Célébration du cheval : Les plus beaux textes et poèmes

La mort des chevaux

La grande bataille cessa, le feu brasillant s'endormit.
Les armées hurlantes ont passé repoussant toujours plus loin le front.
Il ne reste que les ombres des morts et leurs paroles
qui flottent dans l'air, ainsi qu'à la lisière du village les chevaux blessés
qui meurent dans le crépuscule. Voici le haut alezan dont là
foulée au galop touchait à peine terre et cet autre
robuste, dont l'oreille des heures durant se dressait à la voix
de son maître et le balzan qui faisait tinter des grelots d'argent
là-bas dans la plaine moldave et les blanches juments qui dansaient au son de la fanfare.
Oh ! leurs crinières vont se déployant dans la forêt
et les chemins battus par leurs sabots en sang
frémissent. Le vent vient doucement, hennissant comme un cheval
quand son cavalier tombe ; le vent qui semble être leur frère
souffle tristement à leurs naseaux,
l'herbe commence à murmurer.
Et poisson d'or tué
le soleil dans leurs grands yeux se noie.

(Anatol E. Baconsky)