Grand admirateur de Fabcaro auteur de BD, j'avais beaucoup aimé les deux premières oeuvres de
Fabrice Caro le romancier,
Figurec et
le discours, alors que la troisième,
Broadway, m'avait laissé une impression plus mitigée.
samouraï ne m'ayant pas entièrement conquis au premier abord, j'ai décidé d'en faire immédiatement une seconde lecture. Et là, l'humour irrésistible de
Fabrice Caro a balayé toutes mes légères réticences avec, en premier lieu, celle concernant une intrigue plutôt ténue puisque les digressions hilarantes qui partent dans tous les sens la rendent dispensable.
Alan, le narrateur, écrivain qui n'a pas encore réussi à percer, a décidé d'écrire un roman "sérieux", comme le lui réclamait sa compagne qui vient de le quitter. Ce roman, il l'écrira au bord de la piscine de ses voisins qui l'ont chargé de son entretien durant leur absence. Pour ce faire, il se promet d'adopter la rigueur d'un samouraï en s'astreignant à l'écriture de dix mille signes par jour. L'inspiration n'est hélas pas au rendez-vous et la piscine échappe totalement à son contrôle, son eau virant rapidement au verdâtre tout en étant colonisée par des notonectes bientôt rejointes par des grenouilles. Comme si ces désagréments ne lui suffisaient pas, voilà qu'un couple d'amis cherche à tout prix à lui trouver une nouvelle compagne !
Observateur avisé et minutieux du monde qui l'entoure,
Fabrice Caro s'amuse des travers de ses semblables et des vogues de la société, y compris celles qui affectent la littérature, comme la "narrative non-fiction". Sont ainsi invités dans un joyeux désordre l'art et le théâtre contemporains, Dolto et les parents démissionnaires, les apéritifs dînatoires, les vendeurs de magasin de bricolage, les poses avec air mystérieux et index sur la joue, les critiques littéraires, et la liste est loin d'être exhaustive ! Les railleries de
Fabrice Caro sont tout en délicatesse et il rend on ne peut plus attendrissant son personnage d'écrivain dont les errances dans la création littéraire lui font convoquer dans des interviews fantasmées la grande
Claire Chazal.
Un roman dont on ne sort pas indemne : qui donc, pour se prémunir de toute malédiction, ne songera pas désormais à se toucher le bout du nez avec son index quand il constatera sur une horloge un "doublet heures-minutes", comme 10 h 10, 13 h 13 ou encore 18 h 18 ?