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3,53

sur 968 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Une drôle de pièce que ces Bonnes ; une histoire louche qui crée du malaise et qui résiste à toute explication logique.
Il faut distinguer deux choses : d'une part, le fait divers réel, l'affaire des soeurs Papin dans les années 1930 et qui présente un intérêt qui lui est propre et auquel on n'est pas forcé d'adhérer pour aborder la pièce de théâtre ; d'autre part, le drame de Jean Genet qui en est largement inspiré et qui joue sur un autre registre que le fait divers.
Cette pièce est troublante ; on y côtoie la mythomanie, la schizophrénie et surtout la paranoïa de deux soeurs, employées en tant que domestiques dans une maison bourgeoise.
Les deux jeunes femmes ne cessent de jouer leur rôle et celui de leur maîtresse vis-à-vis de laquelle elles nourrissent une profonde haine et un désir de meurtre.
On voit se dérouler devant nous leur hystérie de duo, leur folie, entrecoupée de passages lucides et ancrés dans le réel, au milieu de ce qui est fantasmé et joué.
Je dois reconnaître que c'est assez déstabilisant, on ne sait jamais si elles se parlent réellement ou si elles rabâchent pour la millième fois un scénario échafaudé et des dialogues imaginaires avec leur maîtresse.
Jean Genet s'arrange pour faire entrer en scène la maîtresse de maison en plein milieu de la pièce afin que nous puissions mesurer la métamorphose dans l'attitude des jeunes femmes envers leur patronne, attitude qui devient subitement, maladivement déférente et qui tranche si fortement avec la violence et le fiel déversés à son propos durant tout le début de la représentation.
De même, on accède à un autre éclairage sur l'attitude plutôt bienveillante et généreuse de la maîtresse du logis et la façon dont ses comportements sont interprétés par les domestiques, comme étant méprisants, condescendants et méritant une juste haine.
Bref, une pièce intéressante, très intéressante même d'une point de vue psychologique et psychiatrique, qui m'a fait me documenter sur l'affaire originelle, mais une pièce que je n'ai pas spécialement trouvée agréable au ressenti.
Ceci dit, ce n'est là que mon avis, c'est-à-dire, bien peu de chose.
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N'étant pas forcément une accro du ménage, « Les bonnes » de Jean Genet prenaient la poussière dans ma pal depuis mes années d'étudiantes de lettres. Loin, très loin de proposer un ouvrage sur le thème ménager ou même domestique, Jean Genet nous donne à lire ici une pièce assez dérangeante, où les deux bonnes du titre déversent leur haine contre leur maîtresse, ou bien contre elles-mêmes, on ne le sait trop bien tant leurs propos glissent dans la folie et la pièce dans l'irréalité. Classique conflit ancillaire me direz-vous alors, sauf que Jean Genet évacue cette vision de sa pièce dans l'introduction à celle-ci en indiquant qu'il « ne s'agit pas d'un plaidoyer sur le sort des domestiques ». de quoi s'agit-il ici alors ?

J'y ai vu — en experte du théâtre que je ne suis pas ! — un curieux jeux de rôle où on ne sait à force qui déteste qui. Claire et Solange, les deux bonnes de Madame, profitent de chaque absence de celle-ci pour se travestir en elle et intervertir leurs rôles : un soir sur deux, Claire devient Madame, et Solange devient Claire (mais pour autant Solange n'est pas oubliée dans le déferlement de haine qui suivra, puisqu'elle en prend pour son grade aussi) ; dans ce jeu de rôle assez tordu (chacun s'amuse comme il le peut…), la fausse Madame devient d'une condescendance et d'une méchanceté intenses envers sa domestique, l'acmé étant atteint quand cette dernière est poussée à la rébellion haineuse et meurtrière. Toutefois, le réveil programmé par Claire et Solange pour leur laisser le temps de ranger le désordre avant que la vraie Madame ne rentre, sonne toujours avant que le meurtre symbolique ait lieu. Est-ce une précaution ou un manque de temps ?

