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sur 255 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Bérénice Einberg, rebelle, fantasque, délurée, idéaliste, jalouse, promène son regard acéré sur le monde qui l'entoure, particulièrement sur ses parents dont l'antagonisme criant ne s'étend pas seulement sur les croyances religieuses (le judaïsme pour papa et le catholicisme pour maman) mais aussi sur l'éducation de leurs enfants. Car Bérénice a aussi un frère qu'elle vénère, Christian, adoré par sa mère. le père, quant à lui, s'occupe de Bérénice, un peu trop au goût de celle-ci. « Vacherie de vacherie! »
Réjean Ducharme occupe décidément une place à part dans la littérature québécoise : sa prose originale jumelée à ses personnages jusqu'au-boutistes offrent au lecteur une expérience romanesque hors du commun.
Ce roman précède L'hiver de force dans l'oeuvre de Ducharme et en constitue le précurseur autant dans le propos que dans la vivacité de la narration. J'ai, en revanche, préféré L'hiver de force, que j'ai trouvé plus abouti et parcouru d'un humour salvateur, absent de L'Avalée des avalés. Une lecture au récit échevelé, fou et cruel, empruntant à la mythologie grecque et à la Bible, sans concession pour les âmes sensibles.
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J'ai un peu de mal à faire cette critique parce que d'un côté Réjean Ducharme est un auteur québécois important et de l'autre son premier roman "L'avalée des avalés" ne m'a pas entièrement séduite car il y a un peu trop de noirceurs pour moi.
Le texte est d'une grande puissance comme d'ailleurs les chansons qu'il a écrites pour Robert Charlebois mais j'ai eu un peu de mal avec le langage québécois. Il y a des expressions que je ne comprends pas bien.
La narratrice s'appelle Bérénice Einberg. C'est une petite fille qui se réfugie "dans son palais de solitude" où elle trouve ses seules joies. Pourtant c'est une révoltée qui crie souvent "Vacherie de vacherie!". Il faut dire qu'elle a une famille un peu compliquée : un père juif, une mère catholique et un frère qu'elle aime d'amour. Ils vivent sur une île dans la banlieue de Montréal où les parents font tout pour les séparer. Bérénice cherche à partir de cette maison qui l'enclave, quitter sa mère qui la terrifie et son père qui l'ignore. Elle grandit avec la rage nourrit de tristesse.
Il y a un côté loufoque que j'aime bien comme quand son frère Christian qu'elle aime lui raconte qu'il veut devenir lanceur de javelot alors qu'il fait des études de biologie. Mais ce qui m'a gênée c'est que Bérénice parle de la même façon à 9 ans et à 20 ans.
Ce roman a été créé en 1966 et il a fortement marqué les esprits. Je comprends pourquoi car il y a quelque chose de Boris Vian dans ce texte de Réjean Ducharme qui porte vraiment un très beau nom.


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Ouf! Il n'y a pas à dire, Réjean Ducharme a la plume leste! Que de richesse dans ce livre! Chaque page recèle de perles de poésie!

En dépit de sa qualité littéraire, j'ai d'abord eu de la difficulté à adhérer à l'histoire, car on est bien forcés d'admettre que Bérénice Einberg est un personnage qui se laisse difficilement aimer, autant par son entourage, dans le livre, que par le lecteur! Fille de feu : passionnée, intransigeante, cruelle, à la fois créative et destructrice, lucide et fêlée. Go hard or go home!

Au début, je l'ai détestée ; assez pour me demander si j'allais parvenir à terminer ma lecture! Lentement, mais sûrement, je l'ai apprivoisée, et j'ai fini par, sinon l'aimer, être fascinée par sa fougue!

C'est un récit fort, prenant et déroutant. Je suis vraiment très contente d'avoir persévéré malgré mes réserves du début.
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De ce roman que j'ai lu il y a plusieurs années, j'ai beaucoup plus retenu le style que le récit en soi. C'est que l'écriture de Réjean Ducharme frappe l'imaginaire par ses figures de style, ses jeux de mots, ses expressions très colorées et poétiques et la narration d'un personnage qui voit les choses bien à sa façon. J'ai adoré L'Avalée des avalés et j'en garde un excellent souvenir.
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Vacherie de vacherie ! (je reprends l'expression favorite de Bérénice, la narratrice de ce livre)

Quel livre !

