AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,19

sur 407 notes
A la réception de ce livre j’ai été surprise et ma curiosité éveillée. La couverture rouge orangée alliée au papier beige m’a séduite. Puis en le feuilletant j’y ai découvert des apartés étonnantes comme les intrusions de Lorchus diable lubrique, démon personnel de l’auteur qui affole la typographie ou des pages à découper selon les pointillés contenant des scènes « propres à choquer la sensibilité d’un jeune public ».

Beaucoup d’éléments disparates viennent se glisser dans le récit mais ces digressions, souvent très drôles, s’intègrent très bien à la situation et en allègent le tragique sans l’esquiver.

L’héroïne de cette histoire est au chômage. Elle doit survivre avec 40 euros. A l’impossibilité de se nourrir correctement avec une telle somme ou se distraire viennent s’ajouter toutes les difficultés administratives qu’engendrent les incompréhensions de sa situation par les employés de Pôle emploi qui eux s’en tiennent aux règlements et ne peuvent répondre, sans dossier à jour, à ses demandes d’avance sur les aides auxquelles elle a droit.

Mais elle est aussi écrivain et à ce titre s’autorise, dans l’élaboration de son livre, toutes les fantaisies pour la plus grande joie du lecteur.

Dès le sous-titre « Roman improvisé, interruptif et pas sérieux » le lecteur sait où il met les pieds et la dédicace est à l’avenant : Aux improductifs, aux enfants, aux rêveurs, aux mangeurs de nouilles et aux « défaits », je dédie ce livre.

L’humour et la fantaisie n’empêche pas la dénonciation des travers de notre société, la famille est elle-aussi égratignée même si un intermède au sein du cocon familial fait parfois du bien en permettant de ne pas sombrer.

J’ai aimé les listes débridées, adoré le voyage en TGV où elle s’endort après avoir ouvert un livre de Pierre Bergounioux et que ce dernier lui apparaît dans son sommeil « un grand homme extrêmement maigre engoncé dans une robe de bure, une tête en forme d’épingle dissimulée sous un sombre capuche. Cette apparition me fit une frousse bleue. » S’ensuit un dialogue impayable entre les deux qui se termine dans un grand rire…

Dans le bonus offert à la fin, sur des pages de la même couleur que la couverture, Sophie Divry nous donne à lire sa lettre à la responsable de la résidence De Pure Fiction, Isabelle Desesquelles dont je cite un extrait :

« Le quotidien d’une héroïne qui se débat sans argent, sans emploi, peut facilement être triste, or je ne voulais pas un livre plombant. J’ai commencé à écrire ce texte pour m’amuser. Après le travail d’alliage des contraires que m’avait demandé « La Condition pavillonnaire », j’ai voulu prendre un chemin opposé et laisser libre cours à mon imagination, sans rien m’interdire. Les objets se sont mis à parler, le diable à apparaître, les listes à s’allonger dangereusement , la typographie à s’agiter. C’est ainsi que, alors que j’ai intellectuellement grandi sous l’influence d’une écriture blanche ou plate, en tous points sérieuse, j’ai abouti à son exacte contraire, une écriture gondolée, pour ainsi dire.
Mais ne nous y trompons pas : ce n’est pas le chômage qui est drôle, c’est la littérature qui peut être une fête. »

Le lecteur lui-aussi « se gondole » et passe un très bon moment grâce à cette surprenante lecture pleine de verve et d’originalité.

Merci à Babelio et aux éditions Notabilia / Noir sur Blanc qui m’ont offert ce livre qui me donne envie de prolonger la découverte de cette auteure

