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J'ai lu ce livre il y a une bonne dizaine d'années. À l'époque, plutôt amatrice de littérature " classique " (Qu'est-ce que ça veut dire classique ?), je n'avais jamais réellement franchi le pas de la lecture d'un vrai polar avant de m'attaquer à L. A. Confidential.

Je vais essayer de vous retranscrire mes impressions d'alors à la découverte du livre. Mes amis m'avaient particulièrement recommandé cet opus d'Ellroy ; j'avais vu le film que j'avais vraiment bien aimé, j'avais lu quelques fragments de la biographie de l'auteur qui m'avaient accrochés.

Je me suis donc laissée tenter par ce roman policier noir et y ai découvert un style littéraire à part. A priori, cela ne fait pas très écrit, cela ressemble davantage à un scénario de film qu'à une oeuvre littéraire (trait que j'ai retrouvé plus tard chez Dennis Lehane, par exemple). C'est un peu dérangeant au départ pour les gens comme moi, mais l'on s'y fait très vite.

Le parti pris par l'auteur d'utiliser les termes techniques en vigueur dans la police de Los Angeles à cette époque (années 1950) est parfois un peu ennuyeux, mais donne une certaine authenticité pour ne pas dire une authenticité certaine. On peut même considérer que c'est une sorte de marque de fabrique.

L'histoire (au sens de l'intrigue) est un magnifique édifice composite, un peu comme un château de cartes dont la base serait très, très large. Au début, il faut un peu s'accrocher avec les dizaines de noms à consonance anglo-saxonne qui finissent par tous se ressembler, mais (vous noterez que pour l'instant je suis restée dans un type de ressenti qu'on qualifierait de négatif alors que tel n'est pas mon intention) l'histoire prend peu à peu une ampleur grandiose. (Vous noterez maintenant que là, j'ai écrit " grandiose ", ce qui n'est pas si fréquent sous ma plume ; ceci remboursant largement cela.)

L'intrigue est réellement captivante. On essuie les mêmes frustrations que les enquêteurs dans les fausses pistes ou les bons tuyaux qui ne se rejoignent pas. Au fur et à mesure que l'on s'élève dans les étages du château de cartes, la vitesse semble s'accélérer et l'on oublie le style loin de la littérature ordinaire.

Ce fut, et j'insiste sur ce point, un réel bonheur à la lecture. Je pense qu'il est vain et mal à-propos d'essayer de parler de l'intrigue pour ce type d'ouvrage où tout est dans l'intrigue. Sachez seulement que le livre est une telle cathédrale que le film a forcément fait des coupes franches aussi bien dans le scénario que dans les personnages (j'ai revisionné le film par la suite qui m'a paru simplet alors que je l'avais trouvé bien bâti et complexe la première fois).

On signalera peut être simplement le schéma de base, trois enquêteurs talentueux à leur façon : initialement Vincennes réputé, White dans la moyenne et Exley débutant. Leurs destinées de carrière vont toutes se croiser : la descente aux enfers de Vincennes, l'ascension lente de White et la fulgurance d'Exley.