Bérénice est une petite fille au début du livre (huit ans à peu près) et à la fin du livre elle a une vingtaine d'années.
Elle vit au Canada sur l'île des soeurs avec son père, sa mère et son frère qui a deux ans de plus qu'elle. Les parents se détestent et se déchirent : Ils décident de se séparer et gardent chacun un des enfants. le père Einberg est juif et élève sa fille dans la religion juive. La mère est catholique et veut élever le fils, Christian, dans sa religion à elle. Au début, j'ai cru que Bérénice était une sorte de petite soeur de Zazie (celle du métro) ; grande gueule, avec un franc-parler bien à elle et plutôt assez chipie.
En fait il n'en est rien : Bérénice est une petite fille qui souffre énormément des disputes continuelles de ses parents. Pour survivre à ce climat impossible et anxiogène, elle a une affection démesurée pour son frère Christian. Pauvre petite fille ! au début on est en totale empathie avec elle, écartelée entre son père et sa mère. Elle ne reçoit aucune tendresse, aucune attention si bien qu'un jour elle essaie de se laisser mourir. Elle survivra à cette maladie (forte fièvre) et la ressemblance avec Zazie s'arrête là. Bérénice, un peu après cette maladie, devient franchement antipathique : elle tue les chats de sa mère qu'elle dit détester, une page plus loin elle dit l'aimer. Elle en fait voir de toutes les couleurs à son entourage (entourage détestable de son père et sa mère, pas un pour rattraper l'autre, certes ils ont souffert pendant la guerre mais comme peut on torturer, psychologiquement, ainsi ses propres enfants). de rage, son père l'expédie chez son oncle, juif orthodoxe à New York pendant cinq ans. Son amie Constance la suit mais l'apaisement sera de courte durée.
Pendant cinq années, elle ne verra pas du tout son frère et lui écrira des lettres enflammées : l'aime-t-elle vraiment ce frère ou écrit elle ces lettres uniquement pour faire enrager son père qui lit tout son courrier ?
La petite fille espiègle et malheureuse du début du livre devient une adulte détestable et malheureuse qui se rend, contrainte et forcée par son père en Israël pour faire son service militaire. La petite fille a disparu, reste une jeune adulte perturbée qui accomplira l'indicible.

Au delà de l'histoire très prenante, l'écriture de Réjean Ducharme est somptueuse et très poétique (Roman paru en 1966 en France, Wiki me dit qu'il a été en lice pour le prix Goncourt)
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Ce roman fait partie, selon moi,  des dix romans québécois essentiels qu'il faut lire… Pourquoi? Pour aller à la rencontre de Bérénice et de sa fureur de vivre. Ses parents ont décidé de l'élever dans la religion juive tandis que son frère est éduqué dans la foi chrétienne. Les deux parents se servent de leurs enfants pour atteindre l'autre. Bérénice voue un amour inconditionnel à son frère et ensuite à ses amies Constance Chlore et Gloria. Son père intercepte une lettre et il enverra sa fille chez l'oncle Zio, un autoritaire vivant à New York. Par la suite, elle devra se rendre en Israël où l'histoire se termine tragiquement.

Il faut plonger dans ce bouquin pour vivre avec elle la séparation de ses parents, pour assister à son passage difficile de l'enfance à l'adolescence, pour l'entendre dire des méchancetés, pour l'accompagner dans sa solitude :

J'ai atteint la dernière profondeur de ma solitude. Je suis là où la moindre erreur, le moindre doute, la moindre souffrance ne sont plus possibles. Je suis là où, dépourvue de tout lien, de toute assise, de tout air, ma vie, par son seul fleurissement miraculeux, m'enivre de puissance.

Comme nous sommes des passionnés de littérature, il faut partager avec elle son amour des livres :

Je prends goût à lire. Je me mets dans tous les livres qui me tombent sous la main et ne m'en retire que lorsque le rideau tombe. Un livre est un monde, un monde fait, un monde avec un commencement et une fin. Chaque page d'un livre est une ville. Chaque ligne est une rue. Chaque mot est une demeure. Mes yeux parcourent la rue, ouvrant chaque porte, pénétrant dans chaque demeure.

Véritable boule de feu, Bérénice est un personnage frappant, difficile à aimer, mais elle est inoubliable comme son poète préféré, Émile Nelligan

 Ce fut un grand vaisseau taillé dans l'or massif » . Je me ferme les yeux, et il me semble que sous mes pieds une mer roule des vagues plus hautes que des montagnes. Partir. Encore partir. Toujours partir.

https://madamelit.me/2017/02/03/madame-lit-une-ecrivaine-ou-un-ecrivain-par-mois-2/