Lien : http://www.babelio.com/livre..
Commenter  J’apprécie          735
Ce roman raconte " la misère" d'une jeunesse contemporaine en perte de repères: il conte l'histoire en trois chapitres et à la première personne de Sophie, la trentaine, chômeuse en fin de droits, en recherche d'emploi.
Le lecteur est pris à la gorge: il n'a aucun répit, Sophie est souvent affamée, soucieuse d'écrire son roman....
C'est un ouvrage trés original, parfois pas sérieux, désopilant , digressif, interruptif, improvisé qui porte bien davantage sur la façon incroyablement drôle, parfois grave malgré tout dont l'auteure raconte les péripéties haletantes, hilarantes, drôles que sur les aventures elles - mêmes.....
Sophie nous embarque avec incongruité, cocasserie et burlesque dans ses turpitudes, elle subit son isolement par sa condition " d'ascète forcée".....
La question centrale posée au lecteur dans cet ouvrage est celle - ci : Quelle est la place de l'homme ou de la femme au chômage dans notre société???
Forcée par son destin ou par elle ?
Désopilante ou caustique, consciente de la dérision liée à la fameuse modernité, l'auteure ne laisse rien passer à ses personnages, elle les utilise pour faire sans concession une violente critique caustique, décapante, des besoins de l'homme pour se fondre dans la société moderne, le travail et la famille....pour finalement s'embourgeoiser!
Chacun aspirerait- il à s'embourgeoiser?
Elle nous interpelle à sa manière avec ce roman.....on rit jaune de cette dérision
car elle n'épargne personne, ni sa famille, ni les autres. Au contraire , elle met en relief, cruellement les mesquineries, les combinaisons, les tracasseries ubuesques de la nature humaine et de ses petits comptes mesquins....A Moi tout!
Rien pour les autres!
Un livre trés difficile à critiquer car la forme désopilante, excessive, déstabilise et laisse sans voix! Sur un fond de gravité qui en dit fort long sur notre époque!
Décapant! Déstabilisant ! Salutaire ! Je ne sais.....
Merci à Babelio pour cet envoi et à Masse critique!
J'avoue que j'ai préféré "la cote 400 "et "la condition pavillonnaire" plus classiques...
Commenter  J’apprécie          542
C'est la, c'est la, c'est la Salsa du démon 🎶 🎶
Salsa du démon 🎶

C'est bien connu, la faim peut provoquer des hallucinations. Et c'est ce qui arrive à Sophie, écrivaine fauchée et affamée qui vivote dans son minuscule studio lyonnais. Elle a quitté famille aimante, mari volage et travail abrutissant pour se consacrer à son art, mais la transition est rude et les fins de mois difficiles, surtout quand le RSA se fait attendre

A l'image de son héroïne, Sophie Divry n'a pas besoin de psychotropes pour nous offrir un nouveau roman joyeusement déjanté, dont le titre "Quand le diable sortit de la salle de bain" et la couverture rouge vif annoncent littéralement la couleur. Rien à voir, donc, avec le sérieux mélancolique de "La condition pavillonnaire". On croisera ici Lorchus, un démon répugnant, Hector, un ami obsédé sexuel, une mère-refuge, une fratrie hétéroclite et tendre, des patrons peu regardants et quelques mecs lourds.

Le style, égayé par des fantaisies de mise en page, est surprenant, plein de néologismes et d'énumérations loufoques, tel l'inépuisable « sac aux métaphores » dans lequel Sophie puise des comparaisons complètement farfelues. Dans le supplément des pages rouges en fin d'ouvrage, Sophie Divry qualifie ainsi son écriture de « gondolée ». « Mais ne nous y trompons pas : ce n'est pas le chômage qui est drôle, c'est la littérature qui peut être une fête », précise-t-elle. Et c'est vrai, sous son aspect ludique et coquin (cf. la parodie de texte pornographique), ce roman recèle une véritable profondeur, mettant en abyme le travail d'écrivain et captant l'absurde ou le tragique de notre vie contemporaine. Une façon originale de venger par l'humour les personnes en situation de précarité. Je vous recommande la recette du « contemplage de plafond » à l'annonce d'une nouvelle particulièrement déprimante.

Un grand merci à Babelio et aux éditions Notabilia pour cette surprise littéraire diablement entraînante. « Quel talent Quel talent » ou Splendide ! dirait Lorchus, le démon personnel de madame :
🎶 Oui, je suis Belzébuth (Horreur)
Je suis un bouc, je suis en rut (Horreur, malheur)
Oui, oui, oui, je vis dans l'ordure (Horreur)
Je pue la sueur et la luxure
C'est la, c'est la, c'est la Salsa du démon 🎶 🎶
Salsa du démon 🎶
Commenter  J’apprécie          503
Si La condition pavillonnaire déroulait inexorablement le fil du temps de la vie d'une femme du vingtième siècle, avec Quand le diable sortit de la salle de bain, Sophie Divry s'en paye une tranche, si j'ose dire. C'est en effet un épisode ciblé du quotidien d'une jeune femme, mise sur la touche pour de banales et habituelles raisons : divorce, licenciement, chômage pour en arriver au plus rude : fin de droits et RSA. Autrement la misère, si on la définit comme une lutte de tout les instincts pour assurer ses besoins fondamentaux, manger pour rester en vie :

« Tous les humains, depuis de millénaires, ont dû se remplir l'estomac. C'est l'unique réalité qui ne sera pas suspendue par une révolution, un changement de saison ou un bisou magique ».

