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sur 1289 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
J'ai été captivée par ce roman, dévorant les pages pour connaître le sort de Suzanne, et découvrir si elle allait survivre à ses souffrances. Cette héroïne est très attachante par son humanité, ses qualités et ses défauts, grâce à la sincérité de la langue, du style, qui lui prête Diderot.
Si elle semble parfois un peu trop naïve et trop sensible à mes yeux de lectrice cynique du XXIème siècle, elle souhaite faire plaisir à ceux qui sont autour d'elle. Et surtout, c'est une héroïne très moderne, elle veut décider seule, par elle-même, de son propre avenir, sans se laisser imposer quelque chose. Elle fait preuve de volonté et de détermination, tout en se connaissant elle-même : malgré sa foi sincère, elle ne veut pas devenir religieuse, pour ne pas devoir obéir et être soumise à une autorité.
Car plus qu'une critique de la discipline moniale ou des mères supérieures, ce roman est une critique des puissants : c'est une dénonciation des abus de pouvoir de tous ceux qui détiennent une forme d'autorité. Les parents de Suzanne lui reprochent sa naissance et leurs pêchés, ses soeurs veulent la dépouiller de son héritage, le bénédictin cherche à la violer, ses mères supérieures l'humilient, veulent la rendre folle ou abuser d'elle au sens sexuel...
Cette vision très noire de l'humanité est compensée par des personnages positifs, qui agissent pour éclairer la vie de Suzanne : son avocat, sa première supérieure, son amie religieuse...
Une très belle découverte.
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"La Religieuse" dès le titre le caractère exemplaire de l'ouvrage est posé. En effet, si ce roman est conçu comme le témoignage d'une expérience individuelle, il est avant tout une critique générale de la vie conventuelle. Dans cette vie carcérale ci, les chaînes et les barreaux de fer sont imposés à des êtres n'ayant commis aucun crime préalable. le couvent, Denis Diderot, le clame haut et fort, est une situation qui va tellement contre la nature de l'être humain qu'il pervertit ce dernier. L'austérité, le cynisme, l'indifférence, la répression sexuelle, le fanatisme, la peur, et le pouvoir oppressant de la hiérarchie sont dénoncés à travers ce roman qui ne fut publié qu'à titre posthume. le père fondateur de l'Encyclopédie démontre une fois de plus l'extrême modernité de sa pensée. Jamais un pamphlet aussi violent n'avait été écrit contre l'Eglise avant lui. le scandale qui suivit sa publication est encore dans une certaine mesure d'actualité. Comme le dit si justement Sophie Cheveau, bibliographe du philosophe des Lumières, "Diderot a encore aujourd'hui l'odeur du souffre".
L'auteur a d'autant plus choqué qu'il ne dénonce pas seulement la cruauté et la dureté de la vie des religieuses. En effet, un autre grand sujet tabou est développé dans toute la seconde partie du livre : l'homosexualité féminine. Diderot redonne ainsi aux épouses de Dieu leur âme humaine avec ses défauts et ses qualités et leur corps accompagné de toutes ses sensations.

Mais La Religieuse ne doit pas être lu seulement pour sa dimension philosophique, idéologique et sociologique. Il s'agit avant tout d'une oeuvre qui provoque une émotion profonde chez le lecteur.
On ne peut ignorer à travers, les pages de ces Mémoires, la voix de Suzanne Simonin, jeune fille contrainte par sa famille à prononcer ses voeux. Elle s'élève en un cri de douleur déchirant. On ne peut que partager ses peines et ses espérances.
En somme, je n'ai qu'un mot d'ordre sus à vos bibliothèques et à vos mouchoirs afin de dévorer ce grand roman !

PS aux consciencieux : Je recommande également l'édition critique qui l'accompagne. Il est important de lire la correspondance de Grimm et de Diderot. Elle enrichit encore la complexité de cette oeuvre.
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J'avais envie de lire quelque chose de « classique » et je m'étais récemment procuré ce livre. J'avoue que je m'attendais à une histoire ennuyeuse et un style plutôt lourd, mais j'ai été très surprise.