Lien : https://madamelit.me/2017/02..
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Un livre, lu, relu, trituré, disséqué comme Réjame Ducharme le fait avec les mots qu'il manipule, qu'il exacerbe, qu'il transgresse, qu'il encage, qu'il libère, qu'il confesse…
Un roman à lire en jouant avec Bérénice, l'héroïne, (et pourquoi pas en faire un jeu partagé, pour stimuler nos neurones ?) Comment ? En retrouvant, alignant les jeux de mots, les calembours, les mots valises, les néologismes, les références géographiques, historiques, mythologiques, littéraires, celles de la peinture, de la musique, des sciences, de la botanique, de la zoologie, des sports … Bref, la liste est longue ! et moi j'y ai trouvé grand plaisir en m'instruisant !
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Dans ce roman nous suivons Bérenice de l'âge de huit ans à quinze ans. Nous ressentons toute sa souffrance, sa colère, sa colère, sa révolte, son irrévérence, son irreligiosite. Ce n'est pas la logique ou l'intellect qui nous aide à apprécier ce roman mais la sensibilité et la capacité à se laisser aller à la folie délirante de Bérenice, C'est notre capacité à se laisser avaler.

Ducharme aimé jouer avec les mots, les étirer, les tordre et les disloquer, cela donne une oeuvre pleine d'originalité, une forme délirante et du punch. Si on aime l'absurde on est servi. Personnellement ce genre d'écriture n'est pas ma favorite mais pour faire connaissance avec Rejean Ducharme et ce classique de la littérature québécoise ça valait le coup.

Publié en 1966 en pleine Révolution Tranquille au Québec, ce roman a certainement fait scandale auprès du clergé et marquer une étape dans l'émancipation de la littérature au Québec.
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J'avais détesté ce livre lors de ma première lecture il y a dix ans de ça. le style incisif et désobligeant de la narratrice m'avait rebuté. Ma seconde lecture fut plus intérressante. J'ai mieux compris le déchirement ontologique de Bérénice en rapport avec ses conflits familiaux et son aliénation haineuse. Une oeuvre confuse et pleine de ressentiments, j'ai apprécié davantage l'hiver de force.
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Ici, la forme est parfaitement cohérente avec le fond.

Le narcissisme et l'égocentrisme de la narratrice sont à la mesure de sa souffrance : exacerbés. Carencée, prise dans la haine de soi et des autres, Bérénice ne peut trouver dans le réel -- réel morcelé, inscrit dans la durée, source d'angoisse -- l'amour fusionnel qui seul pourrait la combler. La seule voie qui s'ouvre à elle est celle de l'enfance permanente, celle de l'imaginaire. D'où le refus de l'âge adulte, de la sexualité. Refus, plus largement, du réel -- net, absolu --, et survalorisation de l'acte volontaire, qui est acte de recréation du monde sur le plan imaginaire.

Or, ce passage vers l'imaginaire (plus on avance dans le récit, plus le délire s'accentue) ne peut s'accomplir que par le langage. Dans ce roman, le langage est le plus souvent performatif ; comme le « abracadabra » des contes pour enfants, il a pour fonction de faire apparaître un monde : « Quand je serai grande, je n'aurai plus en place de coeur qu'une outre vide et sèche. Christian me laissera froide, tout à fait indifférente. Aucun lien ne nous unira que je n'aurai tissé de mes propres mains. Aucun élan ne me portera vers lui : je me porterai vers lui de mes seuls pieds. J'aime imaginer que nous sommes deux pierres que j'ai entrepris de greffer l'une à l'autre avec mon sang. Un dialogue sera établi entre deux pierres. Mon entreprise sera couronnée de succès. Je suis une alchimiste rendue folle par des vapeurs de mercure. J'aimerai sans amour, sans souffrir, comme si j'étais quartz. Je vivrai sans que mon coeur batte, sans avoir de coeur ».

Ce qui fait de cet extrait plus qu'une description fantaisiste, c'est la volonté de Bérénice d'y croire, de s'y projeter entièrement. de s'y projeter, précisément du fait du son invraisemblance, de son excès, ce qui lui permet d'affirmer sur le plan imaginaire son irréductible solitude, envers et contre tous.

Mais le langage ne fait pas que créer, il doit aussi détruire. Comme dans L'Hiver de force -- seul autre roman de Ducharme que j'ai lu --, nous sommes conviés ici à une fête nihiliste du langage. Tout y passe. Les clichés, autant que les formes habituelles du langage littéraire, sont férocement attaqués, dynamités, à chaque page. le mot d'ordre de Cioran semble ici scrupuleusement suivi : « Devoir de la lucidité : arriver à un désespoir correct, à une férocité olympienne ». Il faut dire qu'au tournant des années 1970, la littérature québécoise est ouvertement iconoclaste. Mais, chez Ducharme, l'esthétique de la rupture est portée jusqu'à un extrême auquel je ne trouve pas d'équivalent.
Lien : http://lachambredecoute.blog..
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