C'est si fondamental que c'est la trame du roman. Et c'est compliqué quand les factures tombent et que l'on sait qu'il ne reste que quelques euros avant le prochain versement de l'aumône d'état. Il suffit alors d'un grain de sable dans les rouages, une pige pas matérialisée à temps par un bulletin de salaire, et des règlements administratifs idiots dans leur rigidité, consolidés par le perfectionnisme de ses tacherons.

Certes Maman est là : mais il vaut mieux rester discret sur ses galères si on ne veut pas subir la cohorte des « je te l'avais bien dit ». Et c'est mal parti lorsqu'on est accueillie par un « je te trouve en pleine forme », alors qu'on a l'estomac dans les talons depuis plusieurs jours. Alors on profite de l'aubaine et de l'hébergement pour juste se refaire des stocks de calories, en éludant les sujets qui fâchent.

L'auteur se permet des fantaisies d'écriture et de mise en page qui sont un vrai régal. Elle s'y fait malmener par un de ses personnages tyrannique et amoureux pas transi du tout. Bertrande, une autre bouée de secours, est une belle âme que les dérives de la société qui met sur le carreau une foule de gens ordinaires, à l'instar de notre narratrice, occupent à plein temps. Quand au diable, il est prêt à surgir à chaque page, bien conscient qu'il est facile de prendre dans ses rets un quidam fragilisé par la précarité.

L'écriture se fait plus mélancolique lorsque sont évoquées les illusions perdues :

« Quand la terre eut fini d'absorber les larmes de mon père, les barrières du parc qui cernaient mon enfance s'étaient effondrées. »

ou le manque de fondement moral de notre monde :

« La vie est pleine d'action sans intérêt auxquelles les adultes ne songent pas lorsqu'ils lancent leur projet d'enfant, acceptant de fait que bébé risette passera plus de temps à apprendre à conduire une voiture ou à monter un dossier de prêt immobilier qu'à approfondir moralement la notion de justice, esthétiquement la notion de beauté, politiquement l'égalité ».

C'est un roman bien ancré dans son temps, qui évite la nostalgie inutile des « c'était mieux avant » ou les prophéties des oiseaux de malheur tout aussi vaines. le ton est vif et enjoué, léger malgré le drame qui se joue. L'humour et l'autodérision sont des refuges tout autant que la violence ou l'autodestruction.


Si Dickens avait eu plus d'humour….

Lien : http://kittylamouette.blogsp..
Commenter  J’apprécie          472
Journaliste trentenaire, Sophie ♀ est tombée ↓ dans la spirale infernale ҨҨҨ : boulot précaire, chômage, RSA, fins de mois difficiles [€ + £ + $ < 0]. Elle n'est pas encore à la rue, elle a une famille, pas tout près, certes, mais elle peut toujours s'y réfugier.╔╗

Ce roman « émaillé d'élucubrations incontrôlables » est un formidable fourre-tout, foutraque, délirant, loufdingue.
Sophie Divry s'amuse avec le style, joue avec les mots (leur sonorité et leur sens), avec la forme des lettres et la ponctuation. Les mots se tordent - calligrammes et autres fantaisies. C'est drôle !
L'auteur liste à n'en plus finir aussi ∞, et ça, c'est parfois agaçant. J'ai lu certains de ces longs recensements minutieusement, mais en ai zappé beaucoup d'autres ►►. Quand j'ai abordé cette lecture, cette particularité m'a découragée ♠, de même que les effets de style appuyés façon Queneau et Vian ©. J'ai toqué chez Cortoun, qui me semblait être encore dans cette lecture, ou tout juste sorti du truc. Le stylo-censeur à la bouche, il m'a gentiment indiqué quelles pages je pouvais 'arracher' (sic) carrément ■ -> pas possible, il n'est pas à moi, ce livre, mais merci tout plein, je vais te demander en 304e ami, tiens !☺