En tout cas, un polar qui m'a donné envie d'en lire d'autres (bien que je ne m'y tienne guère, toujours magnétiquement happée par les classiques) et un livre que l'on pourrait qualifier de valeur sûre (bien que cela ait peu de sens eu égard à la diversité des lecteurs et de leurs attentes) et un grand merci à James Ellroy pour ce beau moment de découverte littéraire. Ceci dit, tout cela n'est que mon avis de néophyte en la matière, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Adolescente, je lisais toutes les enquêtes d'Hercule Poirot pour perfectionner ma culture british et belge. Durant mes vacances chez les grands-parents, je faisais la rencontre d'un commissaire -presque belge- affectionnant plus de fumer sa pipe que de lustrer sa moustache. Peu après, j'ai cru frissonner en lisant des enquêtes chamallows sur des jeunes femmes aimant danser, en me promettant de ne plus jamais aller me promener seule dans les bois. L'ado que j'étais alors n'avait pas lu l'essai de Bettelheim sur les contes de fées et croyait encore à ces ridicules histoires d'amour qui finissent bien. Pour en arriver là, j'avais pêché par ignorance et duperie : je croyais naïvement que la quantité (le nombre de ventes) était preuve de qualité. J'avais quand même fini par en sortir découvrant un autre monde où se côtoyaient un clown bizarre, un chien moins câlin que Dagobert, sans parler du gardien qui manquait d'humour dans l'hôtel où j'ai passé l'hiver, bloquée sous la neige … Mais ça, « c'était avant »…
C'était avant mes vingt et quelques années ET ma rencontre avec le grand James. le sombre et torturé James Ellroy, obsédé par la mort de sa mère alors qu'il avait dix ans (on le serait à moins). Un ami m'avait mise dans les mains le roman « le Dahlia noir » (dans lequel résonnait la mort sordide de sa mère). En quelques jours de lecture, j'étais déjà hypnotisée par le style de cet écrivain. Et je peux véritablement parler d'un raz-de-marée au niveau de mon cortex cérébral. Un uppercut littéraire.
Ma perception des romans policiers ou romans noirs n'a plus jamais été pareille. Et comme je peux être obsessionnelle aussi (en plus soft l'obsession s'entend : je suis une petite joueuse en comparaison aux personnages d'Ellroy et à Ellroy lui-même avec ses années de drogue, d'alcool et de délits et face à son imagination débordante), j'enchainais coup sur coup un bon nombre de ses romans. Je manquais rarement la sortie du nouvel opus mordant du Dog ni une de ses interviews. J'allais jusqu'à me plonger dans « Ma part d'ombre » et l'enquête sur la mort de sa mère par Steve Hodel (c'est dire). Sûrement cherchais-je à sonder son âme, le personnage et l'homme qu'il était, pour mieux comprendre et analyser son oeuvre.
J'étais remuée par sa plume et ses scénarios, par le rythme qu'il nous infligeait à chaque page, sa capacité à nous immerger au coeur de l'histoire (petite et grande). J'étais avant tout impressionnée par son intelligence, son regard pessimiste et acerbe sur la nature humaine, ses humeurs sans concession.
Par sa connaissance aiguisée des arcanes du pouvoir, de l'histoire politique des Etats-Unis avec tout ce que cela entend (mafia, secret d'Etat, complots, magouilles & cie…), des attitudes des flics et de l'argot des rues (de tous les quartiers et origines), on se retrouvait en plein coeur des Etats-Unis, entre les années 40 à 70, spectateur ébahi à suivre les protagonistes, avec quelques coups de chaud et autant de sueurs froides. On suivait une kyrielle de personnages aux caractères divers : les pourris, les obsessionnels, les déviants, les idéalistes, les écorchés. En un mot, toutes les nuances de gris et de noir de l'âme humaine.
Mazette, chez lui, les personnages ne se contentaient pas de danser et de sursauter au cri du renard. Ils étaient des hommes avec leur quête obsessionnelle, leur courage, leurs valeurs, leur désir, leur vulnérabilité, leurs faiblesses, leur violence presque animale. L'oeil d'Ellroy perçait à jour le coeur des hommes et j'étais autant hypnotisée qu'effrayée par cet univers que je découvrais… Mais, je ne sais pourquoi -peut-être par empathie pour l'enfant qui avait perdu sa mère (et plus tard son père)-, je sentais aussi en lui, par de petites touches ici ou là, une certaine fragilité, son amour pour les femmes, sa curiosité pour les hommes de tout milieu…
J'avoue que certaines de ses histoires étaient un peu trop glauques et perturbantes. Je n'ai pas pu finir « Un tueur sur la route ». Certes curieuse, ce n'est pas pour autant que je souhaite entrer avec autant d'intimité dans le cerveau d'un tueur en série. J'ai mes limites à ouvrir les yeux sur le mal – je ne suis toujours pas fan du gore ni de la violence ‘'gratuite''…
