Nous sommes peut-être à l'aube de l'extinction humaine.
C'est du moins l'un des thèmes que développe le narrateur (on sait qu'il signe P.G. comme
Paolo Giordano) et qu'il est scientifique, catégorie physique. Il s'intéresse bizarrement beaucoup à la question de la bombe d'Hiroshima et vit entre Paris et l'Italie.
Quand «
Tasmania » début, le narrateur est à Paris. Il y vit avec Lorenza, plus âgée que lui, et dotée d'un fils Eugenio. Entre ce fils et le narrateur, se noue une relation étrange, qui pourrait ressembler à de la paternité.
De paternité il est question. Et de l'amitié aussi il va être question. Car le narrateur a plusieurs amis masculins. Ils sont tous scientifiques, comme lui, dans des branches différentes.
Le premier s'appelle Giulio. Ils se sont connus sur les bancs de la fac, et se sont suivis depuis. Giulio a eu un enfant avec Cobalt, sa femme, appelé Adriano, mais presque depuis sa naissance Cobalt se bat pour avoir la garde exclusive de son fils. Giulio fait appel au narrateur pour qu'il l'aide dans son ce combat pour conserver le droit de voir son fils, par avocats interposés.
L'autre s'appelle Novelli. Il est renommé pour sa connaissance du changement climatique et sa connaissance des nuages – un thème qui va intéresser notre narrateur pendant un temps. Celui-ci se lie d'amitié avec lui, mais cette amitié va être mise à mal lorsque Novelli n'obtiendra pas le poste qu'il convoite à Gênes, et attribuera sa défaite au profit d'une consoeur italienne au fait qu'il y ait de la discrimination positive envers les femmes, ce qu'il conteste scientifiquement.
Il a un autre ami qui s'appelle Karol. Celui-ci est prêtre, mais vient de tomber amoureux d'une très jeune femme. Il demande conseil à notre narrateur, sur les questions de couple et d'amour conjugal. Ce dernier se prête au jeu, même si la relation de Karol à la jeune femme semble bien mal partie.
Le narrateur est un homme d'aujourd'hui, vivant cette époque étrange que nous connaissons tous et qui consiste à vivre avec l'épée de Damoclès au-dessus de nos têtes à cause du dérèglement climatique.
Il vit de publications qu'il fait dans un journal italien, le « Corriere Della sera » et a le projet d'écrire un livre sur la catastrophe d'Hiroshima. Entre Paris et l'Italie il enquête sur ce drame, sans toutefois sembler s'y investir comme il le devrait.
Et la relation insolite qu'il a avec Lorenza flotte également.
« Les faits ne mentent pas » fait-il dire à Novelli, reprenant à son compte ce mantra.
Il flotte dans tout ce roman une ambiance étrange, identique à celle qu'on peut vivre en ce moment, où que l'on retrouve dans un film comme « Don't Look up » sur l'histoire d'un déni cosmique. Une atmosphère morose, désillusionnée et contemporaine. Et une forme de nihilisme désabusé.
Alors, la Tasmanie ? Ce pourrait un lieu pour vivre la catastrophe à venir de la manière la moins difficile possible. Parce que c'est une île et qu'il y a de l'eau.
Crise environnementale, crise du couple, crise de l'amitié, crise de la paternité, rien n'est épargné. Avec une très bonne traduction de
Nathalie Bauer, que j'ai retrouvé ici avec plaisir. Et avec mes remerciements à Masse Critique pour ce récit publié aux éditions du « Bruit du monde » : un très bon éditeur.
Mais je ne sais vraiment que penser de ce livre déroutant. A la fois fascinée par cet univers pré-apocalyptique qu'il décrit. Et agacée par sa passivité en tant que scientifique comme si aucune aventure (relationnelle, amoureuse, ou professionnelle) ne méritait déjà plus d'être tentée.
Peut-être faut-il dès à présent chercher sa Tasmanie.
Mais pour moi ce sera la littérature.
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