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John McCrea (Illustrateur)
EAN : 9780979593925
112 pages
Desperado Publishing (18/09/2007)
5/5   1 notes
Résumé :
Television producer Bobbie Flint's corporate bosses punish her with a transfer to a little-known division: a private high-security prison deep in the Florida Everglades. As the new warden, she must use her marketing skills to transform this hell on earth into something worse: a televised execution mill fueled by advertising and ratings. Bobbie's success lands her at the feet of two formidable opponents - her leering boss and her own conscience - and into a lurid dea... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Il s'agit d'un récit complet et indépendant de tout autre. Ce recueil comprend les 4 épisodes de la minisérie, initialement parus en 1999, coécrits par Tom Peyer & Jamie Delano, dessinés par John McCrea et encrés par Andy Chiu. Ce tome est en noir & blanc, sans les couleurs initiales de Tatjana Wood. Il comprend également une introduction de 3 pages sous la forme d'un dialogue en gros caractères, entre Delano et Peyer, pas très intéressant. Il se termine avec 9 pages de croquis de John McCrea.

Bobbie Flint était la responsable et l'animatrice d'une émission de télévision trash retraçant la vie de Jésus Christ, mais de nos jours aux États-Unis, et il finit exécuté sur la chaise électrique. Malheureusement elle a commis une bévue en mettant le sénateur Benny Guevara dans l'embarras. Marion Meach (le propriétaire de la chaîne de télévision) n'hésite pas une seule seconde à la virer et à l'affecter en tant que responsable d'une prison privée (appelée Paradisio Bay) dont il est également le propriétaire. En outre Chloe réclame à sa mère Bobbie Flint de l'argent pour payer son loyer et ses études d'artiste corporelle, car son père n'a pas versé sa pension. Alors qu'elle ramasse ses affaires, Marion Meach lui fait des avances, qu'elle repousse agressivement.

Bobbie Flint doit se rendre par elle-même (en avion) à la prison proche de Miami. Sur place son accueil est entièrement automatisé, depuis le déshabillage jusqu'au à la fouille corporelle, en passant par la douche. Elle a la surprise de découvrir que le premier contact se fait avec les prisonniers dont certains pas très bien dans leur tête. le parcours pour rejoindre son bureau s'avère long et semé d'embûches, avec des rencontres risquées. Elle n'a aucune intention de se plier au règlement sans rien dire. de son côté, Marion Meach se rend à un rendez-vous avec le sénateur Benny Guevara, sur son yacht privé.

La couverture annonce la couleur : sexe et mort, l'exécution capitale devenant un spectacle. Jamie Delano est un auteur anglais qui fut le scénariste initial de la série John Constantine Hellblazer (à commencer par Original Sins) qui a écrit quelques histoires de superhéros peu conformistes, ainsi que de nombreux récits indépendants comme World without end (illustré par John Higgins), Animal Man (illustré par Steve Pugh), The Territory (illustré par David Lloyd), ou encore Outlaw Nation (illustré par Goran Parlov & Goran Sudzuka). Tom Peyer est également un scénariste de comics de superhéros (essentiellement pour DC Comics) et il fut un responsable éditorial pour Vertigo.

Le récit constitue une satire virulente contre la délégation de l'incarcération à des entreprises, du monde du spectacle, et également des accointances entre les entreprises et les politiques. Les auteurs n'hésitent pas à grossir le trait pour un effet entre comique et horreur, mais le lecteur reconnaît des pratiques bien réelles. Aux États-Unis, la population carcérale représente 1% de la population du pays, le plaçant ainsi en tête du taux d'incarcération mondial. En outre entre 8% et 9% de ces prisons sont des établissements privés. Les coscénaristes disposent donc ainsi d'un boulevard pour se livrer à une critique vitriolée des dérives potentielles, et pour certaines bien réelles. Ils s'en donnent à coeur joie avec un système qui favorise le profit avant tout. S'ils partent bien du fait qu'il existe un contrat entre l'état et la prison privée, cette dernière a pour objectif de minimiser les coûts, en faisant réaliser une partie de prestations par les prisonniers eux-mêmes, y compris le maintien de l'ordre à l'intérieur de la prison, et en automatisant le maximum de fonctions possibles, respectant la lettre du contrat, mais pas l'esprit. Une fois que Bobbie Flint a réussi à prendre ses fonctions de chef de l'établissement pénitentiaire, elle cherche à alerter la population civile sur la réalité des conditions de détention. Mais dans un système capitaliste, une telle forme d'alerte ne peut qu'être médiatique.