Je ne peux donc prétendre que tous ses romans sont du même niveau et que j'éprouve le même degré de fascination pour chacun d'eux. Question de feeling. Certains sont parfois « trop ». Trop de tout : il faut s'accrocher avec le nombre de pages, cette multitude de personnages à ne plus savoir où donner de la tête, la complexité des intrigues et entremêlements politiques, sans parler de ces réflexions extrêmes qui choquent, où on frise l'overdose. Je me permets de le dire : parfois James m'agace et me lasse. Et j'ai alors besoin de retrouver un peu d'air et de lumière et surtout mon utopie naïve en la nature humaine.
« L.A Confidential » et « le Dhalia noir » sont sans conteste mes préférés parmi les romans d'Ellroy, si ce n'est des romans noirs/policiers, tout auteur confondu. Et si bien sûr l'histoire d'amour contrariée dans « L.A Confidential » séduit la lectrice anciennement naïve, c'est avant tout l'ampleur de ce roman policier qui magnétise : histoire, politique, psychologie, intrigue labyrinthique, profil consistant des personnages, particulièrement des 3 fameux flics Ed, Bud et Jack… On plonge dans l'histoire dans laquelle il nous est impossible d'en ressortir indemne. Lâchons le mot : L.A. Confidential est pour moi un chef-d'oeuvre du genre, la quintessence du roman noir.
Possible que, sans la mort atroce de sa mère, Ellroy ne serait pas devenu l'écrivain qu'il est, avec ses expériences extrêmes, son regard critique et désenchanté sur la société et les hommes. Possible que sans cette souffrance et ces obsessions, il n'aurait pas creusé aussi profondément dans la part d'ombre qui est en nous.
Je crois que depuis James, je ne peux plus lire de romans noirs/romans policiers, sans attendre une profondeur des personnages, aux traits précis, un humour noir qui fait mouche, une plume implacable, un style percutant qui vous embarque, tellement efficace qu'il pénètre l'esprit, sans oublier cette ambiance moite qui colle à la peau…
Parler de « finesse » pour décrire les romans d'Ellroy peut sembler de prime abord antinomique. le Dog tranche souvent dans le vif, son jugement est lapidaire, il attrape sa proie sans jamais la lâcher, pour en faire une radiographie détaillée jusqu'à l'os. Et c'est justement sa précision, l'envergure de ses personnages, ses connaissances du terrain qui me font penser qu'il est souvent plus ‘'subtil'' que bon nombre de romanciers d'histoires plus édulcorées, manquant de souffle, même s'ils sont étiquetés auteurs de « thriller ».
Depuis Ellroy, j'ai découvert d'autres écrivains du noir. Si Ellroy a été pendant des années à la recherche du meurtrier de sa mère, de mon côté, pendant des années, j'ai été à la recherche d'un roman noir qui aurait la même puissance que « L.A. Confidential » et « le Dhalia noir ».
Et j'en ai lu, des softs, des bof, des doux, des sans-remous, des vibrants, des plaisants, des grisants. J'en ai visité des villes aux quatre coins du globe, entre hiver glacial et été brûlant, j'ai découvert quelques pépites dans des rivières sanglantes (Connelly, Westlake, Lehane, Thompson, Burke, Boileau-Narcerjac, Conan Doyle, Harvey, Mankell, Jonquet, Vargas et quelques plus récents Bouysse, Férey, LeCorre, Norek, et j'en passe et des meilleurs -ou moins bons...). Je me rappelle avoir été chamboulée à la même époque que mes premiers Ellroy par « Les racines du mal » de M.G. Dantec. Mais sûrement devrais-je le relire, maintenant que ma palette d'auteurs noirs est plus large et mon oeil un peu plus aguerri.
Avec l'âge, après moult déceptions, peut-être me suis-je lassée de cette quête éperdue et je suis devenue plus une lectrice –plus sage- de la littérature blanche, ne retrouvant plus autant ce frisson nerveusement cérébral. La blanche m'offre une psychologie des personnages qui me sied mieux, un travail littéraire, parfois sociologique, qui émerveille plus souvent mon petit esprit curieux et amoureux des mots.
De fait, je connais beaucoup moins les auteurs policiers actuels qui font le buzz. Il m'arrive de me laisser tenter et de vouloir renouer avec les émois de mes vingt ans. Mais après quelques pages, il n'est pas rare que je me dise que ce n'est pas parce que le lecteur est immergé dans le noir qu'il n'est pas en mesure de distinguer les plumes trop basiques et à l'encre bon marché. J'ai parfois quelques appréhensions avec les « thrillers » où l'hémoglobine à outrance est plus un cache-misère, dissimulant mal le trou béant en matière stylistique (encore une fois le côté film d'horreur n'est pas ma tasse de thé en littérature). Mais, ça, c'est un peu la faute de James.
Au final, de toutes mes lectures noires, je crois qu'aucune d'entre elles ne m'a jamais autant impressionnée, pour ne pas dire envoûtée que les romans de James Ellroy. Parce qu'il est déjà en soi tout un personnage… Un personnage à multiples facettes qui s'insère dans ses romans. Alors, malgré ses dérapages, ses débordements, ses quelques ‘'longueurs monotones', Ellroy reste pour moi l'une des références en matière de polars. L'un des plus grands...
Une oeuvre qui marque, qui donne le tournis incontestablement. Une oeuvre qui a même changé la lectrice lambda naïve que j'étais. Naïve je l'étais. Mais ça, c'était avant. Avant James Ellroy.
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Du très noir, du beau, du bon polar.

