.
Dans la trame épaisse des émotions, l'auteur aborde la découverte des sentiments et de leur complexité pendant l'enfance. L'amour, la lecture, les choix qui se présentent, ponctuent notamment les souvenirs de ses dix ans.

Peintre impitoyable du quotidien l'auteur se livre avec tendresse et philosophie à des divagations lyriques sur le temps qui passe et qui brasse des vies, des époques, des pays.

Les poissons ne ferment pas les yeux fait partie de ces trop rares livres qu'on a envie de rouvrir à peine refermés, tout simplement parce qu'ils font du bien.


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Sous la forme de fragments, Erri de Luca nous offre un émouvant voyage à travers ses souvenirs d'enfance. Il raconte les aventures d'un petit garçon de 10 ans, amoureux des livres et de la pêche, d'une grande maturité mais dont le corps ne grandit pas assez vite à son gré. Un été, il découvre sur une plage italienne l'émerveillement du premier amour, en même temps que la violence de la jalousie et une réflexion sur la notion de justice...

Ce très beau récit initiatique se lit d'une traite et nous ramène sur les rivages doux et amers de l'enfance, à la fois paradis perdu et première expérimentation de la dureté du monde réel.
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Réminiscences de l'enfance, souvenir d'un été, celui des dix ans du narrateur. Comme chaque année, en période estivale, il se rend sur l'île toute proche de Naples, là où il vit le reste du temps. Mais cette fois-là, son père n'est pas là – préparant un éventuel avenir en Amérique -. Il est donc seul avec sa mère, à l'âge des premiers tressaillements et autres palpitations. Petit garçon contemplatif, de la plage il regarde le travail des pêcheurs, observe le spectacle de la mer, ses doux remous et le miroitement du soleil sur elle, écoute sa musique harmonieuse et aime se fondre en elle et se laisser porter.

Cet été-là, une fillette a jaillit. Comme une fleur, elle est arrivée là, tout près de lui. de sa peau émanait un délicat parfum d'huile d'amande, de sa bouche s'échappaient des histoires d'animaux, elle aimait écrire et semblait savoir plein de choses sur les grands. Elle le fascinait, l'éblouissait. Mais à quelques pas, la bande de garçons lorgnait. Il ne s'était jamais approché d'eux, déjà sortis de l'enfance, ils ne l'intéressaient pas. Lui, il y était encore. Malgré son corps qui, il s'en rendait bien compte, changeait. le monde des adultes, il l'avait entrevu en lisant les livres de son père, et il le déroutait.

Il a pressenti la menace mais l'a laissée venir. Sans contester, sans se débattre, il a accepté les coups. Un assaut comme une épreuve. Un passage, une rupture. Et une tristesse, éphémère, vite soufflée par l'amour, sentiment qui trouble et enivre, renverse et émerveille, et par la justice, valeur qui éclaire et rétablit, amende et répare.

Ce roman c'est l'enfance qui s'en va, mais pas l'enfant. Lui ne nous quitte jamais, il veille.
Lien : https://lesmotsdelafin.wordp..
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