J'ai emprunté ce roman à la médiathèque parce qu'il était en bout de gondole ║ et orné d'un petit ♥. Deux signes prometteurs...
Je me suis quand même longtemps demandé pourquoi il avait mérité une telle médaille ¤, ce drôle de petit bouquin, puis je l'ai adopté à mi-parcours, appréciant de plus en plus ☼ les libertés prises sur la forme, et savourant l'humour (quelques scènes Q chaudasses cocasses (•)(•) - ((l)) - 8==>). Mais aussi, et plus encore, les réflexions sur le travail (en avoir ou pas), la place du chômeur dans la société, l'argent qu'il est facile de mépriser quand on en a suffisamment, etc.

De Sophie Divry, j'ai lu le plus classique 'La cote 400' qui m'a déplu - j'y ai vu l'image stéréotypée de la bibliothécaire acariâtre (ça existe encore, ces "choses" là ? celles que je connais sont charmantes !).
Commenter  J’apprécie          3812
Quand le diable sortit de la salle de bain, c'est le drôle de roman que nous propose Sophie Divry. L'histoire de Sophie qui, au chômage, a du mal à joindre les deux bouts et tente tant bien que mal d'écrire un roman.

Entourée de Victor, son voisin obsédé sexuel, et Lorchus, son diable personnel, elle tente de faire face aux fins de mois difficiles. Sans un sous en poche, elle a bien souvent l'estomac tiraillé par la faim. Pas sûr que ces deux-là lui soient d'un grand secours.

Dure réalité du chômage, rapports compliqués avec l'administration, pôle-emploi notamment, employeurs tout puissants, salariés traités comme du bétail, rien n'est esquivé mais rien n'est jamais pesant. Au contraire, toutes ces situations sont prétextes à des délires hallucinatoires, totalement jubilatoires pour le lecteur.

Alternant réalisme et loufoquerie, gravité et folie douce, inventions langagières et mise en page imaginative, le tout saupoudré de quelques scènes savoureusement crues, Sophie Divry réussit un roman plein d'humour et de profondeur à côté duquel il serait vraiment dommage de passer.

Lien : http://bouquins-de-poches-en..
Commenter  J’apprécie          342
Une chômeuse raconte ses galères d'une manière humoristique : elle connaît la faim, les astuces de toutes sortes pour survivre, les boulots précaires et inadaptés auxquels elle finit par se résoudre, jusqu'au harcèlement sexuel.
Elle invoque sa mère, son meilleur ami et ses obsessions, jusqu'au diable en personne (d'où le titre).
Contrairement à "La condition pavillonnaire" qui m'avait déprimée, j'ai beaucoup apprécié ce livre d'une lyonnaise (d'adoption) que j'ai rencontrée autrefois lors d'une action en "collombie" (époque de l'ancien maire). D'ailleurs elle-même signale que ses livres sont tous différents ("Côte 400" m'intéresse vivement). Comme quoi...
Sophie Divry crée un vocabulaire en tordant les verbes, elle emprunte des phrases à de nombreux auteurs mais en citant ses sources.
Je recommande chaleureusement cet ouvrage à la fois réaliste et déjanté, à la hauteur de ceux de grands auteurs sur le sujet ("Dans la dèche à Paris et à Londres" de George Orwell par exemple)
Commenter  J’apprécie          310
Sophie Divry change tout à fait de style après" La condition pavillonnaire" .
Dans ce livre, Sophie, une chômeuse de longue durée, peine à écrire un livre et ses allocations de chômage n'arrivent pas. Elle se retrouve avec très peu d'argent pour terminer le mois. Elle nous fait entrer dans sa réalité et puis dépasse ce stade pour arriver dans des scènes imaginaires où Lorchus, le diable la tente en lui proposant des plans malhonnêtes. On entre dans une ambiance qui m'a fait penser plusieurs fois à l'univers de Boris Vian dont j'ai relu"L'écume des jours" il y a peu.
L'auteure est imaginative dans les scènes, avec les mots qu'elle invente dans le langage de sa mère, avec les épithètes placés systématiquement avant le nom par son ami Hector, avec les mots disposés de façon à former un dessin.
Ses références littéraires sont vivantes et viennent bien à propos pour illustrer le récit comme la photo que son frère pêcheur amateur lui envoie avec son poisson et la photo dans "La gloire de mon père"...
Le conte qu'elle invente pour ses neveux ," le mange-consonnes", devrait faire l'objet d'une parution illustrée. Il est tout à fait original et peut se lire à des enfants avec leur participation pour retrouver les mots initiaux.
J'ai trouvé ce roman génial, vivant, inventif et surtout, l'humour n'a pas empêché la réalité sociale d'apparaître.
Commenter  J’apprécie          310
Ce livre joyeux, lumineux, est celui d'une auteure douée de sa génération, qui s'amuse avec la langue française en faisant souvent des variations sur un même thème. Bon, personnellement, j'ai trouvé que ces exercices de styles étaient un peu trop appuyés, et j'avoue que n'ai pas trop aimé ce côté baroque où la littérature se noye sous l'abondance des jeux de mots. C'est la seule note négative de cet ouvrage que l'on parcourt avec plaisir de bout en bout.