La police est une "force publique instituée pour l'avantage de tous et non pour l'utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée". Moui.

Voilà une définition à laquelle Ellroy souscrit certainement. Mais quand il se penche sur la police de Los Angeles des années 50, le constat est tout autre: c'est le bastion de la corruption, de la violence et du racisme.

Dans ce jus de haine, Ellroy brode un scénario complexe autour de deux affaires ayant réellement existées: 'Le Noël sanglant" et l'affaire du "Hibou de nuit". le développement de ces deux faits ne montre aucun aspect valorisant du LAPD.

Les rivalités entre policiers sont homériques. Dudley Smith, l'Irlandais joyeux, est le diable. Ed Exley est l'ambition et la droiture même. Jack Vincennes est paumé et Bud White est une brute. Et se tirer dans les pattes n'est pas seulement du langage figuré entre ces quatre-là.

Si , dans ce monde de vices certains peuvent trouver la rédemption, il faudra s'armer d'un peu de patience, car cela n'arrive vraiment que vers la fin.

Le troisième de la tétralogie a inspiré le cinéma et c'est une réussite, puisque qu'invariablement on colle les personnages du film à ceux du livre.

Le style d'Ellroy fait des merveilles, de l'argot qui tache et des phrases qui claquent. le rythme de ce roman m'a semblé palpitant malgré le malaise qui se dégage de cet ensemble.
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J'ai finalement découvert Ellroy par le biais de L.A. Confidential... ou plus précisément de l'adaptation cinématographique du livre. J'en garde un souvenir plutôt désagréable. Je regardais beaucoup de films à l'époque et j'avais eu du mal à entrer dans l'intrigue touffue, alors que j'apprécie particulièrement Kevin Spacey en tant qu'acteur. Il m'était resté une impression de complexité inutile qui m'avait ennuyé à la longue.

Je replonge aujourd'hui dans le livre après avoir dévoré la trilogie Underworld USA, la trilogie Lloyd Hopkins ainsi que le Dahlia Noir et le grand nulle part, les deux premiers tomes du quatuor de Los Angeles. Je me suis habitué au style Ellroy, à sa complexité permettant de rendre au mieux une réalité pourtant en bonne partie fictionnelle. le maître reste fidèle ici à son style mélangeant les coupures de journaux, les rapports d'enquête avec un récit chirurgical des investigations et des états d'âme de ses personnages.Ce récit a ceci de particulier qu'il a pour cadre exclusif la police de Los Angeles au travers de trois de ses membres, représentatifs de plusieurs modèles de policiers, du dur à cuire au fils à papa propre sur lui, en passant par le flic un peu ripoux et profitant des enveloppes de la presse à scandale avec laquelle il collabore.

Le récit est bien sûr l'occasion de rencontrer aussi les différentes composantes des bas-fonds de la société: grand bandits et petits truands, call girls de luxe et starlettes ratées plongeant dans la prostitution. Mais le recentrage sur les intrigues internes à la police fait toute l'originalité de ce tome et on assiste abasourdi aux différentes luttes d'influence avec pour objectif de grimper dans la hiérarchie pour certains, de régler des comptes personnels pour d'autres, de s'enrichir pour la plupart.