L'histoire est un moyen pour l'auteur de critiquer la religion, il ne faut donc pas s'attendre à ce que la vie de Suzanne soit très gaie. Et effectivement, cette fille va en voir de toutes les couleurs à cause de ses supérieures (et donc des soeurs qui suivent celle ci). Je ne détaillerai pas toutes les épreuves qu'elle traverse du fait qu'elle n'a pas la vocation et veut quitter son état, mais sachez qu'elle en subit beaucoup et qu'elle se montre plutôt courageuse. J'ai beaucoup aimé ce personnage, c'est une jeune fille innocente, courageuse et qui, même si elle ne veut pas être religieuse, se comporte de façon irréprochable (elle assiste aux messes, prie, etc.) Sa seule « rébellion », c'est de vouloir être libre. Cette jeune femme m'a beaucoup touchée même si en refermant le livre, je l'ai trouvée un peu trop bien pour être crédible mais ça renforce les défauts des autres et ça la rend attachante.



Les autres personnages sont peu marquants, ce sont plutôt leurs actes qui restent en mémoire. Je ne sais pas quelle est la part de vérité dans les événements décrits mais connaissant un peu l'histoire de différentes religions, plus rien ne m'étonne dans ce domaine. J'ai beaucoup aimé suivre une partie de l'histoire de cette religieuse malgré-elle et j'ai vraiment été surprise de m'y intéresser autant.



Le style est assez difficile mais c'est l'époque de l'auteur qui veut ça, on ne pouvait pas demander à Diderot d'écrire dans un style plus fluide pour les années 2000 ^^ J'ai donc eu beaucoup de mal avec certaines phrases et j'ai dû les relire plusieurs fois avant de comprendre. La lecture a donc été longue mais très agréable.
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Un terrible réquisitoire contre les couvents qui est pourtant parti d'une mauvaise plaisanterie. Diderot met toute sa verve pour dénoncer l'horreur de la vie de nonne, on se dit parfois qu'il en fait peut-être même un peu trop... Rien n'est épargné à la pauvre soeur, personnage principal, enfermée pour la faute d'être mal née: privations, violence, harcèlement... On se demande où est passé l'amour du prochain chez les mères supérieures qui ont plutôt l'air de tortionnaires aguerries! Quoi qu'il en soit, si aujourd'hui ce pamphlet nous semble quelque peu désuet, n'oublions pas qu'à l'époque des lumières les femmes qui finissaient au couvent contre leur volonté n'étaient pas rares, loin de là, et que pousser un grand cri peu au moins faire quelques vagues...
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Diderot nous offre une oeuvre anticléricale majeure mais aussi une étude de la société de cette époque.
Suzanne, enfant illégitime, est enfermée dans un couvent où elle est contrainte de prononcer ses voeux.
Nous la suivons de sa rébellion initiale jusqu'à son acceptation de sa situation mais aussi au travers des relations amicales ou terriblement douloureuses et malsaines qu'elle entretient avec ses soeurs et la mère supérieure.
L'écriture est magnifique et bien que certaines tournures et expressions semblent un peu anciennes et désuètes on est surpris par la qualité et une certaine modernité dans la façon de narrer la vie de Suzanne.
Les descriptions des sévices et autres tourments sont édulcorés et c'est une chance car l'imagination faisant le chemin c'est déjà assez insoutenable.


Je n'aurais pas pensé m'intéresser autant à la vie de cette religieuse forcée mais ce fut une lecture intrigante et agréable.
Lien : http://delcyfaro.blogspot.fr..
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Hésitant entre témoignage et fiction, cet ouvrage violemment anticlérical nous plonge au coeur des turpitudes qui règnent dans les couvents du XVIIIe siècle. Brimades, privations, sévices divers, violences physiques et mentales... Rien n'est épargné à la pauvre Suzanne, jeune femme innocente et naïve, dont la seule faute est d'avoir osé s'élever contre un noviciat qui lui était imposé par des parents cruels.

Loin de la narration fantasque qui faisait le charme et le génie de Jacques le Fataliste, Diderot choisit ici un autre registre, plus sombre, plus désabusé, mais tout aussi corrosif et efficace, faisant de ce roman une critique acerbe des dérives de l'Église, de ses silences et de ses scandales.