Cette question mérite d'être posée car les deux soeurs ne sont pas tendres l'une envers l'autre, se témoignant du rejet que chacune inspire à l'autre (« Je voudrais te consoler, mais je sais que je te dégoûte. Je te répugne. Et je le sais puisque tu me dégoûtes. S'aimer dans le dégoût, ce n'est pas s'aimer. »), et de la violence meurtrière qui, par le prisme de Madame, risque de s'appliquer de l'une à l'autre, Claire prenant peur à un moment : « Ne nie pas. Je t'ai vue. Et j'ai eu peur. Peur, Solange. Quand nous accomplissons la cérémonie, je protège mon cou. C'est moi que tu vises à travers Madame, c'est moi qui suis en danger. »

Pourquoi cette haine envers Madame ? Ce n'est pas si clair, puisque Solange parle de l'aigre et du doux de Madame qui les étouffe et les fait doucement pourrir. Une jalousie de ce qu'elles n'ont pas, d'une tentation du mal et d'un fantasme sur le bagne, qui revient régulièrement dans leurs propos de manière concrète, puisqu'elles ont envoyé Monsieur en prison, en dénonçant ses escroqueries par lettre anonyme ?

Difficile à dire, tant la pièce, qui repose en majeure partie sur les fantasmes des deux bonnes, mêle si bien l'onirique à la réalité que celui-ci prend le dessus. le rêve de meurtre sera-t-il concrétisé ? Je vous laisse le découvrir dans cette pièce en un acte, à ce titre assez courte, dont le caractère vénéneux donne un parfum assez enivrant malgré son côté déplaisant.
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Ça parle de deux bonnes soeurs.

Non.

Ça parle de deux soeurs qui sont bonnes.

...

Ça parle de deux bonnes qui sont soeurs, voilà, et qui jouent à ce qu'elles nomment la "cérémonie", un jeu de rôles où elles miment les relations entre Madame et ses bonnes, en exagérant l'humiliation et la condescendance supérieure...

La pièce met mal à l'aise de par ses dialogues acerbes ; mal accueillie par la critique et le public à sa sortie (1947) car inclassable et dérangeante, elle est devenue incontournable et inspiration - avec le roman L'Analphabète de Ruth Rendell, lui-même librement inspiré du fait-divers célèbre qui vit les soeurs Papin assassiner leurs patronnes - du film "La Cérémonie" où Huppert et Bonnaire rivalisent de noirceur.

Lecture intéressante.

Is@ juin 2013
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L'auteur nous aura prévenu dans les indications préliminaires de la pièce : nous y serons comme dans sa tête, à assister au spectacle de lui-même, et nous n'y serons pas bien.
C'est en effet le sentiment de malaise qui prévaut tout au long de la lecture dans laquelle il est difficile de trouver des points d'appui et de respiration tant le climat est lourd et tendu entre les deux bonnes, deux soeurs qui se jouent une pièce dans la pièce en intervertissant les rôles entre elles et Madame, crainte et honnie, et qu'il convient de tuer.
Lire la pièce cependant met en relief le remarquable travail d'adaptation de Chabrol dans la Cérémonie, ainsi que celui de Bonnaire et Huppert qui restituent parfaitement la colère rentrée, la révolte bouillonnante et la folie latente des bonnes.
Déroutant et étouffant, même à travers les pages.
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Voici une vraie pièce de théâtre qui bouscule les canons classiques du genre. Une pièce où se mêle le drame ambigu de la misère sociale et la violence d'une situation de soumission devenue insupportable. Avec "Les Bonnes", Jean Genet a voulu établir un réel malaise chez le spectateur. Et il y réussit très bien ! le thème, à lui seul, suffit à susciter la gêne. Directement inspiré d'un fait divers des années 1930, "Les Bonnes" raconte les relations ambivalentes, ambisexuées de deux soeurs - Christine et Léa Papin -, dans le monde feutrée de la bourgeoisie de province de l'époque.