Bobbie Flint organise donc une émission de téléréalité, sur la base de l'élément le plus spectaculaire : les exécutions capitales. Son émission trouve immédiatement son public, et le système étant ce qu'il est, le public ne retient que la dimension du divertissement, sans aucune intention de s'impliquer dans la dimension sociale. Les intentions de Bobbie Flint sont neutralisées, parce qu'incompatibles avec le fonctionnement systémique de la société. Un prisonnier lui fait d'ailleurs observer que la société a souhaité se débarrasser de ses éléments toxiques (les criminels), ce n'est pas pour devoir s'inquiéter de leur sort, une fois qu'ils ont disparu de sa vue. En plus de cette analyse systémique pénétrante et décillée, les auteurs ajoutent une couche de sexe et de voyeurisme, sur le principe des émissions de téléréalité, avec des caméras dans les douches des détenus, et des détenus apprenant des textes par coeur pour un service de conversations téléphoniques payantes et piquantes.

Delano et Peyer n'oublient pas de raconter une vraie histoire, avec une intrigue et une résolution. Bobbie Flint est une carriériste qui a su capter l'air du temps dans une série de films provocateurs, sur la base du plus petit commun dénominateur. Il est donc hors de question pour elle de baisser les bras ou d'adopter une posture de victime. le lecteur la voit privilégier les moyens pour atteindre ses fins, dans un monde sans foi ni loi. Les auteurs lui donnent l'occasion de voir comment Marion Meach doit lui aussi avaler des couleuvres pour rester dans les affaires. C'est l'occasion d'en rajouter une couche sur l'absence de moralité des avocats, avec les personnages d'Orin et Lucius. Comme il s'agit d'une satire, le sénateur Benny Guevara se comporte sur le mode de faites ce que je dis, pas ce que je fais, projetant une image vertueuse et menant une vie dissolue. Au regard des scandales politiques qui secouent les États-Unis (et d'autres pays comme la France), le lecteur se dit que la caricature n'est peut-être pas si éloignée que ça de la réalité. Il éprouve une forte empathie pour cette femme forte qui essaye de survivre dans un milieu de requins capitalistes, et de truands dangereux.

S'il ne le sait pas par avance, le lecteur ne se doute pas que cette bande dessinée ait pu être en couleurs, car elle ne présente pas de difficultés de compréhension, ou de formes difficilement distinguables des autres. John McCrea dessine de manière réaliste, avec une exagération dans les expressions des visages et dans les situations, qui accentuent la dimension comique du récit et évite le reportage trop racoleur. Ainsi les hanches de Bobbie Flint sont un peu trop fines, la bimbo siliconée sur le yacht a un tour de poitrine trop important, les personnages semblent toujours dans l'émotion vive qui se lit sur leur visage. La mise en scène est également exagérée pour aboutir à des images sensationnalistes quand la séquence s'y prête (le détenu mangé par les alligators).

Les 2 ou 3 individus qui crament sur la chaise électrique sont parcourus de violents soubresauts et relâchent des fluides corporels, alors que les lanières de cuir mordent dans la chair. Dans ces moments-là, John McCrea sait conserver l'horreur de l'acte, la narration visuelle bifurquant vers l'humour bien noir. Ses dessins oscillent entre la grosse farce et le drame, passant de l'un à l'autre avec naturel. La dame sur la couverture est Bobbie Flint et elle porte bien cette tenue dans les pages intérieures, et même avec un fouet de dominatrice en plus. Mais à l'intérieur, McCrea dessine dans une veine moins réaliste et plus parodique, neutralisant toute dimension érotique pour ne plus laisser que la farce. le lecteur constate également l'enthousiasme de l'artiste pour le récit, dans les détails de certaines cases : le torse velu de Marion Meach, la séquence de rasage de la tête du copain de Chloe Flint, les sex-toys dans la chambre de Meach, les logos sur le bureau du chef de la sécurité du pénitencier, etc. Il est visible que McCrea a pris plaisir à étoffer certains lieux.

Depuis sa création en 1993, le label Vertigo de DC Comics a publié de nombreux récits sortant de l'ordinaire, mais pas toujours réédités sous forme de recueil. C'est un vrai plaisir de pouvoir découvrir ainsi une histoire complète coécrite par Jamie Delano, l'un des pionniers du label Vertigo. le lecteur constate que Tom Peyer a dû l'aider à se lâcher pour aller vers un humour plus graveleux, et une farce satirique aussi drôle que méchante. Les dessins de John McCrea racontent l'histoire avec efficacité, et avec une touche d'exagération qui participe à maintenir le récit sur le terrain de l'humour, certes souvent très noir. Derrière la grosse farce, le lecteur découvre une intrigue qui tient la route et qui n'est pas juste un prétexte à aligner les critiques, ainsi que des personnages adultes et attachants par certains aspects de leur personnalité, repoussants par d'autres. Il se rend également compte que les auteurs savent intégrer avec fluidité leur avis sur le système carcéral livré au capitalisme, un avis réfléchi et perspicace.
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