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EAN : 9782924936047
216 pages
Hashtag Editions (01/04/2019)
4/5   6 notes
Résumé :
Depuis deux cents ans, l’usine de porcelaine Grazyn a bâti sa réputation sur ses magnifiques dés à coudre. On raconte que même la tzarine Anastasia Romanova en avait reçu un dans son trousseau. Les ouvriers proviennent des trois villages avoisinants. Nourris, habillés et éduqués, ils font l’envie de tous à l’époque où la famine programmée par Staline et le cannibalisme font rage dans les environs. Mais quel est le secret de cette usine et pourquoi la famille Grazyn ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Pour trouver le meilleur de la weird fiction, ce sous-genre étrange et fascinant de l'imaginaire, il faut souvent chercher du côté des petits éditeurs. En 2017, le canadien David Demchuk publie son premier roman chez ChiZine Publications. Immédiatement remarqué par la critique, l'ouvrage figure dans la liste des dix meilleurs livres de 2017 du journal Globe and Mail avant d'atterrir chez un micro-éditeur québécois audacieux et engagé : Hashtag Éditions. Aujourd'hui disponible en français de l'autre côté de l'Atlantique, une seule question se pose encore : quand va-t-on voir débarquer cette merveille d'étrangeté dans l'Hexagone ?

Des photos vieillies
Que ressentez-vous en regardant ces photographies en noir et blanc du siècle passé ? Une étrange impression de familiarité mêlée d'un malaise diffus ? Une mélancolie surgit des tréfonds de l'Histoire qui vous interpelle par son intensité imprévue ?
Pour David Demchuk, journaliste et scénariste depuis quarante ans, le déclic ne s'est pas fait attendre. En regardant les portraits du photographe roumain Costica Acsinte, l'auteur canadien en sélectionne une vingtaine avant d'entamer l'écriture d'un ouvrage inclassable intitulé The Bone Mother (étrangement renommé L'Usine de Porcelaine Grazyn pour sa parution québécoise).
Décrire ce roman n'a rien d'une chose aisée tant Demchuk construit quelque chose d'unique et de parfaitement fascinant pour le lecteur.
Mais essayons tout de même.
Séparé en deux parties, L'Usine de Porcelaine Grazyn se divise encore en vingt-cinq chapitres de taille variable, souvent très courts, et illustrés pour la plupart par une photographie en noir et blanc de Costica Acsinte.
Ce que nous savons maintenant : trois villages se situant à la frontière roumano-ukrainienne entretiennent des liens particuliers avec une usine de porcelaine dédiée à la fabrication de dés à coudre à partir de poudre d'os humains. Dans cette région reculée, les habitants côtoient de près des créatures mythologiques issues des légendes slaves : la Rusalka, sorte de sirène attirant hommes et enfants vers une mort certaine, le Strigoi revenant affamé du sang de ceux qui l'aiment ou encore La Dame des Bois, vieille sorcière au dents de métal régnant au plus profond de la forêt.
Au milieu de tout ça, l'armée russe expérimente dans l'ombre et une mystérieuse Police de la Nuit herche à liquider les habitants de la région et les créatures surnaturelles qui la peuplent.
Voilà la base. Mais les choses se compliquent par la suite…

Collision des mondes
En effet, David Demchuk segmente son histoire autour des habitants de ces trois villages, de leurs descendants et même des monstres eux-mêmes. Chaque chapitre nous est narré par un personnage différent qui peut tout aussi bien être un enfant ou un créature surnaturelle, une vieille femme ou un lointain parent exilé au Canada.
Le temps et le lieu s'avèrent rapidement flous, l'auteur changeant constamment le cadre pour se focaliser sur une seule et unique chose : l'ambiance.
En mixant les influences slaves et en n'accordant aucune concession au lecteur quant à la longueur de ses histoires, David Demchuk produit des récits aux fins abruptes et à l'atmosphère macabre à souhait. On y croise par exemple Boris, un ouvrier de l'Usine Grazyn qui nous raconte comment il en vient à remplacer son frère décédé comme pelleteurs de poudre d'os, on y rencontre Nicolai, un enfant adopté qui raconte l'histoire de sa mère soignant une femme-louve à l'agonie, on y côtoie Lena, une jeune femme porteuse d'un parasite logée sur sa colonne vertébrale qui se transmet de génération en génération…