C'est un huis clos entre Claire et Solange. Dans la solitude de leur mansarde, elles échangent leur rôle comme on se prête un vêtement. Elles s'inventent une vie pour mieux s'extraire de leur condition de bonnes à tout faire, de domestiques, de soubrettes, de sans-grades. Claire, dans un état de psychose paranoïaque, devient Madame, la maîtresse de maison. Elle décharge alors toute la haine, l'aversion, l'antipathie, le mépris qu'elle porte en elle. Cette amertume, elle la déverse contre Madame, contre la société, se la renvoie à elle-même, à sa soeur. Solange devient Claire dans ces moments, subordonnée à Madame, assujettie à la violence de sa soeur. Tout ce qu'elles n'osent renvoyer au visage de Madame, elles se le crachent à la figure, tel un venin mortel.
Lien : http://dunlivrelautredenanne..
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J'ai du lire les bonnes dans le cadre scolaire (autant dire que ça partais mal entre cette pièce et moi dans la mesure ou je déteste lire sous la contrainte).
Ma première lecture en fut d'ailleurs assez laborieuse, et j'avais beaucoup de mal à tout comprendre voulant terminer le livre le plus vite possible. Mais du temps à un peu passer, et en analysant plusieurs extraits (merci le bac de français qui approche, les autres premières je suis avec vous) je ne peux pas nier que le style est parfaitement maitrisé, et qu'il porte le message du livre presque plus fort que le fond des répliques.
Toutefois, je reste assez en dehors du récit, n'étant pas très fan du théâtre.
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Quand le chat n'est pas là, les souris dansent.
Quand la maîtresse de maison n'est pas là, les bonnes jouent la comédie. Elles expriment alors leurs frustrations, et leurs soifs de vengeance. Elles ont d'ailleurs commencé à assouvir cette soif, et ne semblent pas vouloir s'arrêter en chemin…
Changement de ton au retour de la maîtresse, mais la tisane qu'on lui prépare risque d'avoir un goût amer.

Je n'ai pas été emballé par la lecture de cette pièce à trois personnages, malgré l'habileté de la construction de la pièce. Peut-être gagne-t-elle à être vue et entendue ?
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En partie inspirée de l'affaire des soeurs Papin bien que Genet s'en est toujours défendu, cette pièce met en scène deux bonnes, méprisant leur patronne, projettent de l'assassiner et de fil en aiguille le dénouement s'avérera imprévisible.

Pour ma part, celle-ci m'a laissée sur ma faim même si tout le côté psychologique de ces deux meurtrières était assez intéressant, mais je m'attendais à autre chose.
Cette histoire possède également des points communs avec le film de Chabrol "La cérémonie" avec dans les rôles principaux Sandrine Bonnaire et Isabelle Huppert.
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Ce qui m'a plu : tout se passe dans ce huis clos de la chambre (1 seul lieu) et avec ces 3 personnages dont on sait qui est qui au fil des pages, avec un seul temps (1h à 2h peut être ?!) Tout se joue là, maintenant sous nos yeux. L'intrigue et le futur de chacun(e) où chacune perd la raison à sa façon. Une petite pièce à (re) découvrir. J'avais vu des extraits au théâtre mais la lire donne un autre relief. Les conseils (vrais ou faux ?) de l'auteur pour le jeu des acteurs et du metteur en scène, me laissent interrogateur quant à leur réelle utilité. le texte et les dialogues ne permettent pas vraiment de somnoler (le conseil du ''jeu furtif'' par exemple est il vraiment nécessaire ? Idem pour le coté fané des bonnes...)
Un conte, sur la folie, la jalousie, la colère cachée, l'hypocrisie.
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Ce livre traînait dans ma pile à lire depuis une éternité. Je crois que je l'avais acheté, car il était au programme du cours de lettres en L1, puis finalement le programme a changé à la rentrée, et je me suis retrouvée avec plusieurs titres qui ne m'intéressaient pas sur le dos. Comme je n'avais pas beaucoup de temps pour lire à la fac, je favorisais toujours les titres qui me faisaient envie ; c'est comme cela que Les Bonnes a traîné dans ma pile pendant 7 ans ! Cela fait un peu peur quand je l'écris. Puisque mon objectif de l'année est de ramener ma pile à lire à 20 livres maximum, j'ai décidé de m'attaquer aux récalcitrants.

Finalement, c'est un titre qui se lit très vite, une fois qu'on ôte la préface et les annexes qui ne m'intéressaient pas vraiment. Je vous rappelle que je l'ai lu pour me "débarrasser" de lui. En une soirée, c'était bouclé, et à ma grande surprise cela s'est révélé être une lecture agréable. Ce n'est pas le livre de l'année et je ne le relirais certainement pas de sitôt, mais c'est une bonne surprise pour celle qui s'attendait à un martyre.[plus sur...]
Lien : http://belykhalilcriticizes...
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