Comme souvent chez Ellroy, on finit écoeuré par cette peinture au vitriol que l'on sent plutôt réaliste et qui nous montre à quel point les questions de justice et d'équité sont finalement reléguées au second plan, même quand les protagonistes eux-mêmes cherchent à se persuader qu'elles sont leurs combats principaux.

Mention spéciale aux trois personnages féminins de Karen Morrow, Lynn Bracken et Inès Soto, qui une fois n'est pas coutume chez Ellroy ne sont pas simplement des potiches ou des victimes désignées mais bien les principaux "moteurs" des personnages principaux, tous trois des hommes quand même, on ne refera pas totalement notre American Dog !
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Voici le roman qui poursuit et clos les aventures du quatuor de Los Angeles.
J'avais fortement apprécié le Dahlia noir et un peu moins celui-ci.
Néanmoins, il faut reconnaitre que l'auteur a un vrai style littéraire unique. Il alterne en permanence dialogue et des termes direct et court pour décrire l'ambiance. C'est unique et assez étrange au début. Il s'agit d'un grand classique de la littérature américaine.
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Ce tome est colossal. On en entend parler comme LE roman d'Ellroy, etc. avec le film... Il n'est pas son chef d'oeuvre, qui reste pour moi le Grand Nulle Part, mais c'est tout de même quelque chose de monumental, d'immense, sur cinq années. Cinq années où les personnages changent fondamentalement, ainsi que la ville autour d'eux. Cinq années de l'histoire de Los Angeles, cinq années des destinées d'Ed Exley, Bud White et Jack Vincennes, trio fort prometteur, mais moins réussi que le précédent. le parcours d'Ed Exley est tout bonnement hallucinant, je n'en dis pas plus, et le carré des relations Ed/Inez/Bud/Lynn est un régal. Avec pour décor une parodie hilarante de cynisme de Walt Disney et la figure clinquante de Preston Exley, flic parfait, héros, dont on sait dès le début qu'il y a derrière cette gloire un secret...

Un excellent roman donc, mais difficile pour ceux qui veulent s'initier à Ellroy, il y a quelques longueurs, et puis il est dense. Mais quel plaisir!! Quel pied. Fondamental chez l'auteur, on ne l'oublie pas.

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J'avais beaucoup aimé le Dahlia noir, j'avais été quelque peu choquée par le grand nulle part, j'ai adoré L.A. Confidential. C'est une claque. J'ai été clairement impressionnée, ce qui ne m'arrive pas souvent. Très peu de livres m'ont fait autant d'effet.


Comme les deux autres romans de la série, James Ellroy décrit avec un réalisme dingue une époque particulière, les années 50, pendant laquelle la frontière entre police et truands, ou entre le triangle showbizz-police-pègre est plus que floue. Ce qui est formidable dans l'univers de James Ellroy, c'est que tout est gris. Tout le monde cache des secrets, chacun a ses faiblesses. Si vous êtes en quête de « happy end », passez votre chemin. James Ellroy ne cherche qu'à montrer la réalité brute, qui n'est pas toujours joyeuse.

Le scénario en lui-même est très complexe. Il est vraiment facile de se perdre parfois entre les personnages, les différentes affaires et les liens entre tout ce beau monde. Mais le suspens nous prend et ne nous lâche plus car on sent la tension monter petit à petit. Ellroy nous promène de meurtre en meurtre, et je me suis demandée plusieurs fois: jusqu'où va-t-on aller? Ellroy nous surprend tout le long de la lecture.
Cela dit, le rythme est plutôt étrange. J'ai été agréablement étonnée par le début, assez explosif, puisque l'on assiste au dénouement du sort de Buzz Meeks, mais par la suite, l'auteur a ralenti un peu pour prendre le temps de poser les bases d'une nouvelle intrigue qui se décompose en une multitude de petites affaires sordides, d'où la complexité.

