«
Les derniers jours de nos pères » est le premier roman de
Joël Dicker… et on est loin du genre polar qui l'a consacré. Il s'agit ici d'un livre historique qui fait revivre un service secret qui a permis aux alliés de gagner la Seconde guerre mondiale : le Special Operations Executive (SOE), une armée secrète créée par
Churchill en 1940. L'idée est de mettre en place une guérilla pour créer des opérations à l'intérieur des lignes ennemis : sabotages, attentats, renseignement mais aussi organiser et armer les réseaux de résistance. le SOE a même joué un rôle capital dans le débarquement du 6 juin 1944. Un chapitre fascinant mais pourtant méconnu de cette période, mis en lumière intelligemment par
Joël Dicker.
On suit une quinzaine de futurs agents secrets du SOE, recrutés dans toute l'Europe et même aux États-Unis, depuis leur formation jusqu'aux attentats en France. Ces agents sont des civils, des hommes, des femmes, qui ont un point commun : ils sont patriotes mais inexpérimentés. Ils suivent des mois d'entraînement dans des camps secrets, des exercices inhumains qui meurtrissent les corps et les âmes. Au départ ils sont 24 stagiaires, seuls 16 arriveront au bout de leur formation.
Le roman suit en particulier Paul-Emile, surnommé Pal, qui doit cacher à son père qu'il est agent. Il lui fait passer des cartes postales, soi-disant envoyées de Suisse pour lui faire croire qu'il est banquier. Une résistante joue les messagers secrets en mettant les enveloppes dans la boîte aux lettres du père… et c'est ce qui va faire basculer le livre !
C'est un roman empli d'émotions, de par sa thématique, mais aussi du fait d'une galerie de personnages auxquels on s'attache. le lecteur se passionne assez rapidement pour le parcours de Pal, Laura, Faron, Claude, Gros et les autres. Ils ont tous choisi de s'engager et suivent un entraînement très difficile pour devenir des agents de terrain, membres de la Section F, « celle des Français indépendants », ni liés à
De Gaulle ni aux communistes ni à qui que ce soit d'autre.
À travers leurs histoires, l'auteur nous invite à une véritable réflexion sur la guerre et comment elle transforme les hommes. Il décrit un monde en subtilités où personne n'est tout blanc ou tout noir. Ses personnages, décrits avec finesse nous sont rendus attachants avec leurs forces et leurs faiblesses.
.
Alors, certes, c'est un énième roman sur la guerre, mais la thématique est ici traitée différemment.
Joël Dicker fait le choix de narrer ce combat mondial vu par le coeur des Hommes. Ainsi, ne vous attendez pas à un roman d'action, ou d'espionnage, c'est davantage un roman psychologique. Dans ce récit, l'important n'est pas vraiment la guerre, l'important est plutôt ses conséquences et en quoi elle transforme les gens.
Reste que la guerre reste en fil rouge de la grande majorité du récit. On mesure tout le travail de documentation effectué par l'auteur. Les mésaventures de ces jeunes héros s'intègrent parfaitement aux événements historiques. de même qu'ils parviennent à se fondre dans la population locale une fois renvoyés en France, leurs émotions, joies et vicissitudes s'accordent parfaitement à l'intrigue qui ne faiblit pas jusqu'au point final.
.
Joël Dicker aborde également de manière très adroite le thème de l'après. Que fait-on après la guerre ? Comment peut-on se reconstruire et exister après ? Des jeunes gens sont devenus des adultes pendant le conflit, ils ont appris à se battre, à penser, à être des soldats, mais quand le conflit prend fin, comment retrouve-t-on une vie quand on a sans cesse des « fantômes » à côtoyer ?
Un premier roman ambitieux, maitrisé de la plus belle des manières et empli d'émotions. L'histoire d'hommes qui ont été prêts à renoncer à tout pour sauver les fondements de la liberté. L'intérêt de ce récit tient surtout dans l'affect que le lecteur éprouve pour tous les personnages et les liens qu'on voit se développer au fil des pages. On referme le livre avec le sentiment d'avoir faire partie de cette bande de résistants.
Lien :
https://www.instagram.com/p/..