Et précisément, c'est un scandale que provoqua la parution de ce livre, sans doute moins pour les réflexions philosophiques de l'auteur concernant la liberté, qu'en raison des nombreuses attaques portées contre les communautés religieuses, où règnent l'ambition, la jalousie, la cruauté, la dépravation et l'hypocrisie. Sans parler de la deuxième partie du roman, où la pauvre Suzanne tombe sous la coupe d'une mère supérieure aux penchants inavouables, et qui a instauré dans son couvent un climat de doux libertinage avec favorites, disgraciées et extases quotidiennes.

Avec un ton volontairement sulfureux et le choix d'une héroïne particulièrement pure et innocente, qui ne voit pas le mal même lorsqu'il est juste sous ses yeux, les infortunes de Suzanne annoncent celles que connaîtra Justine environ dix ans plus tard, sous la plume d'un certain marquis, lui aussi très virulent dans ses attaques contre la religion et l'Église...

(la suite en cliquant sur le lien ci-dessous !)
Lien : http://ars-legendi.over-blog..
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Un texte terrible et puissant. Critique de la société prude et mortifère, des faux semblants en religion, de la haine de son prochain dans les lieux qui prônent l'inverse.
Une oeuvre qui ne manquerait pas de parler à ceux qui ont vécu du harcèlement, et à tous les apostats et autres hérétiques !
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La plupart du temps, j'ai du mal avec les oeuvres dites « classiques », car elles résonnent comme des textes que l'on doit absolument avoir lu en tant que lecteur(ice)s, même si parfois le sens nous échappe. Je dois dire que, cette fois, un roman du passé m'a clairement ramené à notre réalité. Bien plus que les souffrances d'une jeune fille injustement placée dans un couvent, cette histoire nous parle de liberté, celle à laquelle nous avons le droit, et surtout celui de ne pas être enfermés. Suzanne est née illégitime, sa mère décide donc de la faire rentrer dans un couvent à vie, malgré, évidemment ses protestations plus légitimes.

Sous forme de lettres qui nous apparaît comme un journal, Suzanne livre au marquis de Croismare ses mésaventures face à un destin qu'elle n'a pas décidé. Rejetée par ses parents, elle va également subir d'ignobles traitements lors de ses séjours dans les trois couvents dans lesquelles elle ira. On se sent réellement tristes et oppressées dans ce quotidien monacal austère, auquel Suzanne tente de résister et on ne peut qu'espérer pour elle une fin heureuse.
J'ai trouvé qu'il y avait du génie dans la plume de Diderot d'arriver ainsi à se glisser dans la peau d'une femme avec autant de justesse, bien qu'on découvre parfois une gentillesse et une naïveté presque navrante à l'égard du monde. Et pour cause, on lui refuse tout, même le droit d'exister.
Si les crimes finissent par se payer, il n'en reste pas moins que les séquelles restent et que l'espoir entretenu par la jeune femme de « vivre en société » se mût en un désir de se faire oublier, tout cela pour apaiser des conséquences qu'elle n'a pas déclenchées.

Une réflexion juste qui s'entremêle de sous-entendu suffisamment explicite pour faire comprendre aux lecteur(ice)s les travers d'une institution qui laisse entrer des gens dont ce n'est ni le souhait, ni la vocation d'appartenir à Dieu, et dont l'isolement amène à de dangereuses extrémités. Un texte brillant et éclairant, digne des Lumières.
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Lu pour la première fois il y a vingt ans (lecture de lycée), je viens de le relire après avoir vu le film de Rivette (version restaurée inédite), sorti en 1966 et censuré alors que le Premier ministre était Malraux, plus de 2 siècles après le scandale lié au livre ! le film est d'ailleurs rigoureusement identique (mot pour mot, pour ce qui est des dialogues), sauf la toute fin
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Echouée dans un bordel après avoir fui son deuxième couvent, elle bascule par la fenêtre et meurt. Dans le livre, le récit se termine alors qu'elle est blanchisseuse et rêve d'une vie meilleure.
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Le livre se présente sous forme d'une récit-mémoires que la religieuse Marie-Suzanne Simonin adresse à un dénommé "marquis de Croismare". On sait aujourd'hui que Diderot s'inspira d'un authentique fait divers, l'histoire de Marguerite Delamarre, bien que celle-ci fut renvoyée dans son 1er couvent, condamnée à y mourir, contrairement à l'héroïne du livre qui passera entre les mains perverses d'une 2e supérieure avant d'avoir l'opportunité de s'échapper.
Une très jeune fille, très croyante mais n'ayant aucun goût pour la vie religieuse, se voit obliger par sa famille de prendre le voile pour éviter le scandale car elle a plu à un prétendant de sa soeur. Elle fait son noviciat pendant 2 ans. A son retour, elle prononce ses voeux car elle apprend qu'elle n'est pas la fille de son père et sa mère refuse qu'elle déshérite ses soeurs.
C'est étrange mais ma 1re lecture m'avait beaucoup plus choquée que la 2e (et que le film, carrément édulcoré bien que fidèle mot pour mot). J'avais été choquée par les bris de verre qui ensanglantent ses pieds nus... (absent du film). Soeur Suzanne n'a de conscience de son corps que via la douleur...
La vie de cette jeune fille est un martyre total, elle subira mille horreurs (mise au cachot, jeunes forcés, mortifications, piqûres d'aiguille, bris de verre qui visent à lui blesser les pieds, pas de meuble dans sa chambre, pas de livre ni de courrier ni de visite autorisés) suite à sa rebellion contre l'instauration de nouvelles règles austères de la nouvelle supérieure qui succède à sa bien-aimée première supérieure. Donc là clairement, Diderot dénonce la maltraitance dans les couvents, le sort des jeunes filles sans dot et sans défense, la stupidité et la cruauté des soeurs qui évoluent en vase clos et en dehors de la société. Les figures masculines apparaissent bonnes dans l'ensemble.
Grâce à un avocat dévoué à qui elle a fait parvenir des lettres, elle sera transférée ailleurs. Dans son 2e couvent, elle sera l'objet des avances de la mère supérieure, homosexuelle et figure instable. Cette dernière aura plusieurs orgasmes en sa présence, mais Suzanne n'y entendant rien et n'y voyant qu'innocence, elle sera poussée à fuir aussi ce couvent aux allures de bordel saphique par son directeur de conscience.
Enlevée par un jeune bénédictin qui veut la violer, elle le fuira et se retrouvera blanchisseuse, rêvant d'une vie meilleure, terrorisée d'être reprise par le couvent.
Ce que j'en retiens, c'est qu'aucun crachat n'atteint la blanche colombe, même attaquée elle ne songe qu'à se défendre, non à accuser ; subissant des attouchements, elle songe à l'amitié entre femmes unies dans leur amour de Dieu... Rien ne corrompra son âme et son corps purs. Tout cela est difficilement concevable aujourd'hui, que ce soit son innocence à elle ou la cruauté gratuite des soeurs et mère(s) ; pourtant Diderot nous livre cet écrit comme un témoignage glaçant sur les dérives d'une religion menée par les femmes pour les femmes.
PS : j'écris cette critique pendant le visionnage du film de Nicloux : plus court que le premier, certains dialogues sont identiques au livre et au film de Rivette. La prestation de la douce Pauline Etienne est impeccable (qu'on retrouve dans le Bureau des légendes, aux côtés de Gilles Cohen également, son père dans le film, son supérieur dans la série !). La fin est très étrange et inédite : après sa fuite nocturne, elle se réveille dans une riche demeure habitée par un riche marquis qui ne songe nullement à la violer... J'ai trouvé ce remake dénué d'intérêt.
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Ce roman est une vraie satire des couvents et une ode à la liberté de choisir son destin. Il se présente plutôt sous la forme de mémoires , c'est l'histoire d'une jeune femme qui n'est pas la fille du père qui l'a élevé, donc celle-ci doit renoncer à tout droit et se retirer du "monde". Cette héroïne d'une naïveté désarmante sera aux prises avec un univers religieux "à la Sade". Roman un brin caricatural qui dénonce toutes les dérives d'un univers claustral, demeuré inachevé ,donc souffrant d'une fin décevante , est agréable, sans plus...
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