Le lecteur pénètre ainsi dans un univers inquiétant et cryptique qui stimule son imagination et convoque une poésie noire aussi délicieuse qu'obsédante.
Loin d'être exhaustive, cette présentation oublie les monstres et les créatures qui hantent littéralement chaque page du roman. Brutalement dépaysant, la mythologie de Demchuk honore la mémoire ukrainienne de son père décédé tout en remettant au goût du jour des légendes enchâssées. Dans chaque histoire ou presque peut surgir une autre histoire, un conte glauque prêt à déchirer la gorge du lecteur insouciant. Car, comme bien des personnages de L'Usine de Porcelaine Grazyn, le récit se transforme, mute, évolue. Mais à chaque fois que vous pensez tenir quelque chose, comprendre par exemple pourquoi la Police de la Nuit tente de massacrer les villageois, vous vous retrouvez avec d'autres énigmes, d'autres doutes. La nature des événements mais aussi les notions de bien et de mal ne sont jamais claires dans le roman de Demchuk. Construit en niveau de gris, son ouvrage explore divers moments historiques, de l'Holomodor à la Seconde Guerre Mondiale en passant par notre époque moderne, mais aussi divers registres, du récit horrifique au thriller en passant par le contre traditionnel.

Expérience Littéraire Non Identifiée
Ce qui stupéfie clairement dans ce premier ouvrage, c'est le refus de David Demchuk de répondre aux contraintes classiques de la narration. Son histoire peut faire cinq pages ou trente, ses personnages peuvent être des monstres ou des hommes voire les deux à la fois, son action peut glisser de la Roumanie au Canada, peu importe, ce qui relie tout ça, c'est cette sensation troublante d'une histoire derrière l'histoire où l'auteur tisse des liens, utilisant personnages et monstruosités comme autant de marionnettes grinçantes dans le noir.
L'Usine de Porcelaine Grazyn se révèle au final une expérience troublante pour les sens comme pour le coeur, et l'on en redemande !

Quelle expérience que ce premier roman de David Demchuk !
En alliant fantastique slave et photos d'époque, le canadien accouche d'une oeuvre fascinante, macabre et radicalement différente.
Poupées russes narratives, les chapitres se succèdent et étourdissent le lecteur, perdant son esprit au milieu des bois où cannibalisme, sorcellerie et légendes peuvent vous saisir à tout instant !

[Pour acheter ce roman en français, c'est possible, il vous faudra vous rendre sur le site des éditions Hashtag et leur envoyer un mail !]
Lien : https://justaword.fr/lusine-..
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critiques presse (1)
Elbakin.net
07 janvier 2020
L'ensemble possède un pouvoir évocateur, fait preuve d’une utilisation savante des mythes slaves, nous entraîne dans une plongée au plus profond d’esprits tordus aux destins brisés qui nous poussent à dévorer une histoire après l’autre, d’une traite.
Lire la critique sur le site : Elbakin.net
Citations et extraits (4) Ajouter une citation
C’est à ce moment là, à l’âge de dix-neuf ans, que mon père m’a révélé ses grands secrets, ceux de Grazyn et des villages aux alentours. […]
Il était un vivisecteur, qui pratiquait des expériences abominables sur des êtres vivants. Il était un criminel, un tueur d’enfants, même. Il était un profanateur, un voleur de cadavres. Toute la fortune et toute la renommée des Grazyn étaient fondées sur des décennies, des siècles, deux cents ans d’actes innommables qu’il avait commis, comme ses ancêtres avant lui.
Malgré tout, il était mon père.
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Tout cela, était-ce vraiment mes propres souvenirs ? Ou n’était-ce qu’un rêve ? Le rêve de notre vie qui se déroulait et qui se coagulait dans mon esprit ravagé par la culpabilité ?
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Je ne me souviens pas. Je ne peux dire ce qui est vrai de tout ça. Mais je sais une chose : lorsque ma mère est morte des années plus tard, je me suis agenouillée à côté de son lit et j’ai pleuré, et les loups dans la forêt ont pleuré avec moi.
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Tricoter est une bonne façon de passer le temps lorsqu’on attend que quelqu’un meure.
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