L'affaire de la Brinvilliers a fortement marqué la société française du dix-septième siècle. Elle a littéralement empoisonné les esprits, pendant cinquante ans les Français verront du poison partout. Mais dans son procès à elle, il n'y avait pas d'ambiguïté, les preuves étaient trop nombreuses. Elle fût punie avec le raffinement du grand siècle : décapitée et brûlée sur la place de Grève, devant une gigantesque foule.
La marquise de Brinvilliers n'est que le cinquième ou sixième personnage de ce roman dans l'ordre d'importance, son rôle est presque anecdotique, ce qui rend le titre peu juste, sans rapport avec le contenu. L'un des personnages principaux est son amant, le chevalier de Sainte-Croix. En conformité avec la réalité historique, c'est lui qui est au centre de cette affaire des poisons, plus vaste que la petite marquise. Quelque part il est dommage que Gaboriau soit passé à côté de son sujet, comme s'il trouvait que la vie de Mme de Brinvilliers n'était pas assez romanesque. Pourquoi avoir rajouté cette histoire d'enfant caché entre elle et Sainte-Croix ? Il y a trois ou quatre intrigues ébauchées dans ce roman qui ne sont pas menées à terme. Et toute l'histoire se passe quelques années avant les méfaits de Mme de Brinvilliers.
Roman très médiocre et je reste poli. Même dans les détails il y a des choses qui ne sont pas compréhensibles, comme l'évasion d'Exili de la Bastille. Exili est le génie du mal, le savant fou, l'alchimiste qui a inventé tous ces poisons. Il s'évade de la Bastille, façon Lazare – je meurs et je ressuscite, ni vu ni connu – grâce à l'une de ses potions. Mais pourquoi ne l'a-t-il pas utilisée avant, alors qu'il s'acharne à creuser un tunnel depuis des années ? On a connu des génies du mal intellectuellement plus sagaces. Et je ne parle même pas d'Olivier, l'enfant caché, présenté comme une future gloire de la magistrature, alors qu'il est bête comme ses pieds et niais au possible.
Il y a quand même de rares et beaux passages, par exemple la rencontre de Sainte-Croix et d'Exili, dans cette même Bastille. Sauf que c'est un plagiat des Crimes Célèbres d'
Alexandre Dumas (à copieur, copieur et demi).
Beaucoup de griefs pour un seul roman…