Pourtant, le livre parle du sujet grave du chômage et de la faim, avec une légèreté décalée, qui pourrait aider ceux qui sont sur le bord de la route. le personnage féminin est écrivain, elle vit dans la pauvreté. Elle touche les allocations sociales, tout en faisant de temps à autre des boulots comme pigiste, qui rapportent très peu. Elle a perdu son job, son amoureux. Elle fait des calculs afin de pouvoir organiser quelques prochains maigres repas. Elle se bat avec une administration aux exigences ridicules.

On lit tout en réalisant le drame dans lequel vit le personnage. On compatit, et on apprécie l'originalité du style. La fin nous lâche… Une auteure qu'il ne faut pas lâcher, elle.
Commenter  J’apprécie          280
Ce livre, on ne me l'a pas offert : j'en ai lu des critiques sur Babelio et je l'ai....acheté ! Non sans en avoir parcouru quelques pages probatoires, calée dans un fauteuil de notre excellente librairie.
Ce livre, c'est le choc du fond et de la forme (quelle horreur, cette opposition !). le chômage est un sujet profondément déprimant qui aurait pu donner lieu à une peinture sociale triste et consciencieuse, mais, miracle, Sophie Divry qui semble pourtant connaitre parfaitement les situations de manque d'argent, de faim tenaillante et de tracasseries administratives, en fait un livre plein de verve, totalement jouissif, libéré, débridé, où la fantaisie graphique et de mise en page appuie l'imagination et l'invention verbale, et où les tons adoptés, entre parodie, humour, satire, conte, lyrisme même, renouvellent constamment l'intérêt !
Alors que tout est fait pour donner l'impression d'un livre "pas sérieux" où l'auteur se défoule et envoie valser toutes les contraintes imposées par les normes sociales et littéraires, on n'a jamais aussi bien parlé de l'angoisse du chômeur devant les labyrinthes administratifs, de la faim qui rend hypersensible à l'injustice du monde : "elle était comme un diapason qui résonnait de tous les malheurs du monde, puisqu'elle avait tout supprimé, l'espoir comme l'avenir, la chaleur comme le désir, il ne restait que l'offense et l'indignité, d'obscènes déclarations télévisées prononcées par d'obscènes gens de pouvoir" ou encore de notre société de vieux et de papy-boomers qui écrase et aliène les générations plus jeunes, inférieures en nombre...
Une auteure surdouée, des clins d'oeil appuyés à Laurence Sterne (qui lui aussi jouait des codes graphiques !) et à Diderot, une inventivité et un don d'écriture exceptionnels, un jaillissement qui frôle parfois le rap (la mélodie verbale des listes se fait parfois un peu longue quand l'absurde l'emporte), bref, un livre peut-être foutraque, peut-être génial (dans toutes acceptions du terme), un bel objet de surcroît, donc à marquer d'une pierre blanche malgré sa rouge couverture diabolique !
Commenter  J’apprécie          230




Lecteurs (711) Voir plus



Quiz Voir plus

Compléter les titres

Orgueil et ..., de Jane Austen ?

Modestie
Vantardise
Innocence
Préjugé

10 questions
20274 lecteurs ont répondu
Thèmes : humourCréer un quiz sur ce livre

{* *}