Comme précédemment, les personnages sont géniaux. Certains sont déjà apparus dans les deux romans précédents, et ça m'a fait beaucoup de plaisir de les retrouver, comme par exemple Dudley Smith ou Mickey Cohen, le parrain local qui me fait rire souvent et m'attendrit parfois. Mais ce roman nous offre aussi de très belles nouveautés, comme les trois personnages principaux. Tous différents et pourtant tous charismatiques, avec un je-ne-sais-quoi de marquant. On ne peut pas s'empêcher de les admirer et de les détester à la fois. C'est encore une force d'Ellroy: savoir provoquer des sentiments ambivalents face à des personnages ni très bons, ni très mauvais. Simplement parfois bons et parfois mauvais dans leurs actes. En tout cas leur association est une idée brillante: le jeune flic ambitieux qui souffre de la comparaison auprès de son père avec son frère mort, le flic talentueux mais pourri qui se cherche une rédemption, et une sorte de brute épaisse dont l'intelligence limitée se retrouve compensée par une passion et une énergie sans limites. Je les ai aimés tous les trois, mais ce sentiment n'est pas venu tout de suite. Je me suis vraiment attachée à eux au fil de l'histoire, lorsque je les ai vus perdus, en colère, souffrants. En bref, là où j'ai ressenti le plus d'empathie pour eux était quand ils en bavaient le plus. Je dois dire que j'ai eu un pincement au coeur particulier pour Jake Vincennes.
Je citerai ce très beau passage sur Bud White: « Les notes étaient celles d'un homme à l'intelligence limitée qui essaierait de décrocher les étoiles, pour y parvenir, le plus souvent. Limites dépassées par une furie dont l'intelligence était toute entière dans son obstination. Absolue Justice – anonyme, sans grade, et sans gloire. »

En ce qui concerne le style, je vais sans doute me répéter par rapport à ce que j'ai probablement écrit dans la chronique des romans précédents mais l'écriture d'Ellroy est sublime. Non seulement il écrit et fait parler les personnages de manière juste, directe, qui tape là où ça fait mal, mais en plus le ton des dialogues et du narrateur (extérieur) est véritablement celui de l'époque, celui des flics, celui des criminels de cette période, c'est à dire très cru, parfois vulgaire mais parfois aussi avec une certaine poésie ou un humour que j'adore. Ellroy utilise des expressions typiques de l'époque ou qui sortent de derrière les fagots (quelques-unes seront d'ailleurs citées à la fin de la chronique). Ce ton particulier rend le récit tellement réel.

Ce qui m'amène à évoquer la fin du roman. Magistrale. Un vrai feu d'artifice, tant au niveau des événements qu'au niveau du style. J'ai été émue, déchirée, triste et un peu heureuse quelque part. Tout ça en même temps. Voici la dernière phrase qui résume tout: « Des étoiles d'or. Seul, avec ses morts. »

Ce roman est pour l'instant le meilleur de la série, que je vous recommande chaudement car de toute manière les trois romans sont excellents. Mais n'hésitez pas à le lire même si vous n'avez pas lu les autres romans de la série.
James Ellroy est définitivement passé dans ma liste des auteurs préférés.
Lien : https://leshistoiresdesympho..
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L.A. Confidential

Nuit de Noël 1951 ou « Noël Sanglant » dans les annales. Des policiers s'en sont violemment pris à des prisonniers en cellule, abusant de leur autorité et de leur force pour venger des collègues. Un agent tatillon, Ed Exley, héros de la guerre, témoigne en défaveur de ses collègues en échange d'une promotion qui sert son ambition démesurée : cadet d'une famille de policiers méritants, il veut briller aux yeux de son père et éclipser le souvenir brillant de son frère mort en service. Désormais haï de tous ses collègues, il entame une carrière fulgurante qui le mène aux plus hauts postes de la police. Dudley Smith est de plus en plus présent au L.A.P.D. et il entretient une attitude ambiguë vis-à-vis des agents qui ont le malheur de trouver grâce à ses yeux : « Lorsque Dudley Smith vous emmenait à ses basques, on lui appartenait [...] : on n'était jamais sûr de ce qu'il voulait de vous, ou de la manière dont il se servait de vous. » (p. 197) C'est ainsi qu'il s'attache les services de Bud White, un policier connu pour ses pulsions de violence et sa haine des hommes qui maltraitent les femmes. Il s'attache à Lynn Brackens, prostituée de luxe. Bud White est un homme d'honneur, loyal jusqu'au pire à son coéquipier, Stensland, un flic alcoolique en fin de carrière. Enfin, il y a Jack Vincennes dit Poubelle : conseiller technique pour la série L'Insigne du courage, policier aux Stups, il renseigne régulièrement un magazine à scandales sur les vices et crimes des stars. Agent qui aime faire la couverture, il dissimule pourtant avec hargne un secret qui pourrait mettre en péril sa carrière. La course au poste de procureur est ouverte et Ellis Loew se présente pour la seconde fois avec de grandes chances de remporter la place. Survient le massacre du Hibou de Nuit et le viol multiple d'Inez Soto. Se profile une sordide affaire de moeurs fondée sur un réseau de prostitution aux pratiques singulières. On passe de 1953 à 1957 en quelques pages. Les trois flics sont confrontés à des affaires qui impliquent leur force morale et leur capacité à survivre au sein d'un système judiciaire qui écrase les purs pour sauver les pourris. L'honneur et la loyauté sont au centre de l'intrigue : il faut savoir pourquoi et pour qui on devient flic et à qui on choisit de prêter allégeance.

Ce troisième volet est mené à la troisième personne. Comme dans le volet précédent, on passe d'un flic à l'autre au gré d'un rythme dilatoire parfaitement maîtrisé. La mise en place de l'intrigue est longue. La première partie du roman pose les fondements de plusieurs affaires qui finiront par n'en former qu'une, tentaculaire et sordide, comme dans les deux premiers volets. le prologue étonne : il est l'épilogue du Grand Nulle Part et on assiste à la fin prévisible de Buzz Meeks. Ce rejet de la conclusion en début du nouveau volet empêche l'intensité dramatique de s'essouffler. Et Buzz Meeks a encore remporté toute mon affection.

J'ai eu un grand coup de coeur pour l'agencement de ce troisième volet. On passe du récit des enquêtes à des chapitres composés uniquement de rapports de police ou coupures de presse. Version officielle et version journalistique s'affrontent pour donner un mélange audacieux et complexe. C'est au lecteur de tirer le vrai du faux. Comme le dit le titre, ce qui se passe à Los Angeles est confidentiel et ce ne sont pas les révélations prétendument fracassantes des journaux à scandale qui renversent réellement la vapeur. Dans la cité des Anges, le doigt reste posé sur la bouche, sur la marque de l'ange.

Le film éponyme de Curtis Hanson et avec Kevin Spacey, Russel Crow, Kim Basinger et Dany DeVito est une grande réussite. Comme adaptation d'un roman d'Ellroy, je l'ai préféré – et de loin – au Dahlia Noir de Brian de Palma. Si ce dernier est d'un noir glacé, comme une couverture de magazine, le film de Curtis Hanson est gouailleur, sale et compromettant. Dany DeVito excelle dans le rôle de Sid Hudgens, le journaliste de L'Indiscret. Kim Basinger est sublime en pute de luxe un peu paumée. Et que dire de l'interprétation de Russell Crowe, qui endosse avec humilité et éclat le rôle de Bud White ! L'acteur fait ressortir toute la bonté et l'ambivalence du personnage dans une composition très touchante. Certes, Curtis Hanson prend de nombreux raccourcis, élimine des personnages et va plus directement au coeur des choses. Mais il rend à merveille la voix des journaux en la personne de Sid Hudgens. Dans son film, Dudley Smith est un vrai pourri qui obtient enfin ce qu'il mérite. Et Buzz Meeks et Stensland connaissent des trajectoires différentes de celles du roman. Mais l'essentiel est là, la verve de James Ellroy s'illustre avec puissance, ses personnages sont droits dans leurs bottes, prêts à essuyer le pire.


Lien : http://lililectrice.canalblo..
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Suite au Noël Sanglant, au cours duquel des agents de police ont passé à tabac des mexicains, coupables de violences sur leurs collègues du LAPD, trois policiers voient leur carrière prendre un tournant.
Edmund "Ed" Exley, fils du milliardaire Preston Exley, dénonce les fauteurs de troubles et y gagne ses gallons de sergent, ainsi que la haine générale du service.
En première ligne, Jack "Poubelle" Vincennes, un flic en cheville avec des journalistes pour apparaître toujours en première page, épinglé pour avoir importé quantité de gnôle dans l'enceinte du commissariat. Ancien alcoolique, il se retrouve muté au moeurs, pas idéal pour faire la une des journaux ...
Quant à Wendell "Bud" White, la brute épaisse, il s'en sort bien. Ayant largement participé au lynchage, il est couvert par sa hiérarchie et se retrouve homme de main d'une brigade de "recherche" particulièrement virile.
Les trois hommes se vouent mutuellement haine ou mépris. Pourtant, les éléments que chacun détient dans des enquêtes distinctes vont les amener à collaborer pour résoudre l'affaire du "Hibou de Nuit", un sextuple meurtre au fusil de chasse, calibre 12, dans un bar de nuit. L'affaire révèle un vaste réseau mafieux, impliquant prostitution, pornographie et trafic de drogue ...

Très bon polar, à l'intrigue complexe, peut-être trop complexe. La profusion des personnages et certaines redites donnent parfois une sensation de lourdeur. Toutefois l'ensemble reste pleinement maîtrisé, le suspens est bien là et les 650 pages s'avalent assez vite. Comme dans le Dalhia noir, Ellroy est un monstre de précision et de réalisme. Recréant à la perfection l'ambiance des années 1950, un véritable "film noir" avec tous les classiques du genre : flics alcooliques au passé louche, brute au coeur d'or, enchevêtrement politique-mafia-showbiz' et, bien sûr, femmes fatales et belles pépées. Les dialogues font toujours mouches, là encore respectant les codes du genre : interrogatoire de riches magnats de l'industrie autour d'un verre de cognac, tout en finesse et en élégance. Indic' un peu timbrés, producteur de musique minable et couard, qui bavasse au premier bourre pif, prostituées jurant comme des charretières. Bref tout y est pour s'y croire, sortez les clopes et le whisky et sombrez dans les méandres de L.A Confidential.
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"L.A. Confidential", un autre roman emblématique de James Ellroy, fait partie de sa série "Quatuor de Los Angeles" et est souvent considéré comme son chef-d'oeuvre. Publié en 1990, ce roman policier plonge le lecteur dans le Los Angeles des années 1950, un monde de corruption, de scandales et de crimes.

L'histoire suit trois policiers du LAPD : Ed Exley, le fils d'une légende de la police qui cherche la gloire; Bud White, prêt à enfreindre les règles pour rendre justice; et Jack Vincennes, qui collabore avec la presse à scandales. Leurs chemins se croisent lors d'une enquête sur une série de meurtres liés à un réseau de prostitution, révélant les sombres secrets de la ville.

Un des points forts de "L.A. Confidential" est la manière dont Ellroy entrelace habilement les histoires de ses trois protagonistes, tout en explorant les thèmes de la morale, de la corruption, et de la célébrité. La narration est riche et complexe, avec un style caractéristique qui mélange dialogues tranchants et descriptions détaillées.

Le roman brille également par sa capacité à capturer l'ambiance de Los Angeles dans les années 50, mêlant réalité historique et fiction. Ellroy crée un monde où les frontières entre héros et anti-héros sont floues, et où le glamour d'Hollywood côtoie la corruption et la violence.

Toutefois, comme pour "Le Dahlia Noir", le style d'Ellroy peut être exigeant. La complexité de l'intrigue et la grande quantité de personnages peuvent rendre la lecture difficile pour certains. de plus, le livre aborde des sujets très sombres, incluant violence, corruption et racisme, ce qui peut ne pas convenir à tous les lecteurs.

En résumé, "L.A. Confidential" est un roman policier brillant, offrant une exploration profonde de la nature humaine et de la société de l'époque. C'est une lecture incontournable pour les fans du genre, bien qu'elle nécessite une certaine attention et une tolérance pour les thèmes